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dita
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par dita Jeu 20 Oct 2016, 21:01
Bonjour,
je prépare une séquence sur Bérénice de Racine avec mes classes de Seconde. Comme Racine s'est explicitement inspiré de l'histoire du chapitre IV de l'Enéide, je suis en train de bosser le texte.
Que pensez-vous de la traduction de M. André Bellessort, que j'ai trouvée en texte pdf sur internet "Ebooks libres et gratuits ? Je la trouve plus facile à lire, plus "moderne" que la traduction de M. Maurice Rat ( Garnier-Flammarion).
Je précise que je ne connais pas le latin.
cannelle21
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par cannelle21 Jeu 20 Oct 2016, 21:11
Rien d'intelligent à dire sur le sujet si ce n'est que j'adore le texte de Racine. Je me mets souvent cette version en fond sonore quand je travaille :

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Il y a des gens si bêtes que si une idée apparaissait à la surface de leur cerveau, elle se suiciderait, terrifiée de solitude.
dita
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par dita Jeu 20 Oct 2016, 21:51
Merci, Canelle, je vais me servir de certains passages en classe. J'apprécie Racine - quoique je préfère Corneille - mais en classe, il va être très difficile de leur faire comprendre et apprécier le texte.
DesolationRow
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par DesolationRow Jeu 20 Oct 2016, 23:28
Où diantre trouves-tu que Racine s'est inspiré de Didon et Enee ?
Thalia de G
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par Thalia de G Ven 21 Oct 2016, 05:24
DR, je me suis posé la même question hier soir et n'ai pas osé l'avouer. Prise d'une soudaine inspiration ce matin j'ai googlisé "invitus invitam dimisit" et ai obtenu comme résultat la préface de Bérénice
Jean RACINE a écrit:Titus reginam Berenicen, cui etiam nuptias pollicitus ferebatur, statim ab Urbe dimisit invitus invitam.

C'est-à-dire que «Titus, qui aimait passionnément Bérénice, et qui même, à ce qu'on croyait, lui avait promis de l'épouser, la renvoya de Rome, malgré lui et malgré elle, dès les premiers jours de son empire». Cette action est très fameuse dans l'histoire ; et je l'ai trouvée très propre pour le théâtre, par la violence des passions qu'elle y pouvait exciter. En effet, nous n'avons rien de plus touchant dans tous les poètes que la séparation d'Enée et de Didon, dans Virgile. Et qui doute que ce qui a pu fournir assez de matière pour tout un chant d'un poème héroïque, où l'action dure plusieurs jours, ne puisse suffire pour le sujet d'une tragédie, dont la durée ne doit être que de quelques heures ? Il est vrai que je n'ai point poussé Bérénice jusqu'à se tuer, comme Didon, parce que Bérénice n'ayant pas ici avec Titus les derniers engagements que Didon avait avec Enée, elle n'est pas obligée, comme elle, de renoncer à la vie. A cela près, le dernier adieu qu'elle dit à Titus, et l'effort qu'elle se fait pour s'en séparer, n'est pas le moins tragique de la pièce ; et j'ose dire qu'il renouvelle assez bien dans le coeur des spectateurs l'émotion que le reste y avait pu exciter. Ce n'est point une nécessité qu'il y ait du sang et des morts dans une tragédie ; il suffit que l'action en soit grande, que les acteurs en soient héroïques, que les passions y soient excitées, et que tout s'y ressente de cette tristesse majestueuse qui fait tout le plaisir de la tragédie.

Racine établit une comparaison entre les deux histoires. Mais il s'inspire non de Didon et Énée, mais de la véritable histoire racontée par Suétone.

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Le printemps a le parfum poignant de la nostalgie, et l'été un goût de cendres.
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par Aphrodissia Ven 21 Oct 2016, 06:12
Dans son roman Titus n'aimait pas Bérénice, Nathalie Azoulai raconte comment, enfant et élève à Port-Royal, Racine lit en cachette le Chant IV de l’Enéide, celui de l'amour de Didon et Enée, dont la lecture est interdite dans l’établissement janséniste. Plus tard, Racine crée des héroïnes qui toutes montrent les effets de la passion, à des degrés divers. L'idée de l'auteur, si je me souviens bien, c'est que Racine cherche une héroïne qui pourrait concurrencer Didon et finit par trouver Bérénice. Je crois qu'il n'écrit pas sur Didon, d'après le roman, par une espèce de fidélité pour port-Royal mais qu'elle hante sa pensée pendant qu'il compose ses tragédies.

C'est un roman que j'ai eu beaucoup de plaisir à lire mais je ne sais pas à quel point il est historico-biographico-véridique.


Dernière édition par Aphrodissia le Ven 21 Oct 2016, 08:52, édité 1 fois
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par DesolationRow Ven 21 Oct 2016, 08:34
Thalia de G a écrit:DR, je me suis posé la même question hier soir et n'ai pas osé l'avouer. Prise d'une soudaine inspiration ce matin j'ai googlisé "invitus invitam dimisit" et ai obtenu comme résultat la préface de Bérénice
Jean RACINE a écrit:Titus reginam Berenicen, cui etiam nuptias pollicitus ferebatur, statim ab Urbe dimisit invitus invitam.

C'est-à-dire que «Titus, qui aimait passionnément Bérénice, et qui même, à ce qu'on croyait, lui avait promis de l'épouser, la renvoya de Rome, malgré lui et malgré elle, dès les premiers jours de son empire». Cette action est très fameuse dans l'histoire ; et je l'ai trouvée très propre pour le théâtre, par la violence des passions qu'elle y pouvait exciter. En effet, nous n'avons rien de plus touchant dans tous les poètes que la séparation d'Enée et de Didon, dans Virgile. Et qui doute que ce qui a pu fournir assez de matière pour tout un chant d'un poème héroïque, où l'action dure plusieurs jours, ne puisse suffire pour le sujet d'une tragédie, dont la durée ne doit être que de quelques heures ? Il est vrai que je n'ai point poussé Bérénice jusqu'à se tuer, comme Didon, parce que Bérénice n'ayant pas ici avec Titus les derniers engagements que Didon avait avec Enée, elle n'est pas obligée, comme elle, de renoncer à la vie. A cela près, le dernier adieu qu'elle dit à Titus, et l'effort qu'elle se fait pour s'en séparer, n'est pas le moins tragique de la pièce ; et j'ose dire qu'il renouvelle assez bien dans le coeur des spectateurs l'émotion que le reste y avait pu exciter. Ce n'est point une nécessité qu'il y ait du sang et des morts dans une tragédie ; il suffit que l'action en soit grande, que les acteurs en soient héroïques, que les passions y soient excitées, et que tout s'y ressente de cette tristesse majestueuse qui fait tout le plaisir de la tragédie.

Racine établit une comparaison entre les deux histoires. Mais il s'inspire non de Didon et Énée, mais de la véritable histoire racontée par Suétone.

Ben voilà. J'avais bien cette préface en tête ; mais elle ne dit en rien que Racine s'est inspiré de Didon et Énée.
dita
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par dita Ven 21 Oct 2016, 08:50
Bon, en vous lisant, les Néos, j'ai l'impression de lire mes pensées, sauf que contrairement à toi, Aphrodissia, je n'ai pas aimé le livre de Nathalie Azoulai.

 Je lis avec grand plaisir l'Enéide, et, comme je suis nul en latin, je demandais quelle traduction vous me recommanderiez, mais comme je pensais à Suétone et que vous confirmez, je vais aller voir également les textes pdf sur l'ordi, et je vous demande quelle traduction vous préférez ...

   Voilà, donc, pour l'Enéide, j'ai trouvé cela dans la préface, comme Thalia, et pour Virgile, j'ai pensé à ce qu'écrit N. Azoulai, comme l'écrit Aphrodissia.

 En fait, je cherche une entrée intéressante pour mes classes de Seconde, car étudier Bérénice, ça va être costaud. Je cherche, mais je lis les textes anciens avec beaucoup de plaisir !

 Je lirai avec grand intérêt vos conseils et réflexions.
cannelle21
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par cannelle21 Ven 21 Oct 2016, 09:58
Je viens de replonger dans mon classeur de prépa. J'ai adoré travailler sur la pièce :
- En quoi est-ce une tragédie de la fidélité ?
- Le moi tragique dans Bérénice
- Les analyses de Barthes
- Acte 1, scène 5
- Acte 2, scène 2
- L'analyse de la scène 1 Acte III

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par cannelle21 Ven 21 Oct 2016, 10:05
Je n'ai trouvé que cet extrait d'un article (Diversité et unité, Les tragédies de Racine) pour répondre à ta question.

"Une phrase de Suétone a suffi à donner le sujet. Racine ne s'est donc pas proposé, comme dans Britannicus, de représenter une action complexe et les moeurs de tout un siècle. La brièveté de l'historien l'a libéré; il est passé, sans hésiter, de Suétone à Virgile. Il n'invoque pas le respect de l'histoire. Il pouvait, nous dit-il, faire mourir Bérénice ; s'il ne l'a pas voulu, c'est que la reine de Judée, "n'ayant pas ici avec Titus les derniers engagements que Didon avait avec Enée [...] n'est pas obligée, comme elle, de renoncer à la vie.""

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