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Daphné
Demi-dieu

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par Daphné Ven 25 Fév 2011 - 19:46
retraitée a écrit:
Daphné a écrit:J'ai habité Nancy - enfin une commune suburbaine pandant 9 ans - j'ai été affectée dans plusieurs établissements et franchement Poinca n'est pas du tout un établissement qui m'aurait plus !

Je précise que j'en connaissais plusieurs collègues et c'est le type même d'établissement que je redoute, je préfère un collège de banlieue, avec parking en plus Razz

En voilà des préjugés!
Ce lycée est accessible par tous les transports en commun (train, bus, tram), et recrute nombre d'élèves venus parfois de banlieues éloignées; Quant à moi, les jours de grève des transports, j'y allais à pied. Juste une petite demi-heure de marche. Quant aux parkings des collèges, on s'y fait parfois crever des pneus, ou on retrouve sa voiture constellée de crachats, ou rayée!
@Ysabel : on a ensuite bien, voire très bien mangé à la cantine.

Possible mais je n'aime pas les transports en communs !
Il faut être tributaires de leurs horaires qui ne sont pas franchement les notres, sans compter les petits à déposer à la crèche et à recupérer, non très peu pour moi.
Par contre la cantine ne me gêne pas vu que je n'y mange pas. Razz

A Tuin
A Tuin
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"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par A Tuin Sam 26 Fév 2011 - 10:14
haria a écrit:moi aussi je suis venue du privé et je trouve effectivement que le métier d'enseignant est individualiste. C'est quelque chose qui m'a frappée dès mes premières années comme prof.


Idem.
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La Jabotte
Neoprof expérimenté

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par La Jabotte Sam 26 Fév 2011 - 14:49
A Tuin a écrit:
haria a écrit:moi aussi je suis venue du privé et je trouve effectivement que le métier d'enseignant est individualiste. C'est quelque chose qui m'a frappée dès mes premières années comme prof.


Idem.

Je ne comprends vraiment pas ce que vous appelez "individualiste".
Je ne comprends pas non plus comment on peut dire qu'un métier est individualiste. Devenant prof, on perd toute capacité à se soucier des autres ? C'est l'anti-thèse du prof, selon moi.

En revanche, que le métier d'enseignant soit un des plus solitaires qui soit, malgré les apparences, là, oui, je suis d'accord. Enfin... presque d'accord.


Dernière édition par La Jabotte le Dim 27 Fév 2011 - 15:43, édité 1 fois
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retraitée
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"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par retraitée Sam 26 Fév 2011 - 15:18
Je reviens sur ce point de l'individualisme.
Quand je fais (faisais) cours, je suis seule face à ma classe, et je tiens à être auteur de mon cours, c'est à dire que le cours que je fais est le fruit de ma réflexion, de mes lectures, de mes tâtonnements antérieurs, et s'adapte au public auquel je m'adresse. Ainsi, sans vouloir vexer personne, j'avoue ne pas comprendre certaines demandes de collègues concernant des questionnaires "tout faits" ou faits par d'autres sur des oeuvres. Qui, mieux que moi qui ai étudié l'oeuvre en classe, sait quelles questions il faut poser pour vérifier les acquis?
Cela n'exclut pas une discussion avec les collègues de ma discipline, l'utilisation de travaux parus dans des revues ou sur internet. Mais j'ai besoin de m'approprier tout cela, de l'assimiler, de le faire mien.
Je n'aurais jamais accepté les progressions communes, cette idée me révulse, car ma progression obéissait à deux impératifs ; le niveau des élèves , l'état de leurs connaissances et ma façon personnelle de concevoir des cours structurés permettant de traiter le programme en comblant les lacunes, ou en tentant de les combler.
Et puis, on n'explique bien que ce que l'on aime.

Cela dit, pour en revenir au lycée Poincaré,dans ce lycée, quand j'y étais, les professeurs de Lettres travaillaient ensemble. Nous sommes aujourd'hui tous en retraite, ou peu s'en faut.
Nous travaillions surtout sur les devoirs. Il y avait encore du résumé de texte alors. Nous apportions chacun un ou plusieurs textes jugés intéressants, nous en choisissions un, nous le travaillions ensemble, et chacun proposait ensuite son résumé.
Ces diverses moutures étaient ensuite comparées, critiquées, améliorées, puis imprimées et photocopiées à l'intention des élèves, mais chacun était libre de sa correction et de sa notation.

Idem pour les commentaires ou dissertations.
Mais rien de contraignant dans tout cela. Si je voulais donner d'autres devoirs, je le faisais, et mes collègues aussi.
L'"individualisme" bien compris, pour moi, c'est l'exercice de la liberté, non l'absence de solidarité.
J'ai été solidaire de collègues dont je ne partageais pas forcément les pratiques, mais que l'administration abandonnait ou harcelait quand ils avaient affaire à des classes imbuvables.

roxanne
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Oracle

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par roxanne Sam 26 Fév 2011 - 16:40
Je sais , par exemple que mes collègues de maths , donnent un exemplaire de chacun de leurs DM à leurs collègues..libres à eux après d'en faire ce qu'ils veulent..
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Dani
Niveau 8

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par Dani Sam 26 Fév 2011 - 17:31
marquisedemerteuil a écrit:
La Jabotte a écrit:
[*]En salle des professeurs, lorsque l'un d'entre nous est en souffrance, nous ne l'abandonnons pas. Nous nous montrons le plus souvent solidaires face aux problèmes de discipline, face à la hiérarchie.

heu, on n'a pas fréquenté les mêmes salles des profs... :lol: :lol:


Idem. J'ai plutôt fréquenté celles de la Marquise . Sad
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retraitée
Doyen

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par retraitée Dim 27 Fév 2011 - 12:43
Il suffit parfois d'un ou deux collègues décidés pour modifier les choses.
Daphné
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Demi-dieu

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par Daphné Dim 27 Fév 2011 - 14:24
retraitée a écrit:Je reviens sur ce point de l'individualisme.
Quand je fais (faisais) cours, je suis seule face à ma classe, et je tiens à être auteur de mon cours, c'est à dire que le cours que je fais est le fruit de ma réflexion, de mes lectures, de mes tâtonnements antérieurs, et s'adapte au public auquel je m'adresse. Ainsi, sans vouloir vexer personne, j'avoue ne pas comprendre certaines demandes de collègues concernant des questionnaires "tout faits" ou faits par d'autres sur des oeuvres. Qui, mieux que moi qui ai étudié l'oeuvre en classe, sait quelles questions il faut poser pour vérifier les acquis?
Cela n'exclut pas une discussion avec les collègues de ma discipline, l'utilisation de travaux parus dans des revues ou sur internet. Mais j'ai besoin de m'approprier tout cela, de l'assimiler, de le faire mien.
Je n'aurais jamais accepté les progressions communes, cette idée me révulse, car ma progression obéissait à deux impératifs ; le niveau des élèves , l'état de leurs connaissances et ma façon personnelle de concevoir des cours structurés permettant de traiter le programme en comblant les lacunes, ou en tentant de les combler.
Et puis, on n'explique bien que ce que l'on aime.

Cela dit, pour en revenir au lycée Poincaré,dans ce lycée, quand j'y étais, les professeurs de Lettres travaillaient ensemble. Nous sommes aujourd'hui tous en retraite, ou peu s'en faut.
Nous travaillions surtout sur les devoirs. Il y avait encore du résumé de texte alors. Nous apportions chacun un ou plusieurs textes jugés intéressants, nous en choisissions un, nous le travaillions ensemble, et chacun proposait ensuite son résumé.
Ces diverses moutures étaient ensuite comparées, critiquées, améliorées, puis imprimées et photocopiées à l'intention des élèves, mais chacun était libre de sa correction et de sa notation.

Idem pour les commentaires ou dissertations.
Mais rien de contraignant dans tout cela. Si je voulais donner d'autres devoirs, je le faisais, et mes collègues aussi.
L'"individualisme" bien compris, pour moi, c'est l'exercice de la liberté, non l'absence de solidarité.
J'ai été solidaire de collègues dont je ne partageais pas forcément les pratiques, mais que l'administration abandonnait ou harcelait quand ils avaient affaire à des classes imbuvables.


Je partage totalement le point de vue de retraitée.
Absolument aucune envie de "travailler en équipe", je suis rentrée dans l'EN pour être seule maître à bord dans ma classe. Et être indépendante dans mon travail, dans le cadre bien entendu des programmes nationaux et des consignes de l'inspection.
Iphigénie
Iphigénie
Prophète

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par Iphigénie Dim 27 Fév 2011 - 14:37
+10
d'ailleurs le travail d'équipe n'a jamais été autant source de problèmes que depuis qu'il est "obligatoire":ça donne envie de travailler seul (du moins si on a comme moi l'esprit de "contradiction"....) Very Happy
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retraitée
Doyen

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par retraitée Dim 27 Fév 2011 - 15:19
Daphné a écrit:
retraitée a écrit:Je reviens sur ce point de l'individualisme.
Quand je fais (faisais) cours, je suis seule face à ma classe, et je tiens à être auteur de mon cours, c'est à dire que le cours que je fais est le fruit de ma réflexion, de mes lectures, de mes tâtonnements antérieurs, et s'adapte au public auquel je m'adresse. Ainsi, sans vouloir vexer personne, j'avoue ne pas comprendre certaines demandes de collègues concernant des questionnaires "tout faits" ou faits par d'autres sur des oeuvres. Qui, mieux que moi qui ai étudié l'oeuvre en classe, sait quelles questions il faut poser pour vérifier les acquis?
Cela n'exclut pas une discussion avec les collègues de ma discipline, l'utilisation de travaux parus dans des revues ou sur internet. Mais j'ai besoin de m'approprier tout cela, de l'assimiler, de le faire mien.
Je n'aurais jamais accepté les progressions communes, cette idée me révulse, car ma progression obéissait à deux impératifs ; le niveau des élèves , l'état de leurs connaissances et ma façon personnelle de concevoir des cours structurés permettant de traiter le programme en comblant les lacunes, ou en tentant de les combler.
Et puis, on n'explique bien que ce que l'on aime.

Cela dit, pour en revenir au lycée Poincaré,dans ce lycée, quand j'y étais, les professeurs de Lettres travaillaient ensemble. Nous sommes aujourd'hui tous en retraite, ou peu s'en faut.
Nous travaillions surtout sur les devoirs. Il y avait encore du résumé de texte alors. Nous apportions chacun un ou plusieurs textes jugés intéressants, nous en choisissions un, nous le travaillions ensemble, et chacun proposait ensuite son résumé.
Ces diverses moutures étaient ensuite comparées, critiquées, améliorées, puis imprimées et photocopiées à l'intention des élèves, mais chacun était libre de sa correction et de sa notation.

Idem pour les commentaires ou dissertations.
Mais rien de contraignant dans tout cela. Si je voulais donner d'autres devoirs, je le faisais, et mes collègues aussi.
L'"individualisme" bien compris, pour moi, c'est l'exercice de la liberté, non l'absence de solidarité.
J'ai été solidaire de collègues dont je ne partageais pas forcément les pratiques, mais que l'administration abandonnait ou harcelait quand ils avaient affaire à des classes imbuvables.


Je partage totalement le point de vue de retraitée.
Absolument aucune envie de "travailler en équipe", je suis rentrée dans l'EN pour être seule maître à bord dans ma classe. Et être indépendante dans mon travail, dans le cadre bien entendu des programmes nationaux et des consignes de l'inspection.

Et "les consignes de l'inspection, " on peut aussi s'asseoir dessus quand on les juge ineptes.
J'ai vu passer tant d'inspecteurs donnant tant de consignes contradictoires, que si j'avais dû à chaque fois changer mes méthodes, j'aurais tourné comme girouette.
C'était parfois le même qui changeait d'avis après deux ans!
Les consignes constructives, on les fait siennes, les autres non.
J'ai connu une IPR de Lettres qui n'avait jamais enseigné en lycée, et déclarait qu'on pouvait corriger 30 copies de lycée en une heure!
Ou une autre qui déclarait que, comme le passé composé ne s'utilisait plus à l'oral, il était inutile de l'enseigner!
La même n'aurait pas tenu 10 minutes dans certaines de mes classes.
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User5899
Demi-dieu

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par User5899 Dim 27 Fév 2011 - 16:29
retraitée a écrit:Et "les consignes de l'inspection, " on peut aussi s'asseoir dessus quand on les juge ineptes.
+1
NB C'est-à-dire dans 99,9% des cas. Les inspecteurs servent à distraire sur le long terme, c'est très amusant de les entendre palinodier tous les 7-8 ans.
Daphné
Daphné
Demi-dieu

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par Daphné Dim 27 Fév 2011 - 18:52
Oui bien entendu, je parlais des consignes en général hein faut pas pousser non plus
Razz
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retraitée
Doyen

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par retraitée Lun 28 Fév 2011 - 12:33
iphigénie a écrit:+10
d'ailleurs le travail d'équipe n'a jamais été autant source de problèmes que depuis qu'il est "obligatoire":ça donne envie de travailler seul (du moins si on a comme moi l'esprit de "contradiction"....) Very Happy


"Car on veut des maîtres dociles et on les aura. Au lieu de condamner le malthusianisme des jurys de concours (13), on ferait mieux de se demander pourquoi l'on s'achemine vers une situation où les maîtres de tous les degrés seront parmi les esprits les moins savants et les moins cultivés de la nation. Les techniques de l'action psychologique et " éducative " feront le reste. Quand on ne sait ni les mathématiques ni l'histoire, il reste la pédagogie, ce palliatif universel. D'ailleurs la prédilection actuelle pour l'évaluation et la globalité atteste de façon patente que ce n'est pas l'instruction intellectuelle qui est en vue. Simone Weil note que " le nombre deux pensé par un homme ne peut s’ajouter au nombre deux pensé par un autre homme pour former le nombre quatre ". Il n’y a pas d’équipe pour penser. Le groupe et l’appartenance entraînent fatalement une régression intellectuelle. Avec l’équipe pédagogique, on cherche avant tout à dégrader, à dévaluer à ses propres yeux, le corps enseignant.

C’est bien là le point. Il faut que l’instituteur, le professeur, perde ce qui lui reste d’indépendance, renonce à l’orgueil et au vain loisir où, croit-on, il se complaît insolemment. Alors, de même que le pédagogue antique était un esclave domestique ayant pour seule tâche de tenir l’enfant par la main pour traverser les rues, de même l’enseignant – puisque, semble-t-il, il est désormais, indécent d’employer un substantif – assurera enfin, sans vain loisir cette fois, une garderie dérisoire sous le contrôle tyrannique d’une opinion indiscrète. Elément inerte d’un stock – c’est le mot d’un Premier ministre – , le maître d’école n’aura plus d’autre existence que statistique."
PCC JJ Muglioni
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Dulcinea
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"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par Dulcinea Lun 28 Fév 2011 - 22:47
+1000 Retraitée et Daphné, à bas la dictature de l'équipe!
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La Jabotte
Neoprof expérimenté

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par La Jabotte Lun 28 Fév 2011 - 22:58
Moi aussi, j'aime bien ne pas travailler en équipe.

Pour ce qui est des cours.

Parce que sinon, j'aime bien que mon équipe soit soudée, qu'on réussisse à se mettre d'accord quand il s'agit d'acquérir une série (français collège) ou de choisir un manuel, qu'on se répartisse les tâches pour les organisations de sorties et voyages (d'ailleurs là, j'ai merdouillé pour la mienne), qu'on soit d'accord en bloc pour refuser l'inadmissible et les heures sup au delà de la première, et pour dire que les devoirs communs bon ben oh ok d'accord ça va bien 5mn aussi.
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Invité
Invité

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par Invité Lun 28 Fév 2011 - 22:59
retraitée a écrit:


"Car on veut des maîtres dociles et on les aura. Au lieu de condamner le malthusianisme des jurys de concours (13), on ferait mieux de se demander pourquoi l'on s'achemine vers une situation où les maîtres de tous les degrés seront parmi les esprits les moins savants et les moins cultivés de la nation. Les techniques de l'action psychologique et " éducative " feront le reste. Quand on ne sait ni les mathématiques ni l'histoire, il reste la pédagogie, ce palliatif universel. D'ailleurs la prédilection actuelle pour l'évaluation et la globalité atteste de façon patente que ce n'est pas l'instruction intellectuelle qui est en vue. Simone Weil note que " le nombre deux pensé par un homme ne peut s’ajouter au nombre deux pensé par un autre homme pour former le nombre quatre ". Il n’y a pas d’équipe pour penser. Le groupe et l’appartenance entraînent fatalement une régression intellectuelle. Avec l’équipe pédagogique, on cherche avant tout à dégrader, à dévaluer à ses propres yeux, le corps enseignant.

C’est bien là le point. Il faut que l’instituteur, le professeur, perde ce qui lui reste d’indépendance, renonce à l’orgueil et au vain loisir où, croit-on, il se complaît insolemment. Alors, de même que le pédagogue antique était un esclave domestique ayant pour seule tâche de tenir l’enfant par la main pour traverser les rues, de même l’enseignant – puisque, semble-t-il, il est désormais, indécent d’employer un substantif – assurera enfin, sans vain loisir cette fois, une garderie dérisoire sous le contrôle tyrannique d’une opinion indiscrète. Elément inerte d’un stock – c’est le mot d’un Premier ministre – , le maître d’école n’aura plus d’autre existence que statistique."
PCC JJ Muglioni

Tellement vrai. pale
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User5899
Demi-dieu

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty Re: "Notre métier est individualiste", dites-vous ?

par User5899 Mar 1 Mar 2011 - 0:10
Quand on ne sait ni les mathématiques ni l'histoire, il reste la pédagogie, ce palliatif universel. D'ailleurs la prédilection actuelle pour l'évaluation et la globalité atteste de façon patente que ce n'est pas l'instruction intellectuelle qui est en vue. Simone Weil note que " le nombre deux pensé par un homme ne peut s’ajouter au nombre deux pensé par un autre homme pour former le nombre quatre ". Il n’y a pas d’équipe pour penser. Le groupe et l’appartenance entraînent fatalement une régression intellectuelle. Avec l’équipe pédagogique, on cherche avant tout à dégrader, à dévaluer à ses propres yeux, le corps enseignant.
J.J. Muglioni, IG de philosophie
Je vais relancer la phrase du mois, dans ma SDP, je sens. Merci Néo !
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retraitée
Doyen

"Notre métier est individualiste", dites-vous ? - Page 4 Empty À propos du stock

par retraitée Mar 1 Mar 2011 - 10:16
Voici un remarquable pastiche, écrit par un collègue du Lycée Poincaré, expert en la matière, à propos du "stock" de Michel Rocard.

STOCKBAR, FEN, TOTUS KHOKUS
Supplément inédit à FICTIONS de Jorge-Luis Borgès

Stock : Quantité d’une marchandise quelconque qui se trouve en magasin dans les entrepôts (Littré)

anglais Live-stock :troupeau,bétail.
Exemple : « Nous disposons d’un stock d’enseignants »(M.Rocard, Premier ministre)

Il fallait de longues années de démocratie, de pédagogie par objectifs et de cotisations syndicales pour atteindre la salle d’Eprof, au cœur du fantasmagorique Palais de la Revalorizacion, à Fën ; nul ne savait plus pourquoi on avait ainsi baptisé cette bâtisse en stuc, bien que le « Dictionnaire des Langues Indiennes « du père Jospino del P.S. permît aisément d’en retrouver l’étymologie. Contrairement aux explications ingénieuses mais comprouvées qui y distinguent du « rêve » et de l’ « or » , il s’agit bien évidemment de l’hispanisation sud-américaine des mots indiens « Revaltcl »qui signifie « prendre au piège » et « Horiz », c’est-à-dire « testicule de bœuf ». Ce qu’on peut traduire vulgairement par « attrape-couillon ».
Ce jour-là le professeur Stockphen mastiquait plus consciencieusement que d’habitude les images agressivement et cycliquement colorées qui inondaient la salle d’Eprof, sorties silencieuses et criardes de Télé-Nouill’s, dernier (last but not least) perfectionnement des sciences de la Manducation et de l’Éducation réunies.
- Tu mastiques d’une drôle de façon ce matin, fit son collègue Profenstock, ancien élève de l’Université de la Maffpehn. En Zarathoustra il est écrit, selon l’historiographe Al’Ali :
« On dit de l’âne à Trois Pattes que trois est le nombre de ses sabots et six celui de ses oreilles et neuf celui de ses bouches et deux celui de ses oreilles et un celui de sa corne ». Ne crains-tu pas de lui ressembler ?
- Je panse, donc je suis, répondit Stockphen, et la faute d’orthographe n’échappa nullement à l‘oreille exercée de Profenstock. Mais Stockphen mentait : il ruminait d’amour pour la princesse Sny, qu’il courtisait en vain depuis cent trente sept ans.

Or le Télé-Nouill’s annonçait en lettres couleur de feu :

CE SOIR GRANDE COURSE DE STOCK-CARS.

On appelait ainsi un jeu cruel qui consistait à faire marcher les profs, et cela jusqu’à épuisement, cependant que le public poussait le cri rituel : « Travaillez AU TRE MENT, travaillez AU TRE MENT, bande de veaux ! ». Et les concurrents répondaient ; « On fait ce qu’on peut, on n’est pas des bœufs ! ». En quoi ils se trompaient , bien entendu . Les mourants étaient sacrifiés à une sorte de divinité, le Héros-Car. D’où le nom de ce jeu extrêmement populaire, STOCK-CAR. Le vainqueur recevait une prime de 16 roupies 66 ou de 13 roupies 33 selon son âge et son grade. Mais ce jour-là on annonçait que la prime, (qui ne serait pas augmentée), serait remise au vainqueur par la princesse SNY en personne !

Stockphen s’inscrivit immédiatement. Il n’avait bien sûr aucune chance de gagner, mais il était prêt à mourir pour les beaux yeux de la princese.
Avant la course, les concurrents étaient rassemblés dans une gigantesque prairie, et les grands prêtres psalmodiaient l’hymne célèbre, traduit presque intégralement de la Bible (Job, 40, 10-19) :
Tu vois maintenant le Bestiok ; il mange de l’herbe comme le bœuf.
Vois : sa force en ses épaules, et sa puissance au nombril de son ventre.
Il agite sa queue comme le cèdre.
Sous les ombrages, il paît, caché dans les roseaux…
Maintenant vient l’oiseau Rock,
Par les yeux il prendra le Bestiok dans les pièges ; avec des bâtons aigus il lui percera les narines.

Les concurrents,enfermés dans l’enclos fermé par une grille dite « La Grille Indiciaire », étaient classés par catégories.Les plus gras formaient un troupeau spécial,dont le nom était d’ailleurs prédestiné puisqu’il venait tout droit du latin « grex, gregis » = le troupeau. C’étaient les agrégés. Quand Stockphen demanda pourquoi les concurrents marqués d’un K ne couraient pas avec eux, on lui répondit : « Pas encore, pour le moment les K paissent. Leur tour viendra quand ils auront un peu engraissé ».

La course fut rapide et impitoyable. Plus les bestiaux couraient, plus leurs cornes poussaient, et ils en vinrent à crier : « Nous sommes Khôkus, nous sommes Khôkus !
Épuisé, Stockphen vint s’abattre aux pieds de Sny, qui enlaçait tendrement le Héros –Car, sans un regard pour le bovin, qui brouta sa dernière botte de foin et tendit lui-même sa tête au couteau du sacrificateur.

Au moment où la boîte cylindrique de fer-blanc se referma sur lui, Stockphen eut à peine le temps de lire l’inscription qui la décorait :


REVALORIZACION
Fabrique de corned-beef




Note :

Télé-Nouill’s : L’administration du lycée avait un jour jugé bon d’installer dans la salle des professeurs un téléviseur fonctionnant en circuit interne, qui devait donner les nouvelles de l’Académie. On avait donc droit à des news aussi passionnantes que fondamentales, telles que ;
Les conseils de classe du collège du Haut-Regard auront lieu salle 45, et non salle 44 comme indiqué précédemment.
Ou bien : Le lycée Jeanne Papillon a publié son nouveau règlement intérieur, qui prévoit des sanctions pour mauvaise tenue au réfectoire.

Le professeur Pon-Tchéou (à qui nous devons le récit de la Revalorizacion), alla menacer le proviseur de casser sa canne sur l’ordinateur s’il persistait à nous infliger ce supplice. Sa menace fut efficace, car l’engin disparut dès le lendemain.
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