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- JohnMédiateur
Tandis que Neoprofs existe depuis un peu plus de dix ans (et depuis plus de quatre ans sous sa forme actuelle), les Cahiers pédagogiques existent depuis 1945. Le forum accueille actuellement, chaque jour, environ 11 000 visiteurs uniques, et l'association du CRAP-Cahiers pédagogiques compte environ 400 adhérents. Ces rappels montrent bien d'une part toute l'expérience et la dimension historique patiemment acquises depuis des dizaines d'années par le CRAP, et d'autre part la progression très rapide et l'attractivité récente du forum Neoprofs.
Paradoxe 1 : tandis que les Cahiers pédagogiques, qui manifestent un vif intérêt pour les nouvelles technologies, tiennent à publier chaque mois une version papier de leur revue (même si un format PDF existe aussi), le forum Neoprofs, où l'on trouve bon nombre d'amoureux du livre et des revues imprimées, a choisi de se développer exclusivement sur le net. Paradoxe 2 : le CRAP-Cahiers pédagogiques tient beaucoup à l'échange de pratiques et à la communication horizontale, mais fait intervenir principalement des experts, praticiens et chercheurs dont les articles sont sélectionnés par un comité de rédaction, tandis que le forum Neoprofs, où l'on débat bien souvent de l'élitisme, laisse s'exprimer chacun tant qu'il respecte la charte du forum et les lois de la République qui encadrent la liberté d'expression. On en finirait pas de lister d'autres paradoxes, qui montrent à chacun que les choses sont toujours un peu plus compliquées qu'on ne le pense, mais un peu moins incompréhensibles qu'on ne le dit.
Paradoxe 3 : alors qu'on pourrait croire le CRAP-Cahiers pédagogiques absolument hermétique (voire hostile ?) à l'existence d'un forum comme Neoprofs, et qu'on pourrait s'imaginer que Neoprofs se désintéresse (voire se méfie ?) d'une revue papier qui sélectionne ses intervenants en fonction d'une ligne éditoriale pédagogique, voilà que Neoprofs non seulement annonce la célébration du 500e numéro des Cahiers Pédagogiques au siège de la MGEN le 30 octobre 2012, mais en plus... y participe. Peut-être faut-il y voir tout simplement l'application de la célèbre et si juste formule habituellement prêtée à Jean-Jacques Rousseau : "Je préfère être homme de paradoxes qu'être homme de préjugés".
Qui dit participation dit compte rendu. Alors, que dire sur la journée consacrée au 500e numéro des Cahiers Pédagogiques ?
Signalons d'abord que le hashtag #500cahiers a été l'un des termes les plus employés sur twitter ce mardi 30 octobre 2012. Neoprofs n'est d'ailleurs pas étranger à ce succès, puisque le LiveTweet que le compte twitter du forum a consacré à ces rencontres a donné lieu à près de 100 tweets de la part de Neoprofs. Il serait sans doute intéressant de savoir quel(s) membre(s) du CRAP a/ont publié plus de tweets que neoprofs à cette occasion...
Les journées ont été ouvertes par Vincent Peillon en personne, qui a tenu un discours fort applaudi. Prônant l'expérimentation et l'innovation (ce qui fait cependant toujours débat), il a rappelé que, selon lui, "les débats Républicains/Pédagogistes sont faux historiquement et philosophiquement". En fin de discours, il a d'ailleurs clairement rappelé, après avoir évoqué Jaurès, "un grand pédagogue" : "On ne peut pas séparer la pédagogie et la république". Sa volonté de conciliation (oserait-on dire - de syncrétisme ?) se fait au nom de l'élève, envers lequel l'école a selon lui trois devoirs : "Notre souci, a déclaré Vincent Peillon, doit être l'intérêt de l'élève : lui permettre de s'épanouir, de s'émanciper et de s'insérer professionnellement". Le ministre est ensuite revenu sur quelques points importants de sa réforme : rythmes scolaires, ESPE, grand plan numérique, etc.
La première table ronde, consacrée aux médias, était très riche. Philippe Watrelot a rappelé que, selon lui : "La réflexion sur l'école doit être un débat citoyen" ouvert à toute la société. Une militante très active sur twitter, qui connaît bien le forum Neoprofs, a d'ailleurs fait remarquer sur internet, quelque temps plus tard, que la France compte sans doute actuellement plus de 60 millions de pédagogues, puisque chaque citoyen souhaite s'exprimer sur l'école et se sent, à tort ou à raison, habilité à le faire ! Si la question n'est pas tranchée, on ne peut s'empêcher de remarquer que, malgré tout, l'école est un thème politique et un sujet de société majeur, et qu'il serait donc illusoire de lui dénier ce statut d'objet d'un "débat citoyen". Autre remarque liminaire de P. Watrelot, qui prend toute son importance ici : "La mutualisation des pratiques pédagogiques se fait désormais sur le net, à travers les réseaux sociaux". Ce sera l'un des fils rouges de la journée.
Parmi les intervenants, on ne présente plus Marie-Caroline Missir, qui représentait lors de la table ronde l'Association des Journalistes Education (AJE), et qui est responsable de la thématique éducation à l'Express. Elle n'est pas tendre avec les médias, à partir de sa propre expérience dans les médias généralistes : "Les médias ne s'intéressent pas à l'éducation: c'est du vécu !". Elle ajoute : "L'éducation dans les médias, c'est une affaire de marronniers et des camions de clichés". Donnant l'exemple du poids des cartables, de la rentrée de septembre et du bac, qui reviennent chaque année comme alibis pour parler d'éducation, elle conclut : "L'éducation n'est pas qu'une affaire de mamans et de psychologues pour enfants !". Peu après, dans la conversation, elle ajoutera malicieusement : "La pédagogie est idéologique. La preuve, aujourd'hui, certains syndicats ne sont pas représentés ici". Plus judicieuse encore, son analyse des experts considérés comme représentatifs et "bon clients" par les médias : "Il faut élargir le panel d'experts et de chercheurs interrogés par les médias. Ce sont toujours les mêmes !"
Le thème de la table ronde a également été traité de manière historique et internationale. On notera, au détour d'une réflexion historique sur les médias et les personnalités de l'éducation, cette déclaration de F. Jacquet-Francillon : "Je ne dirai pas de mal de Philippe Meirieu, mais je n'en dirai pas de bien non plus". A noter que, selon l'historien, les trois personnalités françaises de l'éducation dont les médias ont dit le plus de mal sont Claude Allègre, Alain Savary et Phiippe Meirieu. Une comparaison avec la Belgique nous a permis d'apprendre que la Belgique est statistiquement, selon sa représentante à la table ronde, "championne du monde... des redoublements !", et une discussion intéressante s'est engagée pour déterminer si la pédagogie relève de la science, de l'art ou de l'artisanat - ce à quoi d'aucuns ont suggéré l'idée qu'elle était plutôt une science appliquée. Les interventions de Claude Lelièvre et Bernard Defrance ont permis d'ouvrir une perspective respectivement historique (tout au long du 20e siècle) et juridique (code pénal et respect du droit de l'enfant dans les établissements). Répondant au public, un intervenant a déclaré : "Certains syndicats sont schizophrènes. Leurs tracts critiquent le socle, et ils proposent de bonnes formations pour l'appliquer". Défendant le journalisme et la presse en général, Marie-Caroline Missir était en terrain conquis lorsqu'elle a défendu le journalisme participatif, et elle a fait un constat malheureusement assez juste : "Les enseignants sont une profession assez mal informée en général".
Après la pause-déjeuner, la compagnie Entrées de Jeu a joué sa représentation de la pièce "Pas de fausse note pour les feuilles doubles". Je dois cette vérité : je m'y rendais à reculons, dans le secret espoir que le temps passe très vite et que l'on arrive le plus rapidement possible à la seconde table ronde. J'avais tort : les 5 membres de la troupe qui ont joué le spectacle ont été formidables (faites-les venir si vous vous intéressez à ce genre de théâtre et/ou de formations). La pièce comportait quatre scènes quotidiennes d'une classe de collège ou lycée, toutes plus vraies que natures. Le public était invité à voir la pièce, puis à intervenir lors d'une seconde représentation des quatre scènes. Les collègues qui souhaitaient intervenir montaient sur scène, et proposaient des solutions pour remédier au problème soulevé. Tous s'en sont très bien tirés, y compris Bernard Defrance qui a tout de même eu maille à partir avec des élèves très remontés pendant qu'il rendait les copies, et qui - ça lui a été reproché à juste titre - a tout de même rabroué de manière assez sèche la jeune fille qui jouait le rôle de la bonne élève un peu trop désireuse de participer et de lui poser des questions correctes et pertinentes.
Un modérateur de neoprofs, qui ne refuse jamais de vivre des sensations fortes et des aventures toujours plus exaltantes, s'est proposé pour monter sur scène devant le public du Crap, et participer à la reconstitution d'une scène classique où un élève repousse indéfiniment, pour tout un tas de bonnes raisons, la date de remise de son devoir-maison. Proposant d'abord de se mettre à la place d'un l'élève, il a ensuite été invité à jouer le rôle de l'enseignant, et le défi a été particulièrement bien relevé. D'une manière générale, les acteurs ont fait preuve d'un extraordinaire talent d'improvisation, et les collègues sur scène ont mis beaucoup de coeur à jouer leur rôle de la manière la plus convaincante possible... avec succès ! Un membre du public, lors des échanges collectifs avec la troupe, a fait part de cette devise aux spectateurs, face à une scène un peu agitée lors de la remise de copies : "Ne rien dire que nous ne fassions, ne rien faire que nous n'ayons dit".
Après la diffusion d'une vidéo rétrospecive réunissant quelques grands témoins, d'Edwy Plenel à Philippe Meirieu, la seconde table ronde a débuté avec l'interview de Luc Cedelle par Christine Vallin. On en retiendra cette phrase : "Les journalistes sont une engeance qui accepte difficilement la critique, mais cette critique est nécessaire". On pourrait ajouter qu'elle s'applique sans doute à tout groupe humain... sans exclusive ! Patrice Bride est revenu sur l'historique des Cahiers Pédagogiques, en indiquant que le comité de rédaction n'est pas sans connaître régulièrement de sérieux débats. Serge Pouts-Lajus a concentré sa réflexion sur le thème d'internet, citant entre autres Weblettres, Sésamaths et les Clionautes, et se déclarant "déçu" par ce qu'a apporté le net à la pratique pédagogique. Deux membres de la table ronde ont d'emblée voulu se démarquer des "extrémistes" (sic) des TICE. Luc Cédelle a bien rappelé que l'outil informatique peut apporter de grandes choses, mais qu'il ne faut pas tourner en dérision ceux qui nourrissent à son égard une certaine méfiance, ou ceux qui continuent à enseigner de manière efficace, mais sans cet outil : "L'intérêt du numérique n'enlève rien à la valeur des enseignants qui ne l'utilisent pas en classe". Serge Pouts-Lajus a très justement fait remarquer que : "Ce sont toujours les extrémistes qui dominent. Je ne suis pas favorable à l'extrémisme du tout numérique [...] Ce sont toujours les "experts" qui parlent du numérique. Même si ce ne sont pas toujours les mêmes, c'est un peu dommage".
Stéphanie de Vanssay, spécialiste des TICE et experte des réseaux sociaux, qui venait de vanter les twittclasses avant l'intervention de Luc Cédelle et Serge Pouts-Lajus, a bien précisé son point de vue : "Je me suis peut-être mal exprimée. [...] Ce qui compte, c'est de mettre en activité les élèves et de donner un sens à cette activité. Et cela peut très bien se faire sans le numérique. On peut bien faire avec ou sans le numérique, et un enseignant qui veut déraper peut déraper avec ou sans le numérique". Tandis que Serge Pouts-Lajus a défendu la coopération à l'échelon local, au niveau de l'établissement, par exemple pour définir le niveau de filtrage du net (souvent inexistant dans l'enseignement agricole par exemple), Luc Cedelle a indiqué l'importance de "temps de déconnexion" pour l'élève (on s'inquiète d'ailleurs que Michel Guillou lui ait indiqué par tweet qu'il ne comprenait pas ce que pouvait bien signifier "temps de déconnexion"). Luc Cedelle a bien rappelé que "l'infobésité" guette nos sociétés modernes, et que twitter par exemple n'y est pas étranger : "Twitter est un outil à la fois fascinant et infernal. Il crée une sollicitation permanente jusqu'à saturation". Enfin, Pascal Bride a invité chacun à "utiliser toutes les ressources de l'écrit, y compris l'écrit diffusé par le net". Nous vous y invitons également bien volontiers !
En conclusion, la journée était bien organisée, et instructive. Faut-il signaler que les tables rondes ont commencé et fini à l'heure, et que le public a eu tout le temps nécessaire pour poser des questions et dialoguer avec les intervenants ? Ce n'est pas si fréquent dans les événements et rencontres de ce genre ! Les différents propos n'avaient objectivement rien de caricatural, mis à part peut-être une intervention superflue de la part d'une oratrice qui, pour défendre twitter, s'est crue obligée de déclarer que twitter était selon elle "bien moins fermé que certains forums". Ce n'est pas une phrase qui, quant à elle, démontre une franche démarche d'ouverture. Mais, dans leur écrasante majorité, les intervenants étaient, il faut le dire, des gens modérés, et le débat a réellement existé : la dénonciation d'un "extrémisme" du "tout-numérique" par exemple, défendu par quelques "experts" récurrents, a été clairement prononcée. Quelle que soit la personne - et il faut ici y inclure vraiment tous les orateurs, et tous les participants à cette journée - chacune avait pour ambition d'amener les élèves à donner le meilleur de soi-même et à progresser dans ses apprentissages. Il faudrait que les partisans de pédagogies différentes les unes des autres comprennent une bonne fois pour toutes qu'il n'est pas besoin, pour faire réussir ses élèves, de taper à bras raccourcis sur la méthode pédagogique du voisin, mais d'appliquer soi-même la méthode pédagogique qui est, pour soi, la plus efficace. Cela n'empêche cependant pas, bien sûr, de garder un oeil critique et vigilant sur les conditions d'enseignement auxquels les collègues sont confrontées au quotidien : si l'enseignant est seul maître dans sa classe, il ne doit par exemple pas être isolé dans son établissement.
On a beaucoup réfléchi au cours de cette journée, mais on a aussi beaucoup ri. Un dessin humoristique, qui a eu beaucoup de succès, montrait Philippe Watrelot en "Master Chef", couronne à l'appui. Ce fut, en tous les cas, un maître de cérémonie fort efficace, très avenant et plein d'humour - pour une journée fort réussie.
À lire également : le compte rendu de Celeborn sur son blog : Lien
Paradoxe 1 : tandis que les Cahiers pédagogiques, qui manifestent un vif intérêt pour les nouvelles technologies, tiennent à publier chaque mois une version papier de leur revue (même si un format PDF existe aussi), le forum Neoprofs, où l'on trouve bon nombre d'amoureux du livre et des revues imprimées, a choisi de se développer exclusivement sur le net. Paradoxe 2 : le CRAP-Cahiers pédagogiques tient beaucoup à l'échange de pratiques et à la communication horizontale, mais fait intervenir principalement des experts, praticiens et chercheurs dont les articles sont sélectionnés par un comité de rédaction, tandis que le forum Neoprofs, où l'on débat bien souvent de l'élitisme, laisse s'exprimer chacun tant qu'il respecte la charte du forum et les lois de la République qui encadrent la liberté d'expression. On en finirait pas de lister d'autres paradoxes, qui montrent à chacun que les choses sont toujours un peu plus compliquées qu'on ne le pense, mais un peu moins incompréhensibles qu'on ne le dit.
Paradoxe 3 : alors qu'on pourrait croire le CRAP-Cahiers pédagogiques absolument hermétique (voire hostile ?) à l'existence d'un forum comme Neoprofs, et qu'on pourrait s'imaginer que Neoprofs se désintéresse (voire se méfie ?) d'une revue papier qui sélectionne ses intervenants en fonction d'une ligne éditoriale pédagogique, voilà que Neoprofs non seulement annonce la célébration du 500e numéro des Cahiers Pédagogiques au siège de la MGEN le 30 octobre 2012, mais en plus... y participe. Peut-être faut-il y voir tout simplement l'application de la célèbre et si juste formule habituellement prêtée à Jean-Jacques Rousseau : "Je préfère être homme de paradoxes qu'être homme de préjugés".
Qui dit participation dit compte rendu. Alors, que dire sur la journée consacrée au 500e numéro des Cahiers Pédagogiques ?
Signalons d'abord que le hashtag #500cahiers a été l'un des termes les plus employés sur twitter ce mardi 30 octobre 2012. Neoprofs n'est d'ailleurs pas étranger à ce succès, puisque le LiveTweet que le compte twitter du forum a consacré à ces rencontres a donné lieu à près de 100 tweets de la part de Neoprofs. Il serait sans doute intéressant de savoir quel(s) membre(s) du CRAP a/ont publié plus de tweets que neoprofs à cette occasion...
Les journées ont été ouvertes par Vincent Peillon en personne, qui a tenu un discours fort applaudi. Prônant l'expérimentation et l'innovation (ce qui fait cependant toujours débat), il a rappelé que, selon lui, "les débats Républicains/Pédagogistes sont faux historiquement et philosophiquement". En fin de discours, il a d'ailleurs clairement rappelé, après avoir évoqué Jaurès, "un grand pédagogue" : "On ne peut pas séparer la pédagogie et la république". Sa volonté de conciliation (oserait-on dire - de syncrétisme ?) se fait au nom de l'élève, envers lequel l'école a selon lui trois devoirs : "Notre souci, a déclaré Vincent Peillon, doit être l'intérêt de l'élève : lui permettre de s'épanouir, de s'émanciper et de s'insérer professionnellement". Le ministre est ensuite revenu sur quelques points importants de sa réforme : rythmes scolaires, ESPE, grand plan numérique, etc.
La première table ronde, consacrée aux médias, était très riche. Philippe Watrelot a rappelé que, selon lui : "La réflexion sur l'école doit être un débat citoyen" ouvert à toute la société. Une militante très active sur twitter, qui connaît bien le forum Neoprofs, a d'ailleurs fait remarquer sur internet, quelque temps plus tard, que la France compte sans doute actuellement plus de 60 millions de pédagogues, puisque chaque citoyen souhaite s'exprimer sur l'école et se sent, à tort ou à raison, habilité à le faire ! Si la question n'est pas tranchée, on ne peut s'empêcher de remarquer que, malgré tout, l'école est un thème politique et un sujet de société majeur, et qu'il serait donc illusoire de lui dénier ce statut d'objet d'un "débat citoyen". Autre remarque liminaire de P. Watrelot, qui prend toute son importance ici : "La mutualisation des pratiques pédagogiques se fait désormais sur le net, à travers les réseaux sociaux". Ce sera l'un des fils rouges de la journée.
Parmi les intervenants, on ne présente plus Marie-Caroline Missir, qui représentait lors de la table ronde l'Association des Journalistes Education (AJE), et qui est responsable de la thématique éducation à l'Express. Elle n'est pas tendre avec les médias, à partir de sa propre expérience dans les médias généralistes : "Les médias ne s'intéressent pas à l'éducation: c'est du vécu !". Elle ajoute : "L'éducation dans les médias, c'est une affaire de marronniers et des camions de clichés". Donnant l'exemple du poids des cartables, de la rentrée de septembre et du bac, qui reviennent chaque année comme alibis pour parler d'éducation, elle conclut : "L'éducation n'est pas qu'une affaire de mamans et de psychologues pour enfants !". Peu après, dans la conversation, elle ajoutera malicieusement : "La pédagogie est idéologique. La preuve, aujourd'hui, certains syndicats ne sont pas représentés ici". Plus judicieuse encore, son analyse des experts considérés comme représentatifs et "bon clients" par les médias : "Il faut élargir le panel d'experts et de chercheurs interrogés par les médias. Ce sont toujours les mêmes !"
Le thème de la table ronde a également été traité de manière historique et internationale. On notera, au détour d'une réflexion historique sur les médias et les personnalités de l'éducation, cette déclaration de F. Jacquet-Francillon : "Je ne dirai pas de mal de Philippe Meirieu, mais je n'en dirai pas de bien non plus". A noter que, selon l'historien, les trois personnalités françaises de l'éducation dont les médias ont dit le plus de mal sont Claude Allègre, Alain Savary et Phiippe Meirieu. Une comparaison avec la Belgique nous a permis d'apprendre que la Belgique est statistiquement, selon sa représentante à la table ronde, "championne du monde... des redoublements !", et une discussion intéressante s'est engagée pour déterminer si la pédagogie relève de la science, de l'art ou de l'artisanat - ce à quoi d'aucuns ont suggéré l'idée qu'elle était plutôt une science appliquée. Les interventions de Claude Lelièvre et Bernard Defrance ont permis d'ouvrir une perspective respectivement historique (tout au long du 20e siècle) et juridique (code pénal et respect du droit de l'enfant dans les établissements). Répondant au public, un intervenant a déclaré : "Certains syndicats sont schizophrènes. Leurs tracts critiquent le socle, et ils proposent de bonnes formations pour l'appliquer". Défendant le journalisme et la presse en général, Marie-Caroline Missir était en terrain conquis lorsqu'elle a défendu le journalisme participatif, et elle a fait un constat malheureusement assez juste : "Les enseignants sont une profession assez mal informée en général".
Après la pause-déjeuner, la compagnie Entrées de Jeu a joué sa représentation de la pièce "Pas de fausse note pour les feuilles doubles". Je dois cette vérité : je m'y rendais à reculons, dans le secret espoir que le temps passe très vite et que l'on arrive le plus rapidement possible à la seconde table ronde. J'avais tort : les 5 membres de la troupe qui ont joué le spectacle ont été formidables (faites-les venir si vous vous intéressez à ce genre de théâtre et/ou de formations). La pièce comportait quatre scènes quotidiennes d'une classe de collège ou lycée, toutes plus vraies que natures. Le public était invité à voir la pièce, puis à intervenir lors d'une seconde représentation des quatre scènes. Les collègues qui souhaitaient intervenir montaient sur scène, et proposaient des solutions pour remédier au problème soulevé. Tous s'en sont très bien tirés, y compris Bernard Defrance qui a tout de même eu maille à partir avec des élèves très remontés pendant qu'il rendait les copies, et qui - ça lui a été reproché à juste titre - a tout de même rabroué de manière assez sèche la jeune fille qui jouait le rôle de la bonne élève un peu trop désireuse de participer et de lui poser des questions correctes et pertinentes.
Un modérateur de neoprofs, qui ne refuse jamais de vivre des sensations fortes et des aventures toujours plus exaltantes, s'est proposé pour monter sur scène devant le public du Crap, et participer à la reconstitution d'une scène classique où un élève repousse indéfiniment, pour tout un tas de bonnes raisons, la date de remise de son devoir-maison. Proposant d'abord de se mettre à la place d'un l'élève, il a ensuite été invité à jouer le rôle de l'enseignant, et le défi a été particulièrement bien relevé. D'une manière générale, les acteurs ont fait preuve d'un extraordinaire talent d'improvisation, et les collègues sur scène ont mis beaucoup de coeur à jouer leur rôle de la manière la plus convaincante possible... avec succès ! Un membre du public, lors des échanges collectifs avec la troupe, a fait part de cette devise aux spectateurs, face à une scène un peu agitée lors de la remise de copies : "Ne rien dire que nous ne fassions, ne rien faire que nous n'ayons dit".
Après la diffusion d'une vidéo rétrospecive réunissant quelques grands témoins, d'Edwy Plenel à Philippe Meirieu, la seconde table ronde a débuté avec l'interview de Luc Cedelle par Christine Vallin. On en retiendra cette phrase : "Les journalistes sont une engeance qui accepte difficilement la critique, mais cette critique est nécessaire". On pourrait ajouter qu'elle s'applique sans doute à tout groupe humain... sans exclusive ! Patrice Bride est revenu sur l'historique des Cahiers Pédagogiques, en indiquant que le comité de rédaction n'est pas sans connaître régulièrement de sérieux débats. Serge Pouts-Lajus a concentré sa réflexion sur le thème d'internet, citant entre autres Weblettres, Sésamaths et les Clionautes, et se déclarant "déçu" par ce qu'a apporté le net à la pratique pédagogique. Deux membres de la table ronde ont d'emblée voulu se démarquer des "extrémistes" (sic) des TICE. Luc Cédelle a bien rappelé que l'outil informatique peut apporter de grandes choses, mais qu'il ne faut pas tourner en dérision ceux qui nourrissent à son égard une certaine méfiance, ou ceux qui continuent à enseigner de manière efficace, mais sans cet outil : "L'intérêt du numérique n'enlève rien à la valeur des enseignants qui ne l'utilisent pas en classe". Serge Pouts-Lajus a très justement fait remarquer que : "Ce sont toujours les extrémistes qui dominent. Je ne suis pas favorable à l'extrémisme du tout numérique [...] Ce sont toujours les "experts" qui parlent du numérique. Même si ce ne sont pas toujours les mêmes, c'est un peu dommage".
Stéphanie de Vanssay, spécialiste des TICE et experte des réseaux sociaux, qui venait de vanter les twittclasses avant l'intervention de Luc Cédelle et Serge Pouts-Lajus, a bien précisé son point de vue : "Je me suis peut-être mal exprimée. [...] Ce qui compte, c'est de mettre en activité les élèves et de donner un sens à cette activité. Et cela peut très bien se faire sans le numérique. On peut bien faire avec ou sans le numérique, et un enseignant qui veut déraper peut déraper avec ou sans le numérique". Tandis que Serge Pouts-Lajus a défendu la coopération à l'échelon local, au niveau de l'établissement, par exemple pour définir le niveau de filtrage du net (souvent inexistant dans l'enseignement agricole par exemple), Luc Cedelle a indiqué l'importance de "temps de déconnexion" pour l'élève (on s'inquiète d'ailleurs que Michel Guillou lui ait indiqué par tweet qu'il ne comprenait pas ce que pouvait bien signifier "temps de déconnexion"). Luc Cedelle a bien rappelé que "l'infobésité" guette nos sociétés modernes, et que twitter par exemple n'y est pas étranger : "Twitter est un outil à la fois fascinant et infernal. Il crée une sollicitation permanente jusqu'à saturation". Enfin, Pascal Bride a invité chacun à "utiliser toutes les ressources de l'écrit, y compris l'écrit diffusé par le net". Nous vous y invitons également bien volontiers !
En conclusion, la journée était bien organisée, et instructive. Faut-il signaler que les tables rondes ont commencé et fini à l'heure, et que le public a eu tout le temps nécessaire pour poser des questions et dialoguer avec les intervenants ? Ce n'est pas si fréquent dans les événements et rencontres de ce genre ! Les différents propos n'avaient objectivement rien de caricatural, mis à part peut-être une intervention superflue de la part d'une oratrice qui, pour défendre twitter, s'est crue obligée de déclarer que twitter était selon elle "bien moins fermé que certains forums". Ce n'est pas une phrase qui, quant à elle, démontre une franche démarche d'ouverture. Mais, dans leur écrasante majorité, les intervenants étaient, il faut le dire, des gens modérés, et le débat a réellement existé : la dénonciation d'un "extrémisme" du "tout-numérique" par exemple, défendu par quelques "experts" récurrents, a été clairement prononcée. Quelle que soit la personne - et il faut ici y inclure vraiment tous les orateurs, et tous les participants à cette journée - chacune avait pour ambition d'amener les élèves à donner le meilleur de soi-même et à progresser dans ses apprentissages. Il faudrait que les partisans de pédagogies différentes les unes des autres comprennent une bonne fois pour toutes qu'il n'est pas besoin, pour faire réussir ses élèves, de taper à bras raccourcis sur la méthode pédagogique du voisin, mais d'appliquer soi-même la méthode pédagogique qui est, pour soi, la plus efficace. Cela n'empêche cependant pas, bien sûr, de garder un oeil critique et vigilant sur les conditions d'enseignement auxquels les collègues sont confrontées au quotidien : si l'enseignant est seul maître dans sa classe, il ne doit par exemple pas être isolé dans son établissement.
On a beaucoup réfléchi au cours de cette journée, mais on a aussi beaucoup ri. Un dessin humoristique, qui a eu beaucoup de succès, montrait Philippe Watrelot en "Master Chef", couronne à l'appui. Ce fut, en tous les cas, un maître de cérémonie fort efficace, très avenant et plein d'humour - pour une journée fort réussie.
À lire également : le compte rendu de Celeborn sur son blog : Lien
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"Qui a construit Thèbes aux sept portes ? Dans les livres, on donne les noms des Rois. Les Rois ont-ils traîné les blocs de pierre ? [...] Quand la Muraille de Chine fut terminée, Où allèrent ce soir-là les maçons ?" (Brecht)
"La nostalgie, c'est plus ce que c'était" (Simone Signoret)
- Palombella RossaNeoprof expérimenté
"" Quelle que soit la personne - et il faut ici y inclure vraiment tous les orateurs, et tous les participants à cette journée - chacune avait pour ambition d'amener les élèves à donner le meilleur de soi-même et à progresser dans ses apprentissages. Il faudrait que les partisans de pédagogies différentes les unes des autres comprennent une bonne fois pour toutes qu'il n'est pas besoin, pour faire réussir ses élèves, de taper à bras raccourcis sur la méthode pédagogique du voisin, mais d'appliquer soi-même la méthode pédagogique qui est, pour soi, la plus efficace.""
Pas besoin, non plus, d'interdire de facto au voisin, en usant des micro-pouvoirs qui nous sont conférés, de pratiquer ladite méthode.
Sinon, je plussoie, naturellement.
Pas besoin, non plus, d'interdire de facto au voisin, en usant des micro-pouvoirs qui nous sont conférés, de pratiquer ladite méthode.
Sinon, je plussoie, naturellement.
- DuplayExpert
Merci John pour ce compte rendu.
Conclusion : vive la liberté pédagogique individuelle, dans le cadre de programmes nationaux bien conçus !
Et que diable, faisons un peu confiance à chaque enseignant pour choisir les outils et méthodes qu'il jugera les plus efficaces par rapport aux élèves qui lui sont confiés et aux conditions concrètes dans lesquelles il exerce son métier... loin des anathèmes et catéchismes de tous ordres !
Je note en revanche que le point noir de cette journée vient, une fois encore, de notre cher ministre.
A quoi bon se réclamer de la République si c'est pour évacuer purement et simplement de ses missions la prise en compte de l'un des droits fondamentaux du citoyen : le droit à l'instruction ?
Conclusion : vive la liberté pédagogique individuelle, dans le cadre de programmes nationaux bien conçus !
Et que diable, faisons un peu confiance à chaque enseignant pour choisir les outils et méthodes qu'il jugera les plus efficaces par rapport aux élèves qui lui sont confiés et aux conditions concrètes dans lesquelles il exerce son métier... loin des anathèmes et catéchismes de tous ordres !
"Notre souci, a déclaré Vincent Peillon, doit être l'intérêt de l'élève : lui permettre de s'épanouir, de s'émanciper et de s'insérer professionnellement".
Je note en revanche que le point noir de cette journée vient, une fois encore, de notre cher ministre.
A quoi bon se réclamer de la République si c'est pour évacuer purement et simplement de ses missions la prise en compte de l'un des droits fondamentaux du citoyen : le droit à l'instruction ?
- JohnMédiateur
Gageons que l'instruction épanouit, émancipe, et permet aussi de s'insérer professionnellement - il n'y a rien de contradictoire entre la déclaration de V. Peillon et le droit à l'instructionMowgli a écrit:"Notre souci, a déclaré Vincent Peillon, doit être l'intérêt de l'élève : lui permettre de s'épanouir, de s'émanciper et de s'insérer professionnellement".
Je note en revanche que le point noir de cette journée vient, une fois encore, de notre cher ministre.
A quoi bon se réclamer de la République si c'est pour évacuer purement et simplement de ses missions la prise en compte de l'un des droits fondamentaux du citoyen : le droit à l'instruction ?
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"Qui a construit Thèbes aux sept portes ? Dans les livres, on donne les noms des Rois. Les Rois ont-ils traîné les blocs de pierre ? [...] Quand la Muraille de Chine fut terminée, Où allèrent ce soir-là les maçons ?" (Brecht)
"La nostalgie, c'est plus ce que c'était" (Simone Signoret)
- Luigi_BGrand Maître
Merci pour ce compte-rendu, John.
Je suis ravi de commencer à entendre des choses sensées sur le numérique et l'école aux Cahiers Pédagogiques.
C'est un devoir moral de porter un regard critique sur ce qui modifie le rapport des élèves à l'enseignement. Un bon enseignant, dans l'intérêt des élèves, doit être sceptique.
Je suis ravi de commencer à entendre des choses sensées sur le numérique et l'école aux Cahiers Pédagogiques.
C'est un devoir moral de porter un regard critique sur ce qui modifie le rapport des élèves à l'enseignement. Un bon enseignant, dans l'intérêt des élèves, doit être sceptique.
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LVM Dernier billet : "Une École si distante"
- DuplayExpert
John a écrit:Gageons que l'instruction épanouit, émancipe, et permet aussi de s'insérer professionnellement - il n'y a rien de contradictoire entre la déclaration de V. Peillon et le droit à l'instructionMowgli a écrit:"Notre souci, a déclaré Vincent Peillon, doit être l'intérêt de l'élève : lui permettre de s'épanouir, de s'émanciper et de s'insérer professionnellement".
Je note en revanche que le point noir de cette journée vient, une fois encore, de notre cher ministre.
A quoi bon se réclamer de la République si c'est pour évacuer purement et simplement de ses missions la prise en compte de l'un des droits fondamentaux du citoyen : le droit à l'instruction ?
Ah, mais je suis bien d'accord avec toi : le droit à l'instruction, dans la conception des fondateurs de la République, a pour finalité l'émancipation et l'épanouissement de chaque citoyen -"le bonheur est un idée neuve en Europe" disait Saint-Just- en lui donnant les moyens d'exercer pleinement sa citoyenneté (et l'activité professionnelle en fait partie, tout comme l'action politique, syndicale ou associative).
Mais c'est tout le contraire des orientations choisies par un ministre dont la politique vise à dynamiter l'école de la République en la mettant sous la coupe des acteurs du périscolaire et des intérêts particuliers, puis à assujettir la formation professionnelle aux besoins à court terme d'un petit "bassin d'emploi" localisé...
- AuroreEsprit éclairé
John a écrit:Quelle que soit la personne - et il faut ici y inclure vraiment tous les orateurs, et tous les participants à cette journée - chacune avait pour ambition d'amener les élèves à donner le meilleur de soi-même et à progresser dans ses apprentissages.
Je ne suis pas d'accord. Sur des questions aussi diverses et essentielles que la finalité de l'école, les contenus et objectifs disciplinaires, les programmes (nationaux ou pas ? socle ou pas socle ?) et, par conséquent, les méthodes pédagogiques (qui ne constituent donc qu'un aspect du problème de l'école), le positionnement des uns et des autres n'est pas du tout le même. Nous l'avons d'ailleurs déjà évoqué sur d'autres fils : certaines positions sont irréconciliables.
On comprend mieux désormais certains choix éditoriaux récents à la lumière de ce reportage.
Après la langue de bois, les vœux pieux. Bien évidemment, je te rejoins sans réserve sur la défense de la liberté pédagogique et la nécessité de laisser à chacun l'opportunité de choisir les méthodes qu'il estime les meilleures. Mais si ce beau principe n'est toujours pas appliqué, ce n'est pas par hasard : depuis Prost et Legrand, les choix pédagogiques sont largement subordonnés des enjeux extérieurs, d'ordre financier et politique, à travers l'instrumentalisation de l'école par des impératifs tant économiques ("l'adaptabilité") que sociétaux (le "vivre-ensemble"), voire purement électoralistes (l'ouverture" aux parents et à la "société").John a écrit:Il faudrait que les partisans de pédagogies différentes les unes des autres comprennent une bonne fois pour toutes qu'il n'est pas besoin, pour faire réussir ses élèves, de taper à bras raccourcis sur la méthode pédagogique du voisin, mais d'appliquer soi-même la méthode pédagogique qui est, pour soi, la plus efficace.
Je ne vois pas très bien ce que tu veux dire par là.John a écrit:Cela n'empêche cependant pas, bien sûr, de garder un œil critique et vigilant sur les conditions d'enseignement auxquels les collègues sont confrontées au quotidien : si l'enseignant est seul maître dans sa classe, il ne doit par exemple pas être isolé dans son établissement.
C'est pourquoi le ministre s'est bien gardé de prononcer le mot "instruction" : voilà un signe qui ne trompe pas.Mowgli a écrit:John a écrit:Gageons que l'instruction épanouit, émancipe, et permet aussi de s'insérer professionnellement - il n'y a rien de contradictoire entre la déclaration de V. Peillon et le droit à l'instructionMowgli a écrit:"Notre souci, a déclaré Vincent Peillon, doit être l'intérêt de l'élève : lui permettre de s'épanouir, de s'émanciper et de s'insérer professionnellement".
Je note en revanche que le point noir de cette journée vient, une fois encore, de notre cher ministre.
A quoi bon se réclamer de la République si c'est pour évacuer purement et simplement de ses missions la prise en compte de l'un des droits fondamentaux du citoyen : le droit à l'instruction ?
Ah, mais je suis bien d'accord avec toi : le droit à l'instruction, dans la conception des fondateurs de la République, a pour finalité l'émancipation et l'épanouissement de chaque citoyen -"le bonheur est un idée neuve en Europe" disait Saint-Just- en lui donnant les moyens d'exercer pleinement sa citoyenneté (et l'activité professionnelle en fait partie, tout comme l'action politique, syndicale ou associative).
Mais c'est tout le contraire des orientations choisies par un ministre dont la politique vise à dynamiter l'école de la République en la mettant sous la coupe des acteurs du périscolaire et des intérêts particuliers, puis à assujettir la formation professionnelle aux besoins à court terme d'un petit "bassin d'emploi" localisé...
- ParatgeNeoprof expérimenté
"Changer la société pour changer l'école, changer l'école pour changer la société".
Devise du CRAP qui signifie donc que les enfants doivent transformés par des "pédagogues" pour arriver à une société selon leurs idées...
A-t-on le droit de trouver ça pour le moins inquiétant ?
Et ce ne sont pas les discours à fendre le coeur des dits pédagogues, dignes des candidates à Miss France, qui vont nous rassurer.
Devise du CRAP qui signifie donc que les enfants doivent transformés par des "pédagogues" pour arriver à une société selon leurs idées...
A-t-on le droit de trouver ça pour le moins inquiétant ?
Et ce ne sont pas les discours à fendre le coeur des dits pédagogues, dignes des candidates à Miss France, qui vont nous rassurer.
- LJeanjeauNiveau 6
Je n'ai participé à la journée du Crap qu'à distance, via Twitter notamment, et pas complètement. Je me garderai donc de commentaires sur le compte-rendu que fait John, qui a en tout cas le mérite d'exister sur ce forum.
Juste une remarque quand même : les deux premiers paragraphes prennent ouvertement le parti d'opposer les tenants de deux conceptions de la pédagogie. Implicitement, c'est une réponse à Vincent Peillon qui proclame qu'entre républicain et pédagogues le débat est clôt.
Justement à ce propos. Le débat est clôt, soit. (Je dis plutôt, pour ma part, qu'il est d'une autre nature). Cela signifierait donc qu'il a été tranché. Mais alors, dans quel sens ?
Ce qui est intéressant, je trouve, c'est que la réponse varie énormément en fonction de ce que l'on regarde. Si on se place du point de vue des lois d'orientation successives depuis 1989 (donc des textes fondamentaux votés par le représentation nationale pour faire fonctionner un service public, ce qui en démocratie n'est pas tout à fait rien), on voit qu'une vision de l'école s'impose peu à peu : centrée sur l'élève, l'évaluation par compétences, la mise en place d'un socle commun, la recherche de "pédagogies du détour", le droit à l'expérimentation, le refus progressif (et encore très timide) des hiérarchies et de la sélection. Cette école là s'impose en effet dans les textes et dans les souhaits d'un nombre relativement conséquent de cadres et de personnels de terrain, minoritaires à mon avis. Mais en réalité, ce n'est pas cette école là qui l'emporte aujourd'hui (si tant est qu'il faille réduire tout cela aux termes d'un débat entre deux camps clairement identifiés). En effet, si on regarde le travail effectif du terrain, le contenu réel des cours effectivement dispensés dans notre institution, que remarque-t-on, sinon la prépondérance de formes de transmission des savoirs issues des générations précédentes ? Combien de collèges ont effectivement joué le jeu du LPC ? Combien de lycées ont effectivement mis en place des dispositifs d'Accompagnement Personnalisé qui soient autre chose que des cours déguisés ? Combien d'établissements se sont effectivement emparés du droit à l'expérimentation pour noter autrement, transmettre autrement, orienter autrement, structurer autrement le temps scolaire ? On peut en trouver quelques uns, évidemment. Mais la "majorité silencieuse", que fait-elle, sinon continuer ce qu'elle a été formée à faire (à l'université et hors de toute démarche didactique). Vous en connaissez beaucoup, vous, des générations entières de lauréats du CAPES qui ont encensé le contenu de la formation reçue à l'IUFM ?
Non, en réalité, je crains, contrairement à ce que proclame Vincent Peillon, que ce débat ne soit pas achevé. Ou alors s'il l'est c'est par l'inertie du terrain, les pesanteurs de l'habitude et de la routine (mode "cause toujours, mais qui sais, je fais ce que je veux").
En ce sens, les journées telles que celle organisée par les Cahiers pédagogiques sont précieuses. La lecture de leur revue aussi. C'est tout de même un point très positif que la présence d'administrateurs et/ou modérateurs de Néoprofs à cette journée. Cela montre qu'indépendamment des outrages des "je-sais-tout-j'ai-tout-vu-tout-fait-et-celui-qui-dit-pas-comme-moi-est-un-con", la discussion reste possible.
Je reste persuadé pour ma part qu'il faut faire évoluer les pratiques, et bien plus que ce que proposera sans doute la future loi d'orientation (et selon des formes, peut-être, qui restent à inventer, afin de dissiper, autant que faire se peut, la croyance magique selon laquelle la pédagogie serait au service de quelque puissance d'argent que l'on peine en réalité à nommer clairement). On voit aujourd'hui clairement où se trouvent les deux leviers qui permettront de réellement faire avancer ce débat :
- "fatiguer le doute" pour convaincre les "aquabonistes" que non, toute transformation du système n'est pas vouée à l'échec pour peu que des gens s'en emparent sur le terrain.
- Refonder la formation des enseignants. Il faut à nouveau inverser l'ordre chronologique des épreuves du CAPES, pour lui redonner la forme qu'il avait en 1950 et que le pouvoir a dénaturé en 1952 sous la pression de la Société des Agrégés, dont on connait effectivement l'audace sans limite en matière d'innovation pédagogique. (voir à ce sujet l'article de Claude Lelièvre sur son Blog, que j'ai repris sur le mien tant je trouve ce rappel éclairant sur les forces qui sont en jeu).
Juste une remarque quand même : les deux premiers paragraphes prennent ouvertement le parti d'opposer les tenants de deux conceptions de la pédagogie. Implicitement, c'est une réponse à Vincent Peillon qui proclame qu'entre républicain et pédagogues le débat est clôt.
Justement à ce propos. Le débat est clôt, soit. (Je dis plutôt, pour ma part, qu'il est d'une autre nature). Cela signifierait donc qu'il a été tranché. Mais alors, dans quel sens ?
Ce qui est intéressant, je trouve, c'est que la réponse varie énormément en fonction de ce que l'on regarde. Si on se place du point de vue des lois d'orientation successives depuis 1989 (donc des textes fondamentaux votés par le représentation nationale pour faire fonctionner un service public, ce qui en démocratie n'est pas tout à fait rien), on voit qu'une vision de l'école s'impose peu à peu : centrée sur l'élève, l'évaluation par compétences, la mise en place d'un socle commun, la recherche de "pédagogies du détour", le droit à l'expérimentation, le refus progressif (et encore très timide) des hiérarchies et de la sélection. Cette école là s'impose en effet dans les textes et dans les souhaits d'un nombre relativement conséquent de cadres et de personnels de terrain, minoritaires à mon avis. Mais en réalité, ce n'est pas cette école là qui l'emporte aujourd'hui (si tant est qu'il faille réduire tout cela aux termes d'un débat entre deux camps clairement identifiés). En effet, si on regarde le travail effectif du terrain, le contenu réel des cours effectivement dispensés dans notre institution, que remarque-t-on, sinon la prépondérance de formes de transmission des savoirs issues des générations précédentes ? Combien de collèges ont effectivement joué le jeu du LPC ? Combien de lycées ont effectivement mis en place des dispositifs d'Accompagnement Personnalisé qui soient autre chose que des cours déguisés ? Combien d'établissements se sont effectivement emparés du droit à l'expérimentation pour noter autrement, transmettre autrement, orienter autrement, structurer autrement le temps scolaire ? On peut en trouver quelques uns, évidemment. Mais la "majorité silencieuse", que fait-elle, sinon continuer ce qu'elle a été formée à faire (à l'université et hors de toute démarche didactique). Vous en connaissez beaucoup, vous, des générations entières de lauréats du CAPES qui ont encensé le contenu de la formation reçue à l'IUFM ?
Non, en réalité, je crains, contrairement à ce que proclame Vincent Peillon, que ce débat ne soit pas achevé. Ou alors s'il l'est c'est par l'inertie du terrain, les pesanteurs de l'habitude et de la routine (mode "cause toujours, mais qui sais, je fais ce que je veux").
En ce sens, les journées telles que celle organisée par les Cahiers pédagogiques sont précieuses. La lecture de leur revue aussi. C'est tout de même un point très positif que la présence d'administrateurs et/ou modérateurs de Néoprofs à cette journée. Cela montre qu'indépendamment des outrages des "je-sais-tout-j'ai-tout-vu-tout-fait-et-celui-qui-dit-pas-comme-moi-est-un-con", la discussion reste possible.
Je reste persuadé pour ma part qu'il faut faire évoluer les pratiques, et bien plus que ce que proposera sans doute la future loi d'orientation (et selon des formes, peut-être, qui restent à inventer, afin de dissiper, autant que faire se peut, la croyance magique selon laquelle la pédagogie serait au service de quelque puissance d'argent que l'on peine en réalité à nommer clairement). On voit aujourd'hui clairement où se trouvent les deux leviers qui permettront de réellement faire avancer ce débat :
- "fatiguer le doute" pour convaincre les "aquabonistes" que non, toute transformation du système n'est pas vouée à l'échec pour peu que des gens s'en emparent sur le terrain.
- Refonder la formation des enseignants. Il faut à nouveau inverser l'ordre chronologique des épreuves du CAPES, pour lui redonner la forme qu'il avait en 1950 et que le pouvoir a dénaturé en 1952 sous la pression de la Société des Agrégés, dont on connait effectivement l'audace sans limite en matière d'innovation pédagogique. (voir à ce sujet l'article de Claude Lelièvre sur son Blog, que j'ai repris sur le mien tant je trouve ce rappel éclairant sur les forces qui sont en jeu).
- CathEnchanteur
Https://twitter.com/cafepedagogique
Applaudissements et depart de peillon
Peillon cest a l'ecole de changer la societe
Peillon: nous irons au terme de la reforme du temps scolaire. J'ai besoin d'un peu de courage, de generosite.
Peillon: la loi dit importance de la complementarite primaire college, rappel evaluation juste du systeme. Nous allons changer l'ecole
Peillon: la loi d'orientation est en train de se terminer. Reformes profondes sur le primaire et le college
Peillon: le socle doit organiser l'enseignement. Ce socle doit etre qque chose qui tire vers le haut
Peillon: tout enseignant doit etre capable d'inventer sa propre pratique
Peillon: les espe (futures ecoles des ens) relieront tous les metiers de l'education
Effectivement, ça va être formidable.
(Merci John pour la remise en forme du message)
Applaudissements et depart de peillon
Peillon cest a l'ecole de changer la societe
Peillon: nous irons au terme de la reforme du temps scolaire. J'ai besoin d'un peu de courage, de generosite.
Peillon: la loi dit importance de la complementarite primaire college, rappel evaluation juste du systeme. Nous allons changer l'ecole
Peillon: la loi d'orientation est en train de se terminer. Reformes profondes sur le primaire et le college
Peillon: le socle doit organiser l'enseignement. Ce socle doit etre qque chose qui tire vers le haut
Peillon: tout enseignant doit etre capable d'inventer sa propre pratique
Peillon: les espe (futures ecoles des ens) relieront tous les metiers de l'education
Effectivement, ça va être formidable.
(Merci John pour la remise en forme du message)
- Presse-puréeGrand sage
John a écrit:Tandis que Neoprofs existe depuis plus un peu plus de dix ans (et depuis plus de quatre ans sous sa forme actuelle), les Cahiers pédagogiques existent depuis 1945. Le forum accueille actuellement, chaque jour, environ 11 000 visiteurs uniques, et l'association du CRAP-Cahiers pédagogiques compte environ 400 adhérents. Ces rappels montrent bien d'une part toute l'expérience et la dimension historique patiemment acquises depuis des dizaines d'années par le CRAP, et d'autre part la progression très rapide et l'attractivité récente du forum Neoprofs.
Paradoxe 1 : tandis que les Cahiers pédagogiques, qui manifestent un vif intérêt pour les nouvelles technologies, tiennent à publier chaque mois une version papier de leur revue (même si un format PDF existe aussi), le forum Neoprofs, où l'on trouve bon nombre d'amoureux du livre et des revues imprimées, a choisi de se développer exclusivement sur le net. Paradoxe 2 : le CRAP-Cahiers pédagogiques tient beaucoup à l'échange de pratiques et à la communication horizontale, mais fait intervenir principalement des experts, praticiens et chercheurs dont les articles sont sélectionnés par un comité de rédaction, tandis que le forum Neoprofs, où l'on débat bien souvent de l'élitisme, laisse s'exprimer chacun tant qu'il respecte la charte du forum et les lois de la République qui encadrent la liberté d'expression. On en finirait pas de lister d'autres paradoxes, qui montrent à chacun que les choses sont toujours un peu plus compliquées qu'on ne le pense, mais un peu moins incompréhensibles qu'on ne le dit.
Paradoxe 3 : alors qu'on pourrait croire le CRAP-Cahiers pédagogiques absolument hermétique (voire hostile ?) à l'existence d'un forum comme Neoprofs, et qu'on pourrait s'imaginer que Neoprofs se désintéresse (voire se méfie ?) d'une revue papier qui sélectionne ses intervenants en fonction d'une ligne éditoriale pédagogique, voilà que Neoprofs non seulement annonce la célébration du 500e numéro des Cahiers Pédagogiques au siège de la MGEN le 30 octobre 2012, mais en plus... y participe. Peut-être faut-il y voir tout simplement l'application de la célèbre et si juste formule habituellement prêtée à Jean-Jacques Rousseau : "Je préfère être homme de paradoxes qu'être homme de préjugés".
Qui dit participation dit compte rendu. Alors, que dire sur la journée consacrée au 500e numéro des Cahiers Pédagogiques ?
.
Merci pour ce CR, dense et intéressant. Cependant, John, je ne comprends pas bien l'intérêt de comparer les Cahiers Pedas à Neoprofs. Les premiers sont une association avec des statuts et un but, l'autre est un média, ce qui est bien différent, non?
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Homines, dum docent, discunt.Sénèque, Epistulae Morales ad Lucilium VII, 8
"La culture est aussi une question de fierté, de rapport de soi à soi, d’esthétique, si l’on veut, en un mot de constitution du sujet humain." (Paul Veyne, La société romaine)
"Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres". La Boétie
"Confondre la culture et son appropriation inégalitaire du fait des conditions sociales : quelle erreur !" H. Pena-Ruiz
"Il vaut mieux qu'un élève sache tenir un balai plutôt qu'il ait été initié à la philosophie: c'est ça le socle commun" un IPR
- JohnMédiateur
Cath5660, aucune de ces citations n'annonce l'apocalypse : il faut attendre les textes precis avant d'etre goguenard, revolte ou inquiet. La citation sur le socle est inexacte : j'ai note "Il faut articuler le socle et les programmes."
Ce n'est pas pareil : articuler ne donne pas preseance au socle.
Ce n'est pas pareil : articuler ne donne pas preseance au socle.
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En achetant des articles au lien ci-dessous, vous nous aidez, sans frais, à gérer le forum. Merci !
"Qui a construit Thèbes aux sept portes ? Dans les livres, on donne les noms des Rois. Les Rois ont-ils traîné les blocs de pierre ? [...] Quand la Muraille de Chine fut terminée, Où allèrent ce soir-là les maçons ?" (Brecht)
"La nostalgie, c'est plus ce que c'était" (Simone Signoret)
- Ingeborg B.Esprit éclairé
Vous ne faites pas dans la nuance.... J'ai aussi assisté au colloque. Je précise que je ne suis pas abonnée aux cahiers pédagogiqie mais cela me permettait de rencontrer des personnes que je ne connaissais que par le biais des échanges virtuels. Rassurez-vous, ce ne sont pas des dinosaures sortis de la caverne soixante-huitarde ou d'n Congrès du PCUS digne du temps de Staline !Paratge a écrit:"Changer la société pour changer l'école, changer l'école pour changer la société".
Devise du CRAP qui signifie donc que les enfants doivent transformés par des "pédagogues" pour arriver à une société selon leurs idées...
A-t-on le droit de trouver ça pour le moins inquiétant ?
Et ce ne sont pas les discours à fendre le coeur des dits pédagogues, dignes des candidates à Miss France, qui vont nous rassurer.
Ce sont des enseignants (contrairement à ce que pensent certains les rédacteurs des cahiers péda sont des professeurs de terrain ) qui partagent des expériences. Comme l'a justement remarqué John, ils ont une qualité essentielle : le sens de l'écoute. Je ne vois pas comment on peut avancer et dialoguer si chacun reste camper sur ses préjugés.
- JohnMédiateur
Presse-purée a écrit:John a écrit:Tandis que Neoprofs existe depuis plus un peu plus de dix ans (et depuis plus de quatre ans sous sa forme actuelle), les Cahiers pédagogiques existent depuis 1945. Le forum accueille actuellement, chaque jour, environ 11 000 visiteurs uniques, et l'association du CRAP-Cahiers pédagogiques compte environ 400 adhérents. Ces rappels montrent bien d'une part toute l'expérience et la dimension historique patiemment acquises depuis des dizaines d'années par le CRAP, et d'autre part la progression très rapide et l'attractivité récente du forum Neoprofs.
Paradoxe 1 : tandis que les Cahiers pédagogiques, qui manifestent un vif intérêt pour les nouvelles technologies, tiennent à publier chaque mois une version papier de leur revue (même si un format PDF existe aussi), le forum Neoprofs, où l'on trouve bon nombre d'amoureux du livre et des revues imprimées, a choisi de se développer exclusivement sur le net. Paradoxe 2 : le CRAP-Cahiers pédagogiques tient beaucoup à l'échange de pratiques et à la communication horizontale, mais fait intervenir principalement des experts, praticiens et chercheurs dont les articles sont sélectionnés par un comité de rédaction, tandis que le forum Neoprofs, où l'on débat bien souvent de l'élitisme, laisse s'exprimer chacun tant qu'il respecte la charte du forum et les lois de la République qui encadrent la liberté d'expression. On en finirait pas de lister d'autres paradoxes, qui montrent à chacun que les choses sont toujours un peu plus compliquées qu'on ne le pense, mais un peu moins incompréhensibles qu'on ne le dit.
Paradoxe 3 : alors qu'on pourrait croire le CRAP-Cahiers pédagogiques absolument hermétique (voire hostile ?) à l'existence d'un forum comme Neoprofs, et qu'on pourrait s'imaginer que Neoprofs se désintéresse (voire se méfie ?) d'une revue papier qui sélectionne ses intervenants en fonction d'une ligne éditoriale pédagogique, voilà que Neoprofs non seulement annonce la célébration du 500e numéro des Cahiers Pédagogiques au siège de la MGEN le 30 octobre 2012, mais en plus... y participe. Peut-être faut-il y voir tout simplement l'application de la célèbre et si juste formule habituellement prêtée à Jean-Jacques Rousseau : "Je préfère être homme de paradoxes qu'être homme de préjugés".
Qui dit participation dit compte rendu. Alors, que dire sur la journée consacrée au 500e numéro des Cahiers Pédagogiques ?
.
Merci pour ce CR, dense et intéressant. Cependant, John, je ne comprends pas bien l'intérêt de comparer les Cahiers Pedas à Neoprofs. Les premiers sont une association avec des statuts et un but, l'autre est un média, ce qui est bien différent, non?
Oui, ce qui doit ressortir c'est que les deux media sont de nature differente et utilisent des moyens differents ;-)
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"La nostalgie, c'est plus ce que c'était" (Simone Signoret)
- ParatgeNeoprof expérimenté
groyer a écrit:Vous ne faites pas dans la nuance.... J'ai aussi assisté au colloque. Je précise que je ne suis pas abonnée aux cahiers pédagogiqie mais cela me permettait de rencontrer des personnes que je ne connaissais que par le biais des échanges virtuels. Rassurez-vous, ce ne sont pas des dinosaures sortis de la caverne soixante-huitarde ou d'n Congrès du PCUS digne du temps de Staline !Paratge a écrit:"Changer la société pour changer l'école, changer l'école pour changer la société".
Devise du CRAP qui signifie donc que les enfants doivent transformés par des "pédagogues" pour arriver à une société selon leurs idées...
A-t-on le droit de trouver ça pour le moins inquiétant ?
Et ce ne sont pas les discours à fendre le coeur des dits pédagogues, dignes des candidates à Miss France, qui vont nous rassurer.
Ce sont des enseignants (contrairement à ce que pensent certains les rédacteurs des cahiers péda sont des professeurs de terrain ) qui partagent des expériences. Comme l'a justement remarqué John, ils ont une qualité essentielle : le sens de l'écoute. Je ne vois pas comment on peut avancer et dialoguer si chacun reste camper sur ses préjugés.
Donc le slogan du CRAP est mensonger ?
Ils ne veulent pas changer mes enfants ?
Je suis rassuré.
- DuplayExpert
A propos, l'un des participants à cette journée aurait-il la possibilité de nous communiquer le texte de l'intervention de Peillon ?
Ça pourrait intéresser beaucoup de monde, il me semble. En tout cas chez les PE...
Ça pourrait intéresser beaucoup de monde, il me semble. En tout cas chez les PE...
- CathEnchanteur
La lecture lointaine du fil des PE montre qu'entre ce qui est dit à certains et à d'autres, il y a parfois une marge...abyssale.
- AuroreEsprit éclairé
On l'aura compris : il n'y en aura jamais assez pour vous. En clair, si les réformes entreprises depuis plus de quarante ans ont échoué, c'est qu'elles n'ont pas été assez appliquées.LJeanjeau a écrit:
Ce qui est intéressant, je trouve, c'est que la réponse varie énormément en fonction de ce que l'on regarde. Si on se place du point de vue des lois d'orientation successives depuis 1989 (donc des textes fondamentaux votés par le représentation nationale pour faire fonctionner un service public, ce qui en démocratie n'est pas tout à fait rien), on voit qu'une vision de l'école s'impose peu à peu : centrée sur l'élève, l'évaluation par compétences, la mise en place d'un socle commun, la recherche de "pédagogies du détour", le droit à l'expérimentation, le refus progressif (et encore très timide) des hiérarchies et de la sélection. Cette école là s'impose en effet dans les textes et dans les souhaits d'un nombre relativement conséquent de cadres et de personnels de terrain, minoritaires à mon avis. Mais en réalité, ce n'est pas cette école là qui l'emporte aujourd'hui (si tant est qu'il faille réduire tout cela aux termes d'un débat entre deux camps clairement identifiés). En effet, si on regarde le travail effectif du terrain, le contenu réel des cours effectivement dispensés dans notre institution, que remarque-t-on, sinon la prépondérance de formes de transmission des savoirs issues des générations précédentes ? Combien de collèges ont effectivement joué le jeu du LPC ? Combien de lycées ont effectivement mis en place des dispositifs d'Accompagnement Personnalisé qui soient autre chose que des cours déguisés ? Combien d'établissements se sont effectivement emparés du droit à l'expérimentation pour noter autrement, transmettre autrement, orienter autrement, structurer autrement le temps scolaire ? On peut en trouver quelques uns, évidemment.
Pour quelles raisons la majorité reste-t-elle silencieuse ? Et pourquoi le rejet des IUFM et de leur idéologie est-il aussi massif ?LJeanjeau a écrit:Mais la "majorité silencieuse", que fait-elle, sinon continuer ce qu'elle a été formée à faire (à l'université et hors de toute démarche didactique). Vous en connaissez beaucoup, vous, des générations entières de lauréats du CAPES qui ont encensé le contenu de la formation reçue à l'IUFM ?
Enfin, pourquoi voulez-vous que tout le monde pense nécessairement comme vous ? Votre réplique en dit long sur les motivations profondes de votre mouvement...
Dans le sens du formatage idéologique ?LJeanjeau a écrit:Refonder la formation des enseignants. Il faut à nouveau inverser l'ordre chronologique des épreuves du CAPES, pour lui redonner la forme qu'il avait en 1950 et que le pouvoir a dénaturé en 1952 sous la pression de la Société des Agrégés, dont on connait effectivement l'audace sans limite en matière d'innovation pédagogique. (voir à ce sujet l'article de Claude Lelièvre sur son Blog, que j'ai repris sur le mien tant je trouve ce rappel éclairant sur les forces qui sont en jeu).
Pas d'accord. Au contraire, ce que Peillon annonce sur le socle (qu'il est urgent de supprimer, et ce n'est pas être "extrémiste" que de considérer cela ), les rythmes scolaires, le rôle accru des collectivités locales et du périscolaire, l'importance et l'institutionnalisation de "l'innovation pédagogique" à tavers les futures ESPE - et j'en oublie - est extrêmement préoccupant.John a écrit:
Cath5660, aucune de ces citations n'annonce l'apocalypse : il faut attendre les textes precis avant d'etre goguenard, révolte ou inquiet.
- JohnMédiateur
Entre ce qui est percu par les uns et par les autres plutot. Je n'ai pas entendu l'organisation des enseignements par rapport au socle : j'ai clairement entendu l'expression "articuler" programmes et socle. La negociation doit porter sur la preponderance de l'un ou de l'autrecath5660 a écrit:La lecture lointaine du fil des PE montre qu'entre ce qui est dit à certains et à d'autres, il y a parfois une marge...abyssale.
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"Qui a construit Thèbes aux sept portes ? Dans les livres, on donne les noms des Rois. Les Rois ont-ils traîné les blocs de pierre ? [...] Quand la Muraille de Chine fut terminée, Où allèrent ce soir-là les maçons ?" (Brecht)
"La nostalgie, c'est plus ce que c'était" (Simone Signoret)
- AuroreEsprit éclairé
Il n'y a pas de négociation à mener dans la mesure où, encore une fois, le socle n'a pas lieu d'être.John a écrit:Entre ce qui est percu par les uns et par les autres plutot. Je n'ai pas entendu l'organisation des enseignements par rapport au socle : j'ai clairement entendu l'expression "articuler" programmes et socle. La negociation doit porter sur la preponderance de l'un ou de l'autrecath5660 a écrit:La lecture lointaine du fil des PE montre qu'entre ce qui est dit à certains et à d'autres, il y a parfois une marge...abyssale.
D'ailleurs, il convient de préciser que le socle a été imposé contre la volonté d'une majorité d'enseignants.
- LJeanjeauNiveau 6
Aurore a écrit:Il n'y a pas de négociation à mener dans la mesure où, encore une fois, le socle n'a pas lieu d'être.John a écrit:Entre ce qui est percu par les uns et par les autres plutot. Je n'ai pas entendu l'organisation des enseignements par rapport au socle : j'ai clairement entendu l'expression "articuler" programmes et socle. La negociation doit porter sur la preponderance de l'un ou de l'autrecath5660 a écrit:La lecture lointaine du fil des PE montre qu'entre ce qui est dit à certains et à d'autres, il y a parfois une marge...abyssale.
Il faudra donc se résoudre à ne discuter que de ce avec quoi vous êtes d'accord. Ce sera effectivement plus simple
Aurore a écrit:On l'aura compris : il n'y en aura jamais assez pour vous. En clair, si les réformes entreprises depuis plus de quarante ans ont échoué, c'est qu'elles n'ont pas été assez appliquées.
Il me semble en effet assez logique de considérer qu'une réforme pas ou peu appliquée ne saurait être responsable d'un échec du système qu'elle prétendait réformer
Sincèrement, autour de vous, vous en voyez beaucoup, des enseignants et des établissements qui appliquent les préceptes de ce que vous appelez les "pédagogistes" ? (indépendamment des militants des mouvements pédagogiques, qui ne doivent quand même pas représenter la majorité de vos collègues !)
- DinosauraHabitué du forum
Aurore a écrit:John a écrit:Quelle que soit la personne - et il faut ici y inclure vraiment tous les orateurs, et tous les participants à cette journée - chacune avait pour ambition d'amener les élèves à donner le meilleur de soi-même et à progresser dans ses apprentissages.
Je ne suis pas d'accord. Sur des questions aussi diverses et essentielles que la finalité de l'école, les contenus et objectifs disciplinaires, les programmes (nationaux ou pas ? socle ou pas socle ?) et, par conséquent, les méthodes pédagogiques (qui ne constituent donc qu'un aspect du problème de l'école), le positionnement des uns et des autres n'est pas du tout le même. Nous l'avons d'ailleurs déjà évoqué sur d'autres fils : certaines positions sont irréconciliables.
On comprend mieux désormais certains choix éditoriaux récents à la lumière de ce reportage.Après la langue de bois, les vœux pieux. Bien évidemment, je te rejoins sans réserve sur la défense de la liberté pédagogique et la nécessité de laisser à chacun l'opportunité de choisir les méthodes qu'il estime les meilleures. Mais si ce beau principe n'est toujours pas appliqué, ce n'est pas par hasard : depuis Prost et Legrand, les choix pédagogiques sont largement subordonnés des enjeux extérieurs, d'ordre financier et politique, à travers l'instrumentalisation de l'école par des impératifs tant économiques ("l'adaptabilité") que sociétaux (le "vivre-ensemble"), voire purement électoralistes (l'ouverture" aux parents et à la "société").John a écrit:Il faudrait que les partisans de pédagogies différentes les unes des autres comprennent une bonne fois pour toutes qu'il n'est pas besoin, pour faire réussir ses élèves, de taper à bras raccourcis sur la méthode pédagogique du voisin, mais d'appliquer soi-même la méthode pédagogique qui est, pour soi, la plus efficace.Je ne vois pas très bien ce que tu veux dire par là.John a écrit:Cela n'empêche cependant pas, bien sûr, de garder un œil critique et vigilant sur les conditions d'enseignement auxquels les collègues sont confrontées au quotidien : si l'enseignant est seul maître dans sa classe, il ne doit par exemple pas être isolé dans son établissement.C'est pourquoi le ministre s'est bien gardé de prononcer le mot "instruction" : voilà un signe qui ne trompe pas.Mowgli a écrit:John a écrit:Gageons que l'instruction épanouit, émancipe, et permet aussi de s'insérer professionnellement - il n'y a rien de contradictoire entre la déclaration de V. Peillon et le droit à l'instructionMowgli a écrit:"Notre souci, a déclaré Vincent Peillon, doit être l'intérêt de l'élève : lui permettre de s'épanouir, de s'émanciper et de s'insérer professionnellement".
Je note en revanche que le point noir de cette journée vient, une fois encore, de notre cher ministre.
A quoi bon se réclamer de la République si c'est pour évacuer purement et simplement de ses missions la prise en compte de l'un des droits fondamentaux du citoyen : le droit à l'instruction ?
Ah, mais je suis bien d'accord avec toi : le droit à l'instruction, dans la conception des fondateurs de la République, a pour finalité l'émancipation et l'épanouissement de chaque citoyen -"le bonheur est un idée neuve en Europe" disait Saint-Just- en lui donnant les moyens d'exercer pleinement sa citoyenneté (et l'activité professionnelle en fait partie, tout comme l'action politique, syndicale ou associative).
Mais c'est tout le contraire des orientations choisies par un ministre dont la politique vise à dynamiter l'école de la République en la mettant sous la coupe des acteurs du périscolaire et des intérêts particuliers, puis à assujettir la formation professionnelle aux besoins à court terme d'un petit "bassin d'emploi" localisé...
+ 1
C'est bien beau le "tout le monde il est beau tout le monde il est gentil" mais en attendant un camp est depuis 30 ans dans les petits papiers du ministère (et des IG) et pas l'autre. Il est là, le sens de l'écoute ?
- CelebornEsprit sacré
LJeanjeau a écrit:
Sincèrement, autour de vous, vous en voyez beaucoup, des enseignants et des établissements qui appliquent les préceptes de ce que vous appelez les "pédagogistes" ?
Dans le premier degré, où nos collègues ont été soumis à des doses intensives d'IUFM (et d'IEN et de conseillers pédagogiques), oui, clairement. Le second degré, qui vit la chose davantage sur le mode de l'injonction contradictoire, est nettement plus circonspect dans son ensemble, mais les « séquences » et autres joyeusetés du même ordre y sont devenues majoritaires néanmoins dans ma discipline, pourtant considérée comme l'une des plus "réac'".
Pour s'en convaincre, il suffit de regarder la représentativité syndicale du 1er et du 2nd degré, et les positions défendues par les syndicats en question. Celles sur le 1er degré sont nettement plus proche du mouvement « pédagogiste » (avec des guillemets).
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- Isis39Enchanteur
Celeborn a écrit:LJeanjeau a écrit:
Sincèrement, autour de vous, vous en voyez beaucoup, des enseignants et des établissements qui appliquent les préceptes de ce que vous appelez les "pédagogistes" ?
Dans le premier degré, où nos collègues ont été soumis à des doses intensives d'IUFM (et d'IEN et de conseillers pédagogiques), oui, clairement. Le second degré, qui vit la chose davantage sur le mode de l'injonction contradictoire, est nettement plus circonspect dans son ensemble, mais les « séquences » et autres joyeusetés du même ordre y sont devenues majoritaires néanmoins dans ma discipline, pourtant considérée comme l'une des plus "réac'".
DE quoi parlez-vous ? Chez nous, une séquence, c'est un chapitre. Rien de novateur.
- Luigi_BGrand Maître
+1 Celeborn.
Il y a aussi les réformes qui ne sont tout simplement pas applicables. Preuve qu'elles ne sont pas conçues par des enseignants, mais par des théoriciens vivant dans un autre monde, celui de l'idéologie.
Exemple : l'Accompagnement Personnalisé. Compte tenu de notre taux d'encadrement (l'un des plus faibles de l'OCDE), personne n'a pu encore m'expliquer en quoi un accompagnement pouvait être "personnalisé" s'il se fait en groupe ou en classe entière... à moins que tout le monde n'en bénéficie pas.
Il y a aussi les réformes qui ne sont tout simplement pas applicables. Preuve qu'elles ne sont pas conçues par des enseignants, mais par des théoriciens vivant dans un autre monde, celui de l'idéologie.
Exemple : l'Accompagnement Personnalisé. Compte tenu de notre taux d'encadrement (l'un des plus faibles de l'OCDE), personne n'a pu encore m'expliquer en quoi un accompagnement pouvait être "personnalisé" s'il se fait en groupe ou en classe entière... à moins que tout le monde n'en bénéficie pas.
LJeanjeau a écrit:Combien de lycées ont effectivement mis en place des dispositifs d'Accompagnement Personnalisé qui soient autre chose que des cours déguisés ?
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LVM Dernier billet : "Une École si distante"
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