Page 2 sur 2 • 1, 2
- lene75Prophète
Merci Weirdan pour tes explications. C'est donc la dissertation que j'avais en tête.
Danska, je n'ai pas bien compris le rapport entre mes questions et la première partie de ta réponse, mais pour ce qui est du côté troublant, c'est justement cet effet "hors sol" qui est troublant pour un observateur extérieur. Que vous ayez fait l'ensemble du cours, c'est une chose, mais ce qui reste énigmatique pour un observateur extérieur, c'est comment vous pouvez savoir que l'élève, lui, a bien compris la logique globale du cours et que la partie sur laquelle vous l'interrogez n'est pas le tout. D'où vraisemblablement la polémique, qui risque de se reproduire chaque année, dans un camp ou dans l'autre.
(Pour ce qui est de la philo, il y a toujours des correcteurs un peu spéciaux, mais la norme, c'est de mettre entre 7 et 9 à ce genre de copie. Certains élèves en difficulté sauvent les meubles de cette manière - et j'ai envie de dire tant mieux pour eux quand ce sont des élèves sérieux - mais beaucoup d'élèves essaient quand même de viser plus haut.)
Danska, je n'ai pas bien compris le rapport entre mes questions et la première partie de ta réponse, mais pour ce qui est du côté troublant, c'est justement cet effet "hors sol" qui est troublant pour un observateur extérieur. Que vous ayez fait l'ensemble du cours, c'est une chose, mais ce qui reste énigmatique pour un observateur extérieur, c'est comment vous pouvez savoir que l'élève, lui, a bien compris la logique globale du cours et que la partie sur laquelle vous l'interrogez n'est pas le tout. D'où vraisemblablement la polémique, qui risque de se reproduire chaque année, dans un camp ou dans l'autre.
(Pour ce qui est de la philo, il y a toujours des correcteurs un peu spéciaux, mais la norme, c'est de mettre entre 7 et 9 à ce genre de copie. Certains élèves en difficulté sauvent les meubles de cette manière - et j'ai envie de dire tant mieux pour eux quand ce sont des élèves sérieux - mais beaucoup d'élèves essaient quand même de viser plus haut.)
- DanskaOracle
lene75 a écrit:Merci Weirdan pour tes explications. C'est donc la dissertation que j'avais en tête.
Danska, je n'ai pas bien compris le rapport entre mes questions et la première partie de ta réponse, mais pour ce qui est du côté troublant, c'est justement cet effet "hors sol" qui est troublant pour un observateur extérieur. Que vous ayez fait l'ensemble du cours, c'est une chose, mais ce qui reste énigmatique pour un observateur extérieur, c'est comment vous pouvez savoir que l'élève, lui, a bien compris la logique globale du cours et que la partie sur laquelle vous l'interrogez n'est pas le tout. D'où vraisemblablement la polémique, qui risque de se reproduire chaque année, dans un camp ou dans l'autre.
(Pour ce qui est de la philo, il y a toujours des correcteurs un peu spéciaux, mais la norme, c'est de mettre entre 7 et 9 à ce genre de copie. Certains élèves en difficulté sauvent les meubles de cette manière - et j'ai envie de dire tant mieux pour eux quand ce sont des élèves sérieux - mais beaucoup d'élèves essaient quand même de viser plus haut.)
Eh bien tu demandais si les élèves ne devaient pas faire une partie critique ou n'avaient pas le droit de discuter la question : la réponse est non, en tout cas pas sur les copies. C'est pareil tout au long de l'année d'ailleurs : ils ont le droit d'avoir un avis, on peut en discuter voire en débattre à l'oral (de fait c'est souvent ce qui se passe au demeurant, et c'est même plutôt bon signe puisque ça signifie que les élèves s'intéressent au cours et réutilisent les éléments qu'on leur montre), mais pas dans les copies. Et on procède de cette façon depuis 7 ou 8 ans au moins, probablement plus.
Et visiblement c'est pareil pour les notes : un élève qui récite le cours aura grosso modo dans la fourchette de notes que tu cites - c'est ce que j'appelle "bien s'en tirer", quand connaître par coeur son cours sans réfléchir du tout suffit à ne pas se vautrer lamentablement. Et ce n'est pas avec un sujet de bac qu'on sait si l'élève a compris la logique d'un chapitre entier ou pas, ça c'est le boulot des enseignants en cours d'année : au bac on vérifie qu'il a compris une notion au pif, qu'il est capable de comprendre et d'exploiter un document statistique et qu'il est capable de rédiger une synthèse factuelle en développant ses arguments et en s'appuyant sur des documents (sauf pour ceux qui choisissent la dissertation, où là il faut effectivement maîtriser la logique d'un cours entier). C'est déjà pas mal, ça nécessite des connaissances rigoureuses dans au moins 3 chapitres distincts, et franchement je ne vois pas comment on pourrait développer une opinion construite sans maîtriser les connaissances de base, justement.
Quant à l'aspect "troublant", ma foi, les sujets de bac ne sont pas conçus pour des gens qui ne connaissent pas le programme, donc je dois bien dire les polémiques à deux balles des journalistes ou de Mme Michu-du-bristro-d'en-face me passent assez loin au-dessus de la tête... D'autant que curieusement lesdits polémistes oublient de commenter le sujet de mercredi ("vous montrerez que certaines évolutions de l’emploi ont pu affaiblir le rôle intégrateur du travail. + "montrez que la redistribution améliore la situation économique des plus pauvres." + "montrez comment la fiscalité et la protection sociale réduisent les inégalités de niveau de vie." - pas assez vendeur, sans doute.)
Chachalila a écrit:Mais il me semble (d'après ce que disent mes enfants) qu'en classe, on les incite à discuter, débattre... Là, les questions n'abordent les thématiques que sous un angle, et toutes sous le même. Pourquoi pas la moindre question appelant à la nuance ("Vous direz dans quelle mesure...") ?
Parce que c'est un sujet de dissertation, une question qui commence par "dans quelle mesure...", qu'il faut bien 4h pour y répondre et qu'on ne peut pas imposer trois questions de ce type aux candidats si on veut qu'ils aient une chance de finir l'épreuve.
Par ailleurs les questions sont plus nuancées qu'elles n'en ont l'air : dans "montrez que les innovations technologiques peuvent aider à repousser les limites de la croissance", il y a bien un "peuvent", on ne demande pas aux élèves de prouver que les technologies vont sauver la Terre comme a l'air de le croire le collègue qui a tweeté en pleine épreuve (et pour lequel je n'ai pas grande estime), mais simplement que certaines technologies peuvent aider même si elles ne résoudront pas le problème. Idem pour la justice sociale : elle "peut" produire des effets pervers, c'est un fait, ça ne veut pas dire qu'il faut balancer à la poubelle toute idée d'Etat-providence. Idem encore pour la notion de classes sociales, qui "peut" être remise en cause - et c'est vrai, factuellement, on ne manque pas d'arguments pour dire que cette notion est dépassée. J'ai un peu de mal à voir en quoi ce serait dramatique d'ailleurs : ce n'est pas parce que cette notion est moins pertinente qu'à une époque qu'on ne parle plus de pauvreté, d'inégalités sociales, de reproduction sociale et ainsi de suite.
Et encore une fois je ne comprends pas pourquoi vous semblez tous vous focaliser sur ces questions : c'est un sujet de bac, forcément c'est très synthétique et loin de représenter l'ensemble de ce qu'ont vu les élèves tout au long de l'année ; et surtout, même si les questions étaient effectivement très orientées, quelle importance ? Ce ne sont pas 4h d'épreuve qui vont conditionner tout ce que les élèves vont retenir de leurs années de lycée, une épreuve de bac ne va pas les transformer en capitalistes convaincus du jour au lendemain !
- lene75Prophète
Hmm, je crois qu'on ne donne pas le même sens aux mots. Pour moi faire preuve d'esprit critique = discuter un sujet en pesant les différents arguments en présence (qu'il faut donc maîtriser pour pouvoir les discuter, c'est un pré-requis), en tranchant ou pas (puisque j'avais bien compris qu'en SES c'était sans trancher) et donner son avis sont à peu près les exacts opposés.
Pour ce qui est de la fin de ton message, je suis en désaccord total. Ce serait très inquiétant que les sujets d'un examen national public soient orientés, justement parce que, contrairement au contrôle de Mme Michu dans sa classe ou aux examens d'une obscure école privée, ils ont une portée qui dépasse largement les élèves qui bûchent dessus.
Pour le HS sur la notation, en philo la façon de noter a beaucoup changé depuis notre génération, ce dont les gens n'ont pas forcément conscience : la consigne pour le bac est de ne mettre moins de 6 qu'aux « non copies », ce qui, inévitablement, rééchelonne les notes. Les copies qui n'ont pas la moyenne sont donc bien des copies qui ne répondent pas aux exigences de l'épreuve, autrement dit qui n'ont pas compris les attentes, pas juste des copies un peu maladroites, même si, avec le stress, un HS en dissertation ou un gros contresens massif en explication de texte peuvent toujours arriver à des élèves qui tiennent habituellement la route. Un élève qui n'a pas la moyenne pourra compenser avec d'autres matières, mais du point de vue de la nôtre, c'est un élève à qui on ne souhaite pas donner son bac (critère qu'on nous rappelle régulièrement aux réunions d'entente), et un élève en dessous de 8, c'est un élève à qui on ne souhaite pas donner sa chance au rattrapage (encore une fois du point de vue de notre discipline : s'il a de meilleures notes ailleurs, tant mieux pour lui).
Pour ce qui est de la fin de ton message, je suis en désaccord total. Ce serait très inquiétant que les sujets d'un examen national public soient orientés, justement parce que, contrairement au contrôle de Mme Michu dans sa classe ou aux examens d'une obscure école privée, ils ont une portée qui dépasse largement les élèves qui bûchent dessus.
Pour le HS sur la notation, en philo la façon de noter a beaucoup changé depuis notre génération, ce dont les gens n'ont pas forcément conscience : la consigne pour le bac est de ne mettre moins de 6 qu'aux « non copies », ce qui, inévitablement, rééchelonne les notes. Les copies qui n'ont pas la moyenne sont donc bien des copies qui ne répondent pas aux exigences de l'épreuve, autrement dit qui n'ont pas compris les attentes, pas juste des copies un peu maladroites, même si, avec le stress, un HS en dissertation ou un gros contresens massif en explication de texte peuvent toujours arriver à des élèves qui tiennent habituellement la route. Un élève qui n'a pas la moyenne pourra compenser avec d'autres matières, mais du point de vue de la nôtre, c'est un élève à qui on ne souhaite pas donner son bac (critère qu'on nous rappelle régulièrement aux réunions d'entente), et un élève en dessous de 8, c'est un élève à qui on ne souhaite pas donner sa chance au rattrapage (encore une fois du point de vue de notre discipline : s'il a de meilleures notes ailleurs, tant mieux pour lui).
- DanskaOracle
lene75 a écrit:Hmm, je crois qu'on ne donne pas le même sens aux mots. Pour moi faire preuve d'esprit critique = discuter un sujet en pesant les différents arguments en présence (qu'il faut donc maîtriser pour pouvoir les discuter, c'est un pré-requis), en tranchant ou pas (puisque j'avais bien compris qu'en SES c'était sans trancher) et donner son avis sont à peu près les exacts opposés.
Ah oui, on ne donnait effectivement pas le même sens à cette expression. Dans le sens que tu lui donnes on demande bel et bien aux élèves de faire preuve d'esprit critique alors, mais on ne l'évalue directement que dans la dissertation ; dans l'épreuve composée on évalue uniquement la capacité à exposer une facette d'un thème en l'appuyant sur des documents factuels. Cela dit un élève a intérêt à maîtriser tous les aspects de chaque thème malgré tout, puisqu'il ne sait pas à l'avance sur lequel il va être interrogé.
Et effectivement on ne leur demande pas de trancher - en règle générale ce sont des thèmes qui n'ont pas de solution ni de conclusion évidente, ce ne serait guère pertinent de demander à des ados de tirer des conclusions auxquels peinent à aboutir d'éminents économistes ou sociologues.
lene75 a écrit:Pour le HS sur la notation, en philo la façon de noter a beaucoup changé depuis notre génération, ce dont les gens n'ont pas forcément conscience : la consigne pour le bac est de ne mettre moins de 6 qu'aux « non copies », ce qui, inévitablement, rééchelonne les notes. Les copies qui n'ont pas la moyenne sont donc bien des copies qui ne répondent pas aux exigences de l'épreuve, autrement dit qui n'ont pas compris les attentes, pas juste des copies un peu maladroites.
Eh bien oui, c'est pareil en SES : un élève qui n'a pas compris les attentes ne peut pas espérer avoir une bonne note, en revanche il aura quelques points à chaque exercice s'il est capable de ressortir les définitions et d'expliquer quelques notions, même s'il n'arrive pas à les mettre en relation avec les documents ou à les organiser en un raisonnement construit. Quelques points à chaque exercice de l'épreuve composée, ça fait dans les 7-9 au final selon le niveau de la copie. En revanche on n'a aucune consigne pour ne pas descendre en dessous d'une certaine note, je mets régulièrement des 2 ou moins quand les copies sont vraiment indigentes.
Quant au fait que les sujets soient "orientés", ou plus exactement que certains des nombreux sujets présentés cette année soient orientés (parce que bon, cette année on a quand même 14 sujets différents dont seulement 3 qui posent problème, et encore), on a tous les ans ou presque ce genre de polémique, et jusqu'à présent je n'ai pas vu d'influence majeure des sujets de bac en SES sur l'orientation politique de la France ni de ses citoyens...
- Spoiler:
- Et vu le programme ça va être compliqué de faire des sujets qui ne soient pas "orientés" : on parle de croissance, de l'environnement, du chômage, des classes sociales, de la justice sociale et ainsi de suite, je me demande bien comment on peut espérer des sujets absolument neutres sur ces thèmes (enfin vu de l'extérieur, parce qu'en réalité aucun sujet en SES n'engage jamais l'avis personnel des élèves).
- lene75Prophète
Un sujet qui peut être neutre (s'il est formulé comme il faut), c'est par exemple (ou exclusivement ?) un sujet qui n'impose pas à l'élève la réponse qu'il doit démontrer, mais lui demande au contraire de peser le pour et le contre. Donc si j'ai bien compris vos sujets de dissertation le sont.
Il ne s'agit pas de savoir si les sujets de SES orientent à eux seuls la politique du pays mais 1) s'ils s'inscrivent dans une logique plus globale, chaque pierre contribuant à l'édifice, 2) s'ils sont le reflet de cette politique. Par exemple si un État décidait d'interdire l'enseignement de telle ou telle discipline, ou de l'amener à s'éteindre (toute ressemblance avec des faits, etc.), l'enseignement de la discipline en question n'aurait par définition aucune influence sur la politique, mais sa disparition en dirait long sur la politique qui est menée. Or pour garantir la liberté, il ne faut pas attendre qu'elle ait disparu mais au contraire répérer les signaux à bas bruit. Mieux vaut être trop vigilant et alerter pour rien que l'inverse.
Au demeurant on se contrecarre peut-être de l'avis de Mme Michu, mais sa voix a autant de poids que la nôtre et que celle de nos élèves majeurs ou en passe de l'être. Ce sont donc eux tout autant que nous - voire plus s'ils sont plus nombreux - qui ont le pouvoir d'orienter la politique du pays.
Il ne s'agit pas de savoir si les sujets de SES orientent à eux seuls la politique du pays mais 1) s'ils s'inscrivent dans une logique plus globale, chaque pierre contribuant à l'édifice, 2) s'ils sont le reflet de cette politique. Par exemple si un État décidait d'interdire l'enseignement de telle ou telle discipline, ou de l'amener à s'éteindre (toute ressemblance avec des faits, etc.), l'enseignement de la discipline en question n'aurait par définition aucune influence sur la politique, mais sa disparition en dirait long sur la politique qui est menée. Or pour garantir la liberté, il ne faut pas attendre qu'elle ait disparu mais au contraire répérer les signaux à bas bruit. Mieux vaut être trop vigilant et alerter pour rien que l'inverse.
Au demeurant on se contrecarre peut-être de l'avis de Mme Michu, mais sa voix a autant de poids que la nôtre et que celle de nos élèves majeurs ou en passe de l'être. Ce sont donc eux tout autant que nous - voire plus s'ils sont plus nombreux - qui ont le pouvoir d'orienter la politique du pays.
- DanskaOracle
Sauf qu'encore une fois, les sujets de mercredi sont la part belle au rôle de l'Etat-providence et aux conséquences négatives de la précarisation du travail... En général ce genre de sujets amène les représentants du Medef à crier aux enseignants communistes qui font du bourrage de crâne anti-marché. Puisque les sujets de SES sont décriés aussi bien d'un côté que de l'autre, finalement on doit pouvoir en conclure qu'ils sont relativement équilibrés dans l'ensemble.
Et comme je le disais plus haut, si on commence à exiger des candidats qu'ils exposent toutes les facettes du sujet qu'on leur demande de traiter, alors on aura des sujets équilibrés sous forme de dissertation, pas de souci, mais on aura surtout des résultats qui s'effondrent vu le peu d'élèves qui prennent habituellement la dissertation dans cette discipline. Ou alors il faut repenser complètement le programme, les modalités d'épreuves et les attendus, mais là on s'éloigne complètement du sujet initial.
Et comme je le disais plus haut, si on commence à exiger des candidats qu'ils exposent toutes les facettes du sujet qu'on leur demande de traiter, alors on aura des sujets équilibrés sous forme de dissertation, pas de souci, mais on aura surtout des résultats qui s'effondrent vu le peu d'élèves qui prennent habituellement la dissertation dans cette discipline. Ou alors il faut repenser complètement le programme, les modalités d'épreuves et les attendus, mais là on s'éloigne complètement du sujet initial.
- BoubouleDoyen
Danska a écrit:
[...]
Par ailleurs les questions sont plus nuancées qu'elles n'en ont l'air : dans "montrez que les innovations technologiques peuvent aider à repousser les limites de la croissance", il y a bien un "peuvent", on ne demande pas aux élèves de prouver que les technologies vont sauver la Terre comme a l'air de le croire le collègue qui a tweeté en pleine épreuve (et pour lequel je n'ai pas grande estime), mais simplement que certaines technologies peuvent aider même si elles ne résoudront pas le problème. Idem pour la justice sociale : elle "peut" produire des effets pervers, c'est un fait, ça ne veut pas dire qu'il faut balancer à la poubelle toute idée d'Etat-providence. Idem encore pour la notion de classes sociales, qui "peut" être remise en cause - et c'est vrai, factuellement, on ne manque pas d'arguments pour dire que cette notion est dépassée. J'ai un peu de mal à voir en quoi ce serait dramatique d'ailleurs : ce n'est pas parce que cette notion est moins pertinente qu'à une époque qu'on ne parle plus de pauvreté, d'inégalités sociales, de reproduction sociale et ainsi de suite.
Et encore une fois je ne comprends pas pourquoi vous semblez tous vous focaliser sur ces questions : c'est un sujet de bac, forcément c'est très synthétique et loin de représenter l'ensemble de ce qu'ont vu les élèves tout au long de l'année ; et surtout, même si les questions étaient effectivement très orientées, quelle importance ? Ce ne sont pas 4h d'épreuve qui vont conditionner tout ce que les élèves vont retenir de leurs années de lycée, une épreuve de bac ne va pas les transformer en capitalistes convaincus du jour au lendemain !
[...]
Les sujets de bac de SES, c'est quand même les collègues de SES qui en parlent le mieux (ce qui est somme toute logique).
- lene75Prophète
Danska a écrit:Sauf qu'encore une fois, les sujets de mercredi sont la part belle au rôle de l'Etat-providence et aux conséquences négatives de la précarisation du travail... En général ce genre de sujets amène les représentants du Medef à crier aux enseignants communistes qui font du bourrage de crâne anti-marché. Puisque les sujets de SES sont décriés aussi bien d'un côté que de l'autre, finalement on doit pouvoir en conclure qu'ils sont relativement équilibrés dans l'ensemble.
Et comme je le disais plus haut, si on commence à exiger des candidats qu'ils exposent toutes les facettes du sujet qu'on leur demande de traiter, alors on aura des sujets équilibrés sous forme de dissertation, pas de souci, mais on aura surtout des résultats qui s'effondrent vu le peu d'élèves qui prennent habituellement la dissertation dans cette discipline. Ou alors il faut repenser complètement le programme, les modalités d'épreuves et les attendus, mais là on s'éloigne complètement du sujet initial.
D'accord, j'ai entendu et n'ai pas polémiqué là-dessus (edit : sur le 1er paragraphe, je veux dire, le 2e allant plutôt dans le sens d'une situation alarmante, mais qui n'est malheureusement pas propre aux SES, d'où le fait que le débat dépasse largement la seule question des SES). Je répondais à ta remarque selon laquelle quand bien même les sujets seraient orientés, ce ne serait pas grave. Dire qu'ils ne le sont pas et dire que ce serait sans importance qu'ils le soient, ce n'est pas la même chose. Les professeurs de SES sont dans leur rôle en expliquant en quoi les sujets ne sont pas orientés et Mme Michu dans le sien en demandant s'ils ne le sont pas, parce qu'il serait inquiétant qu'ils le soient, surtout si on retrouvait le problème ailleurs.
Edit : surtout quand, en l'occurrence, Mme Michu, c'est, entre autres, une association de professeurs de SES, l'Apses : https://www.apses.org/sujets-de-ses-bac2022/
- LaverdureEmpereur
Oui mais l’apses rappelle surtout que, selon elle, le problème ce sont les programmes et le format des épreuves. Les sujets de cette année, qui y sont conformes, n’en sont que la conséquence.
_________________
- lene75Prophète
Laverdure a écrit:Oui mais l’apses rappelle surtout que, selon elle, le problème ce sont les programmes et le format des épreuves. Les sujets de cette année, qui y sont conformes, n’en sont que la conséquence.
Ce qui confirme mes analyses : le problème, ce n'est pas le sujet en lui-même, mais ce qu'il dévoile. En l'occurrence pour l'Apses, que le programme n'encourage pas le développement de l'esprit critique des élèves, dans une discipline et à un âge où on pourrait supposer que c'est l'enjeu essentiel. Le Snes partage cette analyse : https://www.snes.edu/article/bac-2022-en-ses-des-sujets-tres-start-up-nation/?fbclid=IwAR0XZ8NXn_AoZGtTH1xRYBjgm9sXjyjd52tE1bRlQO4LcvJRT6vcKM2-dag
Et l'analyse que fait Danska, et que je partage dans ma discipline, mais aussi, par exemple, avec des collègues d'HG, est fondamentale sur ce point : une partie de nos élèves n'y arrivent pas, ou pas aussi bien qu'ils le pourraient / qu'on le voudrait. Et j'ajouterais que c'est chaque année plus difficile et qu'on est tenté de renoncer. Ce qui signifie que le problème vient de plus loin. Ce n'est pas qu'on ne peut rien faire à notre niveau, c'est chaque année le même dilemme : prendre le temps de leur apprendre à prendre du recul, etc., et ne pas finir le programme, ou faire le programme au pas de charge sans les amener à réfléchir. C'est qu'il y a des choses qui viennent de plus loin et qui sont des obstacles au développement de la pensée critique, à commencer par la maîtrise de la langue, des raisonnements logiques de base, etc., mais peut-être aussi une manière d'enseigner, des programmes, une conception du rôle de l'école, qu'il convient d'interroger. La réforme du lycée a un rôle à jouer là-dedans : avec la mise en concurrence des spécialités, prendre le risque de plus d'exigences, c'est prendre le risque que les notes s'effondrent... et donc de ne plus avoir d'élèves.
Un sujet de bac en lui-même n'est qu'un révélateur. C'est le moment où des non spécialistes vont pouvoir entendre parler d'une discipline et où toutes ces questions vont pouvoir être mises sur la table.
- IphigénieProphète
En fait si on élargit le sujet, on s'aperçoit vite que tous les programmes aujourd'hui intègrent fallacieusement la dimension:"problématiques contemporaines imposés aux enfants et adolescents" parce qu'"ils faut leur donner les clés de notre société et leur apprendre à prendre du recul".
Par exemple dans une société où les journalistes manifestent largement un très grand nombre de lacunes dans leur formations, c'est aux élèves de quatrième de s'interroger sur la presse et les médias.
Or la meilleure façon de prendre du recul, ce serait que l'école prenne du recul face aux thématiques à la mode.
Par exemple dans une société où les journalistes manifestent largement un très grand nombre de lacunes dans leur formations, c'est aux élèves de quatrième de s'interroger sur la presse et les médias.
Or la meilleure façon de prendre du recul, ce serait que l'école prenne du recul face aux thématiques à la mode.
- lene75Prophète
En fait le souci se retrouve vraiment à tous les niveaux. J'ai fait une opération de repêchage de ma fille au CP. Elle faisait des calculs incroyablement difficiles avec une grande facilité, mais quand on lui demdandait : "Jean a 5 billes, il en donne 2 à sa soeur, combien lui reste-t-il de billes ?" Impossible. Panne sèche, pleurs, "on n'a jamais appris ça à l'école". "5-2 ?", réponse du tac au tac : "3 !". "Jean a 5 billes, il en donne 2 à sa soeur, combien lui reste-t-il de billes ?" --> "Je ne sais pas, je ne comprends rien, on n'a jamais fait ça". J'ai rééduqué la demoiselle à l'aide d'un manuel du Grip pour essayer de lui faire intégrer qu'il fallait qu'elle chercher à comprendre le sens de ce qu'elle faisait, travail qui n'a jamais été fait à l'école (merci le Grip ). Là je suis en train de faire travailler les problèmes à ma 2e qui est en CE2 à l'aide d'un manuel dissident. Il y a des exercices sur "comprendre et résoudre" : à partir d'un problème, quelle opération poser, à partir d'un énoncé, comment trouver la question à poser, comment choisir la bonne question parmi plusieurs proposées, pourquoi tel problème est-il impossible à résoudre, peut-on ou non résoudre ce problème, dans un énoncé, supprimer l'information inutile, réécrire un énoncé dans le bon ordre, etc. C'est un livre niveau CE, donc CE1, CE2. Ma fille est en fin de CE2, ce sont des choses qu'elle n'a jamais travaillées à l'école, tout ce qu'ils font, c'est refaire mécaniquement des exercices déjà fait en classe en récitant par coeur des choses pas comprises. Idem pour le français, on a eu une remplaçante pendant une semaine (1er miracle !), qui leur a fait travailler la compréhension de texte (2e miracle !), avec des questions qui supposent de vraiment comprendre le texte et de faire des déductions, adapté au niveau CE2, évidemment. Hyper efficace, mais c'est quelque chose qui n'est d'habitude jamais fait à l'école, je ne sais pas où ils sont allés la dénicher, cette remplaçante ! À l'autre bout de la chaîne, aux concours des Grandes écoles, mon conjoint rencontre le même problème : des élèves, pourtant parmi les meilleurs du pays, qui "torchent" des exercices plus vite que leur ombre tant que c'est l'application mécanique de ce qui a été vu en classe, mais qui se décomposent totalement dès qu'on leur demande d'expliquer le sens de ce qu'ils font ou qu'on leur pose un problème qui sort un peu de l'ordinaire et demande un peu de réflexion. C'est exactement le problème qu'on rencontre en sciences humaines, des élèves qui sont au choix capables de donner leur avis café du commerce dont on se moque comme d'une guigne ou de réciter un cours, mais qui sont incapables de traiter un sujet ou de comprendre les enjeux d'un texte et de construire une argumentation par eux-mêmes, et pire, qui s'interdisent de le faire. Bref, des élèves qui ont pris l'habitude depuis tout petits de ne prendre aucun recul sur ce qu'ils apprennent et à qui on pourrait donc faire réciter absolument n'importe quoi si on le voulait.
_________________
Une classe, c'est comme une boîte de chocolats, on sait jamais sur quoi on va tomber...
Page 2 sur 2 • 1, 2
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum