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Tristana
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Ariane, lycéenne de Bordeaux, lance une pétition contre le sexisme dans les programmes scolaires - Page 3 Empty Re: Ariane, lycéenne de Bordeaux, lance une pétition contre le sexisme dans les programmes scolaires

par Tristana Ven 15 Aoû 2014 - 19:27
Frater a écrit:Chacun son expérience en la matière, votre aveuglement idéologique ne vous donne pas nécessairement raison, même si vous tentez de le dissimuler. J'essaie de mettre en avant le fait que ce que je dis relève de l'opinion, non de la vérité parce que je suis bien conscient du fait que ces choses là sont bien compliquées. Vous avez des certitudes, c'est sûrement fort confortable, tant mieux pour vous. Je pense que les défenseurs de la thèse du genre 100% culturel tiennent des propos extrémistes, c'est vrai. Cela ne veut pas dire que je ne peux pas me tromper, évidemment. J'attends quand même de éléments de réponse un peu convaincants.

Aveuglement idéologique, dis donc, ça devient de plus en plus agréable ici !
Ça tombe bien : je ne prétends pas avoir raison, ni tort. Je ne débats même pas de la question du genre avec vous car je sais que c'est peine perdue, et les causes perdues, très franchement, je commence à m'en lasser.
Je trouve juste un peu surprenant de venir dire que son opinion est la seule à être raisonnable et raisonnée, quand on accuse les autres d'extrémisme.
Personnellement, je n'ai jamais dit que votre opinion était mauvaise ou extrémiste, et ce serait bien que certains sur ce forum apprennent à respecter ce que disent les autres avant de porter des jugements durs (même sans rien en savoir, puisque vous parlez de mon "aveuglement idéologique" alors même que je n'ai pas évoqué le fond du problème, mais simplement votre manière d'en parler).

Frater a écrit:Là, vous allez un peu vite ; je ne parle pas pour vous (je ne vous connais pas) mais je crois pourtant que beaucoup de nos collègues ont cette idée en tête. Tout ce que j'espère c'est qu'ils se bercent d'illusions - je ne pense pas en effet que l'école ait ce genre de pouvoir, heureusement d'ailleurs.

Je me suis mal exprimée : je parlais de ce fil et de la proposition de la jeune fille que les programmes soient moins sexistes. Je ne pense pas que cela fasse de l'école un laboratoire pour autant ; c'est simplement une manière d'enseigner une histoire de notre monde plus équilibrée.

Frater a écrit:Je n'ai jamais prétendu qu'il ne fallait pas enseigner Sand ou Staël ou n'importe quel écrivain féminin. Par ailleurs, je ne vous ai pas attendue pour me poser la question, fort classique, de leur valeur ; il se trouve qu'en la matière, je serais plutôt du parti de Voltaire : devant la confusion des goûts et des couleurs, mieux vaut laisser le temps faire le tri tout seul. Je n'ai pas, moi, la prétention de décider pour mes élèves que George Sand vaut mieux que Chateaubriand. Quant à votre explication par le sexisme, elle a ceci de séduisant qu'elle est simple et qu'elle explique tout. C'est vrai que c'est pratique, à défaut d'être juste sans doute... Enfin, vous parlez de la place des femmes dans la littérature mais vous semblez ramener l'expression littéraire de ces dernières aux seules revendications féministes ; j'espère me tromper mais si c'est ce que vous faites alors c'est une réduction regrettable. Yourcenar ne doit pas faire partie de vos classiques, dommage...

Bien sûr que si, Yourcenar fait partie de mes lectures. Mais on évoquait Mme de Staël et George Sand, et je suis persuadée que leur engagement féministe explique en partie pourquoi certaines de leurs oeuvres n'ont pas accédé à la postérité (Indiana, c'est cent fois meilleur — et plus féministe — que la Petite Fadette, mais de quoi se souvient-on ?...).
Expliquez-moi donc : comment se fait-il que la grande majorité des écrivaines françaises n'aient pas accédé à la postérité ? Parce que toutes étaient des idiotes sans talent ? Vous prétendez que mon explication est (avec mépris, pour changer) "pratique à défaut d'être juste". Mais et la vôtre ? Prétendre que toutes les femmes étaient des mauvaises qui ne savaient pas écrire, ce n'est pas pratique peut-être, et ce n'est pas surtout totalement faux ?
J'imagine que vous avez une explication tout à fait subtile et bien plus intelligente que la mienne en la matière...
Maintenant, sachez malgré tout que nier le sexisme de l'histoire littéraire est une erreur que je n'aurais pas cru possible chez un enseignant de littérature. Mais comme quoi, tout arrive !
John
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par John Ven 15 Aoû 2014 - 21:56
Je n'ai pas le tout le débat.

Je voudrais juste montrer que des femmes célèbres, il y en a. Combien d'entre elles sont citées dans les programmes scolaires ?


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par Olympias Ven 15 Aoû 2014 - 22:24
Rien ne nous empêche de les citer...et je ne m'en prive pas !!!
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par Celeborn Ven 15 Aoû 2014 - 22:33
Tristana a écrit:
Expliquez-moi donc : comment se fait-il que la grande majorité des écrivaines françaises n'aient pas accédé à la postérité ? Parce que toutes étaient des idiotes sans talent ? Vous prétendez que mon explication est (avec mépris, pour changer) "pratique à défaut d'être juste". Mais et la vôtre ? Prétendre que toutes les femmes étaient des mauvaises qui ne savaient pas écrire, ce n'est pas pratique peut-être, et ce n'est pas surtout totalement faux ?
J'imagine que vous avez une explication tout à fait subtile et bien plus intelligente que la mienne en la matière...
Maintenant, sachez malgré tout que nier le sexisme de l'histoire littéraire est une erreur que je n'aurais pas cru possible chez un enseignant de littérature. Mais comme quoi, tout arrive !

Je crois que tu y vas un peu fort, là. Qu'il y ait de grandes écrivaines dans notre histoire littéraire, c'est un fait. Que certaines n'aient éventuellement pas toute la reconnaissance qu'elles mériteraient, éventuellement (mais on risque quand même de tourner assez vite en rond si on devait réellement faire une liste). Qu'ensuite tu préfères Georges Sand à Zola, c'est tout à fait possible, mais ça ne prouve rien sur la qualité littéraire de l'une et de l'autre. On constatera néanmoins qu'en termes d'histoire littéraire, Zola est d'une toute autre importance que Georges Sand. Ça n'empêche pas Georges Sand d'être un grand écrivain français.

Alors non, toutes les femmes n'étaient pas des mauvaises qui ne savaient pas écrire, mais il faut bien avouer qu'on ne les a pas aidées à écrire, et ça me paraît stupide de le nier (d'ailleurs quelqu'un comme Virginia Woolf en parle extrêmement bien dans Une Chambre à soi, et son explication me paraît un peu plus convaincante que la tienne, pour le coup, et montre que souvent, les femmes écrivains ont échappé à la "condition de la femme" de l'époque d'une façon ou d'une autre ). On remarquera d'ailleurs que la différence s'estompe très nettement au XXe siècle, notamment dans sa seconde moitié, et à mon avis ce n'est pas un hasard : je ne suis pas certain que la principale cause de la faible représentation des écrivains femmes des siècles précédents soit un sexisme a posteriori ; je crois qu'il est surtout dans le sexisme des époques en question.

Ensuite, on peut toujours faire des calculs d'apothicaires sur le pourcentage d'auteurs féminins qui tombent à l'agrégation (en même temps, Madame de La Fayette, c'est en gros deux romans, alors que Corneille, c'est 21 pièces… et accessoirement je crois que personne ne remet en cause le fait que La Princesse de Clèves est l'un des romans français les plus importants de notre histoire littéraire), mais ça me semble assez peu intéressant. D'ailleurs on a eu Madame de Sévigné très récemment ; en comparée, j'ai eu la première année Anna Akhmatova, et la seconde Sarah Kane, donc je pense que le pli est pris.

L'Histoire a longtemps été une histoire d'hommes, dans laquelle un certain nombre de femmes ont pu se faire une place importante, voire de tout premier plan, mais la tendance générale n'en demeure pas moins, et pour des raisons extrêmement bien analysées par les féministes historiques.

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par Celeborn Sam 16 Aoû 2014 - 10:09
Dr Raynal a écrit:
Tout à fait, mais cela se rajoute à notre condition mammalienne, cela ne la change pas : nous sommes bien des mammifères

La question n'était pas de savoir si nous étions des mammifères (ça, je n'en doutais pas), mais si nous étions des « mammifères comme les autres », ce qui justifierait la présence obligatoire chez toute femme d'un instinct maternel envers le jeune enfant. J'affirme que la réponse est non, et qu'on ne peut se fonder sur notre "condition mammalienne" pour affirmer une chose pareille.

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par Marmont Sam 16 Aoû 2014 - 10:20
Pour en revenir aux femmes "importantes" dans les programmes d'histoire, bien entendu, il y a des foules d'exemples pour la période contemporaine - il n'y a pas que la période contemporaine en primaire et au collège. Mais auparavant ?
A part Lucy et Jeanne d'Arc (femme ou fille ?), il n'y a rien. C'est un choix du programme, certes, mais aussi de ces époques. On étudie les cités antiques, lorsque les femmes n'y ont aucun pouvoir. A l'époque médiévale et moderne, hormis des reines assurant des régences (je parle de la France), il n'y a rien, à nouveau. Sinon, on peut toujours s'amuser avec l'hagiographie - quelque peu suspecte au passage : Sainte Geneviève, Sainte Blandine, etc.
Bref, arrêtons de penser que les programmes actuels d'histoire sont sexistes, ce sont les sociétés d'antan qui l'étaient (et encore, on n'applique pas ce terme au passé lointain, c'est un anachronisme !).

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par Tristana Sam 16 Aoû 2014 - 10:53
Celeborn a écrit:
Tristana a écrit:
Expliquez-moi donc : comment se fait-il que la grande majorité des écrivaines françaises n'aient pas accédé à la postérité ? Parce que toutes étaient des idiotes sans talent ? Vous prétendez que mon explication est (avec mépris, pour changer) "pratique à défaut d'être juste". Mais et la vôtre ? Prétendre que toutes les femmes étaient des mauvaises qui ne savaient pas écrire, ce n'est pas pratique peut-être, et ce n'est pas surtout totalement faux ?
J'imagine que vous avez une explication tout à fait subtile et bien plus intelligente que la mienne en la matière...
Maintenant, sachez malgré tout que nier le sexisme de l'histoire littéraire est une erreur que je n'aurais pas cru possible chez un enseignant de littérature. Mais comme quoi, tout arrive !

Je crois que tu y vas un peu fort, là. Qu'il y ait de grandes écrivaines dans notre histoire littéraire, c'est un fait. Que certaines n'aient éventuellement pas toute la reconnaissance qu'elles mériteraient, éventuellement (mais on risque quand même de tourner assez vite en rond si on devait réellement faire une liste). Qu'ensuite tu préfères Georges Sand à Zola, c'est tout à fait possible, mais ça ne prouve rien sur la qualité littéraire de l'une et de l'autre. On constatera néanmoins qu'en termes d'histoire littéraire, Zola est d'une toute autre importance que Georges Sand. Ça n'empêche pas Georges Sand d'être un grand écrivain français.

Alors non, toutes les femmes n'étaient pas des mauvaises qui ne savaient pas écrire, mais il faut bien avouer qu'on ne les a pas aidées à écrire, et ça me paraît stupide de le nier (d'ailleurs quelqu'un comme Virginia Woolf en parle extrêmement bien dans Une Chambre à soi, et son explication me paraît un peu plus convaincante que la tienne, pour le coup, et montre que souvent, les femmes écrivains ont échappé à la "condition de la femme" de l'époque d'une façon ou d'une autre ). On remarquera d'ailleurs que la différence s'estompe très nettement au XXe siècle, notamment dans sa seconde moitié, et à mon avis ce n'est pas un hasard : je ne suis pas certain que la principale cause de la faible représentation des écrivains femmes des siècles précédents soit un sexisme a posteriori ; je crois qu'il est surtout dans le sexisme des époques en question.

Nous sommes globalement d'accord, oui. Disons que je pense que les deux sexismes coexistent : le sexisme de l'époque, qui faisait que les femmes écrivaient moins, et le sexisme a posteriori, comme tu dis, qui fait qu'on parle moins de certaines écrivaines que de certains écrivains.
Je n'ai jamais nié l'importance de Zola ou des autres écrivains mâles cités dans le fil. Je dis juste qu'il n'est pas totalement impossible de faire découvrir à des élèves des oeuvres peut-être moins connues mais qui ont leur intérêt aussi. Dire que George Sand est aussi importante que Zola dans l'histoire littéraire française, c'est évidemment une idiotie. Mais je pense qu'un professeur peut choisir parfois des textes qui ne sont pas les plus connus : ça peut aussi permettre de découvrir d'autres choses aux élèves.
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par faer Sam 16 Aoû 2014 - 11:16
Marmont a écrit:Pour en revenir aux femmes "importantes" dans les programmes d'histoire, bien entendu, il y a des foules d'exemples pour la période contemporaine - il n'y a pas que la période contemporaine en primaire et au collège. Mais auparavant ?
A part Lucy et Jeanne d'Arc (femme ou fille ?), il n'y a rien. C'est un choix du programme, certes, mais aussi de ces époques. On étudie les cités antiques, lorsque les femmes n'y ont aucun pouvoir. A l'époque médiévale et moderne, hormis des reines assurant des régences (je parle de la France), il n'y a rien, à nouveau. Sinon, on peut toujours s'amuser avec l'hagiographie - quelque peu suspecte au passage : Sainte Geneviève, Sainte Blandine, etc.
Bref, arrêtons de penser que les programmes actuels d'histoire sont sexistes, ce sont les sociétés d'antan qui l'étaient (et encore, on n'applique pas ce terme au passé lointain, c'est un anachronisme !).

Il y aurait un long débat à faire sur le sujet, mais traiter des femmes en histoire n'est pas si compliqué que ça, quelque soit l'époque. En revanche cela nécessiterait de changer la "manière" de faire de l'histoire scolaire, ce que le programme commence déjà quelque peu à intégrer. Il s'agirait en fait de sortir d'une histoire qui serait guidée par l'importance de tel ou tel personnage pour le récit (toute relative souvent et construite de toute manière a posteriori) pour s'intéresser à la diversité des acteurs qui font la société dans son ensemble. Dans ce cadre, les femmes trouvent naturellement leur place, comme le montre le programme concernant le rôle des femmes pendant la Révolution française par exemple.

A côté de ça je pense également, comme nos collègues de lettres, qu'il faut de toute manière se méfier de l'idée qu'il n'y a pas eu de femmes importantes et que "c'est comme ça, c'est pas notre faute si les sociétés du passé étaient sexistes". En creusant un peu dans l'historiographie on peut parfois se rendre compte que certaines femmes ont été occultées par les historiens de telle période, subissant ainsi une forme de sexisme à rebours qui correspond seulement à l'époque de l'historien et non nécessairement de son objet d'étude. Ça reste collé à l'historiographie tant que le travail inverse n'a pas été effectué. Pendant longtemps on a par exemple fustigé le traitement des enfants au Moyen Age, dénié tout intérêt parental dans cette période, avec l'idée au fond que l'amour maternel serait né au XVIIIe siècle (merci Rousseau). Pourtant le Moyen Age regorge d'exemples d'intérêt pour les enfants, mieux : le père s'occupait en général aussi des enfants pendant les premières années, quelle drôle d'idée ! Pour l'histoire antique, s'appuyer sur l'Assemblée des femmes d'Aristophane par exemple est un bon moyen de réfléchir sur la politique à Athènes.

Cela dit je pense vous rejoindre dans l'idée que tout cela ne doit pas être "forcé", en particulier parce que les élèves aujourd'hui sont très sensibles à ce genre de questions et ont tendance à se cambrer facilement dès qu'ils perçoivent qu'on cherche à leur imposer une idée qui serait considérée comme "bien-pensante". Le féminisme a énormément perdu de sa "subversivité" apparente, c'est devenu plus ambigu, alors que bien souvent c'est le subversif qui fait le charme d'une idée pour la jeunesse. Intégrer "de force" les femmes pourrait donc avoir l'effet opposé à celui souvent recherché. Je pense encore aux discours de certains étudiants qui gardaient une rancœur terrible envers l'institution scolaire pour les avoir "torturé" avec l'histoire de la Shoah, avec l'idée qu'on en ferait (de manière disproportionnée) des tonnes sur le sujet. Je crois que tout cela doit être pris en compte.

Je pense du coup que c'est aussi le rôle du professeur d'histoire d'être capable de juger de sa marge de manœuvre vis à vis du programme et d'aller au delà d'une historiographie vieillissante, en participant de ce fait, au fond, à la transformation des programmes en fonction des besoins d'une société qui se métamorphose sans-cesse et que lui-même perçoit à sa manière (chose, il me semble, parfois trop rapidement abandonnée aux instances supérieures et que l'enseignant, du coup, craint et subit, se plaçant automatiquement sur la défensive et donc dans une posture "conservatrice" par défaut).

Mais il ne s'agit là que de quelques pistes de réflexion personnelles, je n'ai bien évidemment que peu d'expérience pour refléter tout cela avec rigueur.
Marmont
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par Marmont Sam 16 Aoû 2014 - 11:57
faer a écrit:Il y aurait un long débat à faire sur le sujet, mais traiter des femmes en histoire n'est pas si compliqué que ça, quelque soit l'époque. En revanche cela nécessiterait de changer la "manière" de faire de l'histoire scolaire, ce que le programme commence déjà quelque peu à intégrer. Il s'agirait en fait de sortir d'une histoire qui serait guidée par l'importance de tel ou tel personnage pour le récit (toute relative souvent et construite de toute manière a posteriori) pour s'intéresser à la diversité des acteurs qui font la société dans son ensemble. Dans ce cadre, les femmes trouvent naturellement leur place, comme le montre le programme concernant le rôle des femmes pendant la Révolution française par exemple.
Certes oui, mais il faut trouver des sources pour cela. Encore une fois pour la période contemporaine, il n'y a pas de problème, mais auparavant ?
Et puis, s'il faut absolument trouver des femmes afin de rétablir l'équilibre, il faudra passer à côté de points fondamentaux. Exemple : j'ai trouvé certains textes et représentations de Sybille, reine de Jérusalem. Vais-je devoir développer son personnage et son rôle - cela prend du temps - au détriment de la 3ème Croisade ? Est-ce que l'étude de sa vie permettra aux élèves de comprendre le fonctionnement des Etats latins d'Orient ? Alors qu'on dispose déjà de si peu de temps pour traiter des programmes pléthoriques ?
Je ne suis pas contre le principe - cela changera un peu de ces séances toutes faites et ennuyantes que l'on peut trouver dans les manuels (du moins leur ébauche) et sur la toile -, mais s'il faut rétablir l'équilibre à chaque fois (comme le sous-entend cette lycéenne) cela risque d'être très délicat, au risque de passer à côté de l'essentiel des connaissances des programmes.

faer a écrit:En creusant un peu dans l'historiographie on peut parfois se rendre compte que certaines femmes ont été occultées par les historiens de telle période, subissant ainsi une forme de sexisme à rebours qui correspond seulement à l'époque de l'historien et non nécessairement de son objet d'étude. Ça reste collé à l'historiographie tant que le travail inverse n'a pas été effectué.

Tu aurais des exemples ?

faer a écrit:
Pour l'histoire antique, s'appuyer sur l'Assemblée des femmes d'Aristophane par exemple est un bon moyen de réfléchir sur la politique à Athènes.
Pas mal de second degré là-dedans, c'est avant tout de la comédie. Pour le lycée d'accord, mais auparavant ?

faer a écrit:Cela dit je pense vous rejoindre dans l'idée que tout cela ne doit pas être "forcé", en particulier parce que les élèves aujourd'hui sont très sensibles à ce genre de questions et ont tendance à se cambrer facilement dès qu'ils perçoivent qu'on cherche à leur imposer une idée qui serait considérée comme "bien-pensante". Le féminisme a énormément perdu de sa "subversivité" apparente, c'est devenu plus ambigu, alors que bien souvent c'est le subversif qui fait le charme d'une idée pour la jeunesse. Intégrer "de force" les femmes pourrait donc avoir l'effet opposé à celui souvent recherché. Je pense encore aux discours de certains étudiants qui gardaient une rancœur terrible envers l'institution scolaire pour les avoir "torturé" avec l'histoire de la Shoah, avec l'idée qu'on en ferait (de manière disproportionnée) des tonnes sur le sujet. Je crois que tout cela doit être pris en compte.
Complètement d'accord et c'est le risque avec ce type de "demande". Les programmes sont alors très "orientés" et certains élèves qui le remarquent peuvent se cabrer, effectivement. C'est ce point qui m'a fait réagir initialement.

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par Tristana Sam 16 Aoû 2014 - 12:13
faer a écrit:
Marmont a écrit:Pour en revenir aux femmes "importantes" dans les programmes d'histoire, bien entendu, il y a des foules d'exemples pour la période contemporaine - il n'y a pas que la période contemporaine en primaire et au collège. Mais auparavant ?
A part Lucy et Jeanne d'Arc (femme ou fille ?), il n'y a rien. C'est un choix du programme, certes, mais aussi de ces époques. On étudie les cités antiques, lorsque les femmes n'y ont aucun pouvoir. A l'époque médiévale et moderne, hormis des reines assurant des régences (je parle de la France), il n'y a rien, à nouveau. Sinon, on peut toujours s'amuser avec l'hagiographie - quelque peu suspecte au passage : Sainte Geneviève, Sainte Blandine, etc.
Bref, arrêtons de penser que les programmes actuels d'histoire sont sexistes, ce sont les sociétés d'antan qui l'étaient (et encore, on n'applique pas ce terme au passé lointain, c'est un anachronisme !).

Il y aurait un long débat à faire sur le sujet, mais traiter des femmes en histoire n'est pas si compliqué que ça, quelque soit l'époque. En revanche cela nécessiterait de changer la "manière" de faire de l'histoire scolaire, ce que le programme commence déjà quelque peu à intégrer. Il s'agirait en fait de sortir d'une histoire qui serait guidée par l'importance de tel ou tel personnage pour le récit (toute relative souvent et construite de toute manière a posteriori) pour s'intéresser à la diversité des acteurs qui font la société dans son ensemble. Dans ce cadre, les femmes trouvent naturellement leur place, comme le montre le programme concernant le rôle des femmes pendant la Révolution française par exemple.

A côté de ça je pense également, comme nos collègues de lettres, qu'il faut de toute manière se méfier de l'idée qu'il n'y a pas eu de femmes importantes et que "c'est comme ça, c'est pas notre faute si les sociétés du passé étaient sexistes". En creusant un peu dans l'historiographie on peut parfois se rendre compte que certaines femmes ont été occultées par les historiens de telle période, subissant ainsi une forme de sexisme à rebours qui correspond seulement à l'époque de l'historien et non nécessairement de son objet d'étude. Ça reste collé à l'historiographie tant que le travail inverse n'a pas été effectué. Pendant longtemps on a par exemple fustigé le traitement des enfants au Moyen Age, dénié tout intérêt parental dans cette période, avec l'idée au fond que l'amour maternel serait né au XVIIIe siècle (merci Rousseau). Pourtant le Moyen Age regorge d'exemples d'intérêt pour les enfants, mieux : le père s'occupait en général aussi des enfants pendant les premières années, quelle drôle d'idée ! Pour l'histoire antique, s'appuyer sur l'Assemblée des femmes d'Aristophane par exemple est un bon moyen de réfléchir sur la politique à Athènes.

Cela dit je pense vous rejoindre dans l'idée que tout cela ne doit pas être "forcé", en particulier parce que les élèves aujourd'hui sont très sensibles à ce genre de questions et ont tendance à se cambrer facilement dès qu'ils perçoivent qu'on cherche à leur imposer une idée qui serait considérée comme "bien-pensante". Le féminisme a énormément perdu de sa "subversivité" apparente, c'est devenu plus ambigu, alors que bien souvent c'est le subversif qui fait le charme d'une idée pour la jeunesse. Intégrer "de force" les femmes pourrait donc avoir l'effet opposé à celui souvent recherché. Je pense encore aux discours de certains étudiants qui gardaient une rancœur terrible envers l'institution scolaire pour les avoir "torturé" avec l'histoire de la Shoah, avec l'idée qu'on en ferait (de manière disproportionnée) des tonnes sur le sujet. Je crois que tout cela doit être pris en compte.

Je pense du coup que c'est aussi le rôle du professeur d'histoire d'être capable de juger de sa marge de manœuvre vis à vis du programme et d'aller au delà d'une historiographie vieillissante, en participant de ce fait, au fond, à la transformation des programmes en fonction des besoins d'une société qui se métamorphose sans-cesse et que lui-même perçoit à sa manière (chose, il me semble, parfois trop rapidement abandonnée aux instances supérieures et que l'enseignant, du coup, craint et subit, se plaçant automatiquement sur la défensive et donc dans une posture "conservatrice" par défaut).

Mais il ne s'agit là que de quelques pistes de réflexion personnelles, je n'ai bien évidemment que peu d'expérience pour refléter tout cela avec rigueur.

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par faer Sam 16 Aoû 2014 - 12:45
Marmont a écrit:Certes oui, mais il faut trouver des sources pour cela. Encore une fois pour la période contemporaine, il n'y a pas de problème, mais auparavant ?
Et puis, s'il faut absolument trouver des femmes afin de rétablir l'équilibre, il faudra passer à côté de points fondamentaux. Exemple : j'ai trouvé certains textes et représentations de Sybille, reine de Jérusalem. Vais-je devoir développer son personnage et son rôle - cela prend du temps - au détriment de la 3ème Croisade ? Est-ce que l'étude de sa vie permettra aux élèves de comprendre le fonctionnement des Etats latins d'Orient ? Alors qu'on dispose déjà de si peu de temps pour traiter des programmes pléthoriques ?
Je ne suis pas contre le principe - cela changera un peu de ces séances toutes faites et ennuyantes que l'on peut trouver dans les manuels (du moins leur ébauche) et sur la toile -, mais s'il faut rétablir l'équilibre à chaque fois (comme le sous-entend cette lycéenne) cela risque d'être très délicat, au risque de passer à côté de l'essentiel des connaissances des programmes.

Je suis d'accord que c'est compliqué à intégrer, surtout au collège, les programmes étant déjà très riches et à mon avis peu compréhensibles pour les élèves dans les temps impartis (j'ai fait une séquence sur l'Expansion de l'occident avec une cinquième en grande difficulté pendant mon stage, je m'en suis vu). J'ai constaté qu'il était alors très difficile de se défaire des "bases générales". Tout ça, dans un cadre scolaire, soulève en fait l'épineuse question du choix de ce qui est important ou non. Doit-on seulement parler de François Ier, considéré comme essentiel, passant ainsi sous silence le rôle de sa mère et de sa sœur dans sa vie et son œuvre politique (importation de la renaissance en France) ? Oui probablement si on pressé par un programme "pléthorique" et qu'on pense à tout ce que les élèves doivent déjà retenir et surtout comprendre.

Du coup, comme on en convenait sur la nécessité de ne pas forcer la chose, on ne peut intégrer ce genre de considérations que si ça parait réellement opportun. D'où évidemment le côté déconnecté des réalités du métier des revendications de cette lycéenne, ce qui est normal d'un côté, surtout qu'elle ne s'adresse pas qu'aux enseignants (il me semble).

Marmont a écrit:
faer a écrit:En creusant un peu dans l'historiographie on peut parfois se rendre compte que certaines femmes ont été occultées par les historiens de telle période, subissant ainsi une forme de sexisme à rebours qui correspond seulement à l'époque de l'historien et non nécessairement de son objet d'étude. Ça reste collé à l'historiographie tant que le travail inverse n'a pas été effectué.

Tu aurais des exemples ?

Je ne suis malheureusement pas assez calé sur le sujet pour donner des exemples précis. Je me rappelle vaguement avoir lu dans un recueil d'articles sur la question que l'historiographie avait de toute manière beaucoup contribué à la mauvaise réputation des régences (et donc des régentes) par exemple. Mais je ne m'avancerai pas plus que ça sur un sujet que je ne maitrise pas tout à fait. En revanche, j'ai justement abordé le thème de l'enfance que je connais un peu mieux et qui reste assez lié, ayant connu finalement un destin parfois similaire à cause des fonctions attribuées à la femme dans ce cadre.

Marmont a écrit:
faer a écrit:Pour l'histoire antique, s'appuyer sur l'Assemblée des femmes d'Aristophane par exemple est un bon moyen de réfléchir sur la politique à Athènes.

Pas mal de second degré là-dedans, c'est avant tout de la comédie. Pour le lycée d'accord, mais auparavant ?

Je pensais au lycée oui, vu que ça se prête au programme. Au collège, en 6ème, je vois mal comment ce serait utilisable, le programme reste très large et on a toujours un peu le même problème comme évoqué plus haut.

Marmont a écrit:
faer a écrit:les élèves aujourd'hui sont très sensibles à ce genre de questions et ont tendance à se cambrer facilement
certains élèves qui le remarquent peuvent se cabrer

Et non pas "se cambrer", oui.  :lol:
Marmont
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par Marmont Sam 16 Aoû 2014 - 13:14
D'accord avec toi !  Wink 

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Seleneia
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par Seleneia Sam 16 Aoû 2014 - 16:52
On étudie souvent une histoire des "grands hommes" alors qu'une histoire sociale est aussi intéressante : ce sont les peuples qui font l'histoire ! Les grands hommes ne peuvent agir sans eux... Les femmes ont souvent été écartées des grands pouvoirs... L'histoire sociale permet de leur accorder la place qui leur est due. Ensuite je ne comprends pas pourquoi il faut faire l'éloge de l'ambition, que ce soit pour les femmes ou les hommes. En quoi devenir cadre serait "mieux" que d'être boulanger ou plombier ? Les femmes choisissent certes des métiers plus "sociaux" et donc moins bien payés que des métiers de la finance ou l'économie mais peut être que ce sont des métiers plus passionnants. Personnellement, je me satisfais de mon parcours "peu ambitieux". J'y trouve mon compte. Combien de personnes bossent en tant que cadre pendant 15-20 ans puis changent brutalement de métier, épuisés par la pression ? (Et deviennent palefrenier ou agriculteur par exemple?).
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