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- e-WandererGrand sage
Pourquoi cette généralisation ? J'ai une formation de LM, mais j'ai passé une épreuve très exigeante de traduction/commentaire d'un texte latin inconnu à l'oral d'Ulm, à laquelle je me suis préparé avec un grand sérieux, et je traduis toujours beaucoup de latin. Ce n'est pas parce qu'on ne pratique qu'une seule langue ancienne qu'on la pratique forcément mal.Shakti a écrit:Bien que lettres modernes (et latiniste médiocre, c'est un peu la même chose...), je trouve ce bilan affligeant mais pas étonnant. L'utilitarisme dominant veut qu'on oublie que la valeur de la culture et des savoirs, c'est une richesse autrement plus jubilatoire que d'apprendre à apprendre...quoi au fait ?
Résultat d'une politique voulue par des collègues mêmes mais je ne les citerai pas
Au risque de choquer, je trouve précisément que la nécessité de pratiquer obligatoirement deux langues anciennes à haut niveau est l'une des causes des difficultés de la filière LC : en prépa, j'aurais rêvé d'une filière LM avec latin ou grec renforcé (version + thème), sans être obligé d'abandonner pour la 2e langue ancienne (j'étais grand débutant) le commentaire de littérature française de l'option LM (avec du coup un programme à travailler de près), le commentaire de texte en LV1 (épreuve tellement exigeante qu'elle a ensuite été remplacée par une version, avec pour conséquence une baisse rapide du niveau moyen des étudiants de LM en LV1), la LV2, et plus tard la littérature comparée ou la stylistique. Version latine + thème latin + version grec + thème grec, ça impose beaucoup de sacrifices et une forme de spécialisation précoce, alors que même mes collègues de LC à la fac ne pratiquent plus que l'une des deux langues. La formation LC est excellente, je ne le discute évidemment pas, mais elle implique des renoncements très lourds assez tôt dans les études. Il devrait y avoir une filière intermédiaire pour LM philologues, et sur le même modèle une filière histoire et une filière philosophie avec une langue ancienne renforcée (version + thème).
- LoraNeoprof expérimenté
Je ressens la même chose, Audrey. Parfois je me dis « A quoi bon, vu le peu de latin qu’apprennent les élèves réellement ? » Cette année, nous avons essayé d’ouvrir la nouvelle option en 6e. Il fallait présenter un projet . Je n’ai pas compris. Demande-t-on un projet quand un collège veut ouvrir de l’italien, par exemple ? J’ai donc repris les éléments du programme, en appuyant sur le fait que nos élèves avaient un niveau faible et qu’ils avaient besoin de cette option. J’ai dû appuyer sur l’interdisciplinarité aussi . Finalement, l’ouverture nous a été refusée.
Mais ça a donné des idées à ma principale : pourquoi, au lieu de latin, ne pas enseigner les LCA (sic) ?! Monter des projets, mais ne surtout pas apprendre une langue bien trop difficile pour les élèves ? Bon, ça elle ne l’a pas dit, mais elle veut que je fasse des projets sympas pour qu’on arrive à garder des élèves, et si possible avec le collège voisin et le lycée parce qu’on vient d’entrer en Cité Éducative et qu’on a plein de sous grâce à ça.
Mais ça a donné des idées à ma principale : pourquoi, au lieu de latin, ne pas enseigner les LCA (sic) ?! Monter des projets, mais ne surtout pas apprendre une langue bien trop difficile pour les élèves ? Bon, ça elle ne l’a pas dit, mais elle veut que je fasse des projets sympas pour qu’on arrive à garder des élèves, et si possible avec le collège voisin et le lycée parce qu’on vient d’entrer en Cité Éducative et qu’on a plein de sous grâce à ça.
- User9525Niveau 8
e-Wanderer a écrit:Pourquoi cette généralisation ? J'ai une formation de LM, mais j'ai passé une épreuve très exigeante de traduction/commentaire d'un texte latin inconnu à l'oral d'Ulm, à laquelle je me suis préparé avec un grand sérieux, et je traduis toujours beaucoup de latin. Ce n'est pas parce qu'on ne pratique qu'une seule langue ancienne qu'on la pratique forcément mal.Shakti a écrit:Bien que lettres modernes (et latiniste médiocre, c'est un peu la même chose...), je trouve ce bilan affligeant mais pas étonnant. L'utilitarisme dominant veut qu'on oublie que la valeur de la culture et des savoirs, c'est une richesse autrement plus jubilatoire que d'apprendre à apprendre...quoi au fait ?
Résultat d'une politique voulue par des collègues mêmes mais je ne les citerai pas
Au risque de choquer, je trouve précisément que la nécessité de pratiquer obligatoirement deux langues anciennes à haut niveau est l'une des causes des difficultés de la filière LC : en prépa, j'aurais rêvé d'une filière LM avec latin ou grec renforcé (version + thème), sans être obligé d'abandonner pour la 2e langue ancienne (j'étais grand débutant) le commentaire de littérature française de l'option LM (avec du coup un programme à travailler de près), le commentaire de texte en LV1 (épreuve tellement exigeante qu'elle a ensuite été remplacée par une version, avec pour conséquence une baisse rapide du niveau moyen des étudiants de LM en LV1), la LV2, et plus tard la littérature comparée ou la stylistique. Version latine + thème latin + version grec + thème grec, ça impose beaucoup de sacrifices et une forme de spécialisation précoce, alors que même mes collègues de LC à la fac ne pratiquent plus que l'une des deux langues. La formation LC est excellente, je ne le discute évidemment pas, mais elle implique des renoncements très lourds assez tôt dans les études. Il devrait y avoir une filière intermédiaire pour LM philologues, et sur le même modèle une filière histoire et une filière philosophie avec une langue ancienne renforcée (version + thème).
Euh, je ne visais que moi en fait, je ne doute pas de l'excellence de certains L.M en langues anciennes (je ne l'ai jamais vu mais mon expertise est limitée) ni évidemment de la tienne .
J'ai passé plusieurs épreuves de latin aux concours mais jamais, je ne pourrais, à titre exclusivement personnel, entendons-nous bien, me prétendre du même niveau qu'un collègue de L.C.
Je souscris à ta dernière phrase et je vote pour, des deux mains, et encore une fois, à titre personnel, je trouve lamentable de prétendre former des enseignants en français (mais est-ce encore d'actualité ?) sans leur faire travailler et traduire au moins du Sénèque ou du Lucrèce...
- FiatLuxFidèle du forum
Dans un petit collège de campagne, on m'avait demandé d'enseigner le latin parce qu'il n'y avait pas de LC et qu'aucun autre LM ne voulait/se sentait capable de le faire. Je me suis lancée dans l'aventure avec une réelle envie de bien faire les choses, c'est-à-dire d'enseigner le latin, tout simplement. Le premier jour, alors que je me présentais à ... 5 élèves de 3e, tous me regardaient avec grande angoisse. Lorsque je leur ai demandé la raison de cette réaction à une présentation que je voulais plutôt avenante, ils m'ont répondu, mot pour mot "En fait on se demande si on va travailler avec vous." J'ai alors appris, et j'en ai appris de plus en plus au fur et à mesure de l'année, que le semblant de prof qui était censé enseigner le latin avant moi, ne l'enseignait presque jamais de l'année, leur montrant des films, organisant des goûters, racontant sa vie amoureuse et j'en passe. Sur une année, ils avaient en tout écrit une double pages. Ce que je retiens c'est que même en n'enseignant absolument rien et en faisant de ce cours une récréation hebdomadaire, les élèves étaient très peu à vouloir faire du latin. De mon côté, je me suis inscrite dans une autre démarche, j'ai vraiment enseigné le latin, certes moins bien qu'un LC à qui on a appris à le faire, mais mes élèves ont fait du latin du début à la fin, je savais répondre à leurs questions, je maîtrisais mon sujet, et j'ai ponctué mes cours d'activités plaisantes (rédiger une potion magique en latin, expositions diverses, élections d'empereurs fous, etc) qui plaisaient énormément aux élèves. Malgré tous mes efforts les effectifs ne remontaient jamais. Les élèves me disaient "Vous on vous aime bien, mais on n'aime pas le latin." et j'avais vraiment l'impression de traîner ces élèves toute l'année, qui étaient surtout focalisés sur l'idée qu'ils travaillaient plus que leurs camarades non latinistes et qui voulaient partir en récréation plus tôt ou bénéficier des mêmes heures d'étude qu'eux. C'était un peu difficile à encaisser, j'en ressens une forme d'échec.
Cette année, j'ai changé d'établissement et je suis arrivée dans un très gros collège de centre ville. Les latinistes sont bien plus nombreux et le groupe de professeurs qui enseignent le latin (des LM qui ont la certification ainsi qu'un LC) sont extrêmement dynamiques, motivés et leur proposent vraiment plein de choses. A part une poignée d'élus, la grande majorité des élèves n'aime toujours pas le latin et les effectifs importants s'expliquent presque exclusivement par la volonté des parents que leur enfant fasse du latin.
Ce que je retiens de ces observations, c'est qu'en 2022, c'est triste mais c'est la réalité du terrain : les élèves n'ont plus envie de faire du latin. On pourra bien sûr trouver des coupables (le gouvernement, les profs qui font n'importe quoi, les mauvais EDT des latinistes, etc) mais je pense vraiment que la raison principale est générationnelle. Comment des générations d'enfants qui ne voient plus l'intérêt de la lecture, qui sont collés à leur écran, qui sont désabusés vis-à-vis du monde du travail, qui remettent sans cesse en question l'intérêt de l'école, peuvent encore comprendre l'intérêt et ressentir l'envie de faire du latin ?
Cette année, j'ai changé d'établissement et je suis arrivée dans un très gros collège de centre ville. Les latinistes sont bien plus nombreux et le groupe de professeurs qui enseignent le latin (des LM qui ont la certification ainsi qu'un LC) sont extrêmement dynamiques, motivés et leur proposent vraiment plein de choses. A part une poignée d'élus, la grande majorité des élèves n'aime toujours pas le latin et les effectifs importants s'expliquent presque exclusivement par la volonté des parents que leur enfant fasse du latin.
Ce que je retiens de ces observations, c'est qu'en 2022, c'est triste mais c'est la réalité du terrain : les élèves n'ont plus envie de faire du latin. On pourra bien sûr trouver des coupables (le gouvernement, les profs qui font n'importe quoi, les mauvais EDT des latinistes, etc) mais je pense vraiment que la raison principale est générationnelle. Comment des générations d'enfants qui ne voient plus l'intérêt de la lecture, qui sont collés à leur écran, qui sont désabusés vis-à-vis du monde du travail, qui remettent sans cesse en question l'intérêt de l'école, peuvent encore comprendre l'intérêt et ressentir l'envie de faire du latin ?
- DesolationRowEmpereur
Mais ont-ils envie d'apprendre l'anglais, l'allemand ou l'espagnol ?
- CathEnchanteur
Pas plus, mais ils y sont obligés... Une piste ?
- KilmenyEmpereur
DesolationRow a écrit:Mais ont-ils envie d'apprendre l'anglais, l'allemand ou l'espagnol ?
Je dirais même plus : ont-ils envie d'apprendre ?
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Un petit clic pour les animaux : http://www.clicanimaux.com/catalog/accueil.php?sites_id=1
- IphigénieProphète
Je dirais même plus: ont ils les moyens d’en avoir envie? Car enfin le niveau en est arrivé à ne pas reconnaître en cinquième un sujet et un cod ( vérifié par un écho direct ce matin même ) par exemple.
- CasparProphète
L'anglais il est maintenant acté que c'est "utile" et qu'il "faut" l'apprendre: est-ce que ça veut dire que les élèves en ont vraiment envie ? Non, évidemment (et les mêmes qui ne fichent rien se plaindront plus tard qu'ils n'ont rien appris en anglais à l'école, que c'est grâce à Netflix qu'ils savent parler anglais - avec quelques bases apprises à l'école quand même hein...etc)
- AscagneGrand sage
Je viens de voir que la nouvelle maquette de formation en licence de l'Université Bordeaux Montaigne compte une "Licence Histoire et Cultures des Mondes Anciens (DD)", par exemple, ce qui peut correspondre à une de tes propositions. Je me dis qu'il est intéressant d'aller comparer les maquettes pour voir les tendances générales.e-Wanderer a écrit:Il devrait y avoir une filière intermédiaire pour LM philologues, et sur le même modèle une filière histoire et une filière philosophie avec une langue ancienne renforcée (version + thème).
J'ai noté un point pendant mes deux années dans une fac à taille humaine de province : les étudiants de LM étaient pour un certain nombre particulièrement intéressés par les cours transversaux thématiques faisant le lien entre l'Antiquité et notre époque ; en revanche, c'était généralement difficile en cours de langue latine (ou grecque) - pour les raisons habituelles (grammaire française mal connue, cours de LCA non suivis dans le secondaire même dans les établissements où c'était possible, etc.). L'aspect linguistique était plus difficile à faire passer que l'aspect culturel et historique. Mais quelques étudiants semblaient vouloir s'engager plus tard dans un mémoire concernant la littérature antique, ou en tout cas ses répercussions contemporaines.
Pour moi, il est assez clair que ça ferait du bien à la filière qu'il y ait au moins pendant une année de collège un cours obligatoire portant spécifiquement sur une initiation au latin et à la culture antique. Pas une option, un cours obligatoire.Cath a écrit:Pas plus, mais ils y sont obligés... Une piste ?
Avant que la réforme ne passe au lycée je considérais aussi qu'une filière L sans latin obligatoire, c'était, comment dire, contestable.
C'est ce qui est saisissant. J'ai l'impression aussi qu'il n'y a jamais eu autant de manuels pour grands débutants en latin (et en moindre mesure en grec). Pourtant, au lycée, le taux d'inscription se réduit comme la peau de chagrin.Robert Delord dans l'article a écrit:Le professeur de lettres classiques insiste enfin sur l’intérêt que suscite toujours l’antiquité. «Il suffit de voir la quantité de films et de livres qui s’en inspirent chaque année pour le comprendre. Il est dommage de constater que l’intérêt de l’Education nationale pour nos matières est inversement proportionnel à l’engouement du public».
Dans mon établissement, j'ai la chance d'avoir un proviseur qui a un discours adéquat sur les LCA, qui a commencé la réunion sur la DHG dans l'équipe de lettres en disant que la reconduction de la situation présente était garantie (c'est mieux que rien, même si c'est tout sauf optimal - je sais que c'est pire ailleurs). J'ai visité tel collège il y a quelque temps dont le directeur était pro-LC, ça fait plaisir.
Concrètement, entre collègues, nous n'avons pas forcément la même vision des LCA. D'ailleurs, le point de vue peut changer aussi entre ceux qui enseignent au collège et ceux qui sont au lycée... Lors de la dernière réunion de district, je n'ai pas trop osé prendre la parole. Mais je garde en tête qu'en tant qu'élève, les cours de latin puis à plus forte raison en troisième de grec, c'étaient des moments où je me sentais traité "comme un grand". Il y avait moins d'élèves que dans une classe entière, il y avait une certaine liberté. Rien que cela, c'est potentiellement attirant en soi, pour certains élèves... Mais c'était dans un établissement privé et il n'y avait pas de problème pour faire vraiment de la langue, sans négliger bien entendu le reste.
Je ne sais pas comment résoudre le gros problème de la déperdition entre la troisième et la seconde. Au fond, on en arrive aussi à une question civilisationnelle très vaste : l'humanisme traditionnel est mal en point, même "rénové" ; le goût de l'effort sans gain aisément constatable ou bêtement et directement utilitariste ne cesse de se perdre ; les zones défavorisées qui ont le plus besoin de bénéficier des LCA sont aussi celles qui rencontrent des difficultés pour que ces dernières soient effectivement présentes.
- User9525Niveau 8
Ascagne a écrit:Je viens de voir que la nouvelle maquette de formation en licence de l'Université Bordeaux Montaigne compte une "Licence Histoire et Cultures des Mondes Anciens (DD)", par exemple, ce qui peut correspondre à une de tes propositions. Je me dis qu'il est intéressant d'aller comparer les maquettes pour voir les tendances générales.e-Wanderer a écrit:Il devrait y avoir une filière intermédiaire pour LM philologues, et sur le même modèle une filière histoire et une filière philosophie avec une langue ancienne renforcée (version + thème).
J'ai noté un point pendant mes deux années dans une fac à taille humaine de province : les étudiants de LM étaient pour un certain nombre particulièrement intéressés par les cours transversaux thématiques faisant le lien entre l'Antiquité et notre époque ; en revanche, c'était généralement difficile en cours de langue latine (ou grecque) - pour les raisons habituelles (grammaire française mal connue, cours de LCA non suivis dans le secondaire même dans les établissements où c'était possible, etc.). L'aspect linguistique était plus difficile à faire passer que l'aspect culturel et historique. Mais quelques étudiants semblaient vouloir s'engager plus tard dans un mémoire concernant la littérature antique, ou en tout cas ses répercussions contemporaines.Pour moi, il est assez clair que ça ferait du bien à la filière qu'il y ait au moins pendant une année de collège un cours obligatoire portant spécifiquement sur une initiation au latin et à la culture antique. Pas une option, un cours obligatoire.Cath a écrit:Pas plus, mais ils y sont obligés... Une piste ?
Avant que la réforme ne passe au lycée je considérais aussi qu'une filière L sans latin obligatoire, c'était, comment dire, contestable.C'est ce qui est saisissant. J'ai l'impression aussi qu'il n'y a jamais eu autant de manuels pour grands débutants en latin (et en moindre mesure en grec). Pourtant, au lycée, le taux d'inscription se réduit comme la peau de chagrin.Robert Delord dans l'article a écrit:Le professeur de lettres classiques insiste enfin sur l’intérêt que suscite toujours l’antiquité. «Il suffit de voir la quantité de films et de livres qui s’en inspirent chaque année pour le comprendre. Il est dommage de constater que l’intérêt de l’Education nationale pour nos matières est inversement proportionnel à l’engouement du public».
Dans mon établissement, j'ai la chance d'avoir un proviseur qui a un discours adéquat sur les LCA, qui a commencé la réunion sur la DHG dans l'équipe de lettres en disant que la reconduction de la situation présente était garantie (c'est mieux que rien, même si c'est tout sauf optimal - je sais que c'est pire ailleurs). J'ai visité tel collège il y a quelque temps dont le directeur était pro-LC, ça fait plaisir.
Concrètement, entre collègues, nous n'avons pas forcément la même vision des LCA. D'ailleurs, le point de vue peut changer aussi entre ceux qui enseignent au collège et ceux qui sont au lycée... Lors de la dernière réunion de district, je n'ai pas trop osé prendre la parole. Mais je garde en tête qu'en tant qu'élève, les cours de latin puis à plus forte raison en troisième de grec, c'étaient des moments où je me sentais traité "comme un grand". Il y avait moins d'élèves que dans une classe entière, il y avait une certaine liberté. Rien que cela, c'est potentiellement attirant en soi, pour certains élèves... Mais c'était dans un établissement privé et il n'y avait pas de problème pour faire vraiment de la langue, sans négliger bien entendu le reste.
Je ne sais pas comment résoudre le gros problème de la déperdition entre la troisième et la seconde. Au fond, on en arrive aussi à une question civilisationnelle très vaste : l'humanisme traditionnel est mal en point, même "rénové" ; le goût de l'effort sans gain aisément constatable ou bêtement et directement utilitariste ne cesse de se perdre ; les zones défavorisées qui ont le plus besoin de bénéficier des LCA sont aussi celles qui rencontrent des difficultés pour que ces dernières y soient effectivement présentes.
Exactement.
- BoubouleDoyen
FiatLux a écrit:
[...]
Cette année, j'ai changé d'établissement et je suis arrivée dans un très gros collège de centre ville. Les latinistes sont bien plus nombreux et le groupe de professeurs qui enseignent le latin (des LM qui ont la certification ainsi qu'un LC) sont extrêmement dynamiques, motivés et leur proposent vraiment plein de choses. A part une poignée d'élus, la grande majorité des élèves n'aime toujours pas le latin et les effectifs importants s'expliquent presque exclusivement par la volonté des parents que leur enfant fasse du latin.
Ce que je retiens de ces observations, c'est qu'en 2022, c'est triste mais c'est la réalité du terrain : les élèves n'ont plus envie de faire du latin. On pourra bien sûr trouver des coupables (le gouvernement, les profs qui font n'importe quoi, les mauvais EDT des latinistes, etc) mais je pense vraiment que la raison principale est générationnelle. Comment des générations d'enfants qui ne voient plus l'intérêt de la lecture, qui sont collés à leur écran, qui sont désabusés vis-à-vis du monde du travail, qui remettent sans cesse en question l'intérêt de l'école, peuvent encore comprendre l'intérêt et ressentir l'envie de faire du latin ?
Ascagne a écrit:
[...]
Pour moi, il est assez clair que ça ferait du bien à la filière qu'il y ait au moins pendant une année de collège un cours obligatoire portant spécifiquement sur une initiation au latin et à la culture antique. Pas une option, un cours obligatoire.
Avant que la réforme ne passe au lycée je considérais aussi qu'une filière L sans latin obligatoire, c'était, comment dire, contestable.
[...]
Je ne sais pas comment résoudre le gros problème de la déperdition entre la troisième et la seconde. Au fond, on en arrive aussi à une question civilisationnelle très vaste : l'humanisme traditionnel est mal en point, même "rénové" ; le goût de l'effort sans gain aisément constatable ou bêtement et directement utilitariste ne cesse de se perdre ; les zones défavorisées qui ont le plus besoin de bénéficier des LCA sont aussi celles qui rencontrent des difficultés pour que ces dernières y soient effectivement présentes.
Ce sont des points principaux à discuter effectivement mais je n'ai pas l'impression que ça intéresse grand monde sorti des (ex-)latinistes/hellénistes dont je suis (enfin si on reconnaît que j'ai validé quelques années en les présentant au bac).
Il y a encore des enfants qui ont envie d'apprendre le latin (et l'anglais ou autre LV pour faire écho à d'autres messages plus haut) mais si on attend trop ou si on le rend impossible, ça passe, pour différentes raisons, et effectivement il y en a peu de ces élèves, donc c'est un choix difficile d'ouvrir partout. Pour autant quand je vois les efforts de temps et de budget qu'on met pour quelques (mais de plus en plus nombreux) "décrocheurs", on pourrait peut-être proposer quelques trucs pour ceux qui ne posent aucun souci, voire qui avancent vite (ah non, c'est mal et il ne faut pas qu'ils cumulent alors vu qu'ils ont déjà embrassé la musique ou le sport...).
Je suis encore plus radical qu'Ascagne, je ne comprends même pas qu'on puisse dire qu'on a "fait" du français (c'est toujours le titre disciplinaire au collège ?) sans avoir une idée de ce qu'est du latin. Evidemment, vu qu'on ne fait plus de grammaire structurée dans nombre d'écoles primaires, c'est un peu compliqué le latin. J'aimais bien l'initiation obligatoire au latin (1h par semaine en 5è ?), au moins tous ceux qui ne savent pas que ça existe en voyaient une année (mais c'est inimaginable vu qu'on ne connaît plus les accords ou la nature/fonction des mots d'une phrase, quand il ya une phrase).
Pour la déperdition, il faut voir la largeur de la palette de tout ce qui est proposé à un adolescent actuellement. C'est juste énorme, et les enjeux du supérieur dont on est quand même bien conscient me semblent beaucoup plus prégnants qu'avant. Je vois de plus en familles qui ont compris que ce n'est pas au lycée qu'ils allaient acquérir "ce qu'il faut", qui pour une prépa ou école post-bac, qui pour médecine, qui pour Sciences Po, etc... et embauchent des "coachs" alors le latin, sans blague ? C'est du loisir le latin, d'ailleurs les collègues vantent la culture latine, le voyage à Pompéi, etc...
- CathEnchanteur
Ascagne a écrit:Pour moi, il est assez clair que ça ferait du bien à la filière qu'il y ait au moins pendant une année de collège un cours obligatoire portant spécifiquement sur une initiation au latin et à la culture antique. Pas une option, un cours obligatoire.Cath a écrit:Pas plus, mais ils y sont obligés... Une piste ?
Avant que la réforme ne passe au lycée je considérais aussi qu'une filière L sans latin obligatoire, c'était, comment dire, contestable.
C'est ce que j'ai connu au collège : en 5è, Initiation au latin pour tous.
En 4è, la moitié de ma classe faisait latin, l'autre moitié faisait grec.
Et pareil dans une autre 4è, soit à la louche 30 latinistes, 30 hellénistes sur un petit collège.
- AscagneGrand sage
Certes, mais bon, au bout d'un moment, il faut rappeler que même pour les options, si on place l'amour ou le goût comme unique intérêt ou valeur, ça ne fonctionne pas.FiatLux a écrit:la grande majorité des élèves n'aime toujours pas le latin
J'en parlais avec plusieurs collègues. L'école a tendance dans certains cas à aller excessivement dans le sens des élèves. Même quand on les brosse dans le sens du poil, avec des programmes censés "les intéresser" et des instructions de l'inspection/des formateurs visant à multiplier les biais pour les capter, ils n'aiment pas ça malgré tout. Ils se comportent ensuite comme des divas (je repense à mes nombreuses rencontres de fin de seconde pour l'orientation ) mais une fois adultes ils découvrent à la dure que l'école est un paradis face à la société - même si notre société est bien plus accueillante qu'ailleurs.
Pour ma part, je trouve très contestable ce phénomène. C'est comme le recul sempiternel des notes, alors que la société est devenue hyper-évaluatrice et ne cesse d'être concurrentielle.
Je ne vais pas dire qu'il ne faut pas donner envie de faire du latin ou du grec, bien entendu. En revanche, la complaisance absolue ou la transformation de la matière en quasi amusement, je m'y oppose, en tout cas au lycée. C'est aussi aux élèves de mûrir et de trouver de l'intérêt et du goût par eux-mêmes, même en étant au début obligés à faire telle ou telle chose.
Bouboule a écrit:Pour autant quand je vois les efforts de temps et de budget qu'on met pour quelques (mais de plus en plus nombreux) "décrocheurs", on pourrait peut-être proposer quelques trucs pour ceux qui ne posent aucun souci, voire qui avancent vite
- Propos HS mais que je me permets d'indiquer:
J'ai un peu enragé il y a quelques jours en considérant l'écart qui existait finalement entre telle élève qui ne voulait pas redoubler (malgré un dossier pour lequel on s'interrogeait sur la réorientation en pro aussi), qui a demandé l'appel et a finalement eu un maintien dans le niveau seconde imposé - et la meilleure élève de ma classe, qui a eu beaucoup de mérite dans la mesure où, dans un contexte difficile, elle a montré de belles qualités en cours et essayé de tirer la classe vers le haut. Cette élève tenait absolument à faire une spécialité absente de notre établissement (en ayant toutes les qualités le lui permettant), mais vu le nombre de places et le fait que les secondes des établissements concernés prennent la place en priorité, elle devra rester ici et suivre une autre spé. La redoublante pestait. Elle a même osé dire au proviseur que ses résultats étaient dus à l'incompétence des enseignants. En réalité, elle dormait dans 75% de mes cours de français et ailleurs aussi. En toute franchise, j'avais envie de lui dire que l'État était bien gentil de lui donner une deuxième chance.
Face à cela, ma bonne élève, qui a montré toutes les qualités possibles et s'est accrochée malgré une mauvaise ambiance dans la classe n'aura pas ce qu'elle souhaite alors qu'elle le méritait amplement. Je suis bien évidemment pour le redoublement quand il est nécessaire et utile, mais j'avoue que j'étais un peu en colère en comparant les situations de ces deux élèves.
L'une complètement à l'ouest, ne comprenant pas que la société lui donne une véritable chance et lui évite le désastre scolaire qui aurait lieu en la laissant passer directement en 1re ; l'autre qui a attendu deux/trois heures que le proviseur puisse se libérer pour voir avec elle s'il y avait effectivement moyen d'appuyer sa candidature ailleurs, qui a attendu pour rien car il y avait trop de rendez-vous, et à qui on se trouve forcé de répondre qu'il n'y a pas assez de place ailleurs.
Sous un certain angle, peut-être ; pour ma part, je vois ça aussi comme un accélérateur d'accès à la culture générale ou humaniste particulièrement approprié pour les élèves qui ne peuvent pas compenser leurs lacunes en la matière à la maison et pas suffisamment dans les autres matières, si je pense au lycée, par exemple, entre autres choses.Bouboule a écrit:C'est du loisir le latin
- MathadorEmpereur
Ce serait délicat au niveau des postes, mais cela me semble être une bonne idée.Ascagne a écrit:Pour moi, il est assez clair que ça ferait du bien à la filière qu'il y ait au moins pendant une année de collège un cours obligatoire portant spécifiquement sur une initiation au latin et à la culture antique. Pas une option, un cours obligatoire.Cath a écrit:Pas plus, mais ils y sont obligés... Une piste ?
Filières ou pas, on pourrait imposer à tous les élèves du lycée général d'étudier au moins une matière parmi les maths et les langues anciennes.Ascagne a écrit:Avant que la réforme ne passe au lycée je considérais aussi qu'une filière L sans latin obligatoire, c'était, comment dire, contestable.
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"There are three kinds of lies: lies, damned lies, and statistics." (cité par Mark Twain)
« Vulnerasti cor meum, soror mea, sponsa; vulnerasti cor meum in uno oculorum tuorum, et in uno crine colli tui.
Quam pulchrae sunt mammae tuae, soror mea sponsa! pulchriora sunt ubera tua vino, et odor unguentorum tuorum super omnia aromata. » (Canticum Canticorum 4:9-10)
- BoubouleDoyen
Ascagne, ma remarque sur le loisir était une sorte de boutade désabusée ou auto-dérision.
Mathador, l'horaire du français en collège est ridicule, forcément, on finit par ne plus avoir de profs. On fait à la fois trop de choses au collège pour beaucoup en touchant à tout et pas assez pour d'autres qui passent leur sixième à s'ennuyer en français et mathématiques (au moins) et pas parce qu'ils ne veulent pas suivre.
Mathador, l'horaire du français en collège est ridicule, forcément, on finit par ne plus avoir de profs. On fait à la fois trop de choses au collège pour beaucoup en touchant à tout et pas assez pour d'autres qui passent leur sixième à s'ennuyer en français et mathématiques (au moins) et pas parce qu'ils ne veulent pas suivre.
- KilmenyEmpereur
En 5e, je ne sais pas, mais en seconde, c'est toujours le cas... :|Iphigénie a écrit:Je dirais même plus: ont ils les moyens d’en avoir envie? Car enfin le niveau en est arrivé à ne pas reconnaître en cinquième un sujet et un cod ( vérifié par un écho direct ce matin même ) par exemple.
L'autre problème, c'est aussi le recrutement en LC... Cela fait très longtemps que les postes au concours ne sont pas tous pourvus.
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- zigmag17Guide spirituel
Ascagne a écrit:Certes, mais bon, au bout d'un moment, il faut rappeler que même pour les options, si on place l'amour ou le goût comme unique intérêt ou valeur, ça ne fonctionne pas.FiatLux a écrit:la grande majorité des élèves n'aime toujours pas le latin
J'en parlais avec plusieurs collègues. L'école a tendance dans certains cas à aller excessivement dans le sens des élèves. Même quand on les brosse dans le sens du poil, avec des programmes censés "les intéresser" et des instructions de l'inspection/des formateurs visant à multiplier les biais pour les capter, ils n'aiment pas ça malgré tout. Ils se comportent ensuite comme des divas (je repense à mes nombreuses rencontres de fin de seconde pour l'orientation ) mais une fois adultes ils découvrent à la dure que l'école est un paradis face à la société - même si notre société est bien plus accueillante qu'ailleurs.
Pour ma part, je trouve très contestable ce phénomène. C'est comme le recul sempiternel des notes, alors que la société est devenue hyper-évaluatrice et ne cesse d'être concurrentielle.
Je ne vais pas dire qu'il ne faut pas donner envie de faire du latin ou du grec, bien entendu. En revanche, la complaisance absolue ou la transformation de la matière en quasi amusement, je m'y oppose, en tout cas au lycée. C'est aussi aux élèves de mûrir et de trouver de l'intérêt et du goût par eux-mêmes, même en étant au début obligés à faire telle ou telle chose.Bouboule a écrit:Pour autant quand je vois les efforts de temps et de budget qu'on met pour quelques (mais de plus en plus nombreux) "décrocheurs", on pourrait peut-être proposer quelques trucs pour ceux qui ne posent aucun souci, voire qui avancent vite
- Propos HS mais que je me permets d'indiquer:
J'ai un peu enragé il y a quelques jours en considérant l'écart qui existait finalement entre telle élève qui ne voulait pas redoubler (malgré un dossier pour lequel on s'interrogeait sur la réorientation en pro aussi), qui a demandé l'appel et a finalement eu un maintien dans le niveau seconde imposé - et la meilleure élève de ma classe, qui a eu beaucoup de mérite dans la mesure où, dans un contexte difficile, elle a montré de belles qualités en cours et essayé de tirer la classe vers le haut. Cette élève tenait absolument à faire une spécialité absente de notre établissement (en ayant toutes les qualités le lui permettant), mais vu le nombre de places et le fait que les secondes des établissements concernés prennent la place en priorité, elle devra rester ici et suivre une autre spé. La redoublante pestait. Elle a même osé dire au proviseur que ses résultats étaient dus à l'incompétence des enseignants. En réalité, elle dormait dans 75% de mes cours de français et ailleurs aussi. En toute franchise, j'avais envie de lui dire que l'État était bien gentil de lui donner une deuxième chance.
Face à cela, ma bonne élève, qui a montré toutes les qualités possibles et s'est accrochée malgré une mauvaise ambiance dans la classe n'aura pas ce qu'elle souhaite alors qu'elle le méritait amplement. Je suis bien évidemment pour le redoublement quand il est nécessaire et utile, mais j'avoue que j'étais un peu en colère en comparant les situations de ces deux élèves.
L'une complètement à l'ouest, ne comprenant pas que la société lui donne une véritable chance et lui évite le désastre scolaire qui aurait lieu en la laissant passer directement en 1re ; l'autre qui a attendu deux/trois heures que le proviseur puisse se libérer pour voir avec elle s'il y avait effectivement moyen d'appuyer sa candidature ailleurs, qui a attendu pour rien car il y avait trop de rendez-vous, et à qui on se trouve forcé de répondre qu'il n'y a pas assez de place ailleurs.Sous un certain angle, peut-être ; pour ma part, je vois ça aussi comme un accélérateur d'accès à la culture générale ou humaniste particulièrement approprié pour les élèves qui ne peuvent pas compenser leurs lacunes en la matière à la maison et pas suffisamment dans les autres matières, si je pense au lycée, par exemple, entre autres choses.Bouboule a écrit:C'est du loisir le latin
Ce que tu dis de ton élève studieuse me désole, de la même façon que l'attitude consumériste de la chipie me hérisse.
Je constate cela moi aussi en LP. Tout tend vers le nivellement par le bas, les élèves sages et travailleurs, qui ont une posture "normale " d'élèves, en paient le prix. C'est lamentable.
Quant au niveau, je suis bien d'accord. Dans une phrase telle que "La maison sur la colline ouvre ses volets bleus", il y aura toujours un élève pour ne pas comprendre le mot "colline", ou "bleu", ou autre chose. La simplification ne sert à rien d'autre qu'à abrutir, car simplifier c'est fausser en créant de la déperdition.
Continuer de proposer des textes rugueux et pas nécessairement accessibles à tous à la première lecture permet(trait) aux meilleurs élèves de tirer leur épingle du jeu, et aux autres de se sentir valorisés parce que parvenir à comprendre un texte ardu quand on a bloqué au départ c'est gratifiant. Celui qui peut le plus peut le moins.
Je suis fatiguée de ce bonus donné à la médiocrité adoubée au rang d'art, fâchée de devoir justifier le vocabulaire que j'essaie d'apporter à mes élèves ( "A quoi ça sert tous ces mots? Vous dites trop de mots! Il y a trop de mots!"...)... le tout en sachant que rien ne vaut plus rien puisque tout se vaut ( les textes dits "à la portée des élèves", sous-entendus ceux qui ne comprennent pas, n'offrant pas de grandes difficultés ni nuances, ne demandant pas de compréhension fine, sont propices à des copies indigentes et sont tout sauf valorisants).
Je plains énormément les élèves sérieux d'aujourd'hui, dont la soif d'apprendre est coupée par ces injonctions officielles lamentables .
( Et encore je parle du français, je n'imagine que trop bien la situation en latin et en grec, d'ailleurs quand je lis les témoignages ici je suis révoltée par ce que l'EN vous fait subir).
- pseudo-intelloSage
Audrey a écrit:Pour la première fois cette année, je n'ai pas eu assez d'inscrits pour envisager l'ouverture d'un groupe de latin en 5e en septembre. Mon principal m'a dit qu'à 6-7 élèves il pouvait ouvrir le groupe, et que nous n'en avions que 2, il y a de ça 15 jours. J'ai passé deux demi-journées au téléphone, à appeler des familles, et j'ai fait venir des élèves de 6e hésitants dans mon cours de latin 4e... J'ai finalement récupéré l'effectif nécessaire, mais tout juste je pense (je sais que le groupe va ouvrir, mais mon CDE ne m'a pas dit avec combien d'élèves...). Ça m'a désespérée. Vraiment. J'en ai pleuré dans le bureau du principal. Il m'a assurée que je n'y étais pour rien, mais je le savais déjà...
J'en peux plus... faire chaque année du racolage (j'appelle ça mon "péripatétiput'tour") pour le latin et le grec, ça m'épuise. Vraiment. D'un autre côté, vu le niveau de mes élèves en français, peut-on encore vraiment dire que j'enseigne le latin et le grec?
Bon, pour l'an prochain, je me remotive: j'aurai un petit (8 élèves...) mais excellent groupe d'hellénistes en 3e, et je crois que je vais pouvoir enfin faire vraiment de la langue! Et j'ai réussi à doubler l'effectif de mon groupe de 5e montant en 4e, en faisant du battage toute l'année auprès des 5e que j'avais en français, et en récupérant aussi des élèves qui jusqu'à la 5e suivaient des options avec lesquelles le latin est incompatible.
Mais bon sang... c'est dur de garder le moral quand on voit sa matière disparaître et les élèves s'enfoncer de plus en plus dans la perte de leur propre langue...
Je compatis pleinement. Lundi, on va tenter une tournée de la mort, avec des élèves de 3e très sympa qui ont proposé de m'accompagner dans les classes (les élèves seront à peu près là, ils rendent leurs livres) de 6e, étant donné que, selon eux, "ce sera pas pareil si c'est un élève qui le dit que si c'est un prof"."
Ça fait chaud au cœur, quand il en reste des mignons.
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- PhyliaNiveau 9
Dans mon établissement de REP, situation contraire : trop d'inscrits pour un nombre de places limitées... C'est désolant, mais dans l'autre sens.
Pas de budget pour ouvrir d'autres classes, trop tard pour demander un élargissement des places et chambouler la répartition.
Si j'ai bien compris, il faudrait faire passer la demande au CA l'an prochain, sans garantie qu'on ait autant d'inscrits que cette année... Arf...
Pas de budget pour ouvrir d'autres classes, trop tard pour demander un élargissement des places et chambouler la répartition.
Si j'ai bien compris, il faudrait faire passer la demande au CA l'an prochain, sans garantie qu'on ait autant d'inscrits que cette année... Arf...
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Si c'est une option échangeable contre davantage de temps libre, les élèves comprennent qu'à nos yeux -- nous, les adultes, qui leur disons ce qu'il faut apprendre -- le latin n'a aucune espèce d'importance. Je parie que les choses changeraient beaucoup si, au moins, c'était ça ou une autre option.
- SallustiusNiveau 9
Idem ici. J'ai 72 recrutés mais, pour ouvrir mon 3eme groupe, je vais passer de 2h par semaine à 1h30 faute de dhg. Idem en option français culture antique : j'ai déjà 17 retours positifs sur les 30 premiers inscrits. Il va me falloir deux groupes mais on ne me donnera rien de plus.
- NicétasNiveau 9
Caspar a écrit:Je vais essayer de retrouver l'article, que j'ai vu passer sur mon fil d'actualité. C'était dans Courrier International il me semble.
EDIT: @Nicetas C'est bien un article repris par Courrier International et qui date de 2018, donc ça n'a pas dû s'améliorer depuis. Je suis sur son téléphone donc ce n'est pas pratique mais il est facile à retrouver dans un moteur de recherches "baisse des humanités dans les universités américaines".
Merci Caspar, le voici : https://www.courrierinternational.com/article/universites-dans-les-facs-americaines-les-humanites-sont-passees-de-mode
réservé aux abonnés.
Pour information, le SNALC invite les professeurs de LC à témoigner, je crois qu'on peut écrire jusqu'au 30 juin.
https://snalc.fr/souffrance-au-travail-professeurs-lca/
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« Quand un discours naturel peint une passion ou un effet, on trouve dans soi-même la vérité de ce qu'on entend, laquelle on ne savait pas qu'elle y fût, en sorte qu'on est porté à aimer celui qui nous le fait sentir ; car il ne nous a pas fait montre de son bien, mais du nôtre ; et ainsi ce bienfait nous le rend aimable, outre que cette communauté d'intelligence que nous avons avec lui incline nécessairement le cœur à l'aimer. »
Pascal, Pensées
- BOU74Niveau 9
Nicétas a écrit:Caspar a écrit:Je vais essayer de retrouver l'article, que j'ai vu passer sur mon fil d'actualité. C'était dans Courrier International il me semble.
EDIT: @Nicetas C'est bien un article repris par Courrier International et qui date de 2018, donc ça n'a pas dû s'améliorer depuis. Je suis sur son téléphone donc ce n'est pas pratique mais il est facile à retrouver dans un moteur de recherches "baisse des humanités dans les universités américaines".
Merci Caspar, le voici : https://www.courrierinternational.com/article/universites-dans-les-facs-americaines-les-humanites-sont-passees-de-mode
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Pour information, le SNALC invite les professeurs de LC à témoigner, je crois qu'on peut écrire jusqu'au 30 juin.
https://snalc.fr/souffrance-au-travail-professeurs-lca/
Merci pour ce partage, je viens de répondre à l'instant à ce sondage.
- SphinxProphète
Je suis arrivée en 2012 dans un collège où il y avait deux groupes de 10/15 élèves en 5e, deux groupes d'une vingtaine en 4e et un groupe de 15 en 3e. Puis j'ai perdu des groupes (il est dommage qu'on ne puisse pas garder les petits groupes mais dans un contexte où les heures manquent partout, je comprends bien qu'il n'y avait pas de raison que je garde plus de confort que mes collègues), mais en gardant le même nombre d'élèves (rentrée 2015, groupe de 32 en 5e). Collège plutôt mixte socialement mais avec beaucoup de familles qui poussaient beaucoup leurs enfants. Un certain nombre cumulaient les options latin et euro sans problèmes.
Je suis partie en 2020 avec un seul groupe par niveau, des groupes de 8/15 (sauf en 5e : 25, mais certains auraient sans doute abandonné avant la 3e), des problèmes chaque année pour recruter / enrayer les abandons. Je n'ai pas été remplacée pendant plusieurs mois, puis j'ai été remplacée, puis la collègue est partie en congé maternité et elle n'a jamais été remplacée. Mes ex-5e ont fait leur 3e cette année quasiment sans latin, et pas grand chose en 4e non plus (dont un remplacement par une TZR LM).
Les élèves aimaient bien le latin chez moi, il y avait quelques cas (très minoritaires) d'abandon parce que "quand même ça me fait trop d'heures et pis les autres ils peuvent se lever plus tard / sortir plus tôt / partir en récré", mais la majorité des problèmes que j'ai eus sur la fin, c'est "le latin c'est bien mais je vais plutôt prendre euro".
Entre les deux, qu'est-ce qui s'est passé ? La réforme du collège a tenté de faire abandonner le latin, il a été maintenu de justesse, on a supprimé l'option euro, puis on l'a remise, mais avec entretemps des changements d'horaire (règles imposées sur la pause méridienne notamment) qui rendaient le cumul impossible, puis je me suis battue pour rendre le cumul de nouveau possible (le prix étant que ma classe était la seule à finir une heure plus tard que les horaires normaux une fois par semaine). Et voilà le problème.
Ce qui s'est passé, c'est qu'on a mis dans la tête des parents que le latin ne servait à rien (combien de fois ai-je entendu "elle va faire euro parce que c'est plus utile" - je ne l'entendais jamais mes trois premières années), on leur a mis en tête qu'il faut blinder son CV dès la 5e (au collège, faire des trucs "utiles" pour avoir une "bonne" filière et une "bonne" classe au lycée, sérieusement ?), on leur a fait perdre l'habitude de voir des élèves qui prennent plus d'options et travaillent plus que les autres (pour mes premiers élèves, c'était un truc normal, les derniers n'avaient jamais vu ça). Ce qui s'est passé, c'est qu'on a eu une direction qui mettait le latin à des horaires pourris (négociations chaque année pour ne pas avoir 80% de mes cours de latin en dernière heure tous les jours...), et qui faisait le mort quand des élèves décidaient d'abandonner en 4e "passke j'ai pu envie" (des 4e qui auraient envie de bosser, sans blague ?). Ce qui s'est passé, c'est qu'on a fourré dans la tête de mes collègues d'anglais qu'elles devaient se battre pour leur option, et qui plus est qu'elles devaient se battre contre moi - qu'il y avait une compétition entre les matières, et que le nombre d'heures disciplinaires inscrit dans les textes pour le latin changeant tous les ans, on pouvait bien s'asseoir dessus et m'en donner moins.
Je tiens le ministère (qui a organisé la jungle entre collègues, le désordre pour les élèves, le mépris dans l'opinion publique, la pénurie de profs, et la pénurie de moyens horaires) et dans une moindre mesure le rectorat (qui a rogné consciencieusement les heures de marge) pour entièrement responsables de la déréliction.
Je suis partie en 2020 avec un seul groupe par niveau, des groupes de 8/15 (sauf en 5e : 25, mais certains auraient sans doute abandonné avant la 3e), des problèmes chaque année pour recruter / enrayer les abandons. Je n'ai pas été remplacée pendant plusieurs mois, puis j'ai été remplacée, puis la collègue est partie en congé maternité et elle n'a jamais été remplacée. Mes ex-5e ont fait leur 3e cette année quasiment sans latin, et pas grand chose en 4e non plus (dont un remplacement par une TZR LM).
Les élèves aimaient bien le latin chez moi, il y avait quelques cas (très minoritaires) d'abandon parce que "quand même ça me fait trop d'heures et pis les autres ils peuvent se lever plus tard / sortir plus tôt / partir en récré", mais la majorité des problèmes que j'ai eus sur la fin, c'est "le latin c'est bien mais je vais plutôt prendre euro".
Entre les deux, qu'est-ce qui s'est passé ? La réforme du collège a tenté de faire abandonner le latin, il a été maintenu de justesse, on a supprimé l'option euro, puis on l'a remise, mais avec entretemps des changements d'horaire (règles imposées sur la pause méridienne notamment) qui rendaient le cumul impossible, puis je me suis battue pour rendre le cumul de nouveau possible (le prix étant que ma classe était la seule à finir une heure plus tard que les horaires normaux une fois par semaine). Et voilà le problème.
Ce qui s'est passé, c'est qu'on a mis dans la tête des parents que le latin ne servait à rien (combien de fois ai-je entendu "elle va faire euro parce que c'est plus utile" - je ne l'entendais jamais mes trois premières années), on leur a mis en tête qu'il faut blinder son CV dès la 5e (au collège, faire des trucs "utiles" pour avoir une "bonne" filière et une "bonne" classe au lycée, sérieusement ?), on leur a fait perdre l'habitude de voir des élèves qui prennent plus d'options et travaillent plus que les autres (pour mes premiers élèves, c'était un truc normal, les derniers n'avaient jamais vu ça). Ce qui s'est passé, c'est qu'on a eu une direction qui mettait le latin à des horaires pourris (négociations chaque année pour ne pas avoir 80% de mes cours de latin en dernière heure tous les jours...), et qui faisait le mort quand des élèves décidaient d'abandonner en 4e "passke j'ai pu envie" (des 4e qui auraient envie de bosser, sans blague ?). Ce qui s'est passé, c'est qu'on a fourré dans la tête de mes collègues d'anglais qu'elles devaient se battre pour leur option, et qui plus est qu'elles devaient se battre contre moi - qu'il y avait une compétition entre les matières, et que le nombre d'heures disciplinaires inscrit dans les textes pour le latin changeant tous les ans, on pouvait bien s'asseoir dessus et m'en donner moins.
Je tiens le ministère (qui a organisé la jungle entre collègues, le désordre pour les élèves, le mépris dans l'opinion publique, la pénurie de profs, et la pénurie de moyens horaires) et dans une moindre mesure le rectorat (qui a rogné consciencieusement les heures de marge) pour entièrement responsables de la déréliction.
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An education was a bit like a communicable sexual disease. It made you unsuitable for a lot of jobs and then you had the urge to pass it on. - Terry Pratchett, Hogfather
"- Alors, Obélix, l'Helvétie c'est comment ? - Plat."
- musaNeoprof expérimenté
Exactement la même expérience que Sphinx mutatis mutandis. Les deux dernières années ont été très difficiles quand j'ai vu mes collègues d'anglais et d'allemand devenir féroces et se battre contre le cumul possible du latin et de l'euro alors que ce cumul était la seule chance de survie de l'option latin dans des conditions correctes. Avec en plus dans ce contexte tout pourri, la venue de l'inspecteur en mission pour pousser l'enseignement de l'ECLA (en pointe dans notre académie) comme si cela pouvait constituer une solution viable et alors qu'on était en train de me parler de regroupement des effectifs et de réduction des heures. J'ai dit niet et jeté l'éponge. Faut pas non plus me prendre (complètement) pour un jambon.
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