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Bouboule
Doyen

Information sur les classes préparatoires - Page 4 Empty Re: Information sur les classes préparatoires

par Bouboule Dim 3 Fév 2019 - 22:18
lisette83 a écrit:Tout à fait et cela me désole de voir des parents se saigner aux quatre veines pour certaines écoles post bac de peur que leur enfant ne réussisse pas en prépa.
Le mythe d'une difficulté insurmontable s'ajoute parfois à la méconnaissance.

Moi, ce que j'aime bien, c'est le père de fiston qui me regarde intensément au bout de 5 min et qui me dit : "mais si je comprends bien, si mon fils fait CPGE et qu'il intègre cette école en 3è année au lieu du cycle intégré, il aura économisé deux ans de frais de scolarité ?".
Iphigénie
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par Iphigénie Lun 4 Fév 2019 - 9:28
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:
Miettes a écrit:J'ai l'impression, après lecture du fil, qu'on fait comme si les élèves de terminale choisissaient seul·es leur orientation. Or il me semble qu'à cet âge, le poids du discours parental est énorme – quand ce ne sont pas les parents qui choisissent à la place de l'élève. Ce qui rejoint ce que dit Tristana : l'imaginaire familial pèse quand même sacrément sur les choix, et l'information donnée par l'équipe éducative n'arrive qu'en second lieu (il me semble que c'est ce qu'essaient de démontrer toutes les études sociologiques concernant les choix d'études, on nous en avait du moins parlé en DU MEEF).

Nous sommes quand même un certain nombre ici à penser cela, maintenant. Pour ma part, c'est le problème dont nous discutons qui ne me semble plus très clair. On était parti de la liberté. S'agit-il bien de savoir si l'élève choisit librement d'aller ou de ne pas aller en prépa, ou si choix est orienté par divers déterminismes ?

Je ne crois pas que nous soyons entièrement déterminés parce que je n'en ai jamais vu la preuve. Mais je ne vois pas non plus comment prouver la liberté. Je la prends comme quelque chose qu'on suppose parce que sans elle la vie serait désespérante et notre société ne fonctionnerait plus du tout. Cela, je crois, permet de chercher tout ce qui peut être un déterminisme, et de travailler à aider les élèves à s'orienter (ne serait-ce qu'en repérant ce qui peut être un problème), sans nier la liberté et la responsabilité des individus.
On ne voit en effet plus très clair dans ce débat. Je le resitue: on est parti de l'intervention de Bégaudeau, qui reprend la critique bourdeusienne des héritiers. Je me suis étonnée de l’engouement pour cette intervention sur le forum où tout le monde ou presque le critiquait violemment  pour Entre les Murs alors qu'il dit  toujours strictement la même chose. Tristana a approuvé sa vision de l'école des héritiers, a défendu Bourdieu, en donnant l'exemple des prépas.
Pour ma part je pense que Bourdieu était excellent et exact à son époque mais qu'on continue de l'utiliser à tort et à travers alors que le contexte est très différent.
L'école n'est en effet plus du tout, à mon avis celle des héritiers. Je parle de l'école publique. A force de vouloir la faire échapper à l'héritage  de la culture bourgeoise, en supprimant toute idée de sélection (forcément favorable aux favorisés socialement), l'école s'est détruite elle-même en grande partie, selon moi. Car ce qu'elle a détruit ce sont les conditions de transmission de la culture ( par l'exigence relative et le travail nécessaire) alors que les héritiers continuent d'exister, mais sont ailleurs. Ils ne sont même plus tant à Polytechnique (seule) qu'à Harvard ou autre université (payante) américaine, et  si possible dans les filières de l'économie et de la finance . L'école des héritiers est mondialisée et n'a plus rien à voir avec la culture bourgeoise humaniste de l'école française d'antan.
L'école française à force de d'avoir peur de l'emprise bourgeoise a selon moi  contribué à creuser un fossé peut-être devenu infranchissable entre une culture de l'argent, qui prospère en dehors d'elle et une culture humaniste qu'elle persiste à détruire et mettre en marge.
A petite échelle, le système des prépas justement porte la marque de ce délitement pervers: elles se sont multipliées, ouvertes à un plus grand nombre pour diminuer leur sélectivité, spécialisées dans le type des bons élèves de classe moyenne et supérieure attachés à la réussite sociale, qui cherchent à fuir la non-sélectivité des universités, et ce faisant elles se sont dédoublées, entre beaucoup de petites prépas très provinciales et très peu de très grandes prépas, surtout parisiennes.
Et nos très grandes écoles ont  pour autant aussi décroché des classements internationaux parce que les "valeurs éducatives" se sont fortement rapprochées des valeurs essentiellement commerciales et financières  plus que strictement scientifiques (je ne parle même pas des littéraires, parce que, bon...). Alors l'école des héritiers de la bourgeoisie, dans tout ça, c'est une vision qui était juste dans les années 60-70 sans doute, mais qui est aujourd'hui, à mon sens, très largement obsolète: mais je crois qu'on pense toujours avec 50 ans de retard, le temps qu'il faut pour que les idées contestataires deviennent consensuelles...
J'ajoute aussi que, cerise sans le gâteau, cet idée de" l'école des héritiers", au départ fruit de l'examen objectif des réalités, est aujourd'hui devenue tellement une composante psychologique "incontournable" que c'est un obstacle de plus à l'ascension sociale de certains, parce qu'il est au fond plus pratique de rejeter la faute sur la société que sur sa propre détermination à travailler: comme les élèves d'Entre les murs qui disent qu'ils ne vont pas apprendre le subjonctif, parce qu'un peu de bon sens, on les comprend, "leur grand-mère ne dit pas: il fallut que je visse ou chais pas quoi d'aussi ridicule". (très grosso modo, sic dans le film, comme dirait ma grand-mère quoique non latiniste)...quoi de plus bourgeois que le latin! même si je doute qu’il y ait beaucoup de latinistes et d’hellenistes à la City aujourd’hui.
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par klaus2 Lun 4 Fév 2019 - 10:31
Les élèves intègrent-ils les plus grandes écoles parce qu'ils se scolarisent dans cette poignée de prépa ou cette poignée de prépa a-t-elle de bons résultats parce que les meilleurs élèves viennent chez elles?
Cela revient à se demander si les "grandes" prépas" sont comparables aux plus grands restaurants : grands cuisiniers (les profs), meilleure nourriture (ce qu'on y enseigne). Je vais parler de ce que je connais les ECS / ECE de région parisienne. Les collègues de LV de ECS / ECE sont tous des agrégés de très bon niveau, ils s'améliorent en permanence pour la plupart, parce qu'ils aiment le travail intellectuel et leur matière ; ils ont été recrutés parce qu'ils avaient un petit quelque chose en plus et que le CdE les avait recommandés (premier critère : n'être jamais malade ou absent, car difficile à remplacer : 5 semaines sans collègue d'allemand Khagne à Janson (malade) cette année !).

Il y a aussi ceux qui ont eu la chance d'inaugurer une prépa créée dans leur lycée, ils ont donc commencé en faisant moitié secondaire moitié prépa, puis l'augmentation des classes de prépa leur a donné tout leur service en prépa. Le temps passant et l'âge venant, certain(e)s deviennent un peu routiniers, et leur principal défaut est de faire travailler beaucoup leurs élèves (qui, bien triés, sont très bons) et se reposent un peu : Regardez qui fait les corrigés officiels des concours, vous comprendrez mieux.

Les collègues de prépa de grandes villes de province sont du même acabit : très bons, et poussés à travailler par les exigences d'élèves de haut niveau. Un des critères de choix de prépa sera d'aller dans une grande ville !
Dans les "petites", on trouve aussi des certifiés (parfois) de valeur, le lieu (petites villes), les élèves, l'atmosphère générale est moins au  travail acharné : tout le monde travaille un peu moins et, disons-le, 50 certifiés comparés à 50 agrégés ne font pas le poids (individuellement, il y a des exceptions). Je dirais qu'on peut faire 3 groupes de prépas équivalents : 1) niveau très haut et travail au pas de charge, 2) haut niveau et bon travail, 3) niveau moyen, travail moyen. Parler "d'une poignée de prépas" est sans doute restrictif. Exemple concret : dans le groupe 1), le collègue va donner 20 lignes de Modiano à traduire sous 8 jours, dans le groupe 2), ce sera 15 lignes pour 10 jours, groupe 3 : 10 lignes assez faciles pour 15 jours.

Pour les élèves, la meilleure prépa ne sera pas forcément le groupe 1), mais celle où il se verra au cours de l'année dans le premier tiers de la classe : c'est là où il profite au mieux des cours, n'est pas exténué et donne le meilleur rendement. Voilà un constat qui est très difficile à faire comprendre aux parents et élèves de terminale ! Tout comme de leur expliquer que dans les choix de prépas, il faut demander 3 fortes, 3 moins difficiles d'accès, et 4 moyennes. Demander LLG, H-IV, Hoche, St Louis, Le Parc (Lyon), c'est s'exposer à les avoir toutes ou aucune ! Si un élève dans une prépa du groupe 1) (30% de réussite au top 5) est 29è/35, ses chances d'intégrer sont très faibles ; s'il est 10è dans un groupe 2, ses chances sont bonnes.
Dernier point : le niveau de LV1 en terminale est théoriquement C1 (au mieux), or la difficulté des concours (et les  kholles) nous obligent à commencer au niveau C2 : il est indispensable d'aller dans le pays de la LV1 durant les vacances ou de suivre des stages.

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par Iphigénie Lun 4 Fév 2019 - 10:47
En soutien au post de Klaus un petit témoignage personnel: ma fille habitué dans son lycée de province à un 21 de moyenne (voire 22, car oui, le professeur donnait des bonus) m'a dit en arrivant en prépa, avec un poil d'excès dans la caricature mais quand même: "Ah! mais en fait, je n'avais jamais vraiment fait de l'allemand"... Wink
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par Sylvain de Saint-Sylvain Lun 4 Fév 2019 - 11:12
Nous autres du secondaire, quand nous avons de bons élèves, c'est pour les entendre dire après le bac qu'en fait, avec nous, c'était naze Sad Métier ingrat, ingrat métier.

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par klaus2 Lun 4 Fév 2019 - 11:19
Entendre en prépa que "le subjonctif allemand, on le découvre avec vous", est un grand classique : l'élève se dédouane de sa paresse, accuse les autres collègues... puis montre au fil du temps qu'il ne travaille pas assez.

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par Iphigénie Lun 4 Fév 2019 - 11:20
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Nous autres du secondaire, quand nous avons de bons élèves, c'est pour les entendre dire après le bac qu'en fait, avec nous, c'était naze Sad Métier ingrat, ingrat métier.

non ce n’est pas le sens: ce que nous pouvons faire par rapport à ce que nous pourrions faire est parfois bien peu. Ça n’a rien à voir avec le prof individuellement.
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par Iphigénie Lun 4 Fév 2019 - 11:22
klaus2 a écrit:Entendre en prépa que "le subjonctif allemand, on le découvre avec vous", est un grand classique : l'élève se dédouane de sa paresse, accuse les autres collègues... puis montre au fil du temps qu'il ne travaille pas assez.
Je te fais remarquer qu’avec plus de 20 de moyenne elle faisait tout ce qu’on attendait. Il ne s’agit pas de collègues, je répète qu’il s’agit de système.
klaus2
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par klaus2 Lun 4 Fév 2019 - 11:26
On rencontre des collègues de terminale qui disent : "je ne suis pas là pour les préparer au-delà du bac !"

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Pat B
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par Pat B Lun 4 Fév 2019 - 11:38
Oui, débat récurrent :
" mais on ne peut pas parler de ça, c'est hors programme !
- Bien sûr que si on peut le faire ! Ne pas l'évaluer, mais l'aborder en cours ou même en DM facultatif.
- Mais enfin, si on est inspectés on va avoir des ennuis !"


Sinon, pour revenir au post initial : je crois que les prépas sont mieux connues actuellement qu'il y a 15 ou 25 ans, tout simplement. Moi non plus, dans mon environnement rural, je n'en avais pas entendu parler, et c'est juste en terminale que j'ai appris leur existence par des copains mieux informés (mes parents avaient un niveau brevet et ne voyaient absolument pas pourquoi je voulais faire un truc pareil : ingénieur c'est pas un métier de fille, et puis le Parc c'est loin, à Lyon, alors qu'il y a un DUT d'agro-alimentaire ou une fac de droit à proximité, pourquoi vouloir me compliquer la vie ?). Mais l'information était disponible... pour qui avait la curiosité de la rechercher et ne se contentait pas de suivre l'avis des parents. Mais c'est vrai que sur les brochures, CPGE ça ne me disait rien, c'est quoi ces "grandes écoles", c'est pour faire quel métier ? (et je ne m'y suis jamais sentie vraiment à ma place, n'étant pas du même milieu et n'ayant pas les mêmes ambitions)


Sinon, ce fil me fait douter du conseil donné l'autre jour à une élève de TS spé math, très bonne mais pas excellente, sérieuse, bosseuse. Elle déteste la physique, et vise je-ne-sais-quelle filière M2 très sélective en fac de maths ; elle hésite à faire prépa : on lui a dit que ceux qui sortent de prépas y réussissent mieux, mais elle ne voudrais plus faire de physique...
Je lui ai dit que si elle détestait la physique, mieux valait aller en fac, effectivement, mais bosser avec des bouquins de prépas durant ses années de licence, de façon bien plus approfondie que ce qui est demandé. Mais je ne sais pas si elle réussira à avoir l'autonomie et la motivation suffisante, hors prépa. J'ai peut-être eu tort. Je devrais peut-être la pousser vers une prépa "moyenne"...
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par Mathador Lun 4 Fév 2019 - 11:44
Pat B a écrit:Je lui ai dit que si elle détestait la physique, mieux valait aller en fac, effectivement, mais bosser avec des bouquins de prépas durant ses années de licence, de façon bien plus approfondie que ce qui est demandé. Mais je ne sais pas si elle réussira à avoir l'autonomie et la motivation suffisante, hors prépa. J'ai peut-être eu tort. Je devrais peut-être la pousser vers une prépa "moyenne"...
Il y a aussi les Ramis de L1-L2-L3, qui profitent de leur non-alignement par rapport aux programmes de CPGE pour aller plus loin sur certaines choses.

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par Babarette Lun 4 Fév 2019 - 11:45
Est-ce que ça ne serait pas plus difficile pour elle de faire de la physique à un niveau prépa, même moyenne, que de travailler les mathématiques, qui m'intéressent, seule?

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Sylvain de Saint-Sylvain
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par Sylvain de Saint-Sylvain Lun 4 Fév 2019 - 11:46
Iphigénie a écrit:
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Nous autres du secondaire, quand nous avons de bons élèves, c'est pour les entendre dire après le bac qu'en fait, avec nous, c'était naze Sad Métier ingrat, ingrat métier.

non ce n’est pas le sens: ce que nous pouvons faire par rapport à ce que nous pourrions faire est parfois bien peu. Ça n’a rien à voir avec le prof individuellement.

Oh mais j'avais bien compris, je plaisantais.

Merci pour les éclaircissements. Bon, si c'est bien là le débat, le positionnement des uns et des autres est encore obscur pour moi. Je prenais les témoignages comme une façon de révéler des problèmes (dans celui de Tristana, dans le mien et quelques autres, je trouvais notamment que l'information n'est pas tout) et non comme une façon de donner raison à Bégaudeau, en généralisant un cas. Et quant à lui, il illustre à mes yeux certaines dérives de la sociologie, lesquelles commencent lorsqu'elle oublie qu'elle n'est pas une théorie totale, mais qu'elle étudie certains objets pris en tant que sociaux (l'être social et non l'être tout court, le commun et non le singulier) et qu'elle trouve, pour ainsi dire, comme toutes les disciplines, ce qu'elle cherche. Pour autant il ne faudrait pas jeter le bébé avec l'eau du bain, et revenir, au prétexte de dérives, d'erreurs ou de choses simplement discutables, à l'idée d'individus absolument conscients, libres et volontaires. Que la société ait bien changé depuis Bourdieu ne signifie pas qu'il ne faut plus s'inquiéter de savoir ce qui détermine le parcours des élèves, chercher ces déterminations possibles étant à mon avis nécessaire si l'on veut œuvrer à ce que, autant que possible, les choix des élèves soient libres ou du moins déterminés par leurs aspirations plutôt que leur ignorance, leurs préjugés ou leur appréhensions*. Cela ne devrait pas revenir à leur créer des excuses. Lorsqu'on se penche sur l'histoire personnelle d'un criminel, et qu'on trouve un lien entre cette histoire et son crime, on ne l'excuse pas pour autant, on ne lui ôte pas sa responsabilité. Il s'agit là aussi d'une confusion, qu'on devrait pouvoir critiquer pour ce qu'elle est, sans jeter tout ce qui l'a engendrée.

* Je ne voudrais pas laisser croire que je pense que ce travail doit être réalisé par les seuls professeurs, qui seraient les seules causes de toutes ces choses. Normalement, en terminale, un élève a appris à mener une réflexion de manière autonome, et il sait faire des recherches ; il doit être capable de se demander si ses premières idées sont justes et les soumettre à la critique. Certes, dans un système en ruine, un tel élève ressemble considérablement à une pure vue de l'esprit.
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par Tristana Lun 4 Fév 2019 - 14:18
Miettes a écrit:J'ai l'impression, après lecture du fil, qu'on fait comme si les élèves de terminale choisissaient seul·es leur orientation. Or il me semble qu'à cet âge, le poids du discours parental est énorme – quand ce ne sont pas les parents qui choisissent à la place de l'élève. Ce qui rejoint ce que dit Tristana : l'imaginaire familial pèse quand même sacrément sur les choix, et l'information donnée par l'équipe éducative n'arrive qu'en second lieu (il me semble que c'est ce qu'essaient de démontrer toutes les études sociologiques concernant les choix d'études, on nous en avait du moins parlé en DU MEEF).

Petit récit d'expérience : mes parents, pourtant cadre et cadre sup, ne m'avaient jamais parlé de classe prépa, ce n'était pas du tout leur univers (petites écoles de commerce pour leur part), et encore moins les ENS dont j'ai entendu parler pour la première fois en hypokhâgne. En revanche, ils m'emmenaient régulièrement au forum des métiers de la ville, et c'est en me renseignant sur la manière de faire une école de cinéma que j'ai entendu parler des prépas littéraires, une aubaine pour moi qui n'arrivais pas à choisir entre philo et littérature. Zéro information dans mon lycée privé catho et bourgeois. Une prof de terminale qui était elle-même passée par une prépa littéraire a ensuite répondu à certaines de mes questions, mais n'a pas pris l'initiative de nous en parler (nous étions une douzaine dans ma classe de L).

En fait j'ai le sentiment étrange que mon témoignage, ainsi que d'autres, serait une critique à l'encontre des enseignants, qui feraient mal leur travail ou quoi.
Ce n'est pas du tout ce que j'ai voulu dire : j'ai simplement voulu dire qu'il y avait des gens dont le milieu social leur permettait de connaître bien mieux que moi les classes prépa, leur intérêt, les débouchés que cela permettait, etc.
Encore une fois je ne me plains pas, même si je trouve quand même assez violent d'entendre qu'après tout, ceux qui ne savent pas, ce sont les idiots qui n'ont pas voulu savoir, qui ont manqué de "curiosité" — ma "curiosité", après deux masters validés mention très bien, et potentiellement un doctorat dans les années à venir, je crois qu'elle ne se porte pas si mal.

J'ai lu un autre argument sur le fil qui a fait tilt, et que je n'avais même pas mis en avant dans la discussion : j'ai dû travailler pendant toutes mes années à l'université, sauf en L1 où je vivais encore chez mes parents (mais je passais près de 4h par jour dans les transports ; ils ne vivaient pas si loin de la ville mais c'était extrêmement mal desservi et l'université, à Nantes, est au nord de la ville, quand mes parents habitaient en campagne au sud).
Je ne pouvais pas être boursière, puisque mes parents étaient trop "riches" ; néanmoins ils ne pouvaient pas assumer mon loyer (je n'avais pas droit non plus à l'hébergement en cité universitaire).
20h par semaine en collège ou en lycée, je ne vois pas comment j'aurais pu les combiner avec une classe préparatoire. Mais c'est certainement que j'ai manqué de curiosité et de vivacité d'esprit ! Very Happy

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par fifi51 Lun 4 Fév 2019 - 14:24
Je verse mon témoignage de lycéen de banlieue parisienne de la fin des années 80.
Venant de terminale D, les seules prépa scientifiques accessibles étaient les prépas veto et agro. Cela a du concerner peut-être une personne ou deux de ma terminale.
J'ai du entendre parler de quelqu'un qui voulait faire l'école des Chartes au détour d'un couloir, je n'avais aucune idée de ce que c'était.
Grosso modo personne dans mes connaissances ne se sentait concerné, la fac ou un IUT était une évidence. Attention, ce que je dis ne concerne pas forcément les terminales C de l'époque.

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par Anaxagore Lun 4 Fév 2019 - 14:25
Et le job des enseignants, c'est entre autres d'apporter ce qui ne vient pas du milieu des élèves.

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par klaus2 Lun 4 Fév 2019 - 14:31
les parents qui choisissent à la place de l'élève. Ce qui rejoint ce que dit Tristana : l'imaginaire familial pèse quand même sacrément sur les choix
En IdF, on constate dans bien des familles privilégiées (souvent dans Paris 5è, 7è, 16è), à la fois que les enfants ont souvent une identification positive avec les parents, ce qui les met dans la "recherche de l'excellence", et qu'alors les parents mettent en place, très tôt (dès la 2de) des stratégies pédagogiques pour que les rejetons soient en tête de classe : cours supplémentaires dans institutions privées hors contrat, nombreuses à Paris), séjours à l'étranger... On est donc étonné de se voir demander des cours de haut niveau pour des élèves étant eux-mêmes déjà de très bon niveau !! Derrière se trouve aussi la suspicion plus ou moins exprimée que les notes obtenues au lycée sont peut-être trop généreuses..

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par Forster Lun 4 Fév 2019 - 14:45
J'ai fait une intervention la semaine dernière avec un collègue dans cinq classes de terminale S, en tant que prof de prépa. Les élèves semblaient découvrir ces classes alors qu'on est dans leur lycée, certes pas dans le même bâtiment mais tout de même... Surpris, j'en ai parlé avec mes collègues en poste depuis longtemps. D'après eux, peu de PP en parlent à leurs classes de terminale mais pour diverses raisons: certains n'y pensent tout simplement pas, d'autres ne connaissent pas bien ce système et conseillent mal, quelques uns sont même contre les CPGE et les déconseillent. Mes collègues se plaignent d'ailleurs d'avoir de plus en plus à faire des campagnes d'explication de ce qu'est une CPGE.

klaus: oui certains élèves sont prompts à accuser leurs professeurs précédents mais on se rend vite compte que là n'est pas le problème. Juste, le niveau le plus élevé en terminale générale est B2, le C1 étant réservé aux littéraires ayant pris la LV1 en spécialité.
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par klaus2 Lun 4 Fév 2019 - 15:02
klaus: oui certains élèves sont prompts à accuser leurs professeurs précédents mais on se rend vite compte que là n'est pas le problème. Juste, le niveau le plus élevé en terminale générale est B2, le C1 étant réservé aux littéraires ayant pris la LV1 en spécialité
On est bien d'accord, les anciens collègues ont souvent bon dos ! J'essaie de comprendre tous ces A1, B2, etc, c'est plutôt nébuleux, reste que l'écart entre les exigences du bac et celles du début de la CPGE ECS/ECE donne un peu le vertige... Phrase souvent entendue en septembre : 'j'ai eu 20 au bac LV2, mais ça ne veut rien dire.."

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par Forster Lun 4 Fév 2019 - 15:19
klaus: les sujets de LV2 essayent aussi de valoriser les rares élèves qui font allemand peut-être. 

Je viens de relire une brochure ONISEP et les classes préparatoires occupent une toute petite place, c'est vrai. Il y a de nombreuses pages sur les BTS par contre.
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par klaus2 Lun 4 Fév 2019 - 15:24
Ma collègue d'espagnol me dit régulièrement : "ils ont eu 18 au bac et ne savent toujours pas distinguer SER et ESTAR !

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par Iphigénie Lun 4 Fév 2019 - 15:30
En fait les prépas doivent être très coupables car on les accuse et d’exister et de ne pas être plus accessibles.
Et ceux qui n’y sont pas allés accusent leur manque d’information mais par ailleurs sont contents de ne pas y être allés .
Enfin les prepas n’existent que par la sélection des candidats et l’obligation de travail qu’elles imposent mais on les voudrait plus accessibles et moins exigeantes parce que quand même .
Et certains professeurs en effet n’en parlent pas parce qu’ils sont contre ce système sélectif ce qui leur permet de dire que c’est un système sélectif.
Bon résumé du grand débat sur l’école idéale, finalement: fais ce que voudras.

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par klaus2 Lun 4 Fév 2019 - 15:43
C'est aux profs de prépas de faire des efforts d'explication et de se déplacer dans les lycées, parce que, dans le détail c'est pas simple ! l'administration laisse d'ailleurs les collègues de CPGE tout organiser de A à Z, parce que, entre l'emploi du temps, la demande de priorité à la cantine pour cause de devoir ou kholle, les kholles, le recrutement des kholleurs, les 3 concours blancs, les devoirs du samedi, l'utilisation du labo de langues, la sélection, les réunions début septembre pour compléter les classes, ça relève pour elle de l'ésotérisme ou de la guerre des étoiles ; du moment que tout fonctionne...

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par Tristana Lun 4 Fév 2019 - 16:42
Iphigénie a écrit:
Et ceux qui n’y sont pas allés accusent leur manque d’information mais par ailleurs  sont contents de ne pas y être allés .

Rolling Eyes
Je n'ai accusé personne. A la base, c'était simplement un exemple pour illustrer le fait que ton milieu social, oui, a une incidence dans les choix d'orientation.
Libre à toi de nier cette réalité (et toute la littérature sociologique à disposition pour étayer ce que je souligne ; mais j'imagine que tous ceux qui viennent de milieux peu favorisés sont des gros feignants pas curieux — il est évident que c'est plus rassurant pour certains).
Et si je disais que je ne regrette pas mon parcours, c'était simplement pour qu'on ne me fasse pas la remarque du "tu es frustrée" ou que sais-je. Déjà qu'on m'apprend que je manque de curiosité, n'en rajoutons pas.

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« C’est tout de même épatant, et pour le moins moderne, un dominant qui vient chialer que le dominé n’y met pas assez du sien. »
Virginie Despentes
Prezbo
Prezbo
Vénérable

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par Prezbo Lun 4 Fév 2019 - 16:47
Iphigénie a écrit:
Enfin les prepas n’existent que par la sélection des candidats et l’obligation de travail qu’elles imposent mais on les voudrait plus accessibles et moins exigeantes parce que quand même .


Mais qui est "on" ? J'ai dû relire la discussion en diagonale, mais je ne crois pas que ça ait été dit.

Par contre, on peut trouver typique que tout sujet sur les classes prépas débouche sur :

-des réactions très tendues
-d’interminables digressions, plutôt hors-sujet ici, sur le classement relatifs des unes et des autres, ou des différentes écoles.
Sylvain de Saint-Sylvain
Sylvain de Saint-Sylvain
Grand sage

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par Sylvain de Saint-Sylvain Lun 4 Fév 2019 - 16:57
On peut essayer de formuler des questions pour orienter la discussion. En partant du message initial, celui d'Ascagne : une méritocratie scolaire peut-elle exister ? La question de l'orientation en prépa pouvant servir de cas particulier pour tenter d'y réfléchir.
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