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NLM76
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par NLM76 Sam 10 Jan - 9:26
Sinon, il y a "la poésie d'un texte en prose".
Oliv396
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Oliv396 Sam 10 Jan - 9:43
Ce n'est pas très beau, comme mot : pourquoi pas simplement "poésie" ?
sansara
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par sansara Sam 10 Jan - 10:11
nlm76 a écrit:Sinon, il y a "la poésie d'un texte en prose".

Bah oui, je l'avais suggéré dans mon premier message. Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 2252222100
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué... Rolling Eyes
Bobby-Cowen
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Bobby-Cowen Sam 10 Jan - 10:46
PauvreYorick a écrit:
Nita a écrit:Le terme est laid.
Ça m'arrache les doigts de l'écrire mais Nita a entièrement raison.

Prem's Razz
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par NLM76 Sam 10 Jan - 11:27
Parménide a écrit:On pourrait distinguer la poésie du texte de sa poéticité. La première consiste dans le caractère esthétique. La deuxième c'est plutôt le caractère de sa puissance esthétique, ou de son caractère esthétique en puissance, qui fait que la "traduction" et l'interprétation sont, au fond, un travail infini.
gné ?
@ sansara : ça m'apprendra à ne pas lire les messages de mes petits camarades... Mon message est non avenu.

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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Nita Sam 10 Jan - 13:40
Bobby-Cowen a écrit:
PauvreYorick a écrit:
Nita a écrit:Le terme est laid.
Ça m'arrache les doigts de l'écrire mais Nita a entièrement raison.

Prem's Razz

'xact ! Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 2252222100

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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Philomèle Sam 10 Jan - 14:44
J'essaie de sortir de la sidération dans laquelle je suis plongée depuis quelques jours. Je n'ai pas le coeur d'entrer dans une polémique opposant le sens commun lettré d'un côté et les spécialistes de la théorie littéraire de l'autre. A. Compagnon, dans le Démon de la théorie, a si bien miné le terrain, que je désespère que nous parvenions désormais à justifier nos études littéraires (autrement que comme une école de scepticisme, si l'on suit Compagnon) – je dis nous, puisque je suis enseignante chercheuse.

Le mot "poéticité" a une histoire : son emploi n'est pas seulement une coquetterie de pédant ou d'imposteur jargonnant.

Si l'on considère que la littérature est une institution collective (une forme de domination symbolique par l'esthétique, dirait la socio-histoire, etc.), on est en peine pour séparer les textes littéraires des textes non littéraires. La décision des théoriciens formalistes consiste (principe guidant la recherche) à postuler une qualité littéraire de certains textes. Le projet d'enquête consiste ensuite à se demander par quels traits internes aux textes on pourrait isoler cette qualité littéraire.

Le champ nouveau de réflexion qui s'ouvre reprend le terme de poétique (reprise partielle du projet de description littéraire d'Aristote). Une discipline se crée en se dotant d'une terminologie. "Literaturnost" (Jakobson, en 1921) est une création dans la langue russe (dans laquelle la création de néologismes est peut-être mieux admise que dans notre français académique, post-classique), mot qui a été transposé en français et rendu par le néologisme "littérarité" (par T. Todorov).

Dans sa théorie, Jakobson identifie une fonction poétique du langage ("accent mis sur le message pour son propre compte"). Cela ouvre la possibilité d'un examen de cette qualité poétique (en ce sens précis qu'il prend dans la théorie formaliste, charpentée par la linguistique, concentré sur le texte et non sur l'oeuvre). Sa terminologie la nomme "poéticité" (je crois comprendre, sous réserve, que la création du mot est aussi de lui, toujours en russe, dans un article de 1934 "Qu'est-ce que la poésie ?")

Le projet de la  poétique n'est pas essentialiste, il ne s'agit pas d'identifier des substances. Ces mots de littérarité et poéticité permettent d'éviter les confusions entraînées par l'emploi de mots très polysémiques, tels que littérature et poésie, poétique.

Donc, oui, le projet de la poétique est d'inspiration positiviste. Il prend sens si l'on considère que l'on peut approcher le fait littéraire en dégageant la lecture de la conversation mondaine, de l'impressionnisme critique. Je le défends dans le sens où il permet de repérer des traits objectifs, sur lesquels les consciences critiques peuvent s'accorder (bien que je ne travaille pas en poétique, à titre personnel).

Je n'ai pas compris, dans le post initial, dans quel contexte ce mot a été utilisé (copie, cours, étude ?). Il est certain qu'à présent, le mot circule, détaché de la théorie littéraire, désémantisé, bref, devenu charabia. Je suis sûre que l'on peut faire de bon cours en lycée sans avoir besoin du mot. Je suis certaine que les élèves n'ont pas besoin d'utiliser ce mot dans leur travail pour lire les oeuvres.

Je demande cependant que l'on laisse la possibilité aux études littéraires de se doter d'une terminologie et de poursuivre un travail de conceptualisation et de généralisation sur le fait littéraire. Les études littéraires ne peuvent pas se réduire à une collection de remarques particulières sur une poussière d'oeuvres toutes particulières.

Oui, j'ai envie de parvenir à comprendre, un jour, ce que peut être la "littérature", ou du moins, je veux pouvoir mettre à l'épreuve les propositions qui sont faites régulièrement. Je comprends très mal (à dire vrai, je ne comprends pas du tout) que l'on puisse, sur fond de revendication du sens commun, censurer une interrogation à la fois aussi centrale et aussi banale.


Dernière édition par Philomèle le Sam 10 Jan - 14:57, édité 1 fois
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par User17706 Sam 10 Jan - 14:55
Alors, si je comprends bien, à la question initiale du post, il faut répondre «non», parce que le terme de «poéticité» désigne tout autre chose que ce qui était demandé?
Philomèle
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Philomèle Sam 10 Jan - 15:03
Le post initial reste assez flou à mes yeux (contexte d'emploi peu clair). Mais s'il s'agit de désigner "l'accent mis sur le message pour son propre compte" dans un texte en prose (qui n'est pas même reconnu comme "poème en prose"), oui, on peut spéculer sur la poéticité de ce texte. La police de l'emploi des mots ne sévira pas. La poétique (dans la théorie formaliste du XXe siècle) ne s'occupe pas que de poésie au sens restreint de "poème en vers ou en prose", elle s'occupe de tout texte littéraire.

C'est même un problème connu de l'approche de la fonction poétique du langage : c'est peut-être l'usage de la langue dans la publicité qui illustre le mieux l'accent mis sur le message pour son propre compte (autant que l'usage de la langue dans la littérature, du moins).
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par User17706 Sam 10 Jan - 15:06
Je peux me tromper mais il me semble que poéticité était plutôt, dans le post initial, un synonyme du mot poésie dans le sens qu'il revêt dans l'extrait suivant (sublime !) de Balzac:
Dès que la foule venait, il se pratiquait des lectures gratuites à l’étalage des libraires par les jeunes gens affamés de littérature et dénués d’argent. Les commis chargés de veiller sur les livres exposés laissaient charitablement les pauvres gens tournant les pages. Quand il s’agissait d’un in-12 de deux cents pages comme Smarra, Pierre Schlémilh, Jean Sbogar, Jocko, en deux séances il était dévoré. En ce temps-là les cabinets de lecture n’existaient pas, il fallait acheter un livre pour le lire ; aussi les romans se vendaient-ils alors à des nombres qui paraîtraient fabuleux aujourd’hui. Il y avait donc je ne sais quoi de français dans cette aumône faite à l’intelligence jeune, avide et pauvre. La poésie de ce terrible bazar éclatait à la tombée du jour. De toutes rues adjacentes allaient et venaient un grand nombre de filles qui pouvaient s’y promener sans rétribution. De tous les points de Paris, une fille de joie accourait faire son Palais. Les Galeries-de-Pierre appartenaient à des maisons privilégiées qui payaient le droit d’exposer des créatures habillées comme des princesses, entre telle ou telle arcade, et à la place correspondante dans le jardin ; tandis que les Galeries-de-Bois étaient pour la prostitution un terrain public, le Palais par excellence, mot qui signifiait alors le temple de la prostitution. Une femme pouvait y venir, en sortir accompagnée de sa proie, et l’emmener où bon lui semblait. Ces femmes attiraient donc le soir aux Galeries-de-Bois une foule si considérable qu’on y marchait au pas, comme à la procession ou au bal masqué. Cette lenteur, qui ne gênait personne, servait à l’examen. Ces femmes avaient une mise qui n’existe plus ; la manière dont elles se tenaient décolletées jusqu’au milieu du dos, et très-bas aussi par devant ; leurs bizarres coiffures inventées pour attirer les regards : celle-ci en Cauchoise, celle-là en Espagnole ; l’une bouclée comme un caniche, l’autre en bandeaux lisses ; leurs jambes serrées par des bas blancs et montrées on ne sait comment, mais toujours à propos, toute cette infâme poésie est perdue.
Même si je suis d'accord sur le fait que ce sens pourrait aussi prêter à discussion Razz
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Philomèle Sam 10 Jan - 15:25
Voilà que tu m'obliges à me faire puriste (j'identifie bien la perversité du dialecticien).

Dans le poème de Balzac, le mot "poésie" est employé par métaphore en absence. Alors ok, on peut parler de "poéticité" du quartier rouge mais cela restera une métaphore, dont le comparé est volontairement incertain : l'érotisme cheap et ludique, en gros (j'ai lu en diagonale).

Je n'ai pas d'objection envers un emploi métaphorique de "poéticité" par principe (en gros, ailleurs que dans les copies de lycéens).
J'en profite pour réaffirmer l'utilité de l'acception littérale non ambigue (le moins possible), dans la terminologie.
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par User17706 Sam 10 Jan - 15:47
Sur l'utilité d'une langue technique aux significations correctement spécifiées, en tout cas, je ne risque pas de te contredire. Mais en parlant tout à trac d'un «emploi métaphorique de "poéticité"», ne construis-tu pas son sens tout à fait parallèment à l'un des sens de «poésie» (le sens métaphorique justement)?
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Philomèle Sam 10 Jan - 16:18
PauvreYorick a écrit:Mais en parlant tout à trac d'un «emploi métaphorique de "poéticité"», ne construis-tu pas son sens tout à fait parallèment à l'un des sens de «poésie» (le sens métaphorique justement)?

Si, tout à fait, c'est bien mon propos et je reconnais que je n'ai pas soigné les articulations logiques de mon message précédent.

1° Je comprends que l'on conteste la circulation du mot "poéticité" dans cette acception sentie comme vague (car métaphorique, en fait). À titre personnel, cela ne me met pas la rate au court-bouillon (sauf copie d'élève ou d'étudiant, dans l'exercice de mes fonctions), mais je reconnais mon laxisme par goût en matière de création lexicale, de polysémie et autre équivoque. Que des professeurs s'offusquent par principe de ce qui peut être envisagé comme une dérive lexicale, sur fond d'impropriété, je le conçois.

2° Mais il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Le mot "poéticité", transposition d'un néologisme russe, a un sens établi, dans un cadre théorique précis. Il rend des services (a rendu, peut-être) et ne peut pas être récusé simplement comme "jargon", sauf à pratiquer un anti-intellectualisme à la petite semaine. J'ai cru en déceler des traces dans ce fil, mais ma susceptibilité confine peut-être à une paranoïa qui m'inquiète moi-même.

La question n'est pas de savoir si le mot est dans le dictionnaire ou n'est pas dans le dictionnaire. Tout est vraiment affaire de contexte énonciatif, d'intervenants impliqués, pour discerner si l'usage de "poéticité" est acceptable, tolérable ou non, et pour s'entendre sur son sens conventionnel. (J'ai l'impression d'enfoncer des portes ouvertes.) Dans le post qui ouvre ce fil, je peux faire des hypothèses sur des cas d'emplois acceptables, mais je n'en sais pas assez sur le contexte pour être plus assertive.


Dernière édition par Philomèle le Sam 10 Jan - 17:10, édité 1 fois
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par User17706 Sam 10 Jan - 16:26
OK, c'est parfaitement clair ! Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 2252222100

(Il faudrait que Nom_d'Utilisateur revienne !)
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Philomèle Sam 10 Jan - 16:42
(Merci pour tes questions qui m'ont aidée à construire un peu mieux mon propos.
Premiers paragraphes articulés que je parviens à écrire depuis mercredi. Bref.)
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par User17706 Sam 10 Jan - 16:45
J'ai un homme sage-femme dans mes ancêtres ;·)
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Nita Sam 10 Jan - 16:46
Prétentieux, va ! Razz

Spoiler:

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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par NLM76 Sam 10 Jan - 17:43
Ainsi, pour dire "le caractère poétique d'un texte", on aurait deux expressions hyponymes, dont les significations seraient très différentes l'une de l'autre. D'une part, "la poésie d'un texte", ce serait ce qui le rendrait poétique dans le sens commun, lequel n'est pas défini "scientifiquement". D'autre part, "la poéticité d'un texte", ce serait son caractère poétique au sens de Todorov, c'est-à-dire la façon dont le langage "y met l'accent sur le message pour son propre compte".
Cela signifierait qu'en quelque sorte Todorov utilise la répugnance du français, depuis le classicisme, pour les néologismes, qui exclut des mots comme "poéticité", a priori transparents, de la langue commune, et donc les rend disponibles pour que les savants s'en approprient la définition. Ok. Pourquoi pas.
Mais quand Todorov propose une définition de la fonction poétique du langage, ne prétend-il pas définir ce qui fait qu'un texte poétique est poétique ? Autrement dit, ne prétend-il pas que ce qu'il appellerait "la poéticité d'un texte" au sens savant serait la bonne, juste, vraie et précise de la "poésie d'un texte" au sens commun ?

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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par User17706 Sam 10 Jan - 17:46
(Il restait cette petite question au fond de ma dernière question, même si je n'ai pas insisté, voyant que je me faisais traiter de dialecticien Wink : au fond, si «poéticité» est construit entièrement sur un des sens de «poésie», ne fait-il pas doublon?)
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Philomèle Sam 10 Jan - 19:23
nlm76 a écrit:Ainsi, pour dire "le caractère poétique d'un texte", on aurait deux expressions hyponymes, dont les significations seraient très différentes l'une de l'autre. D'une part, "la poésie d'un texte", ce serait ce qui le rendrait poétique dans le sens commun, lequel n'est pas défini "scientifiquement". D'autre part, "la poéticité d'un texte", ce serait son caractère poétique au sens de Todorov, c'est-à-dire la façon dont le langage "y met l'accent sur le message pour son propre compte".
Cela signifierait qu'en quelque sorte Todorov utilise la répugnance du français, depuis le classicisme, pour les néologismes, qui exclut des mots comme "poéticité", a priori transparents, de la langue commune, et donc les rend disponibles pour que les savants s'en approprient la définition. Ok. Pourquoi pas.
Mais quand Todorov propose une définition de la fonction poétique du langage, ne prétend-il pas définir ce qui fait qu'un texte poétique est poétique ? Autrement dit, ne prétend-il pas que ce qu'il appellerait "la poéticité d'un texte" au sens savant serait la bonne, juste, vraie et précise de la "poésie d'un texte" au sens commun ?

L'identification d'une "fonction poétique du langage", c'est l'oeuvre du linguiste Jakobson. Todorov est celui qui a traduit et introduit la terminologie dans la langue française (sauf erreur ; je suis sûre pour le néologisme littérarité, à vérifier pour poéticité).

Pour répondre à la question, non, on ne saurait rabattre le sens de la "poéticité" selon Jakobson sur le sens du mot "poétique", lorsqu'un texte est dit poétique et que l'on identifie "la poésie d'un texte".

En fait, je ne sais pas bien ce qu'on désigne comme la "poésie d'un texte" : c'est parfois une petite machinerie pathétique, une puissance de connotations et suggestions, l'inscription dans une tradition de clichés littéraires, tout simplement une abondance rhétorique, etc. Avec "la poésie d'un texte", on arrive très vite à un usage métaphorique du nom poésie ou de l'adjectif poétique.

La poéticité de Jakobson permet de réfléchir spécifiquement sur la part gratuite de travail sur le langage dans un texte, qui n'a pas d'autre fin que le plaisir de manipuler le matériau. C'est donc un sens bien circonscrit, plus restreint, aussi.

Qu'il puisse y avoir des points d'intersection entre "caractère poétique" au sens commun et la "poéticité" des théoriciens, certes. Après tout, "la poésie d'un texte" (sens commun) tient effectivement à la recherche d'un surcroît de motivation dans l'usage du signifiant (les mots pris comme matériaux, "aboli bibelot, etc.", comme dans l'art abstrait qui joue avec les formes et les couleurs). Mais je ne crois pas que ce soit ce sens qui soit visé en priorité lorsque l'on dit qu'un "texte est poétique".

Je n'établis d'ailleurs aucune hiérarchie entre l'usage de poéticité (savant) et celui de poétique (ordinaire) : je ne dis pas que l'usage du premier serait seul juste ou serait meilleur. Je dis que poéticité a son utilité. Et que c'est même une notion-clé des études littéraires (pour qui s'intéresse à la théorie).


Le Dialecticien a écrit:(Il restait cette petite question au fond de ma dernière question, même si je n'ai pas insisté, voyant que je me faisais traiter de dialecticien Wink : au fond, si «poéticité» est construit entièrement sur un des sens de «poésie», ne fait-il pas doublon?)

Justement : poésie est un mot polysémique, poétique de même (puisque l'adjectif décline aussi les différents sens de sa base). Une discipline s'est formée, qui a tenté d'établir son champ à l'aide d'une terminologie. "Poéticité" selon Jakobson ne retient qu'un des sens de "poésie" (l'usage du langage qui fait du travail sur la forme sa propre fin) : le mot est aussi univoque que possible dans cet usage de spécialité.

Si l'on refuse aux études littéraires la possibilité d'avoir un métalangage, alors il n'y a pas de discipline savante possible. C'est la possibilité de création et d'usage de ce métalangage dont j'essaie de montrer l'intérêt intellectuel sur ce fil (si l'on ne veut pas que les études littéraires se limitent à faire de l'histoire littéraire).
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par Elyas Sam 10 Jan - 19:31
Je suis admiratif,Philomèle. Tout ce que tu racontes est à la fois beau, fascinant et stimulant. veneration
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par NLM76 Sam 10 Jan - 20:04
Philomèle a écrit:Pour répondre à la question, non, on ne saurait rabattre le sens de la "poéticité" selon Jakobson sur le sens du mot "poétique", lorsqu'un texte est dit poétique et que l'on identifie "la poésie d'un texte".
Je ne comprends rien à cette phrase ! Vous pouvez reformuler ? Smile
Philomèle a écrit:En fait, je ne sais pas bien ce qu'on désigne comme la "poésie d'un texte" : c'est parfois une petite machinerie pathétique, une puissance de connotations et suggestions, l'inscription dans une tradition de clichés littéraires, tout simplement une abondance rhétorique, etc. Avec "la poésie d'un texte", on arrive très vite à un usage métaphorique du nom poésie ou de l'adjectif poétique.
L'expression "la poésie d'un texte" existe ; elle a un sens, difficile à définir. Essayer de saisir et de définir pourquoi on a le sentiment que tel ou tel texte est poétique est souvent l'objet de la réflexion littéraire, me semble-t-il.
Philomèle a écrit:La poéticité de Jakobson permet de réfléchir spécifiquement sur la part gratuite de travail sur le langage dans un texte, qui n'a pas d'autre fin que le plaisir de manipuler le matériau. C'est donc un sens bien circonscrit, plus restreint, aussi.
Donc la poéticité de Jacobson, c'est une poéticité dans un sens restreint, c'est-à-dire la poésie d'un texte dans le sens restreint qu'il donne à poésie.
Philomèle a écrit:Qu'il puisse y avoir des points d'intersection entre "caractère poétique" au sens commun et la "poéticité" des théoriciens, certes. Après tout, "la poésie d'un texte" (sens commun) tient effectivement à la recherche d'un surcroît de motivation dans l'usage du signifiant (les mots pris comme matériaux, "aboli bibelot, etc.", comme dans l'art abstrait qui joue avec les formes et les couleurs). Mais je ne crois pas que ce soit ce sens qui soit visé en priorité lorsque l'on dit qu'un "texte est poétique".
Oui, justement : le sens commun est plus riche que le sens Jacobsonien. En quelque sorte, j'aurais tendance à dénier à quelque savant que ce soit de s'approprier un mot de la langue. Or "poéticité", quoique absent des dictionnaires, fait en quelque sorte partie de la langue. De même, je suppose que "poétiser" est absent des dictionnaires, et je dénierais le droit à un savant de m'interdire de l'utiliser dans le sens intuitif (quelque chose comme "faire le poète" ou "rendre poétique").
Philomèle a écrit:Je n'établis d'ailleurs aucune hiérarchie entre l'usage de poéticité (savant) et celui de poétique (ordinaire) : je ne dis pas que l'usage du premier serait seul juste ou serait meilleur. Je dis que poéticité a son utilité. Et que c'est même une notion-clé des études littéraires (pour qui s'intéresse à la théorie).
Pourquoi pas. Mais quand on l'utilise hors-contexte, je dirais qu'il faudrait préciser "la poéticité au sens de Jacobson" : je me réserve le droit de définir un jour "la poéticité", au sens de NLM76. Ainsi, je revendiquerais le droit du mot "poéticité" à être polysémique.
Philomèle a écrit:Si l'on refuse aux études littéraires la possibilité d'avoir un métalangage, alors il n'y a pas de discipline savante possible. C'est la possibilité de création et d'usage de ce métalangage dont j'essaie de montrer l'intérêt intellectuel sur ce fil (si l'on ne veut pas que les études littéraires se limitent à faire de l'histoire littéraire).
C'est là que nous nous opposons. Le prétendu "métalangage" est à mon avis une fantasmagorie.

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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Philomèle Sam 10 Jan - 20:42
nlm76 a écrit:
Philomèle a écrit:Pour répondre à la question, non, on ne saurait rabattre le sens de la "poéticité" selon Jakobson sur le sens du mot "poétique", lorsqu'un texte est dit poétique et que l'on identifie "la poésie d'un texte".
Je ne comprends rien à cette phrase ! Vous pouvez reformuler ? Smile

Le mot savant "poéticité" (au sens de Jakobson) n'a pas le sens de "poésie" dans l'occurrence "poésie d'un texte" au sens commun.

nlm76 a écrit:
Philomèle a écrit:En fait, je ne sais pas bien ce qu'on désigne comme la "poésie d'un texte" : c'est parfois une petite machinerie pathétique, une puissance de connotations et suggestions, l'inscription dans une tradition de clichés littéraires, tout simplement une abondance rhétorique, etc. Avec "la poésie d'un texte", on arrive très vite à un usage métaphorique du nom poésie ou de l'adjectif poétique.
L'expression "la poésie d'un texte" existe ; elle a un sens, difficile à définir. Essayer de saisir et de définir pourquoi on a le sentiment que tel ou tel texte est poétique est souvent l'objet de la réflexion littéraire, me semble-t-il.

On peut aussi choisir de ne pas travailler sur l'origine d'un sentiment (ce qui relèverait plutôt de la psychologie), et choisir d'établir une discipline savante, maniant des données objectives. La coexistence d'une critique mondaine et d'une théorie savante n'est toutefois pas un problème. Ce n'est pas l'un ou l'autre. Il y a de la place pour les différents discours.

nlm76 a écrit:
Philomèle a écrit:La poéticité de Jakobson permet de réfléchir spécifiquement sur la part gratuite de travail sur le langage dans un texte, qui n'a pas d'autre fin que le plaisir de manipuler le matériau. C'est donc un sens bien circonscrit, plus restreint, aussi.
Donc la poéticité de Jacobson, c'est une poéticité dans un sens restreint, c'est-à-dire la poésie d'un texte dans le sens restreint qu'il donne à poésie.
Philomèle a écrit:Qu'il puisse y avoir des points d'intersection entre "caractère poétique" au sens commun et la "poéticité" des théoriciens, certes. Après tout, "la poésie d'un texte" (sens commun) tient effectivement à la recherche d'un surcroît de motivation dans l'usage du signifiant (les mots pris comme matériaux, "aboli bibelot, etc.", comme dans l'art abstrait qui joue avec les formes et les couleurs). Mais je ne crois pas que ce soit ce sens qui soit visé en priorité lorsque l'on dit qu'un "texte est poétique".
Oui, justement : le sens commun est plus riche que le sens Jacobsonien. En quelque sorte, j'aurais tendance à dénier à quelque savant que ce soit de s'approprier un mot de la langue. Or "poéticité", quoique absent des dictionnaires, fait en quelque sorte partie de la langue. De même, je suppose que "poétiser" est absent des dictionnaires, et je dénierais le droit à un savant de m'interdire de l'utiliser dans le sens intuitif (quelque chose comme "faire le poète" ou "rendre poétique").
Philomèle a écrit:Je n'établis d'ailleurs aucune hiérarchie entre l'usage de poéticité (savant) et celui de poétique (ordinaire) : je ne dis pas que l'usage du premier serait seul juste ou serait meilleur. Je dis que poéticité a son utilité. Et que c'est même une notion-clé des études littéraires (pour qui s'intéresse à la théorie).
Pourquoi pas. Mais quand on l'utilise hors-contexte, je dirais qu'il faudrait préciser "la poéticité au sens de Jacobson" : je me réserve le droit de définir un jour "la poéticité", au sens de NLM76. Ainsi, je revendiquerais le droit du mot "poéticité" à être polysémique.
Philomèle a écrit:Si l'on refuse aux études littéraires la possibilité d'avoir un métalangage, alors il n'y a pas de discipline savante possible. C'est la possibilité de création et d'usage de ce métalangage dont j'essaie de montrer l'intérêt intellectuel sur ce fil (si l'on ne veut pas que les études littéraires se limitent à faire de l'histoire littéraire).
C'est là que nous nous opposons. Le prétendu "métalangage" est à mon avis une fantasmagorie.

Ce métalangage n'est pas prétendu, c'est un fait. Ces mots existent, un groupe de gens les utilise et s'entend sur leur sens et leur usage.

On l'a renouvelé avec la théorie littéraire, mais il existait auparavant depuis l'Antiquité une terminologie liée au fait littéraire : la rhétorique (envisagée dans ses cinq parties, pas seulement les figures).

Pour approcher des notions complexes, fuyantes ("riches", en effet), j'aime bien prendre appui sur des notions univoques. Mais je ne considère pas que les études littéraires doivent être exclusivement poétiques : grand bien vous fasse si vous lisez les textes autrement et si vous maniez une langue classique en faisant des dévotions à Malherbe (je vous fait un procès d'intention et bats déjà ma coulpe).
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User17706
Bon génie

Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par User17706 Sam 10 Jan - 21:06
D'accord, Philomèle. Je pense que c'est ma faute s'il restait de l'ambiguïté (mon «parallèlement» qui était ambigu).
Parménide
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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par Parménide Sam 10 Jan - 21:46
nlm76 a écrit:
Parménide a écrit:On pourrait distinguer la poésie du texte de sa poéticité. La première consiste dans le caractère esthétique. La deuxième c'est plutôt le caractère de sa puissance esthétique, ou de son caractère esthétique en puissance, qui fait que la "traduction" et l'interprétation sont, au fond, un travail infini.
gné ?
@ sansara : ça m'apprendra à ne pas lire les messages de mes petits camarades... Mon message est non avenu.

Je n'ai peut être pas été très clair : j'entendais puissance au sens d'Aristote. C'est à dire une capacité. Ici la "poéticité" serait ce en quoi le texte a une capacité à nous émouvoir artistiquement ou esthétiquement. Autrement dit la poéticité serait le génie de l'auteur.

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"Les paroles essentielles sont des actions qui se produisent en ces instants décisifs où l'éclair d'une illumination splendide traverse la totalité d'un monde", Martin Heidegger, "Schelling", (semestre d'été 1936)

"Et d'une brûlure d'ail naitra peut-être un soir l'étincelle du génie", Saint-John Perse, "Sécheresse" (1974)

"Il avait dit cela d'un air fatigué et royal", Franz-Olivier Giesbert, "Le vieil homme et la mort" (1996)

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Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ? - Page 2 Empty Re: Peut-on parler de la "poéticité" d'un texte ?

par NLM76 Sam 10 Jan - 22:23
Philomèle a écrit:On peut aussi choisir de ne pas travailler sur l'origine d'un sentiment (ce qui relèverait plutôt de la psychologie), et choisir d'établir une discipline savante, maniant des données objectives. La coexistence d'une critique mondaine et d'une théorie savante n'est toutefois pas un problème. Ce n'est pas l'un ou l'autre. Il y a de la place pour les différents discours.
C'est là-dessus que nous ne sommes pas d'accord. L'étude des effets produits par un texte relève certes en partie de la psychologie, de la philosophie, de la linguistique, de la musique, etc. Cela n'en fait pas quelque chose de mondain et d'éloigné de la science. Il y a certes de la place pour différents discours, mais je voudrais rappeler celui que je défends est un discours véritablement scientifique. Je crois en outre que la prétention à l'objectivité en ce domaine est un leurre, dans la mesure où cette objectivité voudrait se débarrasser du sujet. Ce n'est pas possible : la littérature est un objet certes, mais un objet humain ; elle est littérature parce qu'elle va de l'homme à l'homme, et l'étude scientifique de la littérature est l'étude scientifique de ce passage.
Philomèle a écrit:Qu'il puisse y avoir des points d'intersection entre "caractère poétique" au sens commun et la "poéticité" des théoriciens, certes. Après tout, "la poésie d'un texte" (sens commun) tient effectivement à la recherche d'un surcroît de motivation dans l'usage du signifiant (les mots pris comme matériaux, "aboli bibelot, etc.", comme dans l'art abstrait qui joue avec les formes et les couleurs). Mais je ne crois pas que ce soit ce sens qui soit visé en priorité lorsque l'on dit qu'un "texte est poétique".
D'accord. Dans ce cas, ce qui me semble intéressant, c'est de chercher dans quelle mesure la poésie du texte dans le sens commun relève de la poéticité jacobsonienne, quelles sont les autres raisons qui font dire que le texte est poétique, et quel est le lien entre cette poéticité jacobsonienne et la poéticité du sens commun. Autrement dit, dans une logique sémasiologique (qui développe les sens d'un mot), il est intéressant de s'interroger sur les liens entre des caractéristiques qui pourraient paraître hétérogènes et se demander pourquoi notre langue les couvre du chapeau d'un même mot.
Philomèle a écrit:Ce métalangage n'est pas prétendu, c'est un fait. Ces mots existent, un groupe de gens les utilise et s'entend sur leur sens et leur usage.
On l'a renouvelé avec la théorie littéraire, mais il existait auparavant depuis l'Antiquité une terminologie liée au fait littéraire : la rhétorique (envisagée dans ses cinq parties, pas seulement les figures).
Pour approcher des notions complexes, fuyantes ("riches", en effet), j'aime bien prendre appui sur des notions univoques. Mais je ne considère pas que les études littéraires doivent être exclusivement poétiques : grand bien vous fasse si vous lisez les textes autrement et si vous maniez une langue classique en faisant des dévotions à Malherbe (je vous fait un procès d'intention et bats déjà ma coulpe).
Qu'entendez-vous par métalangage ? Faites-vous une distinction entre métalangue, métalangage et fonction métalinguistique du langage? Je dis qu'il le métalangage est une fantasmagorie dans la mesure où certains imaginent qu'il y aurait une langue (en l'occurrence, cela s'appelle un jargon) technique pour parler de la langue qui serait parfaitement séparée de la langue, et ce surtout quand ce jargon concerne la partie métalittéraire de la langue. Je dis que c'est une fantasmagorie au sens où la partie métalinguistique de la langue fait partie de la langue. En particulier, chercher à s'appuyer sur des notions univoques me paraît tout ce qu'il y a de plus louable — même si j'ai tendance à croire qu'il s'agit d'un rêve illusoire, ce rêve suscite à la fois mon sourire et ma sympathie : si c'est un rêve, c'est un joli rêve, qui peut même être utile, puisque la vie est un songe ! — il me paraît vain de vouloir rendre les mots de la langue univoques (notion univoque et mot univoque, ce n'est pas la même chose). Voyez l'inénarrable destin de la métonymie et de la synecdoque Smile.

@ Parménide : merci d'avoir précisé. J'ai compris maintenant.

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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
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