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Cath
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par Cath Mer 24 Juil 2013 - 19:22
Je vous propose un lien vers un texte très intéressant, qui traite entre autre de ce qu'est une langue mais surtout de l'acquisition du langage:

http://fr.scribd.com/doc/125227795/La-Plus-Belle-Histoire-Du-Langage-Freebibliotheque-com
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par Vudici Mer 24 Juil 2013 - 22:39
Merci pour le lien. :lecteur: 

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Abraxas
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par Abraxas Jeu 25 Juil 2013 - 5:40
Bien sûr qu'une religion est une secte qui a réussi ! Regardez la scientologie, qui fait le forcing (parfois avec succès : Allemagne ou USA) pour accéder au statut de religion (qui de surcroît amène des avantages fiscaux intéressants…).
Et une langue sans armée parfois redevient dialecte (le latin…) et passe au rang de langue morte. Il faut envisager le mouvement dans les deux sens : un dialecte réussit, devient langue, puis s'épuise, repasse au niveau dialecte, laisse quelques traces — et meurt. Quelques égyptologues (j'en connais) actuels s'amusent à parer entre eux l'égyptien des pharaons, qui domina tout le Moyen-Orient jadis.
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par petit karibou Jeu 25 Juil 2013 - 7:15
A la lecture de ce fil une question me vient: En plus d'une armée et d'une marine, pour devenir langue, un dialecte doit-il aussi avoir une tradition écrite en plus d'orale?
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par Nom d'utilisateur Jeu 25 Juil 2013 - 7:54
petit karibou a écrit:A la lecture de ce fil une question me vient: En plus d'une armée et d'une marine, pour devenir langue, un dialecte doit-il aussi avoir une tradition écrite en plus d'orale?

L'aphorisme attribué à Weinreich ou Meillet ("armée + marine"), et repris sans précautions dans le livre de vulgarisation cité, renvoie la différence langue/dialecte à la sociologie au sens le plus large (politique comprise). Le répondant grammatical de ces attributs reconnus aux langues par opposition aux dialectes, c'est la normalisation, laquelle débouche sur des standards reconnus par la communauté linguistique en question et par les autres. Or, l'écriture a trait à la normalisation et à la diffusion des langues : elle les implique et impose, en même temps qu'elle charrie des modèles scripturaux internationaux (constructions typées des subordonnées,  passivation, internationalismes lexicaux etc.).

Mais d'un autre côté, dans une civilisation de l'écrit, les dialectes s'enseignent, se transmettent, se revendiquent aussi via l'écrit. Ainsi le bon manuel de Marteel sur le flamand de Westhoek "invente"-t-il une graphie inspirée du néerlandais, tout en préservant quelques particularités de l'idiome décrit, et en acceptant parfois une variation libre : Kindtje ou Kindsche, den ou 'n etc. Reste une insistance sur la prééminence de l'oral, typique, une fois de plus, de la perception du dialecte dans notre civilisation écrite.
PS. Vous pourrez comparer avec d'autres situations en prenant connaissance du stimulant recueil "Paroles à dire, paroles à écrire. Inde, Chine, Japon" dirigé par V. Alleton (EHESS, 1997)
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par petit karibou Jeu 25 Juil 2013 - 8:03
Merci de ta réponse.

Dans ma question je parlais bien de véritable tradition écrite, pas de retranscription tardive (comme pour le breton par exemple). Ni même de dialectes qui peuvent ou pas s'écrire.
En fait, je pourrais reformuler en "un langage dans une tradition exclusivement oral, peut-il être considéré comme une langue"?
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par Nom d'utilisateur Jeu 25 Juil 2013 - 8:23
petit karibou a écrit:Merci de ta réponse.

Dans ma question je parlais bien de véritable tradition écrite, pas de retranscription tardive (comme pour le breton par exemple). Ni même de dialectes qui peuvent ou pas s'écrire.
En fait, je pourrais reformuler en "un langage dans une tradition exclusivement oral, peut-il être considéré comme une langue"?

Oui si on considère que dans son acception sociolinguistique qui l'oppose aux dialectes, le terme "langue" ne décrit pas  une invention des temps modernes (occidentaux). Cela peut se discuter.

Je crois que l'inuktitut (un des dialectes inuit, donc) est devenu langue officielle du Nunavut avant d'adopter définitivement l'usage du syllabaire d'Evans, alors que la transcription latine était encore en usage. C'est à vérifier, mais de toute façon, de nos jours, l'écrit est condition sine qua non.

PS (esprit de l'escalier...) Attention, hein, on est bien d'accord qu'une tradition écrite, c'est toujours une tradition étrangère !


Dernière édition par Nom d'utilisateur le Jeu 25 Juil 2013 - 8:33, édité 1 fois
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par petit karibou Jeu 25 Juil 2013 - 8:32
Merci pour ton éclairage.
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par Nom d'utilisateur Jeu 25 Juil 2013 - 8:34
petit karibou a écrit:Merci pour ton éclairage.

(pour éviter tout contre-sens, j'ai rajouté un PS au message précédent).
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marx
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par marx Ven 26 Juil 2013 - 13:51
Nom d'utilisateur a écrit:Vous avez de l'humour, marx, mais un petit détail fait sursauter, ne m'en voulez pas de le relever en passant :

marx a écrit:dans ce cas, tout système de signe (pachtoune, breton, plattdeutsch, serbo-croate...) serait une langue en puissance

Surprenante parenthèse ! Bon, vous savez certainement, mais peut-être pas tous vos lecteurs,  que :
- le pashto, langue majoritaire en Afghanistan, partage dans ce pays avec le persan (dari) le statut de langue officielle.
- le terme serbo-croate, désormais détaillé en bosniaque-croate-monténégrin-serbe  (BCMS), recouvre actuellement plusieurs langues. Ce redéploiement s'accompagne de modifications récentes mais incontestables dans la texture des idiomes concernés.
- le "plattdeutsch" n'est autre que l'ensemble dialectal bas-allemand : plusieurs dialectes, donc. Quand on parle de langue par opposition aux dialectes, il s'agit de la variante considérée comme standard, quelles que soient les difficultés qu'on rencontre pour déterminer cette norme, ou pour l'asseoir)
- ah, et il faudrait parler du breton. Bon, basta !

Pardon encore une fois d'enfoncer des portes ouvertes, mais ça me permet de sortir illico.

Exact, mais j'essayais ici de penser tout "système de signes" abstraction faite de son statut linguistique (langue ou dialecte), sans entrer trop dans les détails du serbo-croate médiéval ou des différentes formes de platt parlées actuellement à Saargemünd ou Saarbruck, etc. et ceci pour ne pas embrouiller une discussion passablement difficile à mener.

A la lecture des différentes interventions, deux problèmes apparaissent :
- si on considère que les langues sont uniquement les idiomes des chefs de guerre et conquérants, cela signifie, encore une fois, que tous les idiomes se valent au départ, que nul n'est préférable à un autre en soi mais n'est préféré que pour des raisons contingentes, accidentelles. Mais il y a peut-être des idiomes qui donnent envie, plus que d'autres, d'être parlés, écrits, travaillés, enrichis (de même qu'on a plus envie de Samantha que de Tabatha, ou de John que de Douglas, parce que Douglas a de belles dents, etc. de même que certaines religions sont plus attractives que d'autres, qui restent confinées à de petites communautés ou sombrent dans l'oubli parce qu'elles sont profondément inintéressantes une fois que le gourou qui les rendait intéressantes a passé). Et de ceci, peut-on démontrer le contraire ? Tous les idiomes sont-ils donc "égaux en droits" et ont-ils un "droit égal" (ou une "puissance égale") à devenir des langues, à charge pour les chefs de guerre de faire triompher celle-ci plutôt que celle-là ?
- imaginer que les idiomes peuvent parcourir un circuit, comme dans une course automobile, où ils seraient dialecte, puis langue, puis de nouveau dialecte, est complètement douteux. Prenons un exemple : si Hitler avait gagné, le français serait-il vraiment devenu, à terme, un dialecte ? N'est-il pas plutôt vraisemblable que le français aurait continué à être parlé, radiodiffusé, écrit, et par les vainqueurs eux-mêmes qui avaient du respect et de l'admiration pour cette langue et sa production écrite ? En effet, une langue est l'élément d'une culture, l'aspect d'une totalité, que l'issue d'une bataille ou de longues guerres ne peut pas détruire. Ainsi il ne viendrait à l'esprit de personne d'affirmer que le grec ancien est un "dialecte" mort : c'est une "langue morte". Et par conséquent ce ne sont pas les vainqueurs qui imposent leurs idiomes, mais les plus beaux idiomes qui deviennent les langues des vainqueurs, des chefs de guerre, des grands prêtres, etc. Les peuples germaniques qui ont envahi la France et l'Espagne ont adopté un idiome d'origine latine.
- les idiomes préférables aux autres pourraient être les idiomes qui offrent plus de possibilités à la pensée. Si Luther a traduit la bible dans son idiome et que celui-ci est ainsi devenu le hochdeutsch officiel, la langue allemande commune aux tudesques, ce n'est pas un hasard.
- l'hypothèse 1 (les meilleurs idiomes se diffusent par leurs qualités propres) n'exclut évidemment pas entièrement l'hypothèse 2 (au sens où il est arrivé que des idiomes barbares, sans doute, s'imposent)
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par Nom d'utilisateur Ven 26 Juil 2013 - 18:31
marx a écrit:
- l'hypothèse 1 (les meilleurs idiomes se diffusent par leurs qualités propres) n'exclut évidemment pas entièrement l'hypothèse 2 (au sens où il est arrivé que des idiomes barbares, sans doute, s'imposent)

Que ne le dites-vous pas explicitement, puisque vous avez raison : la qualité intrinsèque du français laisse à désirer. Lui qui confond les actions du locataire et de son propriétaire ("louer") et dit tout uniment "être" aussi bien pour qualifier que pour localiser ; qui n'a pas de terme courant pour désigner le petit chenal séparant la base du nez de la lèvre supérieure, croit bêtement qu'un nombre supérieur à 1 nécessite un accord au pluriel, et est incapable de substantiviser à tour de bras comme l'ont pourtant fait les philosophes de langue grecque et allemand : comment voulez-vous arriver à penser avec tout cela ? Du coup, traduire bien le Parménide ou la moindre ligne de Heidegger, cela revient à faire un mot-à-mot, en espérant que le lecteur connaît déjà bien ces langues.
En plus, cet idiome est d'une gaucherie...  il peine à conjuguer le verbe "frire" au pluriel de l'indicatif présent et hésite pour "bouillir" au subjonctif présent, multiplie les formes supplétives ou les variantes dans la flexion de verbes aussi courants que "être", "aller" et "asseoir", possède une orthographe dont les règles ne sont qu'emboîtements d'exceptions aux exceptions, est incapable de remplacer "ce jeune homme" par les pronoms ME ou TE dans "on s'arrache ce jeune homme" (pourtant, on a "on se l'arrache") et autres absurdités justement nommées "idiomatiques". Sans parler de sa muflerie dans le traitement des sexes, enfin, des genres... bref, vous voyez ce que je veux dire.
Et est-ce en raison de sa laideur intrinsèque qu'il est allé pêcher chez ses voisins les deux sons rarissimes qu'on entend dans le mot "rue" (leur laideur est relevée par la quasi-unanimité des étrangers interrogés) et s'entête à emprunter à l'anglais ce qu'il possède déjà - et qu'il a même souvent déjà en son temps donné lui-même à l'anglais ?
Une langue barbare donc. Convenons-en entre nous, sans trop l'ébruiter !
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par kamilla Mer 31 Juil 2013 - 20:24
Et si, par-dessus tout ça, on ajoute les considérations politico-éducatives sur ce que doit être une langue, et sur lesquelles méritent le statut de langue ou non, on n'est pas sortis ! :lol: 
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FD
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Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi? - Page 2 Empty Re: Une langue n'est-elle qu'un dialecte qui a réussi?

par FD Mar 26 Mai 2015 - 0:49
Apparemment, tout le monde a répondu en considérant qu’une langue était distinguée par un statut officiel, un standard, etc, alors qu’un dialecte ne l’était pas et occupait un statut socialement inférieur (voire serait intrinsèquement inférieur).

Ce ne sont pas du tout les définitions utilisées en linguistique.
De ce que j’ai compris de mes lectures en amatrice sur le sujet : en linguistique, un dialecte est une variété d’une langue parlée par un certain groupe de locuteurs de cette langue, définis généralement par leur région ou par leur classe sociale (dans ce cas on parle aussi de sociolecte). Ceci implique que toute langue est un ensemble de dialectes (sauf les langues avec très peu de locuteurs, qui n’ont qu’un dialecte), tout le monde parle un dialecte (et tout le monde a un accent aussi). Le français standard qu’on enseigne à l’école est un dialecte du français, tout comme le français de Marseille, d’Alsace, d’Aquitaine, de Picardie, du Sénégal, de Guyane française… Le picard, le berrichon ou l’alsacien sont en revanche des langues. Des dialectes peuvent différer par la grammaire, par exemple les phrases « C’est qu’est-ce que j’ai dit. » ou « Y a pas personne. » (= « Il n’y a personne. ») sont grammaticales dans certains dialectes français, même si elles ne le sont pas en français standard. Le fait qu’un dialecte particulier soit considéré comme le standard de la langue ne tient qu’à des facteurs sociaux et politiques, et certainement pas à un niveau de correction intrinsèquement supérieur de ce dialecte qui autoriserait ses locuteurs à considérer, par exemple, que les locuteurs d’autres dialectes sont des imbéciles incultes qui ne savent même pas parler leur propre langue, une attitude très répandue en France et dans d’autres pays. À ce sujet, les anglophones peuvent aller lire cet article sur les préjudices contre les dialectes new-yorkais et sud-états-unien aux États-Unis.
L’utilisation ou non de l’écriture n’entre pas du tout en compte dans la définition d’une langue.
La difficulté, c’est de déterminer si deux dialectes donnés appartiennent à la même langue ou à deux langues différentes. Le critère de base est l’intercompréhension, mais d’une part, il faut décider à partir de quel degré d’intercompréhension deux dialectes appartiennent à la même langue, d’autre part, il y a problème en cas de continuum dialectal : le locuteur du dialecte B comprend les locuteurs des dialectes A et C, mais A et C ne se comprennent pas. La limite entre langue et dialecte est donc assez floue.

J’ai parlé ci-dessus des définitions scientifiques, mais dans la langue courante les langues et dialectes sont souvent définis suivant des facteurs politiques ou sociaux (c’est ce que tout le monde a fait dans cette discussion). Par exemple, on appellera « dialectes » des langues régionales qui sont indiscutablement des langues du point de vue de la linguistique et réservera le titre de « langue » à la langue qui jouit d’un statut plus prestigieux, souvent dans le but de créer une unité nationale, comme en France avec les « patois », ou en Chine : on parle souvent des « dialectes » chinois mais la Chine compte des dizaines (voire plus) de langues non intercompréhensibles. L’arabe est un cas similaire : il est souvent considéré comme une langue avec des dialectes marocain, algérien, etc, mais les variétés parlées de l’arabe constituent des langues distinctes linguistiquement, même si l’arabe standard littéraire enseigné à l’école est identique partout. Il y a aussi le cas contraire, où on considère que des pays différents utilisent des langues différentes alors que d’un point de vue linguistique ils utilisent des dialectes de la même langue. C’est le cas par exemple avec le serbe et le croate, ou avec le norvégien et le suédois (et le danois à un moindre degré).
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