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Parménide
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Dim 15 Mar 2015 - 15:15
"Il (1) dit fort bien, au commencement, que vivere omnes beate volunt, sed ad pervidendum quid sit quod beatam vitam efficiat, caligant (2). Mais il est besoin de savoir ce que c'est que vivere beate ; je dirais en français vivre heureusement, sinon qu'il y a de la différence entre l'heur et la béatitude, en ce que l'heur ne dépend que des choses qui sont hors de nous, d'où vient que ceux là sont estimés plus heureux que sages, auxquels il est arrivé quelque bien qu'ils ne se sont point procuré, au lieu que la béatitude consiste, ce me semble, en un parfait contentement d'esprit et une satisfaction intérieure, que n'ont pas ordinairement ceux qui sont le plus favorisés de la fortune, et que les sages acquièrent sans elle. Ainsi vivere beate vivre en béatitude, ce n'est autre chose qu'avoir l'esprit parfaitement content et satisfait.

Considérant, après cela, ce que c'est quod beatam vitam efficiat , c'est-à-dire quelles sont les choses qui nous peuvent donner ce souverain contentement, je remarque qu'il y en a de deux sortes : à savoir, de celles qui dépendent de nous, comme la vertu et la sagesse, et de celles qui n'en dépendent point, comme les honneurs, les richesses et la santé. Car il est certain qu'un homme bien né, qui n'est point malade, qui ne manque de rien, et qui avec cela est aussi sage et aussi vertueux qu'un autre qui est pauvre, malsain et contrefait, peut jouir d'un plus parfait contentement que lui. Toutefois, comme un petit vaisseau (3) peut être aussi plein qu'un plus grand, encore qu'il contienne moins de liqueur, ainsi, prenant le contentement d'un chacun pour la plénitude et l'accomplissement de ses désirs réglés selon la raison, je ne doute point que les plus pauvres et les plus disgraciés de la fortune ou de la nature ne puissent être entièrement contents et satisfaits, aussi bien que les autres, encore qu'ils ne jouissent pas de tant de biens. Et ce n'est que de cette sorte de contentement, de laquelle il est ici question ; car puisque l'autre n'est aucunement en notre pouvoir, la recherche en serait superflue
(...)
Au reste, toutes sortes de désirs ne sont pas incompatibles avec la béatitude ; il n'y a que ceux qui sont accompagnés d'impatience et de tristesse. Il n'est pas nécessaire aussi que notre raison ne se trompe point ; il suffit que notre conscience nous témoigne que nous n'avons jamais manqué de résolution et de vertu, pour exécuter toutes les choses que nous avons jugé être les meilleures, et ainsi la vertu seule est suffisante pour nous rendre contents en cette vie."

                                                                                                                                        Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

(1) Sénèque
(2) "Tous veulent vivre heureux, mais quand il s'agit de voir ce qui rend la vie heureuse, il sont dans les ténèbres."
(3) Récipient.

***

Voilà le nouveau texte.

Tout va à peu près "bien" jusqu'à ce fameux dernier paragraphe ! Dont je perçois très mal le sens. Evidemment mon manque de connaissance de la morale cartésienne y est pour quelque chose. De plus, la coupure du texte n'arrange rien... cafe

Voilà comment je caractériserais ce dernier paragraphe :

L'irrationalité du désir est tolérée si elle ne cause pas de troubles de l'âme, et l'essentiel est d'avoir la certitude de notre vertu, qui nous permettra alors d'accomplir des actions exclusivement rationnelles.

_________________
"Les paroles essentielles sont des actions qui se produisent en ces instants décisifs où l'éclair d'une illumination splendide traverse la totalité d'un monde", Martin Heidegger, "Schelling", (semestre d'été 1936)

"Et d'une brûlure d'ail naitra peut-être un soir l'étincelle du génie", Saint-John Perse, "Sécheresse" (1974)

"Il avait dit cela d'un air fatigué et royal", Franz-Olivier Giesbert, "Le vieil homme et la mort" (1996)

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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Aspasie Dim 15 Mar 2015 - 18:28
Un chouette choix de texte, riche en éléments à exploiter, et très intéressant du point de vue de son unité. Un bon exercice donc Smile
Parménide
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Dim 15 Mar 2015 - 18:41
Le dernier paragraphe pose problème. Je m'en veux d'avoir oublié de lui dire de ne pas me donner de texte coupé... cafe

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Nita
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Nita Dim 15 Mar 2015 - 18:46
Parménide a écrit:Le dernier paragraphe pose problème. Je m'en veux d'avoir oublié de lui dire de ne pas me donner de texte coupé... cafe

Aurait-il dû te donner un volume complet ? C'est un faux prétexte, as usual.

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Jézabel
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Jézabel Dim 15 Mar 2015 - 19:06
Tu peux toujours te procurer le bout de texte manquant en allant voir dans l'oeuvre complète.
Parménide
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Dim 15 Mar 2015 - 19:21
Jézabel a écrit:Tu peux toujours te procurer le bout de texte manquant en allant voir dans l'oeuvre complète.

Je tiens à ne pas consulter de documents. De toute façon, il a photocopié ce texte dans un recueil. Et les auteurs du recueil ont nécessairement choisi un extrait présentant une certaine cohérence, même s'il est coupé. De plus, mon correcteur ne m'aurait pas donné ce texte s'il présentait des failles dans sa logique. Donc ma difficulté vient soit de mon manque de connaissances sur Descartes, soit de mes problèmes cognitifs habituels.

Le dernier paragraphe est peu clair, pour moi, et se rattache mal à ce qui "précède". Je ne vois pas très bien quels sont à la fin du texte, les rapports entre la raison, la vertu , le désir...

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Rendash
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Rendash Dim 15 Mar 2015 - 19:27
Parménide a écrit: Donc ma difficulté vient soit de mon manque de connaissances sur Descartes, soit de mes problèmes cognitifs habituels.  

On se rapproche.

J'ai déjà eu à étudier ce texte. M'enfin, je ne suis qu'un branleur de prof d'histoire, moi, je peux pas test.
Je vais relire le reste, tiens.

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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. P61r



"Ce serait un bien bel homme s’il n’était pas laid ; il est grand, bâti en Hercule, mais a un teint africain ; des yeux vifs, pleins d’esprit à la vérité, mais qui annoncent toujours la susceptibilité, l’inquiétude ou la rancune, lui donnent un peu l’air féroce, plus facile à être mis en colère qu’en gaieté. Il rit peu, mais il fait rire. [...] Il est sensible et reconnaissant ; mais pour peu qu’on lui déplaise, il est méchant, hargneux et détestable."
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User17706
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par User17706 Dim 15 Mar 2015 - 23:21
Aspasie a écrit:Un chouette choix de texte, riche en éléments à exploiter, et très intéressant du point de vue de son unité. Un bon exercice donc Smile
Oui, hein bisous
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Parménide a écrit: L'irrationalité du désir est tolérée si elle ne cause pas de troubles de l'âme, et l'essentiel est d'avoir la certitude de notre vertu, qui nous permettra alors d'accomplir des actions exclusivement rationnelles.
Qu'appelles-tu des « actions exclusivement rationnelles » ?
Levincent
Levincent
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Levincent Lun 16 Mar 2015 - 9:23
Parménide a écrit:
Tout va à peu près "bien" jusqu'à ce fameux dernier paragraphe ! Dont je perçois très mal le sens. Evidemment mon manque de connaissance de la morale cartésienne y est pour quelque chose. De plus, la coupure du texte n'arrange rien... cafe

Voilà comment je caractériserais ce dernier paragraphe :

L'irrationalité du désir est tolérée si elle ne cause pas de troubles de l'âme, et l'essentiel est d'avoir la certitude de notre vertu, qui nous permettra alors d'accomplir des actions exclusivement rationnelles.

Je constate toujours cette tendance chez toi à vouloir résumer en une phrase des choses complexes. C'est ce que tu fais ici-même, c'est ce que tu as fais pour la notion d'instant chez Kierkegaard, mais aussi pour réduire ce qui est évalué lors du concours à une maxime ("ce qui est évalué, ce n'est pas en priorité les connaissances"), et dans bien d'autres cas. On dirait que pour toi, comprendre, c'est être capable de ramener quelque chose à une seule phrase, la plus courte possible. Or, d'une part,  il doit être bien clair que l'explication de texte consiste à faire exactement l'inverse, et d'autre part cela te fait écrire des phrases alambiquées et plus obscures que ce qu'elles tentent d'expliquer. Ainsi, on ne voit pas bien ce que vient faire là la tolérance : "l'irrationalité du désir est tolérée", mais tolérée par qui ? Que signifie "exclusivement rationnelles" ?
Ensuite, je ne vois pas en quoi ton manque de connaissances relatives à la morale cartésienne peut t'empêcher de comprendre le dernier paragraphe. Celui-ci est riche de sens, mais assez clair, avec des affirmations bien identifiables. La difficulté que tu éprouves à le rattacher au reste du texte mérite justement d'être examinée, car un moment de l'explication peut par exemple consister à expliquer pourquoi ce paragraphe est une conclusion à tout ce qui précède.
Bon, je vais encore profiter de ce fil pour m'entraîner, je vais donc moi aussi bosser sur le texte, et proposer une explication dans quelques jours.
Parménide
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Lun 16 Mar 2015 - 11:18
PauvreYorick a écrit:
Parménide a écrit: L'irrationalité du désir est tolérée si elle ne cause pas de troubles de l'âme, et l'essentiel est d'avoir la certitude de notre vertu, qui nous permettra alors d'accomplir des actions exclusivement rationnelles.
Qu'appelles-tu des « actions exclusivement rationnelles » ?

Si je comprends bien, il s'agirait notamment du fait de donner libre cours à certains désirs et les satisfaire, et d'en réfréner d'autres.

Mais je ne suis pas sur du tout de comprendre ce dernier paragraphe. Le fait que le texte soit manquant perturbe tout, j'ai l'impression... Je ne comprends pas pourquoi il n'a pas arrêté l'extrait juste avant la coupure.

Levincent a écrit:
Je constate toujours cette tendance chez toi à vouloir résumer en une phrase des choses complexes. C'est ce que tu fais ici-même, c'est ce que tu as fais pour la notion d'instant chez Kierkegaard, mais aussi pour réduire ce qui est évalué lors du concours à une maxime ("ce qui est évalué, ce n'est pas en priorité les connaissances"), et dans bien d'autres cas. On dirait que pour toi, comprendre, c'est être capable de ramener quelque chose à une seule phrase, la plus courte possible.

Exactement. C'est comme ça que je fonctionne, et je ne vois pas comment je pourrais faire autrement. J'ai un état d'esprit très synthétique, mes copies en témoignent d'ailleurs.  

Levincent a écrit:
Ensuite, je ne vois pas en quoi ton manque de connaissances relatives à la morale cartésienne peut t'empêcher de comprendre le dernier paragraphe. Celui-ci est riche de sens, mais assez clair, avec des affirmations bien identifiables.
Je ne trouve pas. J'ai l'impression que Descartes se contredit. Il a dit précédemment, que le désir devait être réglé sur la raison. Dans ce paragraphe, il semble que certains désirs soient tolérés malgré leur irrationalité, du moment qu'il ne causent pas de souffrance...

Et je ne comprends pas trop quel élément est prééminent, de la vertu ou de la raison. Il semble que l'importance de la raison soit minimisée... Alors même que la vertu doit aboutir à des actions rationnelles. Bref, pour moi c'est totalement confus. cafe  

Levincent a écrit:
La difficulté que tu éprouves à le rattacher au reste du texte mérite justement d'être examinée, car un moment de l'explication peut par exemple consister à expliquer pourquoi ce paragraphe est une conclusion à tout ce qui précède.
Je pense que ce serait trop facile de dissimuler au correcteur mon incapacité à comprendre le texte derrière de soi-disant difficultés à son élucidation. Ce serait un peu comme une tentative de manipulation.

Encore une fois, on a là certainement dans ma non compréhension de la fin du texte, un exemple de mes problèmes cognitifs. A moins, ce qui m'étonnerait, que le correcteur ait très mal découpé le texte.

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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par User17706 Lun 16 Mar 2015 - 11:25
Parménide a écrit:
PauvreYorick a écrit:
Parménide a écrit: L'irrationalité du désir est tolérée si elle ne cause pas de troubles de l'âme, et l'essentiel est d'avoir la certitude de notre vertu, qui nous permettra alors d'accomplir des actions exclusivement rationnelles.
Qu'appelles-tu des « actions exclusivement rationnelles » ?

Si je comprends bien, il s'agirait notamment du fait de donner libre cours à certains désirs et les satisfaire, et d'en réfréner d'autres.

Mais je ne suis pas sur du tout de comprendre ce dernier paragraphe. Le fait que le texte soit manquant perturbe tout, j'ai l'impression... Je ne comprends pas pourquoi il n'a pas arrêté l'extrait juste avant la coupure.
Non mais c'est ton expression, là, pas celle de Descartes. Il n'y a pas de « si je comprends bien » : tu dois savoir ce que tu veux dire quand tu l'emploies.
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par Levincent Lun 16 Mar 2015 - 11:28
Parménide a écrit: 

Levincent a écrit:
Ensuite, je ne vois pas en quoi ton manque de connaissances relatives à la morale cartésienne peut t'empêcher de comprendre le dernier paragraphe. Celui-ci est riche de sens, mais assez clair, avec des affirmations bien identifiables.
Je ne trouve pas. J'ai l'impression que Descartes se contredit. Il a dit précédemment, que le désir devait être réglé sur la raison. Dans ce paragraphe, il semble que certains désirs soient tolérés malgré leur irrationalité, du moment qu'il ne causent pas de souffrance...

Et je ne comprends pas trop quel élément est prééminent, de la vertu ou de la raison. Il semble que l'importance de la raison soit minimisée... Alors même que la vertu doit aboutir à des actions rationnelles. Bref, pour moi c'est totalement confus.  cafe   


Réjouis-toi, on dirait bien que tu tiens entre les mains...une problématique ! Il faut que tu arrêtes de te désoler de ne pas saisir les textes dans leur pleine clarté. Si leur sens profond était si évident que ça, on ne demanderait pas de les expliquer. Tu trouves que le texte présente des contradictions, soit. Ton travail consiste maintenant à trouver comment ces contradictions apparentes se réconcilient.

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par Parménide Lun 16 Mar 2015 - 11:29
PauvreYorick a écrit:
Parménide a écrit:
PauvreYorick a écrit:

Qu'appelles-tu des « actions exclusivement rationnelles » ?

Si je comprends bien, il s'agirait notamment du fait de donner libre cours à certains désirs et les satisfaire, et d'en réfréner d'autres.

Mais je ne suis pas sur du tout de comprendre ce dernier paragraphe. Le fait que le texte soit manquant perturbe tout, j'ai l'impression... Je ne comprends pas pourquoi il n'a pas arrêté l'extrait juste avant la coupure.
Non mais c'est ton expression, là, pas celle de Descartes. Il n'y a pas de « si je comprends bien » : tu dois savoir ce que tu veux dire quand tu l'emploies.

Justement, je ne suis pas sur de comprendre. Et ça m'inquiète. Déjà, ai-je raison d'employer cette expression?

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par User17706 Lun 16 Mar 2015 - 11:30
Ça dépend, qu'est-ce que tu entends par là ?...
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par Parménide Lun 16 Mar 2015 - 11:33
PauvreYorick a écrit:Ça dépend, qu'est-ce que tu entends par là ?...

Comme je disais, une action rationnelle serait ici le fait de donner libre cours à un désir et le satisfaire, du moment que ce désir est en accord avec la raison.

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par User17706 Lun 16 Mar 2015 - 11:36
Ce qui soulève deux questions : que veut dire, pour un désir, « être en accord avec la raison », d'une part ?

D'autre part, où exactement dans le texte est-il question de cela ?
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par Parménide Lun 16 Mar 2015 - 11:38
Mais j'ai tort dans mon interprétation du dernier paragraphe?

J'ai vraiment l'impression que dans le texte en l'état, coupé, donc, le dernier paragraphe arrive totalement comme un cheveu sur la soupe cafe

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par Levincent Lun 16 Mar 2015 - 11:39
Et aussi :

Parménide a écrit:J'ai l'impression que Descartes se contredit. Il a dit précédemment, que le désir devait être réglé sur la raison. Dans ce paragraphe, il semble que certains désirs soient tolérés malgré leur irrationalité, du moment qu'il ne causent pas de souffrance...

Et je ne comprends pas trop quel élément est prééminent, de la vertu ou de la raison. Il semble que l'importance de la raison soit minimisée... Alors même que la vertu doit aboutir à des actions rationnelles. Bref, pour moi c'est totalement confus.  cafe   

Je trouve que ce qui est en gras est une surinterprétation du texte. Descartes ne parle pas, ici, d'irrationalité des désirs. Il fait primer le témoignage que la conscience se rend à elle-même vis à vis de sa vertu, c'est-à-dire la bonne conscience, sur le fait que la raison ne doive pas se tromper. Si notre raison est trompée, mais que nous agissons avec résolution en vue de la vertu, alors cela suffit pour être dans la béatitude. Il n'est donc pas question d'irrationalité, mais de raison qui manque son but tout en étant de bonne foi. Ou alors tu pars du principe que le désir est irrationnel, et donc tu apportes ta propre conception des choses dans l'explication de texte, ce qu'il ne faut pas faire. C'est la même chose en ce qui concerne les "actions rationnelles" auxquelles la vertu est censée aboutir : à quel endroit Descartes dit-il une telle chose ?

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par Parménide Lun 16 Mar 2015 - 11:49
Comment je vais faire si j'ai régulièrement des problèmes cognitifs ?... Sad  cafe

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Gryphe
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Gryphe Lun 16 Mar 2015 - 11:53
Parménide a écrit:Comment je vais faire si j'ai régulièrement des problèmes cognitifs ?... Sad  cafe
Tu changes d'orientation. Very Happy
Et déjà tu te confrontes aux écrits de cette année, pour voir ton niveau.
Levincent
Levincent
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Levincent Lun 16 Mar 2015 - 11:54
Parménide a écrit:Comment je vais faire si j'ai régulièrement des problèmes cognitifs ?... Sad  cafe

Arrête un peu avec ces "problèmes cognitifs".
Comprends-tu ce que je t'ai dit ? Es-tu d'accord avec ma critique ? Perçois-tu la raison qui t'a poussé à parlé d'irrationalité des désirs et de rationalité des actions vertueuses alors qu'il n'en était pas question dans le texte ?

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Tonio Kröger
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Tonio Kröger Lun 16 Mar 2015 - 12:08
Parménide a écrit:
Je ne trouve pas. J'ai l'impression que Descartes se contredit. Il a dit précédemment, que le désir devait être réglé sur la raison. Dans ce paragraphe, il semble que certains désirs soient tolérés malgré leur irrationalité, du moment qu'il ne causent pas de souffrance...

Et je ne comprends pas trop quel élément est prééminent, de la vertu ou de la raison. Il semble que l'importance de la raison soit minimisée... Alors même que la vertu doit aboutir à des actions rationnelles. Bref, pour moi c'est totalement confus.  cafe   

Je pense que tu as mal identifié la problématique directrice du texte (et en cas de manquement, soit on est envahi par des problèmes extérieurs au texte - les plus trompeurs sont ceux qu'on pense bien connaître et qu'on est vite tenté de plaquer -, soit on fait un contresens).

Commence par le début : ici la question n'est pas l'opposition raison / désirs dans l'absolu, mais celle de savoir distinguer bonheur et béatitude. Et si tu sais que chez Descartes la distinction âme-corps est facile à saisir métaphysiquement dans l'ordre des idées, mais très confusément dans l'ordre du vécu, alors c'est gagné : tu peux maintenant comprendre qu'ici il sera question de l'impact des passions sur cette appréciation personnelle (donc vécue) nommée "béatitude", ou encore de chercher à définir ce que signifie "être content". Tu as là ton cadre d'interprétation.

Ensuite, tu dois t'arrêter sur le terme capital de "contentement", qu'explicite l'image du navire "plein" : être contenté/content/béat, c'est éprouver une "plénitude" morale, laquelle découle non pas d'une certitude métaphysique mais d'un sentiment d'accomplissement éprouvé dans le rapport vécu de soi à soi. Tu commences à comprendre qu'il est hors de question de raisonner métaphysiquement sur les désirs ici, mais de savoir ce qu'est "une satisfaction intérieure". Descartes ne va donc rejeter certains désirs qu'au nom du trouble qu'ils engendrent dans l'ordre du vécu (et là prend tout son sens le néo-stoïcisme du 17e siècle) et sûrement pas, à l'image d'une certaine lecture de Platon, au nom d'une condamnation du sensible. Il n'est pas question ici de l'irrationalité in abstracto des désirs mais du sentiment intérieur qui accompagne nos actions.

Pour terminer, quelques références pour éclairer cela. Reprends Les passions de l'âme. L'article 147 explicite l'importante notion cartésienne de "joie intellectuelle", c'est-à-dire une passion qui n'est pas déclenchée par les mouvements corporels (esprits animaux) mais qui est purement intérieure à l'âme. Là où ça devient intéressant pour toi, c'est que l'exemple typique de joie intellectuelle est celle que l'on éprouve lorsque l'âme éprouve qu'elle a résisté à un désir néfaste. Elle éprouve ainsi sa propre force et en retire un sentiment de joie, pas si éloigné de ce contentement intérieur évoqué dans ton texte. Article 148 : plus l'âme éprouve sa force et sa capacité à résister aux passions néfastes (toutes ne le sont pas), plus elle tire du contentement devant le spectacle de sa propre vertu. On retrouve alors le sens de la béatitude : un "bonheur" qui ne dépend que de soi-même, qui correspond au sentiment de satisfaction de l'âme lorsqu'elle éprouve qu'elle est capable de résister aux passions, c'est-à-dire in fine un sentiment auto-engendré et qui ne dépend pas des circonstances extérieures. Tu retrouves bien là l'idéal stoïcien d'autonomie de la volonté héroïque, qui se dresse forte et "contente" d'elle-même. Lis aussi l'article 190.

Edit : d'ailleurs, en relisant la partie 3 du Discours, tu trouveras des indices facilement exploitables pour évacuer ici une fausse et grossière opposition raison/désirs et une confiscation stricte de la vertu par la raison, puisque la morale chez Descartes n'est pas affaire de certitude métaphysique mais un mélange d'effort de soi sur soi (rectitude), d'observance des habitudes sociales du groupe dans lequel on vit, et de prise en compte des plaisirs qui ne troubleront pas l'âme violemment.


Dernière édition par Tonio Kröger le Lun 16 Mar 2015 - 12:23, édité 1 fois
Parménide
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Lun 16 Mar 2015 - 12:21
Levincent a écrit:
Parménide a écrit:Comment je vais faire si j'ai régulièrement des problèmes cognitifs ?... Sad  cafe

Arrête un peu avec ces "problèmes cognitifs".
Comprends-tu ce que je t'ai dit ? Es-tu d'accord avec ma critique ? Perçois-tu la raison qui t'a poussé à parlé d'irrationalité des désirs et de rationalité des actions vertueuses alors qu'il n'en était pas question dans le texte ?

Il n'en est pas question, mais je le comprends ainsi. Non, je ne comprends pas très bien ce que tu as mis, je vais relire.  

Mais il doit me manquer des connaissances sur Descartes, je pense. Ce que Tonio vient d'écrire le prouve, on dirait...

Je crois avoir trouvé le problème et la thèse du texte (enfin, ce que je crois être tel) avant de buter sur le dernier paragraphe. Lequel dernier paragraphe est vraiment encombrant par rapport au reste du texte... cafe

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"Les paroles essentielles sont des actions qui se produisent en ces instants décisifs où l'éclair d'une illumination splendide traverse la totalité d'un monde", Martin Heidegger, "Schelling", (semestre d'été 1936)

"Et d'une brûlure d'ail naitra peut-être un soir l'étincelle du génie", Saint-John Perse, "Sécheresse" (1974)

"Il avait dit cela d'un air fatigué et royal", Franz-Olivier Giesbert, "Le vieil homme et la mort" (1996)

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Tonio Kröger
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Tonio Kröger Lun 16 Mar 2015 - 12:32
Le dernier paragraphe est très clair, et indique de lui-même les éléments qui le rattachent à ce qui précède.
Parménide
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Lun 16 Mar 2015 - 12:36
Tonio Kröger a écrit:Le dernier paragraphe est très clair, et indique de lui-même les éléments qui le rattachent à ce qui précède.

Je ne le vois pas du tout comme tel, et il y a deux explications possibles :

1) Mon esprit fonctionne mal.

2) Je manque de connaissances sur Descartes.

Je sais que l'union de l'âme et du corps est un vrai problème chez Descartes, mais je n'en sais pas vraiment plus. Et même si j'en savais plus, je ne pense pas que j'aurais l'idée de faire des développements par rapport à ça dans mon commentaire Sad D'ailleurs, on sait jamais, certaines personnes pourraient m'accuser d'être hors-sujet et de surinterpréter le texte... Sad


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"Les paroles essentielles sont des actions qui se produisent en ces instants décisifs où l'éclair d'une illumination splendide traverse la totalité d'un monde", Martin Heidegger, "Schelling", (semestre d'été 1936)

"Et d'une brûlure d'ail naitra peut-être un soir l'étincelle du génie", Saint-John Perse, "Sécheresse" (1974)

"Il avait dit cela d'un air fatigué et royal", Franz-Olivier Giesbert, "Le vieil homme et la mort" (1996)

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