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par Supaman
le Dim 8 Jan 2017 - 9:53
 
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Sujet: La grammaire est négociable. Blog d'un prof de français atterré
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La grammaire est négociable. Blog d'un prof de français atterré

Je n'ai pas pu attendre qu'un journaliste fasse correctement son travail en modérant au moins un peu par prudence les propos de cette Lucie Martin repris par ses confrères de Marianne et du Figaro (et d'autres). D'avance, je suis désolé, mais j'ai dû retirer les liens de mes sources et donc images (dû au fait que je sois nouveau sur le forum).

Lucie Martin a écrit:Arrêtons de nous encombrer avec des notions complexes, des compléments d’objets directs, indirects, seconds, des compléments circonstanciels, et tout ce charabia[…]

Eh bien c’est chaud pour une prof de lettre… ! Ca veut dire qu’elle n’a pas compris ce qu’était un groupe verbal. Moi, je n’y crois pas du tout. Je pense que c’est de la mauvaise foi de réac’.
Voici la définition qu’elle a eu dans sa formation :
« le prédicat de la phrase = « ce qu’on dit du sujet (très souvent un groupe verbal formé du verbe et des compléments de verbe s’il en a) ».
Source : manuel de l'Inspection pédagogique régionale Groupe des Lettres Bordeaux   en page 19
Je rappelle ce qu’est un complément de verbe :
Voici quelques compléments du verbe :
Le COD / Il se rattache directement au verbe et répond à la question 'qui? quoi?'.
Le  COI / Il ne se rattache pas directement au verbe; il est séparé de son verbe par une préposition et répond à la question 'à/de qui? à/de quoi?
Le COS / Employé avec un verbe transitif direct qui a déjà un COD premier, le COS est introduit par une préposition et désigne le destinataire de l'action.
L'attribut / Il qualifie le sujet par l'intermédiaire du verbe être ou un verbe d'état (sembler, paraître, demeurer, rester, devenir, avoir l'air.
Le complément circonstanciel de lieu.


Donc le prédicat, c’est le groupe verbal. Quelle différence alors ? Et pourquoi ? Eh bien c’est expliqué dans sa formation en page 19 et 20 juste après :
« L’objectif est de permettre à l’élève d’assimiler cette relation syntaxico-sémantique et de comprendre l’organisation de la phrase.
Donc cette notion :
- correspond au GV ;
- désigne la relation de celui-ci avec le sujet grammatical.

L’EXPRESSION « GROUPE VERBAL » (ÉVENTUELLEMENT RÉDUIT AU VERBE) DÉSIGNE LA NATURE DU SYNTAGME.

LE TERME « PRÉDICAT » EN DÉSIGNE LA FONCTION. »


Personnellement, ça me paraît très clair. Et je ne suis pas professeur de lettre.

Lucie Martin a écrit:Au cours du stage, un collègue a demandé comment analyser une phrase avec plusieurs verbes et plusieurs sujets. Par exemple : « Lucie a passé de bonnes vacances, le Père Noël a été généreux, les fêtes furent très réussies. » Réponse de l’inspecteur : on ne considère que le premier sujet. Le sujet de la phrase, c’est Lucie. Et le Père Noël ? Et les fêtes ? Ce sont bien des sujets eux aussi ! Ils sont sur le même plan que le sujet « Lucie » ! Eh bien non, d’après l’inspecteur. Consternation muette dans les rangs.

Eh bien (encore), je suis désolé, mais cette phrase est une phrase complexe, et non une phrase simple. Et si « les rangs » de professeur de lettres ne l’avaient pas remarqué, je serais assez effrayé.
Hors, dans une phrase complexe, il peut y avoir plusieurs sujets et/ou plusieurs prédicats, en particulier lorsque la phrase complexe est constituée de propositions indépendantes.
Donc pour ce point, je ne vois que peu d’explications :

1) c’est un mensonge la part de cette Lucie Martin.
2) Lucie Martin a mal compris la réponse de l’animateur.
3) l’animateur a mal compris la question
4) l’animateur a dit n’importe quoi mais cela n’engage que ce dernier, c’est une mauvaise interprétation de sa part.


Il n’y a aucune règle écrite qui valide le propos rapporté. Nulle part.


Lucie Martin a écrit:Eh bien, compléments essentiels et circonstanciels, c’est fini. Maintenant, c’est compléments de verbe et compléments de phrase. Pourquoi ? Je n’ai pas compris. Quelle différence ? Je n’ai pas compris.

Là, c’est limite consternant de la part d’une prof de lettre. Parce qu’elle sait normalement qu’il y a dans certains cas un souci de distinction entre un complément essentiel et un non essentiel.
« Quel est le problème avec le complément essentiel ? » aurait dû se demander cette dernière. Enfin, c’est mon avis et ça ne reste qu’un avis.
Rappelons ce qu’est un complément essentiel :
"On dit qu'un complément est essentiel :
a) quand sa construction, avec ou sans préposition, dépend du verbe lui-même;
b) quand le verbe ne peut, sans sa présence, avoir un sens.
Un moyen assez facile de distinguer les compléments essentiels et non essentiels est de séparer les compléments.
En règle générale, les compléments qui n'admettent pas la séparation, sont des compléments essentiels. Ces compléments sont les compléments d'objet direct (C.O.D.), les compléments d'objet indirect (C.O.I.), les compléments d'objet second (C.O.S.), les attributs du sujet, mais il en existe d'autres que l'on peut distinguer en diverses variétés, tout comme les compléments circonstanciels."


Tiens !? Ca me rappelle quelque chose…
Supaman a écrit:Voici quelques compléments du verbe :
Le COD […], Le  COI […], Le COS […], L'attribut […], Le complément circonstanciel de lieu.

Oui, donc le complément du verbe, c’est la même chose. Mais au moins, c’est plus clair parce qu’on a regroupé.
La phrase simple canonique, c’est le thème/sujet + le propos/prédicat.
Autrement dit, le sujet + le verbe + (la plupart du temps) le complément de verbe.
Donc ce qui se rajoute à cette phrase simple canonique, c’est forcément un complément de phrase.
C’est vraiment limpide pour ma part.

Je vais quand même cité une autre source qui souligne le souci de la distinction entre « compléments essentiels » et « compléments non essentiels ».
"La distinction complément essentiel, complément non essentiel repose sur d'autres critères qu'il est difficile de présenter ici (comportements différents à l'effacement, déplaçabilité, accord ou non avec le participe passé conjugué avec avoir, etc.). Cette distinction n'est pas absolument pertinente pour tous les compléments et une nouvelle distinction, entre compléments de verbe et complément de phrase, a été proposée par certains grammairiens (mais cela nous entraînerait trop loin)."

Voilà donc la raison. Si cette professeur avait cherché par elle-même, à défaut de savoir (c’est tout de même son domaine), elle aurait pu comprendre toute seule.

Lucie Martin a écrit:De plus, ces soi-disant changements imposés par les programmes, et relayés par l’inspection… ne sont appliqués nulle part ! De plus, ces soi-disant changements imposés par les programmes, et relayés par l’inspection… ne sont appliqués nulle part !

Lorsqu’elle affirme que ce n’est appliqué « nulle part », en fait c’est juste à l’école de ses enfants… Bien bien bien.
Non, mais sérieusement, j’imagine assez facilement qu’une réforme venant de se mettre en place, ça va mettre un peu de temps à être mis en application. Je peux comprendre que le changement, c’est chiant. Mais bon, je ne comprendrais pas trop pourquoi cette nouvelle règle qui simplifie réellement ne serait pas appliquée à court terme. W&S
Lucie Martin a écrit:Car même dans nos nouveaux manuels de collège, ceux édités exprès cette année, rien n’a changé ! Les notions de prédicat ou de complément de verbe sont à peine mentionnées, et tous les compléments d’objet, directs, indirects, essentiels, circonstanciels… sont bien là et constituent la base de l’enseignement de la langue

C’est à ce moment précis où je me demande si elle n’a vraiment rien compris ou si elle fait exprès. Parce que personnellement, si je m’apercevais que les notions de prédicat et de complément de verbe sont bien mentionnés, mais aussi les CO, COI, etc… Je me poserais les bonnes questions et me demanderais, entre autres choses, si j’ai finalement bien compris.
Bon après, je n’ai pas lu ces manuels édités spécialement pour cette année, donc je ne veux pas trop m’avancer et me base sur son constat. J’irais regarder à l’occasion, chez mes enfants ou les copains de mes enfants.
Lucie Martin a écrit:Alors nous, que devons-nous enseigner à nos élèves ?
Réponse : Kev Adams.
[…]Au stage, on nous a fait travailler sur un extrait d’interview de Kev Adams[…]

Là, c’est malhonnête parce que ce qui est annoncé n’est pas la même chose que ce qui est précisé après coup.
Faire travailler des professeur lors d’un stage sur un extrait d’interview de Kev Adams, ce n’est pas la même chose que demander aux professeurs d’enseigner du Kev Adams aux élèves.
Voici l’énoncé posté sur twitter par l’intéressé :

Alors si vous lisez bien l’énoncé au-dessus de l’extrait d’interview, il est demandé aux professeurs de proposer des démarches qui articulent l’oral et l’écrit dans une classe de 3ème.
Hors, dans ce cadre là, et après avoir lu le texte, ce dernier me paraît justement approprié. Pour bien comprendre, c’est une interview audio vidéo de qui est retranscrite à l’écrit pour les besoins de cet atelier du stage.
interview de Kev Adams par la RTS : on la retrouve sur youtube  (c’est vers 4min45 que l’on retrouve le texte en question).
Et là, je me dis que soit cette prof ne comprend rien à rien, soit elle le fait vraiment exprès.
Il suffit de relire le petit manuel de l’inspection pédagogique à partir de la page 64 jusqu’à la 67 pour comprendre où l’atelier veut en venir.
Inspection pédagogique régionale Groupe des Lettres Bordeaux
Je passe sur le raccourci ridicule que cette Lucie Martin nous fait en passant de l’atelier sur l’extrait d’interview à Cyril Hanouna (que je trouve sympathique, au passage).

Lucie Martin a écrit:Car devant nos yeux ébahis, le problème de la difficulté des accords français a été résolu en une maxime à graver en lettres d’or au-dessus de tous les tableaux de France et de Navarre : « en fait, en langue, tout est négociable ».
Si. Je vous jure. Si l’élève a fait une faute, mais qu’il est capable de justifier son choix, même de façon totalement erronée, alors nous devons considérer qu’il a raison.
Par exemple, s’il écrit « Les cadeaux que Lucie a reçue lui ont plue », nous sommes en droit (ô généreuse inspection) de lui demander des comptes sur ses accords défaillants des participes passés. Mais si l’élève répond « Ben on parle de Lucie, or Lucie est une fille, donc j’ai mis des E », eh bien cet élève, qui a fait preuve d’une capacité à justifier ses erreurs… a finalement raison !

Alors là, c’est l’escroquerie intellectuelle. Je vais être clair. J’ai n’ai retrouvé nulle part cette « maxime » à graver en lettres d’or.
Attention, je ne dis pas que ces termes n’ont pas été prononcés. Mais je serais curieux de connaître le contexte dans lequel cela aurait été prononcé. J’ai beaucoup de mal à croire (en fait pas du tout) que l’animateur ait voulu signifier tout ce que cette Lucie Martin en a tiré comme conclusion : à savoir une « grammaire négociable ». Tout simplement parce que cela n’aurait aucun sens, et en plus cela n’est absolument pas applicable. Pour chaque faute d’accords, le prof devrait aller questionner chaque élève… ! Soyons sérieux. Ceci est tellement absurde que ce n’est pas crédible.

Voilà, j’arrête là, mais j’appelle plutôt cela de la désinformation. Cela va participer au déclinisme ambiant "notre société va dans le mur !" #décadence  #tout s’écroule  #votez MLP etc…
Sympa, Mme Martin. Et les journaux Marianne et Le Figaro devraient avoir honte d’avoir relayé l’info, mais un article rétablissant la vérité sauverait quand même un peu la face.

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