Lycée Robert de Luzarches, Amiens : le chambre régionale des comptes critique le proviseur Didier Cardon.

La chambre des comptes relève le manque de rigueur dans la gestion du lycée amiénois Robert de Luzarches. Le proviseur et élu PS, Didier Cardon, décline toute responsabilité.[...]

Didier Cardon balaie la polémique d’un revers de main. « Je n’ai pas à commenter un rapport de la chambre régionale des comptes, surtout si ce dernier ne comporte rien de très probant. » À l’heure de faire ses cartons après neuf années passées à la tête du lycée Robert-de-Luzarches, le proviseur rend une copie qui semble loin d’être propre.

Ce rapport fait suite à l’affaire de détournement de fonds révélée en 2011. L’ancien comptable du lycée et sa compagne sont soupçonnés d’avoir détourné 450 000 euros dans les caisses de l’établissement. Mis en examen, ils devraient être jugés en novembre prochain.

Didier Cardon n’a jamais été mis en cause dans ce dossier, mais, selon la chambre régionale des comptes, un certain laisser-aller dans la gestion de l’établissement aurait favorisé de tels agissements. « L’absence de rigueur, notamment dans les procédures d’engagement des dépenses, et les dysfonctionnements observés dans le suivi d’encaissement des recettes ont constitué un environnement propice à cette situation », détaille le rapport.

Absence de rigueur, toujours, concernant l’organisation et le rôle du conseil d’administration. « Ce dernier n’est pas tenu informé des opérations menées par l’établissement (…) En outre, la transparence des décisions des instances de l’établissement n’est pas assurée en raison de l’insuffisante formalisation des délibérations. »

Le rapport déplore également « l’absence de projet d’établissement sur la période 2011-2013 », mais également « des taux de réussite ou de parcours scolaire inférieurs aux moyennes académiques et nationales, alors que le lycée s’adresse majoritairement à une population favorisée ».

L’aspect le plus étonnant concerne néanmoins les relations entre le lycée et l’association « Lou Organisation », portée par l’artiste Lou Ken, en résidence dans l’établissement pour un salaire annuel d’environ 40 000 euros. Deux problèmes se posent selon la juridiction. Tout d’abord, le fait que Lou Ken, représentant de l’association, a siégé au conseil d’administration de 2006 à 2012. Ce qui « présente des risques en termes de conflits d’intérêts ». Mais aussi, que l’« établissement n’a pas été en mesure de communiquer les conventions tripartites passées entre le lycée, l’association et la région. »

Sur ce point, Didier Cardon renvoie la responsabilité sur son ancien comptable. « Il a détruit tous les documents. » Et estime que la présence de Lou Ken au conseil d’administration ne pose aucun problème. « Il était intéressant qu’il puisse y participer et, dans la mesure où il n’a jamais pris part au vote, je ne vois pas là où il y a conflit d’intérêt. »

D’une manière générale, le proviseur estime que ce rapport ne révèle rien de choquant ou d’illégal. « Dans n’importe quel établissement, les conclusions seraient certainement les mêmes. »

Ce n’est évidemment pas l’avis de certains enseignants qui, sous couvert d’anonymat, mettent directement en cause le proviseur. « Il n’a pas voulu choisir entre sa carrière d’homme politique et d’enseignant et du coup, il est partout et nulle part à la fois. »

Candidat à la candidature aux dernières élections municipales et vice-président PS du conseil régional, Didier Cardon a, il est vrai, un emploi du temps bien rempli. Et des appuis politiques qui, selon certains, auraient pu lui permettre d’éviter les sanctions. Il y a quelques mois, lors du premier mouvement des mutations, le chef d’établissement est affecté à Soissons, dans l’Aisne, au lycée Gérard de Nerval. Pourtant, c‘est au lycée de l’Acheuléen, à Amiens, qu’il effectuera sa prochaine rentrée. Didier Cardon réfute sèchement l’hypothèse d’un piston. « C’est faux ».[...]

FABRICE JULIEN