- Reine MargotDemi-dieu
Le Monde a écrit:
Beaucoup d’enseignants expriment une perte de sens par rapport à leur métier. Comment l’analysez-vous ?
Ce sentiment de perte de sens, très fort, est renforcé par un décalage entre les attentes du ministère de l’éducation nationale et la réalité du métier que les enseignants vivent au quotidien au sein de leurs classes. Un décalage entre le travail réel et le travail prescrit, peut-on dire. Exemple : les programmes scolaires. Leurs réformes sont fréquentes. Les enseignants doivent se conformer aux nouveaux programmes, mais certains ne suivent pas ces évolutions ou a minima parce qu’ils ne croient pas en leur efficacité ni en leur bien-fondé, comme si ces changements étaient déconnectés d’un réel, celui de la classe, sur lequel les enseignants ont une prise, une connaissance très forte, intime presque, de ce qui marche et ce qui ne marche pas.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/01/02/le-systeme-educatif-francais-se-rapproche-d-un-modele-ou-l-enseignant-est-vu-comme-un-technicien_6156343_3224.html
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Quand tout va mal, quand il n'y a plus aucun espoir, il nous reste Michel Sardou
La famille Bélier
- CochonouNiveau 9
Re: Le système éducatif français se rapproche d'un modèle où l'enseignant est vu comme un technicien
Reine Margot a écrit:Le Monde a écrit:
Beaucoup d’enseignants expriment une perte de sens par rapport à leur métier. Comment l’analysez-vous ?
Ce sentiment de perte de sens, très fort, est renforcé par un décalage entre les attentes du ministère de l’éducation nationale et la réalité du métier que les enseignants vivent au quotidien au sein de leurs classes. Un décalage entre le travail réel et le travail prescrit, peut-on dire. Exemple : les programmes scolaires. Leurs réformes sont fréquentes. Les enseignants doivent se conformer aux nouveaux programmes, mais certains ne suivent pas ces évolutions ou a minima parce qu’ils ne croient pas en leur efficacité ni en leur bien-fondé, comme si ces changements étaient déconnectés d’un réel, celui de la classe, sur lequel les enseignants ont une prise, une connaissance très forte, intime presque, de ce qui marche et ce qui ne marche pas.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/01/02/le-systeme-educatif-francais-se-rapproche-d-un-modele-ou-l-enseignant-est-vu-comme-un-technicien_6156343_3224.html
Je n'ai pas lu cet article en entier, car je ne suis pas abonné au Monde.
Je me retrouve complètement dans les premières phrases de cet extrait. Cela dit, mon sentiment change à partir du moment où l'auteur parle des enseignants qui ne suivent pas les "évolutions" "parce qu'ils ne croient pas en leur efficacité ni en leur bien-fondé".
Au début de l'article, l'auteur donne l'impression que les enseignants sont victimes de décideurs qui méconnaissent les réalités du terrain, et je partage cette idée. Cela dit, à partir de la ligne 4, il donne l'impression que les enseignants sont des gens qui refusent de s'adapter et d'évoluer en raison de leurs convictions. Or, sur ce point-là, je ne suis plus tout à fait d'accord. En tant que fonctionnaire, je fais ce que l'on me demande, et pour être parfaitement honnête, que l'on me demande d'étudier tel siècle ou tel autre à tel ou tel niveau m'indiffère profondément. En fait, quand je ne suis pas les évolutions demandées, c'est uniquement parce que lesdites évolutions ne peuvent pas être suivies. Par exemple, si je n'explique pas 20 textes en classe de 1re, ce n'est pas parce que je ne crois pas en l'efficacité de 20 explications, mais tout simplement parce que c'est impossible à faire - pour moi et mes élèves - si l'on tient compte du temps dont les élèves ont besoin pour comprendre un texte et son explication.
En résumé, je trouve que la logique de ce paragraphe gratuit mériterait d'être revue.
- Reine MargotDemi-dieu
Re: Le système éducatif français se rapproche d'un modèle où l'enseignant est vu comme un technicien
Je pense que ce que tu exprimes est un peu ce que veut dire l'article: les enseignants ne croient pas aux réformes car ils voient qu'elles ne sont pas toujours applicables concrètement (euphémisme)
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La famille Bélier
- beaverforeverNeoprof expérimenté
Re: Le système éducatif français se rapproche d'un modèle où l'enseignant est vu comme un technicien
En histoire géographie, pour la classe de seconde, le programme comprend 124 items pour 96 séances de cours. Si l’on compte 10% des séances consacrées à l’évaluation sommative, ce qui est déjà un temps considérable, alors il reste 86 séances de cours, soit 43 pour l’histoire et 43 pour la géographie. Comme il y a 81 items en histoire (le programme est aussi déséquilibré), cela correspond à 29 mn et 11 secondes par item (chaque séance de cours dure 55 mn). Pour la géographie, la situation est un peu plus favorable puisque le temps d’enseignement disponible par item est de 55 mn.
On se rend mieux compte du caractère farfelu du programme en lisant quelques-uns de ces items :
- montrer comment Athènes associe régime démocratique et établissement d’un empire maritime ;
- l’hétérogénéité religieuse et politique entre Rome et Byzance et au sein du monde musulman ;
- le développement de l’économie « sucrière » et de l’esclavage dans les îles portugaises et au Brésil ;
- Colbert développe une politique maritime et mercantiliste, et fonde les compagnies des Indes et du Levant ;
- l’ébauche d’un gouvernement représentatif ainsi que la définition de grands principes et de droits fondamentaux inspirent les philosophes au cours du XVIIIe siècle, et aboutit à la fondation d’un nouveau régime politique doté d’une constitution écrite avec la naissance des États-Unis d’Amérique [oui, c’est bien un item du programme] ;
- le rôle des physiocrates en France;
- le monde urbain comme lieu où se côtoient hiérarchies traditionnelles (juridiques) et hiérarchies nouvelles (économiques) ;
- la France : des milieux métropolitains et ultramarins entre valorisation et protection ;
- les défis de la transition et du développement pour des pays inégalement développés.
Il est évident que ce programme est complètement disproportionné par rapport à l’élève moyen de seconde et même par rapport à l’élève de seconde d’élite. Comment un élève, ou même un adulte diplômé du supérieur pourrait-il apprendre durablement cet empilement de connaissances ?
Donc, face à ces prescriptions impossibles, les enseignants s'adaptent et ne suivent qu'une partie des injonctions. Que peuvent-ils faire d'autres ?
On peut remarquer qu'il suffit aux concepteurs des programmes de faire une division pour se rendre compte que leurs prescriptions sont à côté de la plaque. Est-ce trop demander à des professeurs d'université ?
On se rend mieux compte du caractère farfelu du programme en lisant quelques-uns de ces items :
- montrer comment Athènes associe régime démocratique et établissement d’un empire maritime ;
- l’hétérogénéité religieuse et politique entre Rome et Byzance et au sein du monde musulman ;
- le développement de l’économie « sucrière » et de l’esclavage dans les îles portugaises et au Brésil ;
- Colbert développe une politique maritime et mercantiliste, et fonde les compagnies des Indes et du Levant ;
- l’ébauche d’un gouvernement représentatif ainsi que la définition de grands principes et de droits fondamentaux inspirent les philosophes au cours du XVIIIe siècle, et aboutit à la fondation d’un nouveau régime politique doté d’une constitution écrite avec la naissance des États-Unis d’Amérique [oui, c’est bien un item du programme] ;
- le rôle des physiocrates en France;
- le monde urbain comme lieu où se côtoient hiérarchies traditionnelles (juridiques) et hiérarchies nouvelles (économiques) ;
- la France : des milieux métropolitains et ultramarins entre valorisation et protection ;
- les défis de la transition et du développement pour des pays inégalement développés.
Il est évident que ce programme est complètement disproportionné par rapport à l’élève moyen de seconde et même par rapport à l’élève de seconde d’élite. Comment un élève, ou même un adulte diplômé du supérieur pourrait-il apprendre durablement cet empilement de connaissances ?
Donc, face à ces prescriptions impossibles, les enseignants s'adaptent et ne suivent qu'une partie des injonctions. Que peuvent-ils faire d'autres ?
On peut remarquer qu'il suffit aux concepteurs des programmes de faire une division pour se rendre compte que leurs prescriptions sont à côté de la plaque. Est-ce trop demander à des professeurs d'université ?
- RiftNiveau 3
Re: Le système éducatif français se rapproche d'un modèle où l'enseignant est vu comme un technicien
Et je rajouterai des réformes souvent (euphémisme encore) nuisibles et délétères pour la qualité de l'enseignement et le métier de prof...Reine Margot a écrit:Je pense que ce que tu exprimes est un peu ce que veut dire l'article: les enseignants ne croient pas aux réformes car ils voient qu'elles ne sont pas toujours applicables concrètement (euphémisme)
L'article est paradoxal car il déplore la dévalorisation du métier tout en déplorant que les enseignants n'appliquent pas bien les réformes qui justement dévalorisent le métier!
- Sondage BVA : les Français et le système scolaire - Le bilan du quinquennat de François Hollande dans le domaine éducatif jugé négatif par 70% des Français
- [Article] Le collège, maillon faible du système éducatif français
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- L'académicienne H. Carrère d'Encausse dénonce "l'effondrement du système éducatif" français, qui "doit être reconstruit".
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