Travailler avec beaucoup de documents - un scénario pédagogique pour l"oral, la lecture et l'écrit

Bonjour,

Je ne savais pas comment nommer ce fil.

Sur une idée géniale d'une amie formatrice en lettres (que j'admire profondément, une perle dans l'EN), j'ai adapté ce qu'elle faisait à l'histoire-géographie.

L'idée est de donner aux élèves un ensemble de documents découpés avec des titres-problématiques/problématisés (vous choisissez). Ils doivent analyser chaque document sur des post-it (les consignes sur les documents peuvent varier, moi je demande à mes élèves d'identifier le document et de dire ce qu'ils en comprennent), puis de les organiser sur une grande affiche (moi, j'ai scotché 3 feuilles A3 par groupe) en triant et hiérarchisant les documents avant de faire une phase où ils vont déambuler voir ce qu'ont fait les autres groupes tout en étant à tour de rôle à leur table pour expliquer aux élèves qui viennent voir leur affiche leur raisonnement et je finis par leur demander un récit répondant à la problématique-titre.

Cette pratique est très souple, au lieu de la déambulation, on peut faire passer les groupes à l'oral au tableau. On peut modifier les questions sur les post-it. On peut leur faire créer les titres problématisés/problématiques.

Cela prend 2h sans la production de récit. Avec le récit, on est dans 3h.

Il y a cinq invariants :
- il faut beaucoup de documents pour les trier/hiérarchiser/organiser.
- il faut une phase d'analyse des documents (donc lecture-compréhension, sur les post-it pour ma part).
- il faut une phase d'organisation des documents après leur analyse.
- il faut une phase d'oral pour découvrir le travail des autres.
- Il faut une phase personnelle et solitaire de réflexion écrite sur le sujet.

Les avantages de cette pratique par rapport à d'autres sont les suivantes :
- mes élèves ont vraiment regardé à fond tous les documents alors que souvent, des documents sont laissés de côté quand on les fait travailler sur plusieurs documents pour aboutir à un récit écrit.
- mes élèves en décrochage ont été parmi les plus loquaces pour expliquer lors de la déambulation le raisonnement de leur groupe.
- j'ai pu faire découvrir des faits historiques que je n'arrivais pas à faire passer par manque de temps et de scénario pédagogique permettant de les inclure dans ma progression (là, sur l'exemple que je vais vous montrer, c'est l'importance de Hindenburg et de la violence électorale que j'ai sue faire passer).
- Tous mes élèves ont produit en masse.
- Les rencontres de raisonnements différents ont été nombreux et intéressants.
- J'ai pu réussir à leur faire comprendre la citation de sources pour plusieurs d'entre eux.

J'ai fait ça sur l'arrivée au pouvoir de Hitler en 3e. Je vais sans doute faire la même chose sur l'histoire du génocide des juifs de 1933 à 1945 (je vais remobiliser les lois de Nuremberg et la Nuit de Cristal ainsi que Mein Kampf) en 3e et sur la cité grecque d'Athènes en 6e.

Je vous montre des photos et des productions :

Première phase : découverte et analyse des documents :






Deuxième phase : élaboration des affiches :







Phase suivante : la déambulation (où vous verrez un de mes élèves prendre la pose...) :





Je vous montre des post-it :





Je vous montre des productions finales brutes non corrigées :







Ce n'est pas parfait mais j'avais trouvé que ce scénario avait pas mal fonctionné avec mes élèves de 3e.

C'est très intéressant. Est-ce que tu as une phase de "correction" du professeur avant qu'ils réalisent leur écrit? J'ai essayé des trucs un peu similaires, mais les élèves (au lycée, niveau moyen faible) n'arrivaient pas à justement sortir des documents et à passer au récit, à trouver des thèmes et à mener un raisonnement. J'ai donc perdu beaucoup de temps car j'ai dû réexpliquer l'ensemble théorique.
Comment arrives-tu à leur faire passer l'importance de la citation de la source?
En gros, quel est ton rôle pendant ces heures?

Merci pour le partage, c'est intéressant. Je vois bien comment adapter cela en 5e pour le chapitre sur "La société urbaine au Moyen-âge", en 4e dans le chapitre sur "L'âge industriel" ou en 3e (j'ai déjà terminé le chapitre sur l'entre deux guerres et préparé mon chapitre de géo suivant mais effectivement, cela s'y prête bien aussi sur certains thèmes de la Seconde Guerre mondiale).

Question : l'écrit final est individuel ou par groupe ?

Y a-t-il un endroit où on peut voir ce que fait la collègue de français dont le travail t'a inspiré, @Elyas ?

Merci pour ce partage Elyas, et même question qu'Henriette.

Je réponds à chacun :

Cleopatra2 a écrit:C'est très intéressant. Est-ce que tu as une phase de "correction" du professeur avant qu'ils réalisent leur écrit? J'ai essayé des trucs un peu similaires, mais les élèves (au lycée, niveau moyen faible) n'arrivaient pas à justement sortir des documents et à passer au récit, à trouver des thèmes et à mener un raisonnement. J'ai donc perdu beaucoup de temps car j'ai dû réexpliquer l'ensemble théorique.
Comment arrives-tu à leur faire passer l'importance de la citation de la source?
En gros, quel est ton rôle pendant ces heures?

Non, je n'ai pas de phase de correction avant la réalisation de l'écrit pour deux raisons : mes gestes professionnels pendant les post-its et l'organisation du dossier ; puis la phase orale qui permet de recadrer les choses.
Pour les citations, je passe partout pour le rappeler et je vends la mèche quand ils veulent essayer mais n'y arrivent pas.
Mon rôle pendant le travail, c'est l'accompagnement, les conseils et le fait de faire sauter les blocages. Je donne du contexte, je montre comment faire etc. Un truc que je fais ailleurs, et que je ferai la prochaine fois, c'est de faire la même chose qu'eux en produisant un ou deux post-it dans un groupe pour leur montrer un modèle ou un exemple.

@Malaga : merci de ta remarque, ça me fait plaisir que ça te donne des idées.

@Isis39 : chacun fait son propre écrit. J'aurais dû prendre une photo de cette phase parce que mes 3e ont carrément collé leurs affiches au mur et se donnaient des conseils pour écrire chacun leur texte.

@Henriette et @Maju : ma collègue va sans doute faire un article. Dès qu'elle l'a fait, je vous donnerai le lien mais en l'état, c'est dans nos cercles de travail en REP+ et en travail sur les pratiques langagières qu'elle a développé ça et m'a montré pour voir si le scénario était transférable ailleurs. En l'état, je ne veux pas donner son travail sans son accord.

Merci du partage. C'est toujours super intéressant de lire ces témoignages, même dans d'autres disciplines. Je suis aussi intéressée par ce qu'a fait ta collègue, je viendrai vérifier ce fil. 

Elyas a écrit:Je réponds à chacun :

Cleopatra2 a écrit:C'est très intéressant. Est-ce que tu as une phase de "correction" du professeur avant qu'ils réalisent leur écrit? J'ai essayé des trucs un peu similaires, mais les élèves (au lycée, niveau moyen faible) n'arrivaient pas à justement sortir des documents et à passer au récit, à trouver des thèmes et à mener un raisonnement. J'ai donc perdu beaucoup de temps car j'ai dû réexpliquer l'ensemble théorique.
Comment arrives-tu à leur faire passer l'importance de la citation de la source?
En gros, quel est ton rôle pendant ces heures?

Non, je n'ai pas de phase de correction avant la réalisation de l'écrit pour deux raisons : mes gestes professionnels pendant les post-its et l'organisation du dossier ; puis la phase orale qui permet de recadrer les choses.
Pour les citations, je passe partout pour le rappeler et je vends la mèche quand ils veulent essayer mais n'y arrivent pas.
Mon rôle pendant le travail, c'est l'accompagnement, les conseils et le fait de faire sauter les blocages. Je donne du contexte, je montre comment faire etc. Un truc que je fais ailleurs, et que je ferai la prochaine fois, c'est de faire la même chose qu'eux en produisant un ou deux post-it dans un groupe pour leur montrer un modèle ou un exemple.

@Malaga : merci de ta remarque, ça me fait plaisir que ça te donne des idées.

@Isis39 : chacun fait son propre écrit. J'aurais dû prendre une photo de cette phase parce que mes 3e ont carrément collé leurs affiches au mur et se donnaient des conseils pour écrire chacun leur texte.

@Henriette et @Maju : ma collègue va sans doute faire un article. Dès qu'elle l'a fait, je vous donnerai le lien mais en l'état, c'est dans nos cercles de travail en REP+ et en travail sur les pratiques langagières qu'elle a développé ça et m'a montré pour voir si le scénario était transférable ailleurs. En l'état, je ne veux pas donner son travail sans son accord.

Ok merci c'est très clair. Mais c'est sûr qu'au lycée avec 35 élèves, ça fait beaucoup de groupes pour être efficace.

Cléopatra2 a écrit:

Elyas a écrit:Je réponds à chacun :

Cleopatra2 a écrit:C'est très intéressant. Est-ce que tu as une phase de "correction" du professeur avant qu'ils réalisent leur écrit? J'ai essayé des trucs un peu similaires, mais les élèves (au lycée, niveau moyen faible) n'arrivaient pas à justement sortir des documents et à passer au récit, à trouver des thèmes et à mener un raisonnement. J'ai donc perdu beaucoup de temps car j'ai dû réexpliquer l'ensemble théorique.
Comment arrives-tu à leur faire passer l'importance de la citation de la source?
En gros, quel est ton rôle pendant ces heures?

Non, je n'ai pas de phase de correction avant la réalisation de l'écrit pour deux raisons : mes gestes professionnels pendant les post-its et l'organisation du dossier ; puis la phase orale qui permet de recadrer les choses.
Pour les citations, je passe partout pour le rappeler et je vends la mèche quand ils veulent essayer mais n'y arrivent pas.
Mon rôle pendant le travail, c'est l'accompagnement, les conseils et le fait de faire sauter les blocages. Je donne du contexte, je montre comment faire etc. Un truc que je fais ailleurs, et que je ferai la prochaine fois, c'est de faire la même chose qu'eux en produisant un ou deux post-it dans un groupe pour leur montrer un modèle ou un exemple.

@Malaga : merci de ta remarque, ça me fait plaisir que ça te donne des idées.

@Isis39 : chacun fait son propre écrit. J'aurais dû prendre une photo de cette phase parce que mes 3e ont carrément collé leurs affiches au mur et se donnaient des conseils pour écrire chacun leur texte.

@Henriette et @Maju : ma collègue va sans doute faire un article. Dès qu'elle l'a fait, je vous donnerai le lien mais en l'état, c'est dans nos cercles de travail en REP+ et en travail sur les pratiques langagières qu'elle a développé ça et m'a montré pour voir si le scénario était transférable ailleurs. En l'état, je ne veux pas donner son travail sans son accord.

Ok merci c'est très clair. Mais c'est sûr qu'au lycée avec 35 élèves, ça fait beaucoup de groupes pour être efficace.

Entre 7 et 9 groupes... c'est clair que c'est gros. Après, en spé, ils sont moins nombreux, non ?

Les groupes d'HGGSP sont en général très chargés.
Cette année, les miens sont 6, mais c'est exceptionnel.

Merci pour les pistes.

Alors j'ai testé cette semaine avec mes 2de mais je pense vraiment que je suis mauvaise pour ce type de cours car c'est l'échec.
Je l'ai fait sur les PPO de la Renaissance : 3 personnages. Les classes étaient divisées en 6 groupes et chaque groupe avait un personnage différent (donc 2 groupes par perso). J'ai donné une feuille de consigne avec une problématique et un plan suggéré pour le classement des documents.
Déjà sur les post-it (j'ai pas tout vu et je n'ai pas encore corrigé) ils ont beaucoup paraphrasé ou décrit sans expliquer, sans rattacher à la problématique ou à la partie où ils avaient classé le doc. Les élèves n'en avaient rien à faire et pour certains (les décrocheurs ou faibles) fait le truc n'importe comment à l'arrache. Ils n'ont pas tous lu/vu les documents dans un groupe et ne pouvaient donc pas présenter leur affiche. Je me trouve inutile pendant ces phases parce qu'à part expliquer le vocabulaire et parfois dire qu'ils se sont trompés je ne servais à rien.
2e phase : j'ai affiché les affiches dans la salle et je les ai fait tourner en groupes remixés pour qu'il y ait à chaque fois 1 personne qui explique aux autres l'affiche et les documents. Du peu que j'ai entendu (là encore, comment circuler efficacement???), c'était pas génial pour la majorité. Enfin pour une classe, la plus faible, cette phase orale a été vraiment un échec, ils m'ont dit qu'ils n'avaient rien compris à ce que racontaient les autres sur leurs affiches. Pour la 2e classe ils m'ont dit que "ça va c'est cool".
3e phase en cours : ils doivent compléter un tableau récapitulatif sur les personnages. Mais je pense que je me suis un peu plantée car mon tableau ne reprend pas exactement les parties demandées sur les affiches, pour qu'ils aient une phase de réflexion tout de même...
Je précise qu'outre les doc, ils avaient droit au livre et au cahier, et que nous avions fait un cours magistral sur la Renaissance avant, où toutes les problématiques avaient été soulevées. Il n'y avait plus qu'à reprendre les idées et les "appliquer" aux personnages.
Je prendrai des photos la semaine prochaine des affiches et des tableaux.
Les élèves ont bien aimé les post-it et marcher dans la classe.
Quand je lis que tu as réussi à leur faire comprendre des phénomènes historiques compliqués et l'importance de la source, je me demande comment tu réussis ça car là je pense vraiment que je n'aurai que de la paraphrase pas reliée au sujet pour 5 groupes sur 6.

C'est vraiment hyper intéressant et cela me donne vraiment très envie d'essayer.
Merci beaucoup Elyas.

Ce type de scénario me semble intéressant, et je rejoins Cléopatra sur les difficultés de mise en pratique dans des classes de lycée de 35 élèves et dans des salles assez exiguës. Je vais aussi essayer sur l'Humanisme et la Renaissance en 2nde avec celle de mes classes la plus autonome. Je cherche aussi d'autres façons d'enseigner qui soient moins ennuyeuses et répétitives pour les élèves, et surtout pour moi...
Mais ce type de scénario va à l'encontre de ce qui nous est prescrit pas l'inspection:

- pas du tout de parties cours dialogué, cela ne sert à rien.
- faire du magistral, rebaptisé "écoute active"
- par séance un exercice "long" type bac ou préparant progressivement aux exercices de type bac: analyse d'une question problématisée/ rédaction d'une partie d'un développement etc Ce qui pour moi est très vite répétitif, surtout pour ma classe où les élèves sont peu scolaires.
- Ne pas multiplier les documents....

DODO62 a écrit:Ce type de scénario me semble intéressant, et je rejoins Cléopatra sur les difficultés de mise en pratique dans des classes de lycée de 35 élèves et dans des salles assez exiguës. Je vais aussi essayer sur l'Humanisme et la Renaissance en 2nde avec celle de mes classes la plus autonome. Je cherche aussi d'autres façons d'enseigner qui soient moins ennuyeuses et répétitives pour les élèves, et surtout pour moi...
Mais ce type de scénario va à l'encontre de ce qui nous est prescrit pas l'inspection:

 - pas du tout de parties cours dialogué, cela ne sert à rien.
- faire du magistral, rebaptisé "écoute active"
- par séance un exercice "long" type bac ou préparant progressivement aux exercices de type bac: analyse d'une question problématisée/ rédaction d'une partie d'un développement etc  Ce qui pour moi est très vite répétitif, surtout pour ma classe où les élèves sont peu scolaires.
 - Ne pas multiplier les documents....

Il n'y a pas de cours dialogué dans ce scénario. Il y a du magistral au début lors de la contextualisation. L'exercice final est une question problématisée. Quant à la multiplication des documents, c'est différent. C'est travailler plusieurs documents à la suite qui est mal vu. Pas travailler beaucoup de documents en même temps puisque c'est au coeur même des évaluations nationales (chose où nos élèves échouent massivement tant dans nos évaluations nationales que dans les tests internationaux).

Après, on fait ce qu'on veut. Je présente ça en formation et ça passe sans souci. A noter que je pense qu'au lycée, hors spécialité et classe technologique sympa (des amis ont testé et ça a très bien fonctionné), on ne peut pas le faire sans avoir ce qui s'est passé dans le témoignage de Cléopatra2.

Après, si l'objectif de l'enseignement de l'histoire-géographie, ce n'est que les examens, effectivement, ça ne sert à rien de faire ça. J'ai la naïveté de penser que la chose la moins importante dans nos enseignements est justement la question des examens. Je sais être sur une position très volcanique et contestée.

Le but premier de ce type de scénario est de faire travailler sur les documents ET d'aboutir à un travail de conceptualisation avec justification et références aux documents. Je connais peu de méthodes qui visent ces objectifs sans les travailler de façon séparée. A savoir que ces deux objectifs servent les exercices du baccalauréat. Le but n'est pas de faire ça systématiquement mais une à trois fois dans l'année. Le danger est la systématisation.