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La déscolarisation volontaire  Empty La déscolarisation volontaire

par ameneul Sam 09 Mai 2015, 19:46
Quelques énergumènes dans un bout de France luttent contre l'Education Nationale. Ils appellent parents et jeunes à la déscolarisation volontaire, pour inventer une autre forme d'école. Leur expérience de lutte, comme leurs idées, sont je trouve, intéressantes.

Entretien d'une heure environ : http://www.agoravox.tv/actualites/citoyennete/article/descolarisation-de-la-societe-48543

Une présentation de leurs idées courte et comique : https://www.youtube.com/watch?v=iKdnaWcQd-U

On peut aussi visiter le site. Parfois je trouve certains points assez cons, trop peu nuancés... Mais l'ensemble reste stimulant.

http://descolarisation.org/
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par senzu Mar 12 Mai 2015, 22:50
Bonjour à tous, je suis Sylvain du site Descolarisation.org. Oui, notre projet est clairement la destruction de l'Éducation Nationale par le fait de faire sortir un à un les enfants et d'inviter chaque prof à démissionner.

En parallèle nous sommes pour l'établissement d'une skholè libre et égalitaire dans l'espace public. Sachant qu'il n'y a pas d'espace public digne de ce nom, ceci est également à conquérir. Nous employons le mot originel de Skholè pour débarrasser de sa souillure le mot école tel qu'il existe aujourd'hui. La skholè désigne le temps pour soi, le loisir lettré, le repos, le jeu, le fait de prendre soin de soi, de se cultiver, d'apprendre des choses librement... La skholè s'oppose par définition au temps-contraint. L'école d'aujourd'hui fonctionne à l'envers de ce qu'est normalement la shkolè. Mais tout est à l'envers : nous ne sommes pas non plus en démocratie (voir ce sujet également sur notre site et ailleurs sur le web). Ni en République puisque tout est privé, soit par la propriété privée soit par la possession de l'oligarchie politique.

Chacun sait que notre régime politique et économique ne tient pas (on flingue, on stérilise tout en permanence) et que le régime d'éducation est le régime de propagande (la plus grosse part en tout cas) au service du régime politique.

Je vous invite à lire sur Descolarisation.org le pamphlet qui s'intitule Géométrie Scolaire où je parle surtout de la relation Prof/Élève en 5 parties : I : Les profs sont des agents ; II : les profs sont "méchants" (en théorie) ; III: L'Égo très très spécial des profs ; IV : des prisons. La peur. ; V (à venir) : De l'impossibilité du Souci de soi en situation scolaire.

Je vous invite à lire notre bibliographie, qui contient les ouvrages les plus offensifs contre l'Éducation Nationale et contre le professorat écrits depuis 1 siècle. Mais allez doucement (c'est pour cela que nous interdisons notre site aux profs, à la fois par humour mais aussi pour vous protéger - c'est seulement une invitation à aller doucement en fait).

Comment peut-on espérer continuer avec ce régime d'éducation vu les résultats : une société composée d'êtres qui ne prennent pas soin ni d'eux, ni des autres, ni de leur environnement, pourris par l'idéologie du travail, de l'argent, de la consommation, de la compétition, de la hiérarchie etc. ?

L'école de l'Éducation Nationale forge en continue depuis des décennies des individus totalement hétéronomes dans tous les domaines de l'existence à commencer par les mécanismes d'accès à la connaissance, des êtres totalement dépendants de l'État et d'une quantité de services et objets, des apathiques politiques, des électeurs, consommateurs, qui s'intéressent uniquement à leur chose à eux (des idiotès comme ils les appelaient dans l'Athènes antique. Des idiots, dirait-on aujourd'hui.)

Pendant ce temps, on continue de nous raconter que tout ça c'est "la démocratie", que tout ça, c'est "liberté égalité fraternité", que tout ça c'est "pays libre", que tout ça, c'est "apprentissage de l'esprit critique" ... Waou, y'a qu'à regarder dehors dans une ville pour contempler les résultats de l'E.N. Mais en même temps c'est normal (lire ma géométrie scolaire). Cette institution tord, aliène, corrompt les individus un par un...

Mais ne pourrait-on pas discuter entre Profs et Citoyens ? Je trouve totalement injuste votre fonctionnement en cellule hermétique protégée par la Police dans laquelle personne (ou presque) ne peut rentrer. De rare personne rentrent, avec le tampon du chef d'établissement ou du ministère... des banquiers, les thuriféraires des nouvelles théories libérales, l'entreprise TOTAL, et quelques artistes ou intervenants triés sur le volet, pas trop ou pas du tout subversif, amis de quelques profs. Comment établir ce dialogue si vous restez entre vous ? L'école (la skholè) doit être publique ! non appartenir à des agents de l'État, État lui-même actuellement au service de la mafia et de la ploutocratie.
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User5899
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par User5899 Mer 13 Mai 2015, 03:13
Mon frère a déscolarisé sa fille de la moyenne section de maternelle. En cause :
-photographie de mots courants ---> la gamine essaie sans arrêt de les placer sur n'importe quoi qui a une vague ressemblance et ne supporte pas qu'on lui dise que ce n'est pas ça mais qu'elle ale temps ;
-parents qui poussent l'instit pour que la lecture soit encore plus abordée ; cela tourne à la recherche de performance ;
-évaluationnite comportementale aiguë avec livret de compétences trimestriel aussi long qu'abscons.
Sylvain de Saint-Sylvain
Sylvain de Saint-Sylvain
Grand sage

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par Sylvain de Saint-Sylvain Mer 13 Mai 2015, 05:53
Mais il est où ce smiley qui mange du pop-corn ? bounce
senzu
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par senzu Mer 13 Mai 2015, 08:08
Je colle la bibliographie ici (à diffuser partout, et surtout prendre le temps de se poser pour lire ) :

Une société sans école, Ivan Illich

Le maître ignorant, Jacques Rancière

Les enfants d’abord, Christiane Rochefort

Pour décoloniser l’enfant, Gérard Mendel

Avertissement aux écoliers et aux lycéens, Raoul Vaneigem

L’école contre la vie, Edmond Gilliard

Comme des invitées de marque, Léandre Bergeron

Et je ne suis jamais allé à l’école, André Stern

Mort de l’école, Everett Reimer

Libres enfants de SummerHill, A.S. Neill

L’école de Jules Ferry, un mythe qui a la vie dure, Jean Foucambert

Insoumission à l’école obligatoire, Catherine Baker

Les cahiers au feu, Catherine Baker

Apprendre sans l’école, John Holt

Les apprentissages autonomes, John Holt

La fin de l’éducation, commencements, Jean-Pierre Lepri

De l’éducation, Jiddu Krishnamurti

L'école mutuelle : Une pédagogie trop efficace ? , Anne Querrien

C'est pour ton bien, Alice Miller

La véritable nature de l'enfant, Jan Hunt

Les méfaits de l’Instruction publique - aggravés d’une Suite des méfaits, Denis de Rougemont

La fabrique de l'impuissance : Tome 2, L'école entre domination et émancipation, Charlotte Nordmann

La fabrique scolaire de l’histoire, Laurence de Cock et Emmanuelle Picard

L'herméneutique du sujet, Michel Foucault

L’enfant et la raison d’État, Philippe Meyer

Pour l’abolition de l’enfance, Shulamith Firestone

Soumission à l’autorité, Stanley Milgram

Le Pédagogue n'aime pas les enfants, Henri Roorda

Les murs de l’école, Jeannette Colombel

Petit Arbre, Forrest Carter

Homo Academicus, Pierre Bourdieu
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Demi-dieu

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par Pseudo Mer 13 Mai 2015, 08:28
senzu a écrit:Bonjour à tous, je suis Sylvain du site Descolarisation.org. Oui, notre projet est clairement la destruction de l'Éducation Nationale par le fait de faire sortir un à un les enfants et d'inviter chaque prof à démissionner.

.

Je vais aller voir vos propositions pour les enfants, mais concernant les milliers de profs invités à démissionner, vous mettez en place une cellule de reclassement ou vous les invitez à aller vivre d'amour et d'eau fraîche sous les ponts ? Avec la belle saison qui arrive, ça peut être sympa.

_________________
"Il faut encore avoir du chaos en soi pour pouvoir enfanter une étoile qui danse" Nietzsche
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par senzu Mer 13 Mai 2015, 08:40
Nous n'avons pas spécifiquement de "propositions pour les enfants" puisque nous sommes plutôt pour "l’abolition de l'enfance" à la manière de Shulamith Firestone (voir son texte). Nous sommes pour une skholè libre et égalitaire dans un espace public refondé, qui s'ouvre pour tous : jeunes et moins jeunes. Nous sommes aussi adeptes de "l'école mutuelle" : les plus jeunes étant rapidement en situation d'enseigner aux autres.

Pour les profs démissionnaires, nous disons la même chose que pour chacun qui arrêteraient de "travailler" dans ce système : nous invitons chacun à se tourner vers la permaculture, l'autoconstruction et la reconquête de l'entraide, de la philia, de la polis. La destruction du régime politique permettra aussi à chacun de s'employer lui-même dans l'espace public et les communaux. De manière générale, l'essentiel du travail réalisé depuis des décennies (je dirais plus de 60%) est nocif la plupart du temps : je pense que chacun devrait aller planter des arbres et "marcher dans la forêt par amour pour elle" plutôt que de continuer de tout détruire. Chaque jour qui passe, les hommes abattent une somme de travail qui conduit globalement à la destruction de la vie. Je pense qu'il faudrait parfois simplement s'arrêter. C'est l'école de l'E.N., surtout, qui nous a mis à chacun dans le cerveau cette idéologie du travail et de la lutte pour la survie.

Thoreau a écrit:« Si un homme marche dans la forêt par amour pour elle pendant la moitié du jour, il risque fort d'être considéré comme un tire-au-flanc ; mais s'il passe toute sa journée à spéculer, à raser cette forêt et à rendre la terre chauve avant l'heure, on le tiendra pour un citoyen industrieux et entreprenant. »


Dernière édition par senzu le Mer 13 Mai 2015, 08:48, édité 1 fois
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par llaima Mer 13 Mai 2015, 08:47
Je partage une partie de la vision sur la société qu'on "les descolarisateurs" et je trouve le regard critique porté sur l'institution tout à fait intéressant. Par contre je pense que la théorie sur laquelle repose ce mouvement -l'école actuelle est la base de la société capitaliste et c'est par cette institution qu'il se maintient alors qu'il devrait s'effondrer quasi-spontanément- est fausse : Aujourd'hui des millions d'enfants n'ont pas accès à l'enseignement et cela loin de gêner les capitalistes, ils exploitent la situation pour trouver une main d'oeuvre qu'il peut réduire à l'esclavage! Les serviteurs du système capitaliste, les politiciens  savent aussi exploiter l’ignorance des populations pour diviser les gens voir pour les faire s’entre-tuer. Alors oui l'école n'a pas été inventée et développée à la base pour développer l’intelligence et cultiver l'esprit critique de nos enfants : Elle a été faite pour que dans une société capitaliste moderne la main d'oeuvre  aille un niveau de connaissance suffisante pour participer à la production. Malgré tout ceci a permis aussi d'élever le niveau d'instruction général ce qui est quand même positif : On voit aujourd'hui les dégâts de la remise en cause partielle de ces acquis avec le vidage des contenus d'enseignement et la l'effondrement du niveau de nos élèves! C'est pour ça que je trouve la situation assez terrible : être obligé d'aller à l'école (ce qui peut souvent ne pas être rigolo en effet) et finalement ne même pas acquérir une solide instruction. Je pense que c'est cette situation qui peut faire que la descolatisation aille un certain succès même si les bases idéologiques "libertaires" qu'il y a derrière ne seront partagées que par une minorité des "descolarisateurs"! Idées que je trouve en partie fausse : Non le capitalisme "libéral" n'a pas comme principal pilier l'école et les enseignants ne sont pas ses serviteurs les plus importants,on voit comment d'ailleurs "le système" nous paye, si on était les gardiens de ce dernier, je crois qu'on nous bichonnerait comme les traders et les banquiers... Ce qui n'est vraiment pas le cas!

Le capitalisme sera plus dur à renverser qu'en retirant juste ses gamins de l'école! En plus même dans une société débarrassée du capitalisme je pense que même sous une autre forme il faudra avoir   une organisation professionnalisée de l'instruction avec des enseignants pour effectuer ce travail, d'ailleurs on a du mal à voir l'organisation de vos "Skholés". Je crois avoir compris que c'est basé sur le volontariat. Je vois très bien ça pour des adultes (l'université fonctionne bien comme ça) mais pour des enfants, il ne faut pas oublier qu'on ne peut pas miser seulement -pour que celui-ci devienne un adulte libre- sur la bonne volonté et qu'il faut passer par une phase d'éducation qui passe malgré tout toujours par certaines frustrations, obligations ou choses déplaisantes car non naturelles. Je ne veux pas dire qu'il faut faire une éducation militaire mais que laisser l'éducation des enfants à leur seul volontariat me semble pour le coup un peu irréaliste.

Je trouve donc les critiques apportées parfois utiles, la vision intéressantes mais vraiment la vision sur l'éducation nationale vraiment décalée par rapport à la réalité et les alternatives proposées pas toujours réalistes (ou au moins à préciser). Après que les parents n'aille plus envie de mettre leurs enfants à l'école quand la violence y règne (violence qui ne vient pas des profs d'ailleurs, au moins aujourd'hui), quand elle est inefficace, je le comprends bien et ne leur jetterai pas la pierre!!!!! Par contre à mon modeste niveau d'enseignant plutôt que de partir de l'EN j'essaye de faire que les élèves acquièrent les savoirs qui leur permettront de devenir des esprits éclairés et libre par la connaissance
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par Pseudo Mer 13 Mai 2015, 08:57
senzu a écrit:Nous n'avons pas spécifiquement de "propositions pour les enfants" puisque nous sommes plutôt pour "l’abolition de l'enfance" à la manière de Shulamith Firestone (voir son texte). Nous sommes pour une skholè libre et égalitaire dans un espace public refondé, qui s'ouvre pour tous : jeunes et moins jeunes. Nous sommes aussi adeptes de "l'école mutuelle" : les plus jeunes étant rapidement en situation d'enseigner aux autres.

Pour les profs démissionnaires, nous disons la même chose que pour chacun qui arrêteraient de "travailler" dans ce système : nous invitons chacun à se tourner vers la permaculture, l'autoconstruction et la reconquête de l'entraide, de la philia, de la polis. La destruction du régime politique permettra aussi à chacun de s'employer lui-même dans l'espace public et les communaux. De manière générale, l'essentiel du travail réalisé depuis des décennies (je dirais plus de 60%) est nocif la plupart du temps : je pense que chacun devrait aller planter des arbres et "marcher dans la forêt par amour pour elle" plutôt que de continuer de tout détruire. Chaque jour qui passe, les hommes abattent une somme de travail qui conduit globalement à la destruction de la vie. Je pense qu'il faudrait parfois simplement s'arrêter. C'est l'école de l'E.N., surtout, qui nous a mis à chacun dans le cerveau cette idéologie du travail et de la lutte pour la survie.

Thoreau a écrit:« Si un homme marche dans la forêt par amour pour elle pendant la moitié du jour, il risque fort d'être considéré comme un tire-au-flanc ; mais s'il passe toute sa journée à spéculer, à raser cette forêt et à rendre la terre chauve avant l'heure, on le tiendra pour un citoyen industrieux et entreprenant. »

Oh, je n'ai aucune illusion sur le travail et sa valeur. Si 60% est nocif, 90% est inutile et occupe les gens à des conneries. J'en sais quelque chose... En revanche, si la totalité des gens vont en forêt en même temps, il n'en restera plus grand chose en quelques jours.
Bon, je vais quand même garder mon salaire pour payer mon loyer et le reste et développer sereinement ma propre solution à ce vide stupide qu'est mon taf (et je ne plaisante pas, ce n'est pas de l'ironie) plutôt que de démissionner et aller construire une cabane en forêt. Je ne pense pas qu'une solution radicale me convienne, me retrouver dans la merde ne me dispose que très rarement à l’entraide et à la philosophie sur le bonheur d'être.
J'imagine que toi-même tu as mis en pratique les idéaux que tu professes. Tu veux bien nous expliquer comment tu es arrivé à aller marcher en forêt au lieu de travailler ? Ca nous donnerait peut-être des idées.

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par Reine Margot Mer 13 Mai 2015, 09:36
Je n'ai pas été tout lire mais je reste sceptique. L'école républicaine telle qu'elle existe a certes bien des défauts mais elle a permis l'alphabétisation et l'instruction de millions d'enfants qui à l'origine ne parlaient même pas le français.
Tout est fait par les gouvernements successifs pour faire exploser le système et inciter ceux qui le peuvent à mettre leurs enfants dans le privé (ce que fait apparemment la ministre elle-même), d'où la floraison d'initiatives privées au motif que "ça ne marche pas". Je crains un peu le truc à la Anne Coffinier.

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par the educator Mer 13 Mai 2015, 09:57
Le capitalisme sera plus dur à renverser qu'en retirant juste ses gamins de l'école!
Pour beaucoup de ces mouvements, il n'est pas question de renverser quoi que ce soit, mais de vivre sans.
Quand senzu parle de l'école comme ciment de la société capitaliste, il n'évoque pas seulement les ignorants qui consomment, mais aussi les produits "finis" de l'école qui se construisent naturellement dans des positions de domination, individualistes, pulsionnelles, incapables de penser au collectif ni de vivre avec les autres.
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par senzu Mer 13 Mai 2015, 12:16
Parfois quand je discute avec des enseignants (si j'y arrive, dans la rue quoi, puisqu'on ne peut pas rentrer dans les établissements), y'a une réponse qui est de dire : "mais non l'école n'est pas responsable de tous les maux de la société, la télévision par exemple fait de gros dégâts"...

Je dois dire que je ne comprends pas trop cette manière de se défiler et de faire comme si le régime d'éducation d'une société était secondaire. Je pense qu'il n'y a rien de plus premier. Le régime d'éducation, le type d'éducation détermine le type d'hommes et de femmes (leur éthos) qui vivront dans une société donnée. Nous avons une société composée d'hommes et de femmes qui ont un certain éthos, un éthos particulier et un éthos relativement identique, car calibré et conforme. Le trait majeur de cet éthos concerne le réflexe d'hétéronomie : "je délègue" ou encore "je consomme", ce qui est un peu synonyme, "je n'établis jamais mes propres règles ou ne participe jamais à l'établissement des règles, il s'agit toujours de règles définies par d'autres" : l'hétéronomie. Quelle est la toute première chose qu'on apprend quand on commence à aller à l'école : que pour apprendre, il y a besoin de tout ça, qu'il y a besoin de tout ce fatum, d'un enseignant, d'une structure, d'une institution, et de mille rites et encadrements. On apprend qu'on doit se développer dans une masse. La ploutocratie requiert une société de masse et c'est à l'école qu'on y est pris dedans.

Voilà, dès le début de sa vie chacun apprend qu'il n'est pas autonome pour aller lui-même au devant de ses apprentissages, au devant de ce qu'il désire.

Ivan Illich a écrit:"L'école enseigne le besoin d'être enseigné" Ivan Illich.

Comment l'école peut-elle une seule seconde ensuite dire qu'elle s'essaie à rendre les gens autonomes puisque par définition elle fait exactement le contraire : à l'aube de nos vies, elle met en nous la mauvaise graine de l'hétéronomie. Ensuite, l'école nous enseigne à être hétéronome pour tous les autres aspects de l'existence. Et d'ailleurs, très rapidement déboule l'hétéronomie politique. Le sujet des élections est parfois abordé dès le CP ; on profite bien souvent que le matériel électoral soit installé dans l'école pour montrer tout ça aux élèves et commencer de leur expliquer en quoi donner son pouvoir à quelqu'un qui aura donc le pouvoir à votre place, ça veut dire avoir le pouvoir et être en démocratie !!!!.

Toujours concernant l'éthos élaboré par l'école. Celle-ci enseigne la compétition et la hiérarchie, le fait qu'il vaut mieux se conformer, obéir pour que le "maître" nous gratifie, nous élève, nous donne une promotion (et ça, la plupart le conserve ensuite toute leur vie). En corollaire de l’apprentissage de la compétition, l'école apprend rapidement la flatterie, le mensonge et la tricherie (pour s'en tirer avec le minimum de frais). L'école apprend donc rapidement à S'ADAPTER au prix de se nier soi-même et les autres. L'école nous apprend tout bêtement qu'on est en compétition avec les autres pour résoudre un problème, non qu'il soit plus intelligent de chercher un cerveau collectif. Je m'arrête là mais la liste est longue concernant l'éthos produit par l'école. Et cette école de Jules Ferry a plus de 130 ans maintenant. Pourquoi ne fait-on jamais le bilan ? Y'a juste à regarder dehors, y'a juste à vivre dans cette société pour connaître ses résultats. Elle ne forme pas des citoyens et n'en a jamais formés, ce n'est pas son but depuis le départ.
Jules Ferry a écrit:
"Avec ces nouvelles lois scolaires, nous allons enfin clore l'ère des Révolutions."
...
Un (vrai) citoyen vote lui-même ses propres lois, participe au pouvoir politique (là, les gens sont à des années-lumières de la politique). Un citoyen est forcément constituant (il pense à sa constitution et à se protéger des abus de pouvoir). Un citoyen est autonome individuellement et collectivement. Un citoyen sait se débrouiller pour construire sa maison, prendre soin de la terre, faire pousser de quoi manger. Un citoyen s'intéresse et participe à toutes les choses de l'homme adulte : la connaissance, la sécurité, l'eau, l'alimentation, l'habitat, etc. Nous n'avons pas ça du tout ! Nous avons des apathiques politiques, des êtres privatisés à tous les niveaux, des êtres prolétarisés au sens large (automatisés de plus en plus), domestiqués, qui ne sont pas eux-mêmes, qui cherchent "à tirer leur épingle du jeu" au lieu de co-construire, qui cherchent à l'emporter sur les autres (comme à l'école !), des êtes conformes qui disent ce qu'il convient de dire, qui font ce qu'ils convient de faire au moment où on leur dit de le faire. Des êtres déconnectés du cosmos, des vrais saisons du cosmos et branchés sur un calendrier frauduleux, avec des rythmes et rites imposés, au service de l'idéologie du travail. Des êtres dépendants à l'argent, totalement (et obsédés par l'argent). Des êtres qui vivent dans une accélération sociale atroce, qui ne prennent pas le temps de la contemplation, qui ne savent pas vivre simplement, qui ne savent pas ce qui est bon pour eux (soumis perpétuellement à la pub). Des êtres au final en mauvaise santé sur tous les plans. Des êtres qui ne savent pas "parler" (au sens d'exprimer ses opinions, d'avoir le courage de dire le fond de sa pensée, de forger une pensée propre et de se confronter aux autres dans des polémoï démocratiques). Des êtres qui sont dégoûtés de la lecture pour la majorité. Des êtres incapables d'avoir une existence publique, résultat seul les personnalités les plus fortes et souvent les plus dominatrices trouvent le courage de s'affirmer publiquement (ça donne une société du spectacle et les éternels gourous à la télé et sur internet). Les gens majoritairement se taisent, ont "peur d'être mal vu", peur d'être rejeté par leurs proches s'ils se mettaient à dire ce qu'il pense vraiment, mais avec parfois des irruptions explosives de violence (c'est ça vivre avec des être civilisés ?!).

Et l'école n'y serait pour rien ??! Moi, je pense que c'est la responsable principale de ce désastre social et environnemental. C'est à l'école qu'on passe tous entre 13 ans et 20 ans, plusieurs heures par jour au moment de notre vie où on est les plus malléables, les plus fragiles. C'est à l'école, qu'on perd le contact avec son âme, qu'on se force à obéir contre soi-même. C'est l'école qui nous perd. C'est l'école qui nous met dans le crâne tout un tas d'horreurs qui amène l'éthos que je décris dans ce post. Et l'école est l'outil de reproduction sociale. Tant qu'on n'arrêtera pas avec l'école de l'Éducation Nationale, cette société atroce demeurera inchangée.
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alainmailing
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par alainmailing Mer 13 Mai 2015, 18:10
Pseudo a écrit:
Bon, je vais quand même garder mon salaire pour payer mon loyer et le reste et développer sereinement ma propre solution à ce vide stupide qu'est mon taf (et je ne plaisante pas, ce n'est pas de l'ironie) plutôt que de démissionner et aller construire une cabane en forêt. Je ne pense pas qu'une solution radicale me convienne, me retrouver dans la merde ne me dispose que très rarement à l’entraide et à la philosophie sur le bonheur d'être.
J'imagine que toi-même tu as mis en pratique les idéaux que tu professes. Tu veux bien nous expliquer comment tu es arrivé à aller marcher en forêt au lieu de travailler ? Ca nous donnerait peut-être des idées.

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par senzu Mer 13 Mai 2015, 21:57
Léon Tolstoï a écrit: Il est absolument certain qu'il est difficile à un homme de notre temps de ne pas participer de quelque façon à la violence de gouvernements.

Mais, que tous les hommes ne puissent pas aujourd'hui organiser leur vie de manière à ne plus être, dans aucun cas, les collaborateurs des gouvernements, cela ne prouve pas qu'ils ne puissent s'affranchir de plus en plus de la violence.

Tout homme n'a pas la force de refuser le service militaire (il y a cependant des hommes qui le font) mais tout homme peut ne pas choisir les carrières de l'armée, de la police, de la magistrature ou des finances et peut préférer à un emploi public grassement rétribué un métier indépendant et moins rémunérateur.

Tout homme n'a pas la force de renoncer à la propriété de la terre (il y a cependant des hommes qui le font) mais tout homme peut, comprenant qu'ils sont criminels, restreindre volontairement ses droits.

Tout homme ne peut pas faire abandon du capital qu'il possède (il y a cependant des hommes qui le font) et renoncer aux droits de propriété que la violence lui assure sur certains objets, mais tout homme peut diminuer ses besoins et s'accorder de moins en moins les jouissances qui excitent l'envie des autres hommes.

Tout homme ne peut pas refuser de recevoir un traitement de l'État (il y a cependant des hommes qui aiment mieux souffrir de la faim que de remplir quelque malhonnête fonction publique), mais tout homme peut préférer un emploi modeste à un gros bénéfice, afin d'avoir moins de part à la violence.

Tout homme ne peut pas refuser de suivre les leçons d'une école de l'État (il y a cependant des hommes qui le font), mais tout homme peut préférer une école particulière à une école d'État. Tout homme peut faire usage de moins en moins des objets imposés et des services dirigés par l'État.

Entre l'ordre de choses actuel, fondé sur la grossière violence, et l'idéal de la vie sociale où les hommes seront rapprochés par leur consentement raisonnable, où les coutumes seules maintiendront la cohésion, il existe d'innombrables degrés que l'humanité toujours en marche parcourt successivement. Mais les hommes ne se rapprochent de cet idéal qu'en s'affranchissant graduellement, en se déshabituant de la violence, en renonçant à en profiter.

Nous savons à n'en pas douter que l'existence des hommes qui, ayant compris l'immoralité et la funeste influence des gouvernements, s'efforceront de n'en plus profiter et de n'y plus contribuer, sera tout autre et plus conforme aux lois de la vie et de notre conscience que l'existence actuelle des hommes qui, participant à la violence des gouvernements et en bénéficiant, font mine de vouloir la combattre et tendent seulement à en changer les formes.

Ce qu'il est important de retenir, c'est que l'organisation actuelle de la société est mauvaise. Elle aboutit à l'esclavage et nous trouvons qu'elle repose sur la violence des gouvernements. Or pour détruire la violence des gouvernements, les hommes n'ont qu'un moyen, qui est de ne plus participer à cette violence. Les hommes n'ont qu'un moyen de s'affranchir, ils doivent le prendre.

Quand sera remplacé dans chaque société le règne de la violence par celui du consentement libre et raisonnable des hommes ?

Cela dépendra du nombre des esprits qui, dans chaque pays prendront conscience du mal et du degré de clarté avec lequel ils le percevront. Chacun de nous, isolément, peut collaborer au mouvement général de l'humanité, ou au contraire y faire obstacle. Chacun de nous devra choisir : aller contre la volonté de Dieu en construisant sur le sable la demeure fragile de sa vie illusoire et passagère ou diriger ses efforts ans le sens de l'éternel, de l'immortel mouvement de la vie véritable, conformément à la volonté de Dieu.

Je sais que nous sommes tous si fortement assujettis à la violence qu'il nous est très difficile de la vaincre. Mais je ferai cependant tout ce que je pourrai pour ne pas la favoriser, pour ne pas être son complice et je m'efforcerai de ne jamais profiter de ce qui a été acquis et de ce qui est gardé par la violence.

Je n'ai qu'une vie et pourquoi dans cette vie si courte me ferais-je, contre la voix de ma conscience, le collaborateur de vos horribles forfaits ? Je ne veux pas être et je ne serai pas celui-là.

Version longue de ce texte ci-dessus

Je rappelle aussi cette citation de Tolstoï qui va comme un gant aux agents de l'E.N. (profs) :
Léon Tolstoï a écrit:
Les gouvernements protègent et récompensent les hommes à proportion de la part qu'ils prennent à l'organisation du mensonge.
Ce qui m'amène à être d'accord avec les profs quand ils veulent être mieux rémunérés.

Du Tolstoï pour dire aux professeurs de l'E.N. que non, ils ne sont pas obligés d'être profs. Personne n'est obligé d'être Élu, prof, soldat, flic, procureur, patron, propriétaire lucratif, j'en passe et des meilleurs... Personne n'est obligé d'avoir du pouvoir sur autrui et de se mettre du côté de la violence organisée.
BrindIf
BrindIf
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La déscolarisation volontaire  Empty Re: La déscolarisation volontaire

par BrindIf Mer 13 Mai 2015, 22:14
Cette capacité à exposer vos idées et à les organiser à partir de la pensée d'autres personnes, l'avez-vous développée sans l'école ? L'auriez-vous développée sans école ?

(C'est une vraie question Very Happy Contrairement à ce qu'écrit llaima plus haut, il me semble que les enfants peuvent et veulent apprendre même en l'absence de contraintes, pourvu que l'environnement soit porteur. Définir ce qu'est un tel environnement... est une vaste question  sunny
Affirmer que l'école ne fait forcément pas partie de la réponse est un peu trop manichéen à mon goût.)
stench
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par stench Mer 13 Mai 2015, 22:17
Senzu, les idées que tu défends (sur l'école mais aussi d'autres qui sont sous-entendues) sont celles que je fréquente depuis de nombreuses années dans diverses organisations politiques, mais rarement je n'ai eu l'occasion de les voir exposées avec tant de clareté. Je t'en remercie et bien entendu je partage ton point de vue.

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par senzu Mer 13 Mai 2015, 22:31
@Brindlf : Face à ce capharnaüm qu'est le monde entier, il me semble que la tâche de tous est de simplifier et de revenir à l'essentiel.

C'est pourquoi je voudrais rappeler la simplicité sidérale d'une otium vitae, d'une skholè qui se fonde simplement sur le loisir lettré. Je lis des livres en suivant les inclinations de mon esprit et de mon âme, de livre en livre, en position de chercheur. Ensuite, quand j'échange avec des gens, quand j'écris ou quand je parle, mon cerveau connecte tout seul avec des choses que j'ai lues (mais je ne suis pas spécial, tous ceux qui lisent activement fonctionnent comme ça). C'est vrai que l'usage du surligneur que m'a enseigné Etienne Chouard est très pratique pour retrouver les passages les plus marquants.

Voilà mais tout ça c'est très très simple, pas de structure, pas d'institution, pas de milliard d'euros, pas de bâtiments, pas de concierge. Juste un homme et ses bouquins. Il suffit de savoir lire et de chercher à comprendre ce qui tourne pas rond dans ce monde. Pas besoin d'école pour apprendre à faire ce genre de chose, au contraire, l'école dégoûte très souvent les gens de la lecture et ne fait pas comprendre à quoi ça sert.

Pour lire en chercheur, il faut être libre, libre de suivre ses inclinations, il faut s'écouter. A l'école, c'est tout le contraire, on est porté en dehors de soi, on doit correspondre à ce qui est attendu. On ne peut pas chercher dans la direction où on veut, donc on ne cherche pas du tout, et on oublie rapidement cette qualité humaine que tout le monde peut développer.
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par BrindIf Mer 13 Mai 2015, 22:38
Voilà mais tout ça c'est très très simple, pas de structure, pas d'institution, pas de milliard d'euros, pas de bâtiments, pas de concierge. Juste un homme et ses bouquins. Il suffit de savoir lire et de chercher à comprendre ce qui tourne pas rond dans ce monde. Pas besoin d'école pour apprendre à faire ce genre de chose
Il faut savoir lire.
Il faut avoir accès aux livres.

L'école apporte cela. Ce n'est pas la seule façon de l'apporter, certes.
Par contre sans école... est-ce que cela sera toujours disponible pour chacun ?
leyade
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par leyade Mer 13 Mai 2015, 22:42
senzu a écrit:

Voilà mais tout ça c'est très très simple, pas de structure, pas d'institution, pas de milliard d'euros, pas de bâtiments, pas de concierge. Juste un homme et ses bouquins.
Il suffit de savoir lire et de chercher à comprendre ce qui tourne pas rond dans ce monde. Pas besoin d'école pour apprendre à faire ce genre de chose, au contraire, l'école dégoûte très souvent les gens de la lecture et ne fait pas comprendre à quoi ça sert.

Le souci, c'est que sans structure, sans institution, sans menaces, sanctions, carottes et bâtons, là où je suis, Dylan va surtout flanquer ses bouquins à la tête de Jean-Kevin qui les lui rendra avec élan tandis que Kaycie, au fond, mordillera la 4ème de couverture sans conviction...

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par liliepingouin Mer 13 Mai 2015, 23:06
En bonne Hugolâtre, je me demande ce que Victor aurait pensé de tout cela: je suis peut-être d'une naïveté débordante mais il me semble que l'école a protégé des milliers d'enfants de travaux destructeurs à la mine ou à l'usine. "Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit?" Donc l'école comme suppôt du capitalisme est une idée qui ne me convainc guère...

De même il me semble que des études ont montré une corrélation dans de nombreux pays entre le faible taux de scolarisation des filles et le taux de mariage précoce. Pour des milliers de jeunes fillse, l'école est la voie de l'émancipation, sans quoi elles sont cantonnées à l'aliénation au sein de la famille. Sans école, que deviennent-elles?

L'école est une institution qui permet aux enfants d'échapper à leur milieu familial, lorsque celui-ci est nocif, ou n'a pas les moyens de développer leurs talents. En effet, faire de l'école la source de tous les maux, c'est oublier un peu vite que ce n'est pas l'école qui élève les enfants. lls y passent en fin de compte bien peu de temps, mais il baignent dans un milieu familial et social qui contribue grandement à les façonner.

Critiquer est sain, mais vouloir tout détruire me semble plus que dangereux.
Proposer des alternatives, pourquoi pas; mais faire de l'école et des professeurs les ennemis à abattre m'horrifie et me peine.
Que vaut une utopie qui désigne un ennemi à abattre, jugé responsable de tous les maux?

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ameneul
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par ameneul Mer 13 Mai 2015, 23:32
Moi non plus, je n'aime pas être associé à un élu ou à un flic. Mais bon... on oublie tellement souvent que nous exerçons un pouvoir (sur de jeunes gens) tout en étant à la fois de purs exécutants, les rouages sans liberté d'un système.

Il est évident que le gouvernement représentatif élu et l'école républicaine entretiennent des liens étroits. Il n'y a presque pas de citoyens en France. Les adultes sont presque tous des enfants politiques. Il est certain que Jules Ferry avait vu juste. L'emprise morale sous laquelle sont les profs et beaucoup d'autres d'adultes est une forme de colonialisme spirituel... empêchant tout révolution.

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par User5899 Jeu 14 Mai 2015, 00:17
senzu a écrit:@Brindlf : Face à ce capharnaüm qu'est le monde entier, il me semble que la tâche de tous est de simplifier et de revenir à l'essentiel.

C'est pourquoi je voudrais rappeler la simplicité sidérale d'une otium vitae, d'une skholè qui se fonde simplement sur le loisir lettré. Je lis des livres en suivant les inclinations de mon esprit et de mon âme, de livre en livre, en position de chercheur. Ensuite, quand j'échange avec des gens, quand j'écris ou quand je parle, mon cerveau connecte tout seul avec des choses que j'ai lues (mais je ne suis pas spécial, tous ceux qui lisent activement fonctionnent comme ça). C'est vrai que l'usage du surligneur que m'a enseigné Etienne Chouard est très pratique pour retrouver les passages les plus marquants.

Voilà mais tout ça c'est très très simple, pas de structure, pas d'institution, pas de milliard d'euros, pas de bâtiments, pas de concierge. Juste un homme et ses bouquins. Il suffit de savoir lire et de chercher à comprendre ce qui tourne pas rond dans ce monde. Pas besoin d'école pour apprendre à faire ce genre de chose, au contraire, l'école dégoûte très souvent les gens de la lecture et ne fait pas comprendre à quoi ça sert.

Pour lire en chercheur, il faut être libre, libre de suivre ses inclinations, il faut s'écouter. A l'école, c'est tout le contraire, on est porté en dehors de soi, on doit correspondre à ce qui est attendu. On ne peut pas chercher dans la direction où on veut, donc on ne cherche pas du tout, et on oublie rapidement cette qualité humaine que tout le monde peut développer.
Je suis d'accord (dans un autre fil, d'ailleurs, je me suis interrogé sur les propos de quelqu'un qui souhaite professionnaliser le lycée et la fac). Pour autant, sans école, je n'aurais jamais eu le bagage pour penser cela.
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par liliepingouin Jeu 14 Mai 2015, 01:18
ameneul a écrit:Moi non plus, je n'aime pas être associé à un élu ou à un flic. Mais bon... on oublie tellement souvent que nous exerçons un pouvoir (sur de jeunes gens) tout en étant à la fois de purs exécutants, les rouages sans liberté d'un système.

Il est évident que le gouvernement représentatif élu et l'école républicaine entretiennent des liens étroits. Il n'y a presque pas de citoyens en France. Les adultes sont presque tous des enfants politiques. Il est certain que Jules Ferry avait vu juste. L'emprise morale sous laquelle sont les profs et beaucoup d'autres d'adultes est une forme de colonialisme spirituel... empêchant tout révolution.


Je me demande de quel pouvoir tu parles. Personnellement, je trouve que, du pouvoir, j'en ai bien peu...
Est-ce par orgueil? Je ne me considère pas comme une "pure exécutante". Exécutante de quoi? Je n'ai pas la prétention de me croire libre de tout préjugé, de toute reproduction, de tout système de pensée (qui peut l'être?), mais je ne décrirai pas ma tâche comme celle d'une exécutante! Au contraire, il faut en permanence que j'utilise mon cerveau.
Et si je continue malgré tout de me lever le matin alors que je galère terriblement pendant certaines heures de cours et que je me demande souvent ce que je fais là, c'est bien parce que j'ai encore un petit espoir malgré tout d'apporter un peu d'émancipation aux jeunes, en leur ayant appris ne serait-ce qu'un tout petit peu à s'exprimer, à réfléchir, à prendre du recul. Si je ne le fais pas, qui le fera?

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par ameneul Jeu 14 Mai 2015, 09:42
Nous avons du pouvoir car nous avons le pouvoir de participer au modelage de futurs "citoyens".

Nous sommes exécutants par rapport au cadre dans lequel nous exerçons et sur lequel nous n'avons pas de prise : le "système école" avec ses règles.

Mais oui, bien entendu, nous avons aussi un peu de liberté et nous devons toujours recourir à notre cerveau.

Les déscolarisateurs ne disent pas que les adultes n'ont aucun rôle dans l'instruction des jeunes. Ils veulent déprofessionnaliser et dénationaliser l'éducation.

Sur les propositions concrètes, je les trouve vagues. Mais j'imagine plusieurs points :
- si l'on conserve des "classes" : une plus grande collaboration entre les plus grands et les plus petits
- le développement de l'éducation populaire, mais participative, avec un dépassement de la relation professeur/apprenant
- la réduction du travail inutile et destructeur, pour permettre l'explosion du temps libre
- le développement d'applications numériques intelligentes : en Afrique des gosses parviennent à apprendre seuls sans profs, sans classes et avec des parents illettrés, grâce à des tablettes.
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par senzu Jeu 14 Mai 2015, 09:59
Merci beaucoup pour toutes les premières réactions, je suis agréablement surpris. J'avais établi (dans la rue, ou en société) à 20% de le nombre de "profs" de type "philosophes", c'est-à-dire, des personnes détachées de leur fonction capables d'un maximum de recul, capables de tout remettre en question s'il le faut, capables de polémiques. J'ai l'impression qu'on est parti pour que ce chiffre soit relativement élevé sur ce forum.

Je voulais répondre à deux choses. Concernant Victor Hugo, il me semble que beaucoup, même les plus érudits ont en tête une fameuse phrase d'Hugo sur l'école, quelque chose comme "Si vous voulez fermer une prison, ouvrez une école". En faisant quelques recherches, on peut découvrir qu'Hugo n'aurait jamais dit cela et que ce serait une fausse citation de l'écrivain. Hugo, a par contre, c'est vrai, toujours chanté les louanges et l'importance radicale de l'élévation intellectuelle et spirituelle du plus grand nombre possible, mais de là à dire qu'il faut des écoles "Républicaines" pour cela... Je pense qu'Hugo fut une relative exception en tant qu'élu, mais il avait quand même sacrément les pieds dedans et il faut toujours en rabattre un peu quand on est pris dans la machine du gouvernement représentatif, même si Hugo, c'est vrai, fut connu pour le maintien ferme de ses convictions et une faculté à ne pas se laisser influencer.

"Si vous voulez fermer une prison, ouvrez une école" que Hugo l'ait dit ou pas, cette phrase est assez intéressante. Nous ne sommes pas contre l'école au sens de la skholè, au sens de l'éducation populaire, au sens de l'école du peuple, par le peuple, pour le peuple. Même réponse concernant les pays pauvres qui n'ont pas d' "école". Nous voulons pour eux aussi une école, mais pas d'État, nous leur voulons, une skholè. Nous sommes même pour une méga-skholè en fait. L'école de l'E.N. organise la rareté du savoir, nous sommes pour son abondance.

Concernant l'éternelle objection du "vous voulez détruire, il faut construire". C'est évidemment une arme argumentaire de nos adversaires politiques, pourtant elle ne tient pas. Nous voulons les deux : 50/50. Vie/Mort. Construction/Destruction. Donc, se concentrer sur la moitié pour jeter le discrédit, n'est pas loyal. Nous voulons détruire l'Éducation Nationale, et construire une skholè libre et égalitaire dans l'espace public (nous travaillons aux deux). De la même façon, nous voulons détruire le gouvernement représentatif et construire une vraie démocratie (nous travaillons aux deux).

Que pensez-vous d'une école qui soit vraiment publique ? Démocratique, donc vraiment laïque ( de laikos : du peuple, public) ? Si l'école était vraiment laïque, tous ceux qui ont un enseignement à proposer pourraient le faire, et tous ceux qui sont avides de connaissance pourraient connaître toutes les propositions et des outils pourraient simplement être là pour que les rencontres puissent se faire dans de bonnes conditions (c'est Albert Jacquard qui dit que l'école devrait simplement être le lieu de la rencontre des autres ; Illich dit aussi dans la vidéo (http://www.descolarisation.org/index.php/bibliotheque/mediatheque/videos/74-ivan-illich-un-certain-regard) quelque chose comme "les institutions s'essaient en vain de fabriquer la grâce alors qu'elles devraient simplement être des tables autour desquelles je te retrouve au nom du mystère"). Aujourd'hui, l'école n'est pas laïque, elle est la propriété privée de l'État et de l'oligarchie politique. Des agents (qui sont agent bien avant d'être éducateur, à la place d'être éducateur) dispensent un programme conçu par "les pouvoirs" pour répondre à une certaine demande des industriels et des capitalistes. Pourquoi ai-je découvert par hasard la greffe d'arbre à 34 ans alors que j'ai bouffé des maths toute ma jeunesse ? Je précise que j'ai découvert la greffe auprès de quelqu'un de 70 ans, qui a greffé toute sa vie, car il a quitté la filière générale pour une filière horticole ; donc depuis qu'il a 15 ans, ce type fait des greffes d'arbre. Lui, il greffait, moi je faisais des maths... Pourtant, si j'avais vu "atelier greffe" comme choix possible à moment donné à la place de me torturer avec des maths, j'y serais allé mille fois. Et lui, n'aurait-il pas finalement pu faire plus de maths aussi, ou d'astronomie ou de peinture ? Mais non, l'école est au service de la division du travail et de la conservation des classes sociales (et l'outil pour cela est la rareté du savoir). L'école est au service des industriels : il faut former des techniciens, des ingénieurs, pour l'industrie.
Ivan Illich a écrit: « J’emploie ici le terme d’ “école” et celui d ‘ “enseignement” pour définir une façon de s’occuper des enfants et surtout un rite de passage que nous acceptons comme allant de soi. Nous oublions que cette institution et la croyance sur laquelle elle se fonde n’apparurent sur la scène du monde qu’au moment de la croissance de la société industrielle. »

Au fait connaissez-vous notre document qui regroupe toutes les citations les plus offensives contre l'Éducation Nationale et pour une skholè libre, sur Descolarisation.org : https://docs.google.com/document/d/1R1IWge-oaf-jZ6KQjwcSY79tHbTifNz4e6P5V5BM09w/edit?usp=sharing
La déscolarisation volontaire  Millecitations
https://docs.google.com/document/d/1R1IWge-oaf-jZ6KQjwcSY79tHbTifNz4e6P5V5BM09w/edit?usp=sharing
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