HLP 1re : la Parole

Pour l'autorité de la parole, est-ce que vous auriez une idée d'un texte avec une parole parentale ?
J'ai pensé à ce passage de La promesse de l'aube :

R. Gary a écrit:et j'entendis une fois de plus la formule intolérable, devenue depuis longtemps classique dans nos rapports :
— Alors, tu as honte de ta vieille mère ?
D'un seul coup, tous les oripeaux*** de fausse virilité, de vanité, de dureté, dont je m'étais si laborieusement paré, tombèrent à mes pieds

Mais je souhaite aussi un ou des exemples respectant les bornes temporelles...

Mme de Chartres dans La PC ?

Merci cléo ! super exemple En plus les conseils sur son lit de mort prennent une autorité naturelle !

Oui, très bon exemple !

Est-ce que dans "Autorité de la parole", on peut parler des rumeurs à votre avis ?
Je me dis que lorsqu'une rumeur circule, c'est que ceux qui la transmettent attribuent une certaine autorité à ceux qui la leur ont transmise. Trop éloigné ?

Ce n'est pas éloigné du tout, tu peux justement mettre en parallèle la rumeur, fama, telle que Virgile la représente (Enéide IV, 173-195) avec les Muses hésiodiques, capables aussi bien de mensonge que de vérité, mais sous une forme pervertie et horrible pour la fama.

Tu as une petite synthèse sur la fama chez les Romains ici :

https://www.persee.fr/doc/medi_0751-2708_1993_num_12_24_1267

Pour le texte de Virgile :

http://bcs.fltr.ucl.ac.be/Virg/V04-173-295.html#laRenommee

A comparer avec Ovide dans les Métamorphoses XII, 39-63 :

http://bcs.fltr.ucl.ac.be/METAM/Met12/Met12-001-145.htm#12-39

Il y aurait des choses aussi à faire avec la fama chez Lucain, mais je n'ai que de vagues souvenirs.

Merci pour ces précieuses références !

De mon côté pour "l'art de la parole" je suis à la recherche de discours construits, issus de l'antiquité ou non, pour faire un travail en îlots: j'aimerais que chaque groupe analyse un discours, sa construction, les moyens employés pour convaincre/ persuader, etc... avant d'en proposer une lecture expressive.
J'ai déjà:
- le discours de Badinter sur la peine de mort
- un discours de Hugo (soit le discours de Gwynplaine dans l'Homme qui rit ou alors le discours de Hugo sur la misère)
- le discours de Chaplin dans Le Dictateur

Il m'en faudrait encore deux autres, de préférence dans les bornes du programme (vu que les 3 autres n'y sont pas!)... avez-vous des idées?

Le discours de Périclès aux Athéniens chez Thucydide (II, 35-46) ?

http://palimpsestes.fr/textes_philo/thucydide/discours-pericles.html

Tu dois pouvoir trouver pas mal de harangues aux troupes, dans l'Antiquité, comme le discours de César à ses troupes chez Lucain
http://remacle.org/bloodwolf/Lucain/phars6.htm

En comparaison de Badinter, tu as aussi celui de Veil à l'assemblée nationale sur l'IVG.

Ou celui-ci

Merci pour les pistes!
Aller voir du côté de Lucain est une bonne idée.

Il va sans dire que le dernier est le meilleur, d'autant qu'il a produit quelques discours mémorables! Je vais peut-être faire appel à lui pour illustrer un powerpoint, merci pour l'idée!

Il y a aussi le célèbre discours des "brassica" dans Astérix chez les Belges qui se conclut par la non moins célèbre réplique de César "tu sais où tu peux te les mettre, tes brassica?".

Tiens, j'ai trouvé ça sur les harangues, ça peut t'intéresser pour des exemples et pour l'analyse peut-être
https://www.persee.fr/doc/vita_0042-7306_2004_num_171_1_1174

Et chez Tacite : http://librecours.eu.free.fr/spip/spip.php?article258

Merci beaucoup @Shajar ! J'ai de quoi faire avec tout ça.

Conseil de lecture sympa - plutôt pour les LC - : le livre de C. Semenzato, A l'écoute des Muses en Grèce archaïque existe désormais en couverture souple pour un prix bien plus raisonnable que le format cartonné :

https://www.degruyter.com/view/title/526581

Commandé. Merci Ruthven !

Je cherche des exemples de personnages qui auraient mieux fait de se taire (Phèdre aurait mieux fait de ne pas avouer à Oenone son amour pour Hippolyte, Julien Sorel aurait mieux fait de ne pas parler lors de son procès...) et des exemples de personnages qui auraient mieux fait de parler (Cyrano aurait pu dire son amour à Roxane après la mort de Christian, Aricie aurait mieux fait de dire à Thésée qu'Hippolyte était effectivement amoureux d'elle).

Des exemples historiques me conviendraient aussi, par exemple quelqu'un qui serait passé à la guillotine pour un mot de trop...

Bonjour à tous!
D'abord merci pour vos éclaircissements, ça aide beaucoup... J'aurai cette spé à enseigner pour la première fois l'an prochain, et je peinais aussi à cerner les contours de ce qu'on pouvait / devait faire.
[et j'avais posé une question précise, mais je la retire, m'étant aperçue que j'avais la réponse devant les yeux.]

Concernant l'art du discours, je m'intéresserais (j'enseigne les LCA en collège) à la comparaison bien connue Cicéron/ Obama :
https://www.nonfiction.fr/article-2072-ciceron_speechwriter_dobama__leloquence_revient_a_la_maison_blance.htm

au film A voix haute (lien dossier pédagogique ci-dessous)
https://www.cinema-star.com/fichier/pdf/a_voix_haute_dossier_pedagogique.pdf

aux discours de Sage l'Ancien dans La Ferme des animaux de G. Orwell :
https://coggle.it/diagram/XPEfaFnY8zww_2tu/t/le-discours-de-sage-l’ancien

à la gestuelle (ou "chirologia") :
https://www.neoprofs.org/t74873-3eme-je-recherche-un-texte-de-quintilien-sur-la-memoire-et-des-representations-d-orateurs-durant-leur-discours#2502115

Un sujet passionnant.

Bon courage !

Ruthven a écrit:Ce n'est pas éloigné du tout, tu peux justement mettre en parallèle la rumeur, fama, telle que Virgile la représente (Enéide IV, 173-195)  avec les Muses hésiodiques, capables aussi bien de mensonge que de vérité, mais sous une forme pervertie et horrible pour la fama.

Tu as une petite synthèse sur la fama chez les Romains ici :

https://www.persee.fr/doc/medi_0751-2708_1993_num_12_24_1267

Pour le texte de Virgile :

http://bcs.fltr.ucl.ac.be/Virg/V04-173-295.html#laRenommee

A comparer avec Ovide dans les Métamorphoses XII, 39-63 :

http://bcs.fltr.ucl.ac.be/METAM/Met12/Met12-001-145.htm#12-39

Il y aurait des choses aussi à faire avec la fama chez Lucain, mais je n'ai que de vagues souvenirs.

Merci beaucoup pour toutes ces références !

Je comptais faire une étude comparée entre un extrait d'Agamemnon d'Eschyle et un extrait de l'autobiographie de E. Snowden pour réfléchir à la figure de la prophétesse qui n'est pas crue, Cassandre, à celle du lanceur d'alerte. Un travail sur la rumeur me semble aussi très intéressant et pourrait être, avec le.la collègue documentaire, abordé en rapport avec les fake news.

The Paper a écrit:Je cherche des exemples de personnages qui auraient mieux fait de se taire (Phèdre aurait mieux fait de ne pas avouer à Oenone son amour pour Hippolyte, Julien Sorel aurait mieux fait de ne pas parler lors de son procès...) et des exemples de personnages qui auraient mieux fait de parler (Cyrano aurait pu dire son amour à Roxane après la mort de Christian, Aricie aurait mieux fait de dire à Thésée qu'Hippolyte était effectivement amoureux d'elle).

Le risque n'est-il pas que cela dépende surtout de notre interprétation de lecteur contemporain et pas vraiment d'une analyse littéraire? C'est une vraie question. Personnellement, savoir si Phèdre aurait mieux fait de se taire ne m'intéresse pas vraiment parce qu'elle a parlé, et que c'est le fait que Racine la fasse avouer qui m'intéresse davantage que tout ce qu'il aurait pu ne pas lui faire faire... Elle parle parce que c'est un personnage tragique soumis à Vénus et que, pour l'économie théâtrale, il faut qu'elle parle pour qu'il y ait noeud et conflit.

En revanche, partir sur la parole qui dérange et qui ne peut/veut être écoutée me parle plus - je pense subitement au procès d'Antigone dans la version de Bauchau, ou au procès, justement, de Julien Sorel ou de Meursault. Et là, il y aurait fort à faire sur le statut d'une prise de parole qui, par définition, bouleverse les codes. Les idées me viennent un peu de manière brouillonne, mais je pense notamment aux critiques que l'on formule contre les dénonciations sur les réseaux sociaux (cf. affaire Matzneff - Girard) ou les cas d'impossibles prises de parole à cause des chapes de plomb posées sur les victimes - tout de suite, l'affaire du double-viol Tonglet-Castellano / Halimi me vient comme exemple de réflexion sur le statut de la parole qui dérange.

LDR a écrit:
Le risque n'est-il pas que cela dépende surtout de notre interprétation de lecteur contemporain et pas vraiment d'une analyse littéraire? C'est une vraie question. Personnellement, savoir si Phèdre aurait mieux fait de se taire ne m'intéresse pas vraiment parce qu'elle a parlé, et que c'est le fait que Racine la fasse avouer qui m'intéresse davantage que tout ce qu'il aurait pu ne pas lui faire faire... Elle parle parce que c'est un personnage tragique soumis à Vénus et que, pour l'économie théâtrale, il faut qu'elle parle pour qu'il y ait noeud et conflit.

Tout à fait, je ne demande pas cela pour interpréter les textes. C'est seulement pour alimenter un sujet de réflexion du type "Vaut-il mieux parler ou se taire ?" avec des exemples culturels. Il n'est pas question de plaquer un point de vue contemporain mais d'adopter celui du personnage : au début de la pièce, Phèdre veut mourir. Son aveu à Oenone repousse à plus tard cette mort qui aura finalement lieu mais il provoque au passage la mort d'Hippolyte, ce que ne souhaitait pas Phèdre.

J'ai un peu étoffé mes anthologies ; je les mets en ligne durant quelques jours pour ceux qui sont intéressés :

Et une séance plus sur l'émergence de la philosophie.

Merci beaucoup Ruthven, c'est super intéressant et utile!

Merci Ruthven !

Petite proposition de filmographie, à compléter :
ART DE LA PAROLE : - Le discours d'un roi
- Ridicule
- Le brio
- Banlieusards
AUTORITÉ DE LA PAROLE : - Le dictateur
- V pour Vendetta
SEDUCTION DE LA PAROLE : - Bugsy