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LM
Vénérable

L'étude des textes au collège : comment en sommes-nous arrivés là ? - Page 8 Empty Re: L'étude des textes au collège : comment en sommes-nous arrivés là ?

par LM Mer 17 Juil 2013, 14:55
Amaliah a écrit:
Reine Margot a écrit:n'empêche que je reste toujours sur mon problème de double progression (même si je n'enseigne plus ça m'a toujours agacée de ne pas trouver de solution).

Si on fait de la lecture-écriture d'un côté et de la grammaire-orthographe de l'autre, il y a bien un moment où ça se rejoint (ne serait-ce quand on montre comment les outils de la langue produisent tel effet). On va faire un peu de stylistique dans les cours de lecture (utiliser la grammaire pour montrer comment le texte construit telle impression), et de l'application de la grammaire dans les textes (montrer par exemple l'utilisation de tel temps, pour cela il faut un texte).

Donc on finit par tout croiser, alors finalement pourquoi faire 2 progressions séparées qui vont sans cesse se chevaucher et se rejoindre au bout du compte au lieu de n'en faire qu'une?

j'avais essayé de monter des progressions annuelles mais devant un tel schmilblick j'étais revenue à une seule progression, donc une suite de séquences.

Parfois les faits de langue servent à éclairer le texte, mais les élèves ne sont pas vierges de toute notion grammaticale, donc ils peuvent aussi convoquer une notion sans que tu ne l'aies revue en détails avec eux.
J'ai une progression grammaticale bien séparée : chaque année je sais que j'aborderai un certain nombre de notions dans un ordre prédéfini et immuable. Et il y a certaines notions que je déplace selon le thème de ma séquence. Par exemple les valeurs du présent en 6e que je vois forcément en même temps que les fables ou le passé simple que je ne fais pas pendant la poésie ou le théâtre. Je réfléchis donc à l'ordre de mes séquences, puis je déplace certaines notions grammaticales pour que ce soit le plus rigoureux possible.

Je fais la même chose.
V.Marchais
V.Marchais
Empereur

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par V.Marchais Mer 17 Juil 2013, 15:05
Même si c'est pour la gloire, puisqu'elle n'enseigne plus, je copie ici un vieux message pour Margot - et puis ce sera peut-être utile à d'autres.

Je vais essayer de rassembler ici quelques réflexions et propositions relatives à la pédagogie de la grammaire. Bien sûr, chacun peut contribuer pour discuter et apporter d’autres pistes.

D’abord, ce que j’ai appris (et vous aussi sans doute, si vous avez moins de 149 ans).La grammaire s’enseigne en séquences. Le cloisonnement, c’est le Mal, le décloisonnement, c’est le Bien. Il faut partir des textes et retourner aux textes (via l’écriture), un peu comme les saumons. Soi-disant que les leçons de grammaire décrochées ne feraient pas sens alors que, c’est bien connu (mantra n°641 du Parfait Pédagogue) : « Il faut donner du sens aux apprentissages » (si un jour quelqu’un veut bien m’expliquer, justement, le sens de cette formule, je lui en saurai gré). Et puis surtout, il faut éviter de conceptualiser : il faut MA-NI-PU-LER. Pas de définitions, entachées de tout le mépris jeté sur le par-cœur, mais des critères de distribution censé créer chez l’apprenant une soudaine conscience des mécanismes de la langue.

Pour quoi ça ne marche pas ?

Je tiens tout de suite à le dire : c’est pas tant la faute à la séquence (après tout, si un professeur veut partir systématiquement des textes étudiés pour créer ses leçons de langue, il se complique beaucoup la tâche de façon pas toujours utile, mais jusque là, en soi, rien de nuisible à l’enseignement de la grammaire) qu’à la manière de construire ces séquences et de penser l’organisation de la grammaire au sein de ses séquences. En d’autres termes, le souci de cohérence de chaque séquence et la recherche d’un sacro-saint « lien entre les séquences » (dont je n’ai toujours pas compris l’intérêt, soit dit en passant), contraintes déjà lourdes, finissent par faire perdre de vue une cohérence au moins aussi importante : celle de la grammaire, qui est un domaine à part entière avec sa logique, et qui ne peut être abordée dans n’importe quel ordre.

Le gros problème de la séquence, c’est qu’on se dit qu’on va commencer par travailler d’abord sur une petite nouvelle policière pour se remettre en train de façon stimulante, et du coup, travailler les descriptions dans cette nouvelle et la manière dont elles contribuent à l’atmosphère du récit, donc, après quelques vagues et trop rapides rappels sur les classes grammaticales (faut bien que ça tienne en une ou deux séances), on attaque les CC qui organisent cette description. Ensuite on va faire écrire une petite nouvelle, en caractérisant les personnages, temps du récit et expansions du nom. Et en route vers le roman de chevalerie, le style épique, degrés et fonctions de l’adjectif. Puis la farce, la situation d’énonciation semble s’imposer, et les compléments d’objet. C’est comme ça que vous, moi, et tous les professeurs nés après le Pléistocène ont appris à penser leurs séquences : dans un rapport de nécessité entre le point de langue étudié et les textes envisagés. Que cela déstructure complètement la logique de la grammaire de phrase n’a l’air de heurter personne, ni nos IPR chargés de promouvoir le modèle de la séquence ni nombre de collègues. Pourtant, si on lâche deux minutes l’échelle de la séquence pour regarder juste ce que ça donne au niveau de la grammaire, on comprend vite qu’il y a un problème : d’abord les classes grammaticales (toutes, en bloc), puis les CC, puis des fonctions liées à l’adjectif, puis une fonction essentielle… Quel bazar ! Aucun espoir pour l’élève de percevoir la logique de la langue là-dedans, encore moins de voir les notions s’éclairer les unes les autres. Je reviendrai sur cette idée d’un ordre éclairant dans l’abord des notions.

Deuxième écueil de la démarche séquentielle : en partant systématiquement des textes, elle surajoute sans cesse la difficulté des textes aux difficultés de la grammaire. Pour des élèves fragiles, c’est, au contraire de ce que l’on croit souvent, bien plus simple et rassurant de travailler la grammaire de façon décrochée : ils reprennent haleine face à un corpus de phrases choisies, sans plus se sentir débordés par un vocabulaire et une syntaxe qui leur font défaut, ils comprennent enfin quelque chose en français et peuvent reprendre pied. Ce sont souvent les élèves les plus faibles qui préfèrent la grammaire et se trouvent sécurisés et valorisés par un travail décroché, méthodique, offrant des repères et des habitudes sur lesquels prendre appui. Et s’il y a bien une chose qui « donne du sens aux apprentissages », c’est de se mettre à y comprendre quelque chose et de se sentir progresser, quelle que soit la méthode.

Enfin, la manière, héritée de la linguistique, de se contenter de décrire les caractéristiques des différentes fonctions au lieu de les définir réellement est bien peu opérante. Les élèves se retrouvent à manipuler les phrases de façon hasardeuse, sans plus savoir si le résultat qu’ils obtiennent est recevable ou non et y perdent leur latin. Quant à opérer la transformation passive pour identifier un COD, c’est un peu mettre la charrue devant les bœufs ; de même les critères de
pronominalisation sont peu sûrs avec des élèves qui ignorent bien souvent ces « petits mots » dont la référence est pour le moins nébuleuse dans leur tête (il n’y a qu’à voir comment nous peinons tous avec les exercices sur les pronoms). Bref, au lieu de donner aux élèves des repères clairs, nous leur donnons descritères que bien peu savent utiliser, qui ne leur sont d’aucune aide, et qui de toute façon peuvent au mieux constituer des moyens de vérification de l’analyse, mais en rien se substituer à une réelle définition des concepts, permettant leur pleine intelligence par le cerveau de l’enfant. Et là, je dois bien dire que, depuis 30 ans au moins, c’est le désert pédagogique. Je vous mets au défi de me trouver un seul manuel qui définisse réellement les notions de complément d’objet, d’attribut ou de CC.

Je suis d’accord avec Incognito : une progression grammaticale cohérente, en particulier pour tout ce qui touche à la grammaire de phrase, doit permettre de comprendre la structuration de la phrase française, son enrichissement progressif et les possibilités stylistiques qu’offre cet enrichissement. Ça veut dire qu’on part du noyau irréductible de la phrase verbale, à savoir le couple sujet-verbe, et qu’on construit à partir de là. On fait observer qu’avec un verbe intransitif, ça suffit pour former une phrase complète. Mais avec d’autres verbes, non : il manque un truc pour compléter la phrase, c’est-à-dire précisément un complément qui précise sur quel objet porte l’action. Et là, on n’est pas en train de décrire une fonction du point de vue de ses caractéristiques distributionnelles, on est vraiment en train de les faire comprendre du point de vue conceptuel – et ça, c’est très important. On parle de sens, eh bien, d’un seul coup, toutes ces expressions que nous utilisons en grammaire trouvent leur sens. On en profite pour insister sur la différence entre sujet et objet, et ainsi, l’introduction de la nouvelle notion permet de mieux comprendre la première. Puis on introduit l’attribut du sujet, qui lui aussi complète le verbe, mais qui, contrairement au complément d’objet, ne désigne pas un objet différent du sujet, mais justement une caractéristique du sujet. Et ce faisant, non seulement on avance pas à pas dans la construction de la phrase, mais à chaque notion nouvelle permet de mieux éclairer les précédentes. Ainsi, l’intelligence de la phrase se dessine peu à peu dans la tête de l’élève.

Et les applications stylistiques sont immédiates. On apprend que la base de la phrase – la phrase minimale – souffre peu de distorsions et impose un ordre aux éléments (en gros, le fameux : S+V+COD). Toute dérogation à cet ordre relève donc d’un effet de style, d’une mise en relief, par exemple. Dès les premières leçons, on peut ainsi travailler sur la place du sujet et son inversion après certains adverbes ou autres indications de lieu en tête de phrase, puis sur le rejet du COD en fin de phrase (par exemple dans le Cendrillon de Perrault, où la découverte de la princesse endormie est rejetée à la suite d’une succession de CC, disant l’éblouissement de cette révélation). Peu à peu, on verra les CC, la place où l’on peut les mettre pour un effet heureux dans la phrase – mais on aura défini les CC pour ce qu’ils sont, sans les réduire à cette histoire par ailleurs discutable de suppression / déplacement, critères que l’on utilise bien mieux dans l’écriture, une fois que les notions sont posées.

Les avantages d’une progression méthodique en grammaire sont nombreux :
- Les notions sont définies de façon bien plus rigoureuse en prenant appui sur lefonctionnement de la phrase ;
- Elles s’éclairent et se renforcent les unes par rapport aux autres ;
- De ce fait, elles obligent aussi à réinvestir les notions précédentes, donc à les revoir perpétuellement et garantissent une mémorisation bien supérieure ;
- Non seulement cette « grammaire à ma grand-mère », comme disent certains avec mépris, ne s’oppose pas à une pratique de la grammaire dans l’écriture
mais (et ce serait là un sujet à part entière à développer), elle favorise au contraire une réelle progression dans l’apprentissage de l’écrit qui permet de faire comprendre à l’élève pourquoi on doit construire la phrase minimale comme ça et pas autrement, et quels écarts et effets il peut mettre en œuvre peu à peu, au fur et à mesure qu’il déchiffre mieux les mécanismes de la phrase.

Bref, selon moi, il est impensable de ne pas avoir de progression indépendante en grammaire (c’est d’ailleurs ce que demandent les IO actuelles), parce que c’est cela qui garantit l’efficacité du travail. MAIS cela ne présuppose pas du fait de travailler ou non en séquences. Ça, c’est encore autre chose. La littérature use de la langue dans son intégrité et ce serait bien le diable si l’on ne parvenait pas à étudier ses points de grammaire dans l’ordre voulu en lien avec les textes de son chapitre si l’on y tient. D’ailleurs, si, pour tout ce qui est de la grammaire de phrase, je trouve le fonctionnement décroché plus pertinent, pour étudier des points comme l’emploi du subjonctif en subordonnée, les mots de liaison ou les paroles rapportées, je suis la première à dire que ça n’a de réel intérêt qu’en contexte. C’est toute la différence entre grammaire de phrase et grammaire de texte. Il en résulte une nécessaire souplesse dans les pratiques : leçons décrochées ici, leçons liées, là. Pas de dogme absolu, pas de vérité universelle. Juste une démarche adaptée à son objet autant que possible.

Enfin, il y aurait beaucoup à dire sur la notion de décloisonnement. J’ai une progression de grammaire indépendante de ma progression littéraire et je pratique massivement la leçon « décrochée », comme on dit. Cela ne m’empêche pas d’être favorable au décloisonnement. L’erreur serait de croire qu’il n’y aurait qu’une seule manière de décloisonner, laquelle consisterait en une inféodation systématique de la grammaire aux textes étudiés, avec le désordre que cela génère, déjà évoqué. J’ai inventé une autre forme de décloisonnement faisant appel à ce que Ferdinand Buisson appelait la « connaissance intuitive de la langue », et je suis convaincue qu’on pourrait en inventer d’autres encore tant il est vrai que la pédagogie, c’est aussi l’imagination au pouvoir. Mais une chose à la fois. Ce message est, pour pas changer, d’une longueur effrayante. Je vous livre déjà ceci avant d’entamer cet autre point.

(PS : Je me fatigue moi-même et j’ai la flemme de me relire : je réclame votre indulgence pour les fautes qui traîneront dans ce message.)
V.Marchais
V.Marchais
Empereur

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par V.Marchais Mer 17 Juil 2013, 15:06
Bon, j'avais promis de développer ici mon travail sur l'approche intuitive de la grammaire, je vais essayer.

Tout est parti d'un article du Dictionnaire Pédagogique de Ferdinand Buisson qui dit que l'on doit nourrir la langue de l'enfant afin d'en faciliter l'étude réflexive. Les enfants ont, dans une certaine mesure, ce que Buisson appelle "une connaissance intuitive de la langue" sur laquelle s'appuyer, et l'étude de la grammaire est d'autant plus aisée que l'on peut s'appuyer sur cette connaissance. Par exemple, nous ne voyons jamais d'enfant (en tout cas pas d'enfant francophone) qui dirait : "Un soleil brille". Même si l'enfant n'est pas capable d'expliquer l'emploi de l'article défini, il en use spontanément. Il est alors relativement facile, à partir d'exemples bien choisis, de lui nommer les articles existant et de mettre des mots sur ces règles qu'il emploie sans le savoir. À l'inverse, nous avons tous fait l'expérience de cours relatifs à des tournures que nos élèves ne maîtrisent pas du tout (par exemple, la construction des relatives, notamment l'emploi de dont) avec l'impression particulièrement laborieuse de devoir leur apprendre ici la langue française comme une langue étrangère : il est alors très difficile de dispenser en même temps l'usage et la théorie sur cet usage.

D'où mon idée d'étendre à la grammaire le "nourrissement de la langue" qu'évoque Buisson dans un autre contexte. Cela facilite l'étude ultérieure des notions.

L'idée est assez simple, en fait. Ils s'agit de croiser deux approches de la langue : d'une part une approche purement théorique, les leçons de grammaire "classique", obéissant à une progression rigoureuse, donc cloisonnées, assurant cette progressivité et ce réinvestissement des apprentissages déjà évoqués ; et d'autre part une approche pragmatique, partant des textes étudiés et mise au service de l'écriture.
Par exemple, dans un texte, on va s'arrêter sur un passage descriptif et faire utiliser l'apposition pour éviter être et avoir. L'exercice est présenté comme un exercice d'imitation : à aucun moment, le mot "apposition" n'est prononcé, mais les élèves utilisent la chose, mettent en oeuvre le concept en écrivant, d'abord des phrases, puis un paragraphe descriptif. Ou bien je leur montre comment donner du rythme à leur récit en enchaînant des phrases à l'aide d'un pronom relatif au lieu de faire deux phrases. Là non plus, pas de théorie, mais un appel à l'intuition et à l'imitation pour utiliser correctement les pronoms en question. Etc.

Donc, en ce qui me concerne, la grammaire est toujours à double détente :
- moitié du temps d'enseignement consacré à des cours "classiques" ;
- à l'issue de chaque étude de texte ou presque, travail d'imitation d'une structure syntaxique (non nommée).
Les avantages sont nombreux :
- Comme l'avait remarqué Buisson, sur des notions peu familières aux élèves, il est bien plus aisé de travailler quand les élèves se sont approprié ces notions grâce à leur manipulation et leur emploi ;
- Avant même toute théorisation sur le sujet, on enrichit le bagage linguistique des élèves de nouvelles tournures qui vont leur permettre de mieux réussir leurs rédactions ;
- On réactive toujours dans un sens ou dans l'autre (approche pragmatique de l'écriture préparant l'approche théorique ou la reprenant), permettant ainsi de mieux fixer les connaissances ;
- Les élèves peu à l'aise avec l'abstraction parviennent ainsi à raccrocher en partie les wagons ;
- Ce travail, mené rigoureusement, permet d'adopter une démarche progressive en écriture autant qu'en langue à strictement parler.
Leclochard
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Empereur

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par Leclochard Mer 17 Juil 2013, 15:09
Je n'ai pas lu tous les messages. je confirme la dérive techniciste et écœurante. La raréfaction des rédactions jouent aussi.
Mon neveu passe en 5ème. Il a un problème très proche avec l'anglais. Il a eu de bonnes notes mais il est incapable de dire deux phrases simples et d'exprimer un sentiment basique (j'ai soif. Je voudrais boire de l'eau). Résultats: il prend des cours cet été avec un ancien instit qui confirme qu'il est incapable de parler malgré les nombreuses heures qu'il a suivies.
On avait abordé la question de l'imposture sur ce forum. En voilà une belle: le cours-illusion. Celui qui remplit les cahiers (de préférence avec des fiches photocopiées), qui donne l'impression de savoir quelque chose mais qui n'apprend rien.

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Quelqu'un s'assoit à l'ombre aujourd'hui parce que quelqu'un d'autre a planté un arbre il y a longtemps. (W.B)
adelaideaugusta
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par adelaideaugusta Mer 17 Juil 2013, 22:34
Leclochard a écrit:Je n'ai pas lu tous les messages. je confirme la dérive techniciste et écœurante. La raréfaction des rédactions jouent aussi.
Mon neveu passe en 5ème. Il a un problème très proche avec l'anglais. Il a eu de bonnes notes mais il est incapable de dire deux phrases simples et d'exprimer un sentiment basique (j'ai soif. Je voudrais boire de l'eau). Résultats: il prend des cours cet été avec un ancien instit qui confirme qu'il est incapable de parler malgré les nombreuses heures qu'il a suivies.
On avait abordé la question de l'imposture sur ce forum. En voilà une belle: le cours-illusion. Celui qui remplit les cahiers (de préférence avec des fiches photocopiées), qui donne l'impression de savoir quelque chose mais qui n'apprend rien.

Je prends en cours de route.

Texte qui résume bien ce que dit Véronique.
adelaideaugusta
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par adelaideaugusta Mer 17 Juil 2013, 22:53
adelaideaugusta a écrit:
Leclochard a écrit:Je n'ai pas lu tous les messages. je confirme la dérive techniciste et écœurante. La raréfaction des rédactions jouent aussi.
Mon neveu passe en 5ème. Il a un problème très proche avec l'anglais. Il a eu de bonnes notes mais il est incapable de dire deux phrases simples et d'exprimer un sentiment basique (j'ai soif. Je voudrais boire de l'eau). Résultats: il prend des cours cet été avec un ancien instit qui confirme qu'il est incapable de parler malgré les nombreuses heures qu'il a suivies.
On avait abordé la question de l'imposture sur ce forum. En voilà une belle: le cours-illusion. Celui qui remplit les cahiers (de préférence avec des fiches photocopiées), qui donne l'impression de savoir quelque chose mais qui n'apprend rien.

Je prends en cours de route.

Texte qui résume bien ce que dit Véronique.

Voici un autre exemple qui n'est pas un pastiche, mais que j'ai vécu.

Marguerite Cours de français en cinquième.

"Depuis des décennies, nous, professeurs de français et de littérature, sommes trahis par les linguistes et par les lexicographes."

J’ai tapé intégralement ce texte, qui rassemble deux cours de français d'une mienne petite-fille de douze ans.

Les séquences.

Français en cinquième (Cours des 20 et 21 octobre)

Les principales fonctions du discours.

I) Généralités.
Lors de l’acte d’énonciation, l’émetteur a toujours une intention. Chaque énoncé a une fonction dominante : raconter, décrire, expliquer, ou argumenter (chercher à convaincre.)

II) Le discours narratif.
A) Objectifs.
L’émetteur l’emploie pour :
1) à l’oral :
Raconter des événements survenus à lui ou à quelqu’un d’autre.

2) à l’écrit :
rédiger des romans, nouvelles, contes, récits (historiques, biographiques, autobiographiques.)

B) Indices grammaticaux.

1) Indices de personne (l’émetteur).
a) 1ère pers.du sing. ou pluriel (je, nous)
- ouvrage des récits autobiographiques
- ou lorsque le narrateur est un narrateur fictif, un personnage du livre.
b) 3ème pers. Du sing. ou du pluriel (il, elle, ils, elles) dans la plupart des romans, quand le récit est directement écrit par l’auteur, sans intervention d’un narrateur.

2) Le temps des verbes :
a) présent : le présent d’actualité.
b) passé : passé simple (ou passé composé)

3) Des repères nombreux dans l’espace et le temps :
a) L’espace - adverbes de lieu : ici, là.
- GN.C circon. de lieu (« dans une clairière », « de chez moi »,)
b) Le temps - adverbes de temps : maintenant, hier, plus tard.
- GN.C circ. de temps : « Un certain jour d’automne », « de bonne heure », « à deux heures ».


III) Le discours descriptif.
A) Objectifs.
L’émetteur veut que le récepteur puisse se représenter, imaginer un lieu, objet, personnage.
On le trouve :
1) à l’oral dans les récits, contes.
2) A l’écrit : manuels scolaires, guides touristiques, notices (de montage, d’utilisation), articles de journaux.

B) Les indices grammaticaux.

1) Indices de personnes : 3ème personne sing.ou pluriel.
2) Temps des verbes.
a) Présent : le présent.
b) Passé : imparfait.
3) Quelques repères dans le temps et dans l’espace.
4) De nombreuses expansions du GN

a) L’adjectif épithète : les terrains arides
b) C de N (complément du nom) : les murs de boue
c) La prop.subordonnée relative : le chien qui court est malade.


IV) Le discours explicatif.
A) Objectifs.
Le narrateur veut faire comprendre quelque chose au récepteur.
1) A l’oral : cours d’un professeur, explication d’un vendeur.
2) A l’écrit : dans les manuels scolaires, les notices.

B) Les indices grammaticaux.
1) Personnes : 3ème personne
2) Temps présent de vérité générale.
3) Les mots outils servent à marquer les étapes de l’explication.

Les étapes de l’explication.
1) Conjonctions de coordination : car, donc.
2) Adverbes : en effet, pourtant.
3) Conjonction de subordination : parce que, puisque, ainsi, c’est pourquoi.


V) Le discours argumentatif.
A) L’adjectif.
L’émetteur veut persuader, convaincre le récepteur par tous les moyens.

1) A l’oral : conversation, débat, publicité.
2) A l’écrit : dialogue de théâtre, de roman ; publicité, articles de journaux.


B) Les indices grammaticaux.
On retrouve les outils, les indices des trois premiers discours.

Une grande variabilité.

1) De personne (1ère, 2ème, 3ème)
2) De temps (passé, présent, futur.)
3) De mode (indicatif, impératif, condit. subj.)

Une abondance de mots outils (les mêmes que dans le discours explicatif)

(Il s'agit d'un travail sur trois pages de la chèvre de Monsieur Seguin, seul texte étudié...depuis la rentrée!)

Ces fameuses séquences didactiques conduisent nos enfants à "l'inappétence scolaire", euphémisme utilisé par le "langage pédadingo", pour qualifier le rejet de ces enfants pour toute littérature.

Dans le livre de Michel Leroux, j'ai trouvé une comparaison, sur ce genre de procédure.
"Cela n'aurait aucun sens, disait Einstein, de décrire une symphonie de Beethoven comme des variations de pression ondulatoire."

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Ruggera7
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par Ruggera7 Mer 17 Juil 2013, 22:56
Elle a dû apprendre tout cela???
Libé-Ration
Libé-Ration
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par Libé-Ration Jeu 18 Juil 2013, 00:12
C'est un vrai cours de 5e ????
Dalva
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par Dalva Jeu 18 Juil 2013, 01:40
En tout cas, c'est bien ce qu'on attendait de nous au sortir de l'iufm. Enfin... C'est ce que les formateurs iufm attendaient de nous. Heureusement, les IPR qui passaient par derrière l'année suivante nous remettaient vite les idées en place - la mienne en tout cas le faisait, me rassurant ainsi : "Débarrassez-vous donc de tout cela, vous pouvez prendre un peu de distance avec l'iufm, maintenant ! N'oubliez pas le texte ! Le texte !"
adelaideaugusta
adelaideaugusta
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par adelaideaugusta Jeu 18 Juil 2013, 07:54
Libellune a écrit:C'est un vrai cours de 5e ????


Séquences (suite)


Extrait du 'Livre unique de français' cinquième'. (P.19) Nathan :trois mois sur quelques pages de la chèvre de M. Seguin.

*Que l'on raconte, que l'on décrive ou que l'on argumente, on le fait toujours avec une intention particulière, que l'on appelle 'visée' : ce peut être pour faire rire, susciter une émotion, convaincre...

3 . AUTEUR, NARRATEUR, PERSONNAGE.

*On appelle auteur l'écrivain qui imagine et écrit une histoire.

*L'auteur choisit un narrateur qui racontera l'histoire.

- Ce narrateur peut être un personnage de l'histoire : il raconte cette histoire à la première personne.
- Ce narrateur peut être extérieur à l'histoire : il raconte cette histoire à la troisième personne.
- L'auteur peut raconter sa propre histoire : l'auteur, le narrateur et et le personnage sont alors une seule et unique personne.

* Identifier le statut du narrateur, c'est dire si le narrateur est un personnage de l'histoire ou s'il est extérieur à l'histoire.

* Le narrateur peut intervenir pour faire un commentaire. Lorsque le récit est au passé, ces commentaires sont au présent d'énonciation.
Ex : Plus de dix fois, Gringoire, elle força le loup à reculer pour reprendre haleine.

4 . LE SCHEMA NARRATIF.
* Entre le début et la fin du récit, la situation des personnages évolue et se transforme. Une succession d’événements permet le passage de l'un à l'autre. Un récit comporte en général cinq étapes :
- Une situation initiale qui présente les circonstances de départ (personnages, lieu, époque...);
- un premier événement (élément déclencheur) qui a permis de lancer l'action;
- une série d'actions qui s'enchaînent;
- un dernier événement qui permet à l'action de se dénouer (dénouement ou résolution) ;
- une situation finale qui instaure un nouvel équilibre, différent de celui présenté dans la situation initiale.

* Ces cinq étapes constituent ce qu'on appelle le schéma narratif. La structure d'un récit est parfois plus souple : par exemple, un récit peut commencer par l'élément déclencheur et se terminer par le dénouement, la situation finale est alors sous-entendue.

5 . LE SCHEMA ACTANCIEL.

* Le schéma actanciel permet d'identifier les forces agissantes (appelées aussi actants) qui s'exercent sur un personnage. Il faut se poser les questions suivantes au sujet de ce personnage, qu'on appelle alors sujet :
- qui le pousse à agir (qui est le destinateur?)
Il peut s'agir d'un autre personnage d'une force intérieure (amour, jalousie, désir de vengeance...)
- que cherche à obtenir le personnage (quel est l'objet de sa quête?) Ce peut être l'amour, l'argent..
- qui va l'aider (adjuvant) ? Ce peut être un autre personnage, son propre courage, sa ruse...
- qui va s'opposer à lui (opposant) ?
- à qui la quête profite-t-elle (qui est le bénéficiaire) ? Elle peut profiter au personnage lui-même, à un autre personnage...

(Suit un schéma avec cinq flèches, sujet au centre, et les mots destinateur, adjuvants, opposants, etc, à vomir...)

6 . LES TEMPS DU RECIT.

* Dans un récit au passé, le passé simple est utilisé pour raconter des actions de premier plan qui se succèdent et font avancer l'histoire.

Ex : elle se retourna et vit dans l'ombre deux oreilles courtes.

* L'imparfait est utilisé pour présenter l'arrière-plan de l'histoire, c'est-à-dire :
- Les descriptions.
Ex : Qu'elle était jolie la chèvre de Mr Seguin!

* Les actions répétées ou habituelles.

Exemple : Il les perdait toutes de la même façon.' La chèvre".



(Travail fait en sixième)
Transposer un texte dans un autre niveau de langage.

Ce texte est écrit en langage familier. Réécrivez-le en langage soutenu.
« La môme qui m'avait laissé tomber se tenait devant le micro au milieu de la salle, devant des fauteuils et quand tout s'est allumé, elle m'a vu. Il y avait trois ou quatre mecs dans les coins mais ils étaient pas armés. Je devais avoir l'air con la bouche ouverte, parce que tout le monde me regardait comme ça. »
Romain Gary.



'Les mots eux-mêmes appartiennent à un langage familier, courant ou soutenu : marrant, amusant, distrayant.

(Titre du texte étudié : Les niveaux de langage. Adapter son langage au destinataire. (Sic!) )

Si tu emploies un langage familier, pense à utiliser :
* des expressions imagées : se prendre la tête, pour se soucier.
* des expressions abrégées : l'apéro pour l'apéritif.
* des mots d'argot (le langage parlé à l'origine par les voyous parisiens.) : tarin pour nez.
* le verlan (les mots sont prononcés en inversant les syllabes.) : laisse béton pour laisser tomber.'

Voici un bon cours de français en sixième. Ma petite-fille m'a dit (j'ai copié cela en cachette d'elle, et ne lui en ai pas parlé, c'était donc spontané de sa part) : 'je déteste le français. Heureusement, demain, j'ai art plastique. ' Elle commence à étudier l'énonciation, le destinataire, et toute cette nouvelle façon d'étudier le français en tournant autour du pot en abordant très peu les vrais textes. Quel intérêt d'apprendre le verlan à l'école, elle a bien l'occasion de l'apprendre en dehors!

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InvitéP22
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par InvitéP22 Jeu 18 Juil 2013, 08:15
Cela me paraît fou !
Oudemia
Oudemia
Bon génie

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par Oudemia Jeu 18 Juil 2013, 08:20
adelaideaugusta a écrit:
* Le narrateur peut intervenir pour faire un commentaire. Lorsque le récit est au passé, ces commentaires sont au présent d'énonciation.
Ex : Plus de dix fois, Gringoire, elle força le loup à reculer pour reprendre haleine.
Je vais être gentille pour la collègue: peut-on supposer que ta petite-fille n'a pas pris le bon exemple ?L'étude des textes au collège : comment en sommes-nous arrivés là ? - Page 8 248604097
Lora
Lora
Neoprof expérimenté

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par Lora Jeu 18 Juil 2013, 08:50
C'est exactement le type de cours que je faisais en 1999, lors de mon année de stage.pale Heureusement, tout ça, c'est fini.cheers 
adelaideaugusta
adelaideaugusta
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par adelaideaugusta Jeu 18 Juil 2013, 08:53
Oudemia a écrit:
adelaideaugusta a écrit:
* Le narrateur peut intervenir pour faire un commentaire. Lorsque le récit est au passé, ces commentaires sont au présent d'énonciation.
Ex : Plus de dix fois, Gringoire, elle força le loup à reculer pour reprendre haleine.
Je vais être gentille pour la collègue: peut-on supposer que ta petite-fille n'a pas pris le bon exemple ?L'étude des textes au collège : comment en sommes-nous arrivés là ? - Page 8 248604097

Hélas, je ne le souhaitais pas, mais ta question me force à enfoncer le clou.


Devoir de français en cinquième (fait par ma petite-fille. Les " R" sont ses réponses aux questions.)

Susie Morgenstern
Lettres d’amour.

Synthèse.
A propos de l’auteur.

1) Qui est l’auteur de Lettres d’amour de 0 à 10 ? Citez le titre de deux autres de ses romans.
R. L’auteur est Suzie Morgenstern.
Elle a aussi écrit « Alibie » et « Europe alibie ».
2) En quelle langue ce roman a-t-il été écrit ? En quelle année ?
R. Ce roman a était écrit en englais et a était écrit en

3) A qui ce roman est-il dédié ?
R. Ce roman est dédié à

A propos de l’histoire.

4) Quel Evénement déclenche les changements dans la vie d’Ernest ?
R. L’évènement qui déclenche les changements dans la vie d’Ernest et l’arrivé d’une nouvelle : Victoire.

5) Autour de quel trio de personnages l’histoire s’organise-t-elle ?
R. L’histoire se tourne autour d’Ernest de sa grand-mère : Précieuse et de sa nouvelle amie Victoire.

6) Citez les trois lieux principaux où se déroule l’histoire.
R. – à l’école.
- chez Ernest.
-chez Victoire.

A propos des personnages.

7) Qu’est-il arrivé aux parents d’Ernest ?
R. La mère d’Ernest est morte en ayant mit au monde Ernest et son père à disparu.

8) Quels personnages secondaires ont pourtant un rôle important dans la vie d’Ernest ?
Citez deux personnages et justifiez votre réponse.
R. Son père, Gaspard qui lui envoit de lettres et son Grand-père grâce à la lettre qui depuis des ans Ernest et sa Grand-mère on toujours essayé d’ilucidé.

9) Différences entre Ernest et Victoire.
R. Ernest : frères et sœurs : 0 à la fin 5
1 parent à la maison assez timide

Victoire : frères et sœurs : 13 frères
15 parents à la maison très décontracté

10) Points communs.
R. âge : 10 ans, quartier de résidence.

11) Les points communs portent-ils sur des choses essentielles de la vie des deux personnages ?
R. Oui, car l’âge porte beaucoup sur la mentalité donc sur l’afection et les dialogues qu’on entreprend.

12) Complétez le paragraphe suivant avec certains des mots proposés dans cette liste :
timide- influence-différents-entreprenante-similaires-autorité.

R. Ernest et Victoire sont deux enfants très (différents). Ils sont associés par le maître, sans qu’on leur donne le choix. Victoire exerce très vite une réelle (autorité : faux, le bon mot est influence) sur Ernest parce qu’elle est (entreprenante) et beaucoup moins (timide).

Encore quatre questions aussi intéressantes.
Note : 14, 25 – 1,5 (orthographe et expression) = 13/20.
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Ruggera7
Neoprof expérimenté

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par Ruggera7 Jeu 18 Juil 2013, 09:20
heu Incroyable... Les autres parents n'ont pas bougé? Aucune réaction de qui que ce soit???
adelaideaugusta
adelaideaugusta
Fidèle du forum

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par adelaideaugusta Jeu 18 Juil 2013, 11:37
Ruggera7 a écrit:heu Incroyable... Les autres parents n'ont pas bougé? Aucune réaction de qui que ce soit???

Dans les "livres uniques de français", de chez Hatier ou Nathan, qui pèsent un poids considérable (leur pesant de c...:censure: ) de quatrième et de troisième, on retrouve les mêmes textes : les enfants trouvent cela tellement abscons qu'ils sont incapables de retenir ce qui n'a aucun sens.

C'est très bien analysé par Michel Leroux .

http://www.sauv.net/leroux.htm

Vous comprenez pourquoi on dit que le brevet est bradé ...et pourquoi votre fille est muette...

ps : que peuvent les parents ? Hatier et Nathan font leur beurre. Vraiment, personne ne connait ces livres uniques ?????????:malmaisbien: 

Les textes de Zidane y sont sur le même plan que ceux de Totor.
V.Marchais
V.Marchais
Empereur

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par V.Marchais Jeu 18 Juil 2013, 11:59
Je vais dire une chose à la décharge de Nathan, alors que j'ai pesté contre leur distribution.
Quand les IO imposaient le travail en séquences et la typologie des textes, ils ont publié des manuels en séquences abordant la typologie des textes. Comme tout le monde. Parce que les éditeurs ont obligation de conformité aux programmes et aux IO en général.
Ils ne publient plus ces manuels.
Par contre, Nathan est le seul éditeur qui ait accepté le risque de publier Terre des Lettres, malgré nos textes jugés trop longs par la majorité des collègues (ben oui, si on veut offrir aux enfants le plaisir d'une histoire, il faut donner à cette histoire le loisir de se développer un peu, et plus un texte est court, plus on en est réduit à des remarques de pure forme, au lieu d'une interprétation), malgré nos questions d'interprétation non jargonnantes qui déstabilisent les collègues habitués à des "axes", des "objectifs de lecture" (autres que lire le texte pour lui-même), malgré le fait que nous refusons de travailler en séquences, malgré notre grammaire qui ne ressemble à aucune autre...
Et je suis bien placée pour vous dire que, certaines années, Nathan ne fait pas du tout "son beurre" et que, jusqu'à nouvel ordre, il continue tout de même de porter la collection.

Voilà.
Je suis la première à râler quand je ne suis pas d'accord avec les pratiques de mon éditeur, mais ça, je tenais à le dire. Il faut au moins lui rendre cette justice-là.
Gryphe
Gryphe
Médiateur

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par Gryphe Jeu 18 Juil 2013, 12:02
(Du coup, depuis hier, me retrotte dans la tête l'idée d'une demi-journée d’échange de pratiques dont nous avions parlé à Nouvel An... Very Happy Wink )
MelanieSLB
MelanieSLB
Doyen

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par MelanieSLB Jeu 18 Juil 2013, 12:13
Leclochard a écrit:Je n'ai pas lu tous les messages. je confirme la dérive techniciste et écœurante. La raréfaction des rédactions jouent aussi.
Mon neveu passe en 5ème. Il a un problème très proche avec l'anglais. Il a eu de bonnes notes mais il est incapable de dire deux phrases simples et d'exprimer un sentiment basique (j'ai soif. Je voudrais boire de l'eau). Résultats: il prend des cours cet été avec un ancien instit qui confirme qu'il est incapable de parler malgré les nombreuses heures qu'il a suivies.
On avait abordé la question de l'imposture sur ce forum. En voilà une belle: le cours-illusion. Celui qui remplit les cahiers (de préférence avec des fiches photocopiées), qui donne l'impression de savoir quelque chose mais qui n'apprend rien.

Je tourne en rond pour essayer de palier ce problème sans y arriver: il est évident pour moi que la 6e est déterminante, et quand j'en avais, la plupart de mes 6e finissaient l'année en ayant acquis de bonnes bases (sauf les 2 ou 3 qui n'ont jamais fait l'effort d'apprendre le moindre mot); mais c'est après que je coince: j'ai l'impression de tourner en rond (je n'ai jamais eu mes 6e dans les niveaux supérieurs), d'être face à des élèves qui ne savent rien et qui ne sont même pas foutus d'apprendre à dire leur âge. (Je voudrais boire de l'eau, ça ne m'étonne pas de ne pas connaître, c'est du programme de 4e (I'd like some water), on doit pouvoir se débrouiller en fin de 6 avec "I want water" (une petite erreur grammaticale, et pas forcément super poli, mais on doit pouvoir se faire comprendre) mais "j'ai soif" fait partie des choses basiques à apprendre en 6e.

Je suis surprise des fiches photocopiées, je ne connais aucun collègue qui fonctionne comme ça.

Gryphe a écrit:(Du coup, depuis hier, me retrotte dans la tête l'idée d'une demi-journée d’échange de pratiques dont nous avions parlé à Nouvel An... Very Happy Wink )

Ça m'intéresserait beaucoup! Tu organises ça quand, Gryphe?

_________________
La réforme du collège en clair : www.reformeducollege.fr .

Et pour ceux qui voudraient en comprendre quelques fondements idéologiques:
De l’école, Jean-Claude Milner, visionnaire en 1984 (ça ne s'invente pas!) de ce qui nous arrive: "On ne dira pas que les enseignants sont l'appendice inutile d'une institution dangereuse et presque criminelle; on dira seulement qu'ils doivent devenir Autres: animateurs, éducateurs, grands frères, nourrices, etc. La liste est variable. Que, par là, les enseignants cessent d’être ce qu'ils doivent être, c'est encore une fois sortir de la question. On ne dira pas que les enseignants n'ont pas à exister, mais qu'ils ont à exister Autrement. Que cette Autre existence consiste à renoncer à soi-même pour disparaître dans la nuit éducative et s'y frotter, tous corps et tous esprits confondus, avec les partenaires de l'acte éducatif - manutentionnaires, parents, élèves, etc. -, seul un méchant pourrait en prendre ombrage." (page 24)
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elwellon
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par elwellon Jeu 18 Juil 2013, 14:08
clairlaure a écrit:Mon problème après lecture de ce genre de post, c'est que je me sens souvent nulle, idiote et pas à la hauteur de l'enseignement. Et pourtant je bosse, je bosse, je bosse...  

 cheers L'étude des textes au collège : comment en sommes-nous arrivés là ? - Page 8 2252222100 Clairlaure, on est pareilles! Moi aussi, je me suis sentie d'abord nulle, puis en colère, puis la connexion internet s'est interrompue alors que j'avais écrit une longggggggggggggggggue bafouille! furieux 
Bref, je trouve ce topic passionnant parce qu'en SDP on en parle peu, voire pas du tout!
Je travaille en séquences (j'enfonce le clou!) mais je trouve que le débat devient très manichéen pour le coup!
Les gentils et bons profs sont ceux qui ne travaillent pas en séquences, eux savent parler des textes, les méchants sont ceux qui travaillent en séquences et ne savent pas montrer la beauté d'un texte!
Je pense sincérement (car je me contre-fiche royalement des directives de l' EN, seuls comptent le résultat et le plaisir que j'ai avec mes élèves) que les professeurs ont (la plupart) une passion pour les livres et les textes qu'ils étudient (perso, je ne fais pas les textes que je n'aime pas), je vois les résultats qu'obtiennent mes élèves (je ne suis pas en train de me vanter car je me pose encore beauoup de questions sur mes pratiques et leur réception) . Cependant, ce n'est pas feint quand ils me disent que le cours est passé très vite, quand ils me disent qu'ils ont aimé l'année, qu'ils veulent m'avoir l'année prochaine. J'ai également des retours positifs de mes collègues de lycée quand ils ont nos élèves (j'entends mes collègues qui travaillent en séquences aussi et moi-même). Je pense qu'il y a des mauvais professeurs, quelle que soit la pratique mise en oeuvre et on en a tous connu!  Quand je vois les progrès que mes élèves ont fait aussi bien dans les rédactions que dans la compréhension des textes, je n'ai pas envie de changer de méthode.
On a mal lu aussi certains de mes propos! Véronique, j'ai lu attentivement votre pratique en classe et je n'ai pas du tout l'impression de faire autre chose. Pour moi aussi (bien que je travaille en séquences), l'intérêt du texte passe avant tout ce jargon littéraire; pour moi aussi, je veux voir la passion briller dans le regard de mes élèves, les voir s'intéresser au cours, à l'oeuvre! C'est la base de notre métier,non? On m'a aussi accusée (plus ou moins ouvertement) de n'étudier le texte que pour voir les adjectifs. Or, si on relit mon post, je dis bien clairement que je privilégie l'oeuvre d'abord (mais il fallait lire jusqu'au bout ma longue tirade Sleep ).
Cependant, ce topic m'interpelle et la suite des commentaires m'a montré plus de nuances, je n'ai pas pu participer alors (puisque caprice de ma connexion! là je dois subir le soleil et la terrible chaleur du Sud pour pouvoir répondre, car je ne peux capter que dehors! Bref, les joies des vacances dans des lieux éloignés de la civilisation). Donc, j'avoue que ces réflexions me passionnent. Je voudrais en savoir plus sur la manière concrète dont vous vous y prenez pour construire une séance. Car, je pense aussi que parfois je vais trop loin dans l'analyse technique d'un texte et que je peux passer à côté des émotions des élèves (ou de l'auteur).
Ce que je n'admets pas, c'est ce rejet systématique d'une méthode, comme si tous les manques, toutes les incompétences du système étaient dus à cette pratique. Ce serait trop simple, voire simpliste! On ne parle pas des classes surchargées, des horaires diminués, des surcharges sur les programmes (HDA, fiche des métiers et j'en passe, je ne parle même pas du socle commun car il me donne des boutons!).
Vous parlez de certains professeurs qui se pensent encore en fac et qui veulent que leurs élèves deviennent de parfaites machines littéraires, j'entends bien, mais par pitié, ne vous jetez pas sur le pauvre prof qui avoue travailler en séquences, comme si c'était lui le seul, l'unique coupable de tous les maux de l' EN! pale 
J'aimerais un échange direct, positif et riche. Merci de m'avoir lue jusqu'au bout, j'avoue que je suis bavarde!:lol:
adelaideaugusta
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par adelaideaugusta Jeu 18 Juil 2013, 14:13
V.Marchais a écrit:Je vais dire une chose à la décharge de Nathan, alors que j'ai pesté contre leur distribution.
Quand les IO imposaient le travail en séquences et la typologie des textes, ils ont publié des manuels en séquences abordant la typologie des textes. Comme tout le monde. Parce que les éditeurs ont obligation de conformité aux programmes et aux IO en général.
Ils ne publient plus ces manuels.
Par contre, Nathan est le seul éditeur qui ait accepté le risque de publier Terre des Lettres, malgré nos textes jugés trop longs par la majorité des collègues (ben oui, si on veut offrir aux enfants le plaisir d'une histoire, il faut donner à cette histoire le loisir de se développer un peu, et plus un texte est court, plus on en est réduit à des remarques de pure forme, au lieu d'une interprétation), malgré nos questions d'interprétation non jargonnantes qui déstabilisent les collègues habitués à des "axes", des "objectifs de lecture" (autres que lire le texte pour lui-même), malgré le fait que nous refusons de travailler en séquences, malgré notre grammaire qui ne ressemble à aucune autre...
Et je suis bien placée pour vous dire que, certaines années, Nathan ne fait pas du tout "son beurre" et que, jusqu'à nouvel ordre, il continue tout de même de porter la collection.

Voilà.
Je suis la première à râler quand je ne suis pas d'accord avec les pratiques de mon éditeur, mais ça, je tenais à le dire. Il faut au moins lui rendre cette justice-là.

Soit, Véronique, mais les éditeurs sont surtout attentifs à ce qui peut leur rapporter. (Et c'est bien normal !) Ainsi, Nathan édite tous les livres de Bentolila.
Belin a édité Lire avec Léo et Léa, quand Cuche et Sommer en ont écoulé 8.000 exemplaires à compte d'auteur. Il ont senti que ce livre leur rapporterait.
Belin édite aussi plusieurs dizaines de milliers de Boscher chaque année.
Cela ne les empêche pas de publier cette m...:censure: absolue qu'est Justine et Compagnie. ( Dyslexie garantie à la sortie du CP)
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par adelaideaugusta Jeu 18 Juil 2013, 14:28
elwellon a écrit:
clairlaure a écrit:Mon problème après lecture de ce genre de post, c'est que je me sens souvent nulle, idiote et pas à la hauteur de l'enseignement. Et pourtant je bosse, je bosse, je bosse...  

 cheers L'étude des textes au collège : comment en sommes-nous arrivés là ? - Page 8 2252222100 Clairlaure, on est pareilles! Moi aussi, je me suis sentie d'abord nulle, puis en colère, puis la connexion internet s'est interrompue alors que j'avais écrit une longggggggggggggggggue bafouille! furieux 
Bref, je trouve ce topic passionnant parce qu'en SDP on en parle peu, voire pas du tout!
Je travaille en séquences (j'enfonce le clou!) mais je trouve que le débat devient très manichéen pour le coup!
Les gentils et bons profs sont ceux qui ne travaillent pas en séquences, eux savent parler des textes, les méchants sont ceux qui travaillent en séquences et ne savent pas montrer la beauté d'un texte!
Je pense sincérement (car je me contre-fiche royalement des directives de l' EN, seuls comptent le résultat et le plaisir que j'ai avec mes élèves) que les professeurs ont (la plupart) une passion pour les livres et les textes qu'ils étudient (perso, je ne fais pas les textes que je n'aime pas), je vois les résultats qu'obtiennent mes élèves (je ne suis pas en train de me vanter car je me pose encore beauoup de questions sur mes pratiques et leur réception) . Cependant, ce n'est pas feint quand ils me disent que le cours est passé très vite, quand ils me disent qu'ils ont aimé l'année, qu'ils veulent m'avoir l'année prochaine. J'ai également des retours positifs de mes collègues de lycée quand ils ont nos élèves (j'entends mes collègues qui travaillent en séquences aussi et moi-même). Je pense qu'il y a des mauvais professeurs, quelle que soit la pratique mise en oeuvre et on en a tous connu!  Quand je vois les progrès que mes élèves ont fait aussi bien dans les rédactions que dans la compréhension des textes, je n'ai pas envie de changer de méthode.
On a mal lu aussi certains de mes propos! Véronique, j'ai lu attentivement votre pratique en classe et je n'ai pas du tout l'impression de faire autre chose. Pour moi aussi (bien que je travaille en séquences), l'intérêt du texte passe avant tout ce jargon littéraire; pour moi aussi, je veux voir la passion briller dans le regard de mes élèves, les voir s'intéresser au cours, à l'oeuvre! C'est la base de notre métier,non? On m'a aussi accusée (plus ou moins ouvertement) de n'étudier le texte que pour voir les adjectifs. Or, si on relit mon post, je dis bien clairement que je privilégie l'oeuvre d'abord (mais il fallait lire jusqu'au bout ma longue tirade Sleep ).
Cependant, ce topic m'interpelle et la suite des commentaires m'a montré plus de nuances, je n'ai pas pu participer alors (puisque caprice de ma connexion! là je dois subir le soleil et la terrible chaleur du Sud pour pouvoir répondre, car je ne peux capter que dehors! Bref, les joies des vacances dans des lieux éloignés de la civilisation). Donc, j'avoue que ces réflexions me passionnent. Je voudrais en savoir plus sur la manière concrète dont vous vous y prenez pour construire une séance. Car, je pense aussi que parfois je vais trop loin dans l'analyse technique d'un texte et que je peux passer à côté des émotions des élèves (ou de l'auteur).
Ce que je n'admets pas, c'est ce rejet systématique d'une méthode, comme si tous les manques, toutes les incompétences du système étaient dus à cette pratique. Ce serait trop simple, voire simpliste! On ne parle pas des classes surchargées, des horaires diminués, des surcharges sur les programmes (HDA, fiche des métiers et j'en passe, je ne parle même pas du socle commun car il me donne des boutons!).
Vous parlez de certains professeurs qui se pensent encore en fac et qui veulent que leurs élèves deviennent de parfaites machines littéraires, j'entends bien, mais par pitié, ne vous jetez pas sur le pauvre prof qui avoue travailler en séquences, comme si c'était lui le seul, l'unique coupable de tous les maux de l' EN! pale 
J'aimerais un échange direct, positif et riche. Merci de m'avoir lue jusqu'au bout, j'avoue que je suis bavarde!:lol:

J'ai tout lu, et je dis bravo !!!et même veneration veneration veneration 

Le tout, séquences ou pas, puisque c'est ainsi que certains professeurs travaillent, c'est l'art et la manière de le faire : et si les élèves en redemandent, c'est que c'est du bon travail !

(Quand je fais de l'aide aux devoirs, je me sens gratifiée quand mes petits élèves (de CE2 ou CM1) me disent , madame, je sens que je fais des progrès avec vous.)
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elwellon
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par elwellon Jeu 18 Juil 2013, 14:33
V.Marchais a écrit:Bon, j'avais promis de développer ici mon travail sur l'approche intuitive de la grammaire, je vais essayer.

Tout est parti d'un article du Dictionnaire Pédagogique de Ferdinand Buisson qui dit que l'on doit nourrir la langue de l'enfant afin d'en faciliter l'étude réflexive. Les enfants ont, dans une certaine mesure, ce que Buisson appelle "une connaissance intuitive de la langue" sur laquelle s'appuyer, et l'étude de la grammaire est d'autant plus aisée que l'on peut s'appuyer sur cette connaissance. Par exemple, nous ne voyons jamais d'enfant (en tout cas pas d'enfant francophone) qui dirait : "Un soleil brille". Même si l'enfant n'est pas capable d'expliquer l'emploi de l'article défini, il en use spontanément. Il est alors relativement facile, à partir d'exemples bien choisis, de lui nommer les articles existant et de mettre des mots sur ces règles qu'il emploie sans le savoir. À l'inverse, nous avons tous fait l'expérience de cours relatifs à des tournures que nos élèves ne maîtrisent pas du tout (par exemple, la construction des relatives, notamment l'emploi de dont) avec l'impression particulièrement laborieuse de devoir leur apprendre ici la langue française comme une langue étrangère : il est alors très difficile de dispenser en même temps l'usage et la théorie sur cet usage.

D'où mon idée d'étendre à la grammaire le "nourrissement de la langue" qu'évoque Buisson dans un autre contexte. Cela facilite l'étude ultérieure des notions.

L'idée est assez simple, en fait. Ils s'agit de croiser deux approches de la langue : d'une part une approche purement théorique, les leçons de grammaire "classique", obéissant à une progression rigoureuse, donc cloisonnées, assurant cette progressivité et ce réinvestissement des apprentissages déjà évoqués ; et d'autre part une approche pragmatique, partant des textes étudiés et mise au service de l'écriture.
Par exemple, dans un texte, on va s'arrêter sur un passage descriptif et faire utiliser l'apposition pour éviter être et avoir. L'exercice est présenté comme un exercice d'imitation : à aucun moment, le mot "apposition" n'est prononcé, mais les élèves utilisent la chose, mettent en oeuvre le concept en écrivant, d'abord des phrases, puis un paragraphe descriptif. Ou bien je leur montre comment donner du rythme à leur récit en enchaînant des phrases à l'aide d'un pronom relatif au lieu de faire deux phrases. Là non plus, pas de théorie, mais un appel à l'intuition et à l'imitation pour utiliser correctement les pronoms en question. Etc.

Donc, en ce qui me concerne, la grammaire est toujours à double détente :
- moitié du temps d'enseignement consacré à des cours "classiques" ;
- à l'issue de chaque étude de texte ou presque, travail d'imitation d'une structure syntaxique (non nommée).
Les avantages sont nombreux :
- Comme l'avait remarqué Buisson, sur des notions peu familières aux élèves, il est bien plus aisé de travailler quand les élèves se sont approprié ces notions grâce à leur manipulation et leur emploi ;
- Avant même toute théorisation sur le sujet, on enrichit le bagage linguistique des élèves de nouvelles tournures qui vont leur permettre de mieux réussir leurs rédactions ;
- On réactive toujours dans un sens ou dans l'autre (approche pragmatique de l'écriture préparant l'approche théorique ou la reprenant), permettant ainsi de mieux fixer les connaissances ;
- Les élèves peu à l'aise avec l'abstraction parviennent ainsi à raccrocher en partie les wagons ;
- Ce travail, mené rigoureusement, permet d'adopter une démarche progressive en écriture autant qu'en langue à strictement parler.
Véronique, je viens de lire tes deux posts très intéressants (j'avoue à ma grande honte que je n'avais pas vu qu'un de mes posts avait fonctionné, donc le dernier était redondant, soyez indulgent avec les aléas de ma connexion internet!).
J'avoue qu'ils me parlent vraiment et  je veux les mettre en pratique à la rentrée, c'est exactement ce qui me manquait dans ma pratique de l'étude de la langue.
Comme Gryphe, le propose, on pourrait faire un topic. Je vais devoir envoyer plusieurs posts car je ne sais pas utiliser les citations multiples:pale:
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elwellon
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par elwellon Jeu 18 Juil 2013, 14:37
Merci Adelaïde!Very Happy L'étude des textes au collège : comment en sommes-nous arrivés là ? - Page 8 2252222100 J'avoue que je commençais à me sentir seule sur ce topic.
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par elwellon Jeu 18 Juil 2013, 14:47
Cripure a écrit:
Nadejda a écrit:Je me souviens d'une copine qui ne pouvait s'empêcher, lorsqu'elle lisait un texte, de se jeter sur ses stabilos pour surligner les figures de style, déictiques, progression à thème constant et autres outils qui en eux-mêmes ne servent pas à grand-chose. J'avais trouvé ça triste.
J'ai l'impression que beaucoup ont peur de se confronter à des textes qui résistent et se dérobent au sens. Parce que ça prend du temps et parce que ça bouleverse les petites cases qui rassurent et qui donnent l'illusion de maîtriser quelque chose qui nous dépasse — et nous survit. Pourtant on a encore du respect pour quelques grandes figures de la critique littéraire (j'y inclus aussi des noms comme Charles Du Bos et même Simone Weil quand elle analyse L'Iliade). Quand je les lis, ces critiques, je ne vois pas tout l'attirail hérité de la linguistique et de la stylistique : je vois des hommes qui tâtonnent, n'ont pas peur de dire ce qu'ils ont ressenti face au texte (c'est presque un gros mot aujourd'hui mais on lit aussi avec son cœur). Au fil des questionnements, des reformulations (comme face à des élèves) un sens émerge, du moins une lecture personnelle, toujours perfectible, parfois infidèle. Et cette lecture se fonde sur la singularité propre à chaque texte, donc sur un contexte bien précis (qu'on a trop évacué depuis quelques décennies), un motif, une figure, que sais-je encore... Pas sur une ribambelle de procédés qui retirent au texte ce qui fait qu'on le lit, lui, et pas un autre.

(Ma réponse est un peu H.-S. par rapport aux problèmes rencontrés au collège, mais certains messages m'ont rappelé la confession de l'amie dont je parle au début.)
Bon, là aussi, quand même, quelques précisions. Si vous voulez dire que le vocabulaire de la linguistique est trop difficile pour des élèves du secondaire, d'accord. Mais on ne peut pas se passer d'une description des moyens linguistiques utilisés. Je n'ai aucune envie de recommencer la querelle de Barthes vs Picard, mais enfin celui-ci, dans sa fureur anti-Barthes en est réduit à faire appel à la bonne volonté de chacun pour qu'on parvienne à se mettre d'accord sur une vérité sur Racine...
Pour faire simple :
-J'ai choisi le voussoiement sur ce forum. Dépourvu de sens ? (énonciation)
-Madame Tim, femme créole opulente et extravagante, est vue par un paysan montagnard sous le second empire : dépourvu de sens ? (discours rapporté - point de vue)
-Baudelaire utilise énormément l'alexandrin dans Les Fleurs du Mal mais compose "Invitation au voyage" uniquement en vers impairs : dépourvu de sens ? (versification)
-Rimbaud compose "Larme" en vers de onze syllabes : dépourvu de sens ? (versification)
-Flaubert résume tout le drame d'Emma dans un même chapitre, le 9e de la 1re partie, en faisant varier la narration de sa réaction devant deux objets distincts. Dépourvu de sens ? (points de vue - discours rapportés - connotations)

Etc. Razz
Moi aussi, ce post m'interpelle. Nadejda, Comment faites-vous une explication de texte (je parle du niveau troisième pour les préparer à la seconde) sans relever les figures de style, sans montrer le système énonciatif (par exemple pour une lettre de Mme de Sévigné, ou pour Le Neveu de Rameau?). Nous sommes obligés de passer par cette explication parce qu'une fois qu'on a bien vu la beauté du texte, l'atmosphère, les intentions aussi (sans forcément nommer les outils d'écriture), il faut bien construire son explication, sinon, c'est une longue litanie de paraphrases, comme je l'ai bien connue quand j'étais au lycée (époque du Crétacé, je précise)?
 J'avoue que ce qu'il faut donc enlever c'est l'exercice du commentaire composé, si vous ne voulez pas expliquer le texte. J'avoue que je ne comprends pas bien (sans agressivité aucune Evil or Very Mad ), je veux comprendre en fait votre manière de procéder.
Leclochard
Leclochard
Empereur

L'étude des textes au collège : comment en sommes-nous arrivés là ? - Page 8 Empty Re: L'étude des textes au collège : comment en sommes-nous arrivés là ?

par Leclochard Jeu 18 Juil 2013, 14:54
MelanieSLB a écrit:
Leclochard a écrit:Je n'ai pas lu tous les messages. je confirme la dérive techniciste et écœurante. La raréfaction des rédactions jouent aussi.
Mon neveu passe en 5ème. Il a un problème très proche avec l'anglais. Il a eu de bonnes notes mais il est incapable de dire deux phrases simples et d'exprimer un sentiment basique (j'ai soif. Je voudrais boire de l'eau). Résultats: il prend des cours cet été avec un ancien instit qui confirme qu'il est incapable de parler malgré les nombreuses heures qu'il a suivies.
On avait abordé la question de l'imposture sur ce forum. En voilà une belle: le cours-illusion. Celui qui remplit les cahiers (de préférence avec des fiches photocopiées), qui donne l'impression de savoir quelque chose mais qui n'apprend rien.

Je tourne en rond pour essayer de palier ce problème sans y arriver: il est évident pour moi que la 6e est déterminante, et quand j'en avais, la plupart de mes 6e finissaient l'année en ayant acquis de bonnes bases (sauf les 2 ou 3 qui n'ont jamais fait l'effort d'apprendre le moindre mot); mais c'est après que je coince: j'ai l'impression de tourner en rond (je n'ai jamais eu mes 6e dans les niveaux supérieurs), d'être face à des élèves qui ne savent rien et qui ne sont même pas foutus d'apprendre à dire leur âge. (Je voudrais boire de l'eau, ça ne m'étonne pas de ne pas connaître, c'est du programme de 4e (I'd like some water), on doit pouvoir se débrouiller en fin de 6 avec "I want water" (une petite erreur grammaticale, et pas forcément super poli, mais on doit pouvoir se faire comprendre) mais "j'ai soif" fait partie des choses basiques à apprendre en 6e.

Je suis surprise des fiches photocopiées, je ne connais aucun collègue qui fonctionne comme ça.
?

Je caricature pour les fiches (ce sont des feuilles avec du vocabulaire soigneusement remplies et parfois coloriées) mais il y a aussi ces dialogues appris par cœur. J'avais eu les mêmes en allemand. Je n'ai jamais pu les ressortir..
Je n'y connais rien et il doit y avoir de bonnes raisons mais pourquoi un enfant qui exprime la soif ou la faim doit-il attendre deux ans pour exprimer une demande basique (would like) ?
Mon sentiment, c'est qu'on n'enseigne pas les langues pour parler et comprendre dans des situations ordinaires mais comme une initiation à une science, une technique de commentaire en langue étrangère.

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Quelqu'un s'assoit à l'ombre aujourd'hui parce que quelqu'un d'autre a planté un arbre il y a longtemps. (W.B)
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