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Zagara
Guide spirituel

Le "néo-management", ou le mal indéfini - Page 3 Empty Re: Le "néo-management", ou le mal indéfini

par Zagara Mer 27 Sep 2017 - 14:44
Un syndicat n'est pas une institution scientifique. Il n'a pas vocation à produire des définitions parfaites, mais à mettre des mots sur le ressenti des employés afin de les représenter, de leur faire prendre conscience de leur état et de les fédérer.
En cela, les syndicats font ici leur boulot : ils expriment un ressenti diffus que plein de gens ont. Peut-être que ce n'est pas ton ressenti personnel, mais cela ne doit pas t'amener à nier sa réalité.
D'ailleurs, si j'étais CDE, je ferais attention : la violence professionnelle est souvent produite de manière inconsciente ou structurelle. Des profs peuvent mal vivre les méthodes d'encadrement sans qu'on s'en rende compte et alors qu'on est d'une bonne foi totale...
pseudo-intello
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par pseudo-intello Mer 27 Sep 2017 - 14:58
pogonophile a écrit:Quant à la multiplication des évaluations, prélude au recrutement par les CdE, que tu pressens, tu oublies deux aspects : les CdE n'ont ni le temps, ni l'envie de faire ça ; tous ceux avec qui j'ai échangé à ce propos trouvent la perspective débile, et aucun syndicat ne défend cette idée.
Je n'ai pas dit le contraire.
j'ai critiqué le principe, je n'ai jamais dit que les CDE avaient envie de l'appliquer.
D'ailleurs, je ne vois pas quel CDE sain d'esprit acceptera de porter un jugement dur les "connaissances disciplinaires" d'un enseignant.

pogonophile a écrit:Enfin sur l'évaluation, une petite voix me murmure qu'il est plutôt cocasse d'évaluer quotidiennement les élèves, mais de ne pas accepter de l'être...
Là, c'est tout bonnement insultant :

1- j’évalue mes élèves parce que je suis compétente et qualifiée pour, donc légitime (je suis prof). Le CDE, jusque là, me notait sur des critères qui relevaient de sa compétence. Là, on en sort car une partie de ce qu’on lui demande relève de la compétence et de la qualification de l’IPR.

2- J’évalue les acquis des élèves. C’est l’objectif premier de l’évaluation. Il y a une différence fondamentale entre un prof et un élève : le prof n’est pas là pour apprendre, mais pour enseigner (si ce n’est que c’est en forgeant, tout ça). Un prof arrive en septembre devant sa classe parce que ses compétences ont été validées en amont. Un élève arrive en septembre pour acquérir des savoirs et des compétences (même si le terme est galvaudé) tout au long de l'année. De ce fait, il est légitime d'évaluer souvent un élève, alors que pour les profs, une petite vérification de temps à autre suffit amplement.

3- J’évalue le travail des élèves (c’est le second objectif de l’évaluation). Je sais très bien ce qui se passerait si je ne vérifiais pas les devoirs, ni l’apprentissage des leçons : de moins en moins d’élèves s’y colleraient : d’abord les élèves proches du décrochage, qui décrocheraient pour de bon, puis tous les autres, sauf peut-être ceux qui ont la chance d’avoir des parents présents et assez investis pour surveiller les devoirs à ma place. Alors qu’un prof est suffisamment consciencieux pour faire le job, même quand il sait que l’inspection est passée (et qu’il est tranquille pour quatre ans, voire beaucoup plus), ce dont tu es sans doute confiant, dans le fond. En fait, ta dernière phrase nous compare implicitement à l’élève je m’en foutiste qui n’a jamais son cahier et ne fera éventuellement ses devoirs que si vraiment on le flique, et ça, c’est nauséabond.

En fait, quand on a dit que ces grilles et ce système sont infantilisants, on a tout dit. Infantiliser, ça veut dire : considérer come des enfants. Il se trouve que les élèves sont des enfants. Nous, non.

J’oubliais : le vocabulaire méprisant (« petite voix », « cocasse »), superflu, est également très révélateur.
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User17095
Érudit

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par User17095 Mer 27 Sep 2017 - 15:19
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] : que des CdE se comportent comme des caporaux, mettent à mal des personnels, c'est un fait réel, toujours trop fréquent. Même pas imaginable de le nier.
Ce que je suis conduit à nier en revanche, c'est l'affirmation qu'il y a une formation à ça, associée à l'emploi d'un terme aux allures techniques pour désigner des ressentis, laisse entendre qu'il s'agit d'un plan concerté - ceci étant dit en se basant sur la définition que tu proposes, qui me semble la plus proche du sens qu'on a voulu donner. Et là, je m'énerve un peu, parce que ce n'est pas très honnête. On pourra justifier en disant "à la guerre comme à la guerre", moi je ne m'estime pas en guerre.

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L'emploi d'un même mot pour l'évaluation des élèves et celle des personnels n'est certes pas heureux. Mais tous les salariés sont évalués, d'une manière ou d'une autre, et ce n'est pas choquant en soi. Oui, ok, c'est le travail qui est évalué, pas la personne : habitude de langage qui ne révèle rien.
Sur les parties de l'évaluation qui relèvent de la compétence de l'IA-IPR et sur celles qui relèvent de celle du CdE, je t'avoue que pour le moment, c'est encore confus. On attend tous des précisions, parce qu'effectivement, une partie relève du disciplinaire ou du pédagogique, les perdirs ne sont pas tous à même de le faire, et ceux avec qui j'ai échangé ont une conscience très claire de leurs limites. En revanche, je trouve intéressant qu'on évalue aussi le travail hors de la classe : les enseignants ne sont pas rémunérés uniquement sur leurs 18 heures, mais sur un ensemble de missions. Il était temps de le souligner.
Par contre, sur l'idée selon laquelle tous les professeurs sont assez consciencieux pour "faire le job", ce qui implique de bosser régulièrement, de se former, de se tenir au fait de sa discipline, de se remettre en question... tu trouveras des contre-exemples dans tous les établissements. Si minoritaires soient-ils, ils sont là, on en connaît tous. Les enseignants sont des travailleurs comme les autres, ils ont leur lot de fumistes, il n'y a pas de vertu intrinsèque au métier qui préserverait du je-m'en-foutisme.
Et quand bien même, on n'est pas obligé de vivre l'évaluation ou l'inspection comme du fliquage, tout le monde a besoin de regards extérieurs et de conseils. C'est ce vers quoi est censée tendre l'inspection.

Enfin sur ce que tu qualifies de vocabulaire méprisant, j'essayais simplement de souligner l'ironie. Mon propos n'était pas du mépris.
pseudo-intello
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par pseudo-intello Mer 27 Sep 2017 - 16:55
pogonophile a écrit:L'emploi d'un même mot pour l'évaluation des élèves et celle des personnels n'est certes pas heureux. Mais tous les salariés sont évalués, d'une manière ou d'une autre, et ce n'est pas choquant en soi.
Et quand bien même, on n'est pas obligé de vivre l'évaluation ou l'inspection comme du fliquage, tout le monde a besoin de regards extérieurs et de conseils. C'est ce vers quoi est censée tendre l'inspection.
Certes, mais les inspecteurs n'ont jamais eu besoin de ce genre de grille pour évaluer les troupes.  
De plus, une seule grille pour tout le monde (en admettant qu'on valide le principe de la grille, même si d'autres et moi avons essayé de t'expliquer ses nombreux défauts), c'est absurde : certaines matières se prêtent plus aux projets que d'autres, dans certaines matières, il y a davantage de boulot de copies, alors que dans d'autres (par exemple l'EPS, où mes collègues s'occupent de communiquer avec la mairie pour le gymnase et tout) il y a des tâches de différentes nature. Au lieu de filer un carcan si rigide, on ferait mieux de compter sur l'intelligence des gens, et sur leur compétence (mon IPR évalue ma pédagogie et est le seul qualifié pour) et de les laisser faire leur boulot à leur manière.

D'ailleurs, j'aurais bien aimé en voir davantage, d’inspecteurs, parce que là, ça va faire neuf ans, et que ma carrière a fini par ralentir faute d’inspection (et que maintenant, l'ancien système a été mis à bas).

pogonophile a écrit:En revanche, je trouve intéressant qu'on évalue aussi le travail hors de la classe : les enseignants ne sont pas rémunérés uniquement sur leurs 18 heures.
Ma correction de copie ? Mon temps de préparation ?
Ou la participation à diverses usines à gaz comme la mini-entreprise avec une association douteuse, le CVC avec les élèves qui écrivent des lettres pour demander aux profs de venir à la marche contre l'autisme un dimanche matin ?
Ou s'agit-il de mieux me noter que d'autres collègues parce que j'use mes fonds de culotte sur les bancs du CA et pas eux ?
Ou de saquer les collègues qui ne veulent pas être profs principaux ? Ceux qui ne veulent pas participer à une réunion inutile parce qu'ils ont mieux à faire et que ça ne vaut pas le coup de payer des heures sup à nounou pour ça ?
C'est une vraie question, et je serais bien curieuse de savoir ce que tu es à même d'évaluer hors la classe et qui ne risque pas de partir en vrille dans des concours de léchage de bottes (ou en moyen de pression quand un chef manque de volontaires pour mettre en œuvre une directive que lui-même trouve peut-être débile).


pogonophile a écrit:Par contre, sur l'idée selon laquelle tous les professeurs sont assez consciencieux pour "faire le job", ce qui implique de bosser régulièrement.
Ce qui rend encore plus mauvaise ta comparaison avec les élèves du post précédent. Un élève qui ne glande rien ne glande RIEN. Alors qu'un prof, même en burn-out, même en service plus que minimum, même je m'en foutiste, fait cours, et apprend des trucs à ses élèves, donne et corrige des contrôles et remplit ses bulletins malgré tout. Et si son boulot et trop léger, l'inspecteur, qui ramasse toujours un cahier d'élèves, voire plusieurs, est parfaitement à même de s'en rendre compte.
Et sincèrement, des profs qui ne bossent pas, j'en ai vu très peu.

de se former
La plupart des rares formations que l'on me propose ont lieu le mercredi après-midi. Du reste, leur intitulé m'incite jamais à penser que ce sera constructif ou intéressant, les frais de route sont mal remboursés (quand ils le sont), et j'ai assez donné en tant que stagiaire (ou avec le baratin de présentation de l'HDA)  pour savoir qu'on se retrouve souvent face à un idéologue déconnecté aux manettes (ou à un enseignant qui vit manifestement dans une autre dimension, dans un collège un guimauve).

de se tenir au fait de sa discipline
J'enseigne le français, le latin et le grec. J'attends tes exemples concrets

, de se remettre en question...
Sans rire, j'ai besoin de mon chef pour ça ? Je peux pas me rendre compte toute seule que mes élèves n'arrivent plus à faire les mêmes exercices qu'il y a quatre ans et qu'il faudrait m'adapter ? Ou qu'il ne captent rien à mes cours (quand j'ai sur-estimé leurs pré-requis) ? Tu crois qu'on n'est pas capable de faire la différence entre une classe dans laquelle ce qu'on fait fonctionne, et une autre classe, ou il va falloir adapter des choses ? Que je ne sais pas lire dans leurs yeux s'ils pigent / sont intéressés / largués / s'en foutent ?
JPhMM
JPhMM
Demi-dieu

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par JPhMM Mer 27 Sep 2017 - 17:00
pseudo-intello a écrit:
de se tenir au fait de sa discipline
J'enseigne le français, le latin et le grec. J'attends tes exemples concrets
Quand on enseigne les mathématiques, on n'est pas non plus avare d'exemples concrets de l'actualité scientifique en mathématiques qui pourraient être réinvestis en classe conformément aux programmes.

_________________
Labyrinthe où l'admiration des ignorants et des idiots qui prennent pour savoir profond tout ce qu'ils n'entendent pas, les a retenus, bon gré malgré qu'ils en eussent. — John Locke

Je crois que je ne crois en rien. Mais j'ai des doutes. — Jacques Goimard
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Invité
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par Invité Mer 27 Sep 2017 - 17:06
Quelques éléments de définition ici :

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laMiss
laMiss
Sage

Le "néo-management", ou le mal indéfini - Page 3 Empty Re: Le "néo-management", ou le mal indéfini

par laMiss Mer 27 Sep 2017 - 17:18
Passionnante discussion.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien], je te conseille de parcourir les discussions précédentes.

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_________________
Si rien n'est décidé, ce sera à chacun d'entre nous de décider en conscience.
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Mateo_13
Niveau 5

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par Mateo_13 Mer 27 Sep 2017 - 18:04
B


Dernière édition par Mateo_13 le Dim 20 Fév 2022 - 13:49, édité 1 fois
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User17095
Érudit

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par User17095 Mer 27 Sep 2017 - 18:24
pseudo-intello a écrit:
(...)

Je répondrai juste à un point. Des exemples concrets dans l'évolution de l'enseignement des lettres ? Structuralisme, théorie de la réception, manifestes dans les évolutions des programmes.
Pour le reste, tu as si absolument raison qu'argumenter serait faire offense. Seul un pourceau trouverait à redire à ces perles.

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Merci, enfin quelque chose à me mettre sous la dent !
Donc si je comprends bien, il s'agit de la transposition d'un système théorisé, visible dans la LOLF ou la RGPP. C'est assez touffu et une seule lecture rapide ne me suffit évidemment pas à en saisir les aspects.
J'exprime tout de même, à la première lecture, un doute quant au caractère concret de cette transcription au niveau de l'EPLE. Elle est certes manifeste dans les politiques publiques générales, ou dans la description de ce qu'est devenue la Régie des Transports Marseillais (on pense immédiatement à la Poste), où il n'est finalement plus vraiment question de service public. Elle apparaît dans l'EN avec, par exemple, la révision annuelle de la carte scolaire - mais est-ce un mal en soi de vouloir mieux dépenser l'argent public ? En revanche, dans le quotidien des établissements, ça ne me saute pas aux yeux.
Sur la question de la mise en concurrence des salariés, avec des pri-primes pour mieux les faire obéir, on peut penser aux critiques émises sur l'apparition des IMP. Mais je n'ai pas constaté de reproche selon lequel la répartition des IMP correspondrait au fait du prince, ou que les enseignants se chamailleraient pour accéder aux sinécures qui sont ainsi reconnues ; au contraire, c'est souvent une rétribution un peu maigre par rapport à l'investissement demandé, et c'est toujours basé sur du volontariat. On trouvera sûrement des CE pour recourir à des procédés dégueulasses afin que les missions soient acceptées, mais ce n'est pas la norme, et pas ce que l'institution encourage - ne serait-ce que par pragmatisme, puisque ça finit toujours mal, avec un établissement à feu et à sang cité dans la presse.

Dans l'article, on trouve un tableau qui met en opposition des logiques d'organisation différentes, entre un professionnalisme dit organisationnel, relevant de la gestion "managée", et un professionnalisme dit occupationnel, correspondant à un coeur plus traditionnel du métier : protocole/hiérarchie vs organisation collégiale (...)indicateurs de performance vs éthique et déontologie, etc.
Il me semble que la tendance dans l'EPLE est de concilier les deux : il y a une hiérarchie, mais la réflexion sur les enseignements au sein du conseil pédagogique est collégiale (et on tend un peu partout à faire un conseil pédagogique ouvert à tous les enseignants et CPE, et le CA en adopte quasi systématiquement les conclusions). On attribue des indicateurs de performance aux établissements, mais avant toute chose on tient à un fonctionnement éthique (par exemple, on pourrait créer des classes de relégation et ne pas inscrire ces élèves aux examens pour bidouiller les résultats, mais ce n'est même pas concevable).

J'émets une première hypothèse selon laquelle l'EN est un des services publics où la reconnaissance du professionnalisme et la préoccupation de l'usager sont les plus fortes - par exemple, en comparaison avec l'hôpital ou la police nationale, qui souffrent énormément. Oui, j'admets que ce n'est jamais assez, que des enseignants ne sont pas toujours reconnus dans l'école comme à l'extérieur, que des politiques comme la réforme du bac pro en 2009 sont clairement budgétaires sous des prétextes pédagogiques. Mais tout de même, une infirmière avec des horaires délirants, ou un policier sommé de faire du PV pour améliorer les chiffres du commissariat, sont bien plus mal lotis.
J'en émets une deuxième, subséquente, selon laquelle le fait que pratiquement tous ses cadres aient connu le travail auprès des élèves n'y est pas étranger, et renforce la sauvegarde d'une certaine éthique.

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J'avais fait mes devoirs :aaq:
Mais je n'avais pas vu décrite la notion de "néo-management"
pseudo-intello
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Sage

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par pseudo-intello Mer 27 Sep 2017 - 18:48
pogonophile a écrit:Je répondrai juste à un point. Des exemples concrets dans l'évolution de l'enseignement des lettres ? Structuralisme, théorie de la réception, manifestes dans les évolutions des programmes.

J'ai googlisé "structuralisme", et j'ai lu des pavés de jargon, parmi lesquels j'ai tout de même compris "pour le lycée".
Perdu, j'enseigne au collège.

Si la théorie de la réception est manifeste dans l'évolution des programmes, comme il se trouve que je lis les programme, en principe, ça devrait être bon (et m'épargner le jargon, ou l'achat de bouquin théorique dispensable).

Du reste, l'expérience est le meilleur des maîtres, et davantage que je ne sais quel écrit de je ne sais quel quidam qui enseigne bien rarement dans le second degré (encore plus rarement au collège), il se trouve que mes pratiques, ça tombe bien, j'ai l'occasion de les tester devant les élèves, de les changer, et si je veux être une bonne prof, i-e une prof qui parvient à transmettre les éléments du programme aux élèves et les amener le plus loin possible, cela me semble la voie la plus sage. J'en ai marre d'obéir à des diktats de fonctionnement qui en réalité ne fonctionnent pas du tout, car c'est de l'absurdité et du gâchis. Heureusement que, jusqu'à présent, je 'nai pas été notée en fonction e ma lecture ou non d'essais sur le structuralisme, car je n'en ai pas besoin pour être une meilleure enseignante.

pogonophile a écrit:Pour le reste, tu as si absolument raison qu'argumenter serait faire offense. Seul un pourceau trouverait à redire à ces perles.

Je te laisse donc avec tes histoires de perles et de pourceaux, à ton vécu de prof qui s'est barré du métier mais fait la leçon à ceux qu y restent, et quitte ce topic bien soulagée de ne jamais avoir à subit ton évaluation de chef d'établissement, car au fil de tes messages, on comprend que ce que tu appelles un "prof consciencieux" est un prof qui, s'il fait tou ce que tu dis, finira par faire un burn-out (ou par passer un autre concours pour quitter le job). Je ne m'inquiète pas, car il est plus qu'improbable qu'un CDE de l'académie de Paris ne quitte son académie pour la mienne, si peu courue, et encore moins dans mon secteur.
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Cath
Enchanteur

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par Cath Mer 27 Sep 2017 - 19:33
pogonophile a écrit:
monseigneur a écrit:Certaines de ces compétences sont évaluées par le CdE et peuvent lui servir à sanctionner un enseignant qui montrerait un esprit trop indépendant, certains étant bêtement attachés à la notion de liberté pédagogique. Par exemple, "coopérer en équipe".

"coopérer au sein d'une équipe" fait partie du référentiel de compétences des enseignants, je ne vois pas ce que ça a de choquant. Il y aurait beaucoup à dire sur la notion de "liberté pédagogique" si elle vient en opposition à tout travail en équipe, mais j'aimerais qu'on reste dans le sujet - et notamment mieux comprendre en quoi ça relève d'une forme de "néo-management", qui reste à définir...

Juste pour dire que pour les anciens comme moi, pas de référentiel de compétences quand on m'a recrutée... Juste un concours avec des épreuves strictement disciplinaires.
Lefteris
Lefteris
Esprit sacré

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par Lefteris Mer 27 Sep 2017 - 19:35
Zagara a écrit:Moi je mettrai excellente partout parce que je m'auto-évalue comme excellente et voilà. C'est encore la meilleure méthode pour ne passer que 2 secondes sur ces bidules.
A mes supérieurs de réussir à me prouver le contraire sans recevoir un pain dans la figure, comme le leur conseillent leurs circulaires (bon courage).

(par contre ne pas tout mettre à l'envers : il n'y avait pas de "conscience de classe" parce que le concept de classe n'avait pas été inventé. L'histoire des idées ça compte. Les idées sont des forces matérielles de l'histoire. On ne peut pas faire de lutte de classes si on n'a pas le concept "classe". Soit dit en passant, c'est un problème de notre temps actuel : la dissolution du concept de "classe" en prétendant le "dépasser", organisée par ceux qui en avaient l'intérêt, a limité les capacités des gens d'aujourd'hui à comprendre ce qui leur arrive et à se fédérer contre leurs chefs. Il faut avoir des outils intellectuels pour transformer un mécontentement en révolte, et d'autres outils pour transformer une révolte en lutte de classes. Je ne sais même pas si nos contemporains, pris dans leur majorité, ont encore les outils du premier ordre ; ils ont certainement perdu ceux du second, en tout cas).
Le monde romain n'avait pas formulé le concept de classe comme Marx, mais chaque classe de citoyen avait fortement conscience de sa position, pendant la République où l'acquisition de droits était le moteur des tensions civiles,  comme sous le Principat, où les positions étaient différentes mais où l'on se défendait fortement, surtout les ordines supérieurs. On peut donc  inverser la proposition comme le font certains spécialistes  et dire que dans le monde servile  (enfin les diverses catégories qui composaient ce que nous ne connaissons que sous un terme générique) , du fait de la disparité des situations, ne pouvait émerger une conscience de classe.Bref, ça serait une discussion intéressante mais  trop longue et hors sujet...

pogonophile a écrit:Calmons nous sur les comparaisons avec l'esclavage et le management d'entreprise, je rappelle qu'on n'est pas dans la grande distribution mais dans le service public, donc que le but de notre travail n'est pas de générer du profit.
Ainsi, la "réunionite" n'est pas un outil de management destiné à faire plier les résistances pour gagner des sous. Elles sont dans un but utile (enfin, la plupart... du moins j'essaie) aux élèves - par exemple, une réunion d'équipe pédagogique lancée par le professeur principal pour travailler sur le climat d'une classe qui tourne mal.

Quant à la lutte des classes au sein de l'EPLE, gardons nous d'une transposition douteuse. Il n'y a pas de dynamique exploitant/exploité quand on parle de service public : personne ne gagne d'argent sur la sueur des enseignants. On pourrait gloser sur la dérive induite par les rapprochements école-entreprise, qui me hérissent le poil, mais ce n'est pas l'entreprise qui emploie les enseignants.
Il ne s'agit pas de comparer les buts et les conditions, qui sont très différentes, évidemment, mais derrière cette disparité d'analyser comment fonctionnent les "leviers" (terme chéri  du langage managérial) permettant de manipuler l'esprit humain, leviers qui sont universels.
La réunionite n'est pas destinée à faire plier des résistances pour gagner des sous, mais à faire plier des résistances tout de même, et à faire en sorte que des gens rétifs à la galère se mettent d'eux-mêmes aux avirons, ou à faire accepter des choses qui ravagent leur quotidien, voire leurs vies. On a encore en mémoire les EPI, les pressions pur organiser soi-même ce qui nous détruisait. Et les réunions ont pour but  "d'impliquer les acteurs" (deux autres termes fétiches), créant de fait un "transverse management", même si le mot n'est pas prononcé (ni parfois même connu, certains en faisant sans le savoir).
 Toutes ces techniques sont écrites noir sur blanc dans des bouquins de management, public ou privé, dans des cours dispensés dans les stages de toutes les administrations désormais.Les théories du new public management sont d'ailleurs entrées en force, et officiellement, dans les années 80-90, et ont même servi de référence explicite à la RGPP, mère de toutes les "réformes".

JPhMM a écrit:Oui oui je sais.
Mais ce n'est pas le fait d'être évalué qui dérange, mais la méthode.

C'était mieux avant ! Et pourtant, déjà, c'était pas terrible, c'est dire.

Du reste, je n'évalue jamais un élève, j'évalue toujours une production. Mais sans doute est-ce précisément là que je suis vieux con.
Voilà, la méthode : une évaluation floue, sur des critères de comportement, où l'on peut mettre ce qu'on veut selon les habitudes locales, son propre degré d'attente, et totalement arbitraire. Et avec un pouvoir coercitif très fort, puisque la non-proposition locale équivaudra à une non-promotion, donc une punition financière, sans compter les mesures de rétorsion nommées "accompagnement".
Dans les administrations pionnières passées à ce système de "pavés", la souffrance s'est abattue sur les personnels, toujours remis en cause, toujours chargés de plus de tâches, la palme tristement célèbre revenant à France Télécom.
Là, on évalue non les qualités objectives, le travail correspondant au métier,  mais un "ressenti" pour utiliser le solécisme à la mode, et surtout,  tout est fait pour faire en sorte que les enseignants passent leur vie dans l'établissement.
Qui pourra juger de l'effort de formation d'un enseignant qui refuse les stages  lubies informatiques qui ne lui servent à rien, mais qui lit beaucoup, qui approfondit en permanence sa discipline ? Quel sera le sort de celui qui  ne passe pas de temps à des réunions , par rapport à celui qui va aux commissions des menus, dont tout le monde se contrefiche ? Quelle  va être la notion d'éthique  et de responsabilité ?

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"La réforme [...] c'est un ensemble de décrets qui s'emboîtent les uns dans les autres, qui ne prennent leur sens que quand on les voit tous ensemble"(F. Robine , expliquant sans fard la stratégie du puzzle)

Gallica Musa mihi est, fateor, quod nupta marito. Pro domina colitur Musa latina mihi.

Δεν ελπίζω τίποτα, δεν φοβούμαι τίποτα, είμαι λεύτερος (Kazantzakis).
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Cath
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par Cath Mer 27 Sep 2017 - 19:36
pseudo-intello a écrit:Quant au problème de la grille d'évaluation, il n'y a qu'à lire les intitulés des items :
- coopérer au sein d'une équipe : outre que le verbe "coopérer" peut être interprété de différentes manières, et "travail en équipe" non plus d'ailleurs, , je n'ai jamais compris cette idéalisation du travail en équipe. Qu'on laisse travaille en équipe des gens qui en ont envie et ont les mêmes pratiques, très bien. Mais dans l'absolu, je ne vois pas ce que ça apporte. Dans mon bahut, dans ma discipline, nous nous apprécions beaucopu toutes les 5, et avons beaucopu de respect les unes pour les autres ainsi que pour nos manières de faire, mais on travaille très différemment. S'il fallait davantage "coopérer", je ne vois pas en quoi on travaillerait mieux, et ça obligerait certaines d'entre nous à se caler sur les autres (voir 4 à se caler sur la 5e). nos manière de faire sont aussi liées à nos caractères et nos personnalités, qui jouent un rôle crucial dans le métier ; on enseigne avec ce qu'on est.

- "contribuer à l'action de la communauté éducative" : ne veut rien dire. Donc si on me demande de le faire, c'est impossible, puisque c'est bullshit, et coopérer avec les parents d'élèves (là aussi, c'est très flou. Le commun des mortels penserait qu'il s'agit simplement de prendre ou en tout cas accepter les RDV avec les parents d'élèves quand c'est nécessaire, mais l’appréciation du critère de nécessité peut varier énormément d'une personne à l'autre, c'est très subjectif. Quand aux p"partenaires du collège", mentionnés juste après et avec lesquels il faudrait aussi coopérer, c'est encore plus flou. Pour certains, ça désignera n’importe quelle association ayant obtenu ses entrées dans l’établissement. Je ne vois pas pourquoi on y serait contraints, ni l'intérêt de nous y contraindre ni d'ailleurs celui de nous y inciter (je ne vois pas quel bénéfice mon enseignement en tirerait). J'ai appris il y a trois jours que la CPE et la doc projettent de travailler avec l’association "entreprendre pour apprendre", et vu le contenu du site, il est hors de question que j'aie le moindre rapport avec ces gens (qui n'ont, à mon humble avis, pas leur place dans un établissement scolaire). Cela fait-il de moi une mauvaise prof ?

- "agir selon des principes éthiques" : comme je ne suis pas encore totalement incohérente ni psychopathe, ça me semble couler de source, mais encre faut-il que la personne qui m'évalue ait le même sens de cette notion si subjective qu'est l'éthique" que moi.

- "accompagner les élèves dans leur formation" : c'est moi, ou pour ça, i y a des cops ? Ah non, je plaisante : on sait très bien qu'il manque tellement de cop que c'est la mouise et que faute de mieux, les profs n'ont qu'à se taper le job (gratuitement). Ça revient moins cher que d'embaucher des gens.

Je continue, ou c'est bon ?

Avant, mon travail était évalué par inspecteur, qui me jugeait sur mon cours + quelques documents qu'il fallait lui fournir. Là tout est morcelé et perd son sens (et est parfaitement subjectif). Le chef n'était pas un manageur, mais un supérieur hiérarchique qui évaluait sur des critères certes pas parfaites (ce fameux "rayonnement"...), mais neutres pour le reste : "assiduité" et "ponctualité".
Avant, la qualité de mon travail (outre l'assiduité et la ponctualité, qui sont le premier devoir pour tout un chacun), était évaluée à l'aune de mes cours, mes compétences pédagogiques dans ma discipline, critères sur lesquels j'ai été embauchée et titularisée (le concours écrit validant mes savoirs disciplinaires, le stage ma capacité à les transmettre dans un climat de travail sain). Maintenant, il faut que j'ai l'esprit start-up, que je coopère avec des tas de gens même des assos parce que les assos c'est in, que je bosse en équipe, parce que c'est à la mode, que je "sociabilise" parce que ça fait joli, et que "contribue" et m'investisse dans la "communauté", parce que c'est beau d'afficher un esprit d'équipe même si on se force, ça fait soutire colgate, joli catalogue, ça fait moderne, ça fait startup. C'est coopératif comme un Ulule ou un Kisskissbankbank, c'est du sharing, c'est constructif. Au lieu d'enseigner dans le calme, je dois mettre en aplce des climats, mettre en œuvre des situations, en fait, je me demande si je suis fonctionnaire d'Etat ou auto-entrepreneur. Que "j'organise", et surtout, que "j'anime", et là, je me demande si je suis au collège ou dans une colo.

Avant, je n'avais pas à m'auto-évaluer, pratique infantilisante et poussant à l'autoflagellation : "oh, chef, je bats ma coulpe, parce que je n'ai pas assez œuvré pour la socialisation de mes élèves ; ce point, de toute évidence, est à consolider".
Avant, l’inspecteur inspectait et se faisait son avis puis recueillait mes justifications et et mes éclaircissements sur les points qui l'avaient interpelé. Cet ordre là me paraît largement plus sain(même si on sait que ce n'était pas parfait, que de nombreux inspecteurs avaient leurs marottes, etc.).


Ah, ben tiens, je n'avais pas lu ça, mais j'approuve vigoureusement.
Al9
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Le "néo-management", ou le mal indéfini - Page 3 Empty Re: Le "néo-management", ou le mal indéfini

par Al9 Mer 27 Sep 2017 - 19:56
pseudo-intello a très bien résumé les choses.
On passe doucement d'une évaluation (certes imparfaite) de l'écart à nos qualifications (didactique, pédagogique) à une évaluation de compétences où l'individu devient une entreprise, qui doit se former (je ne dis pas qu'il ne faut pas) pour investir dans son "capital humain" qu'il pourra mettre en avant. On entre dans la compétition.
Dans cette logique là d'ailleurs, tout ce qui n'est pas dans la norme est écarté, voire vu comme une menace, et mis au ban.

C'est çà le new management et l'état d'esprit qui va avec.
Ce n'est pas un phénomène nouveau et cette vision fait quasi consensus, j'insiste sur le quasi.
D'ailleurs, c'est tellement plus pratique pour la flexibilité.

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Quelque part dans le fil, tu dis que l'enseignant doit se former.
Question pratique : comment un personnel de direction sait qu'un de ses enseignants se forme ?
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User17095
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Le "néo-management", ou le mal indéfini - Page 3 Empty Re: Le "néo-management", ou le mal indéfini

par User17095 Mer 27 Sep 2017 - 20:31
Al9 a écrit:
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Quelque part dans le fil, tu dis que l'enseignant doit se former.
Question pratique : comment un personnel de direction sait qu'un de ses enseignants se forme ?

Ce n'est pas moi qui dis qu'il faut se former, c'est le référentiel de compétences... et le bon sens. Il y a plusieurs moyens de le constater.

Le plus visible pour le perdir, et le plus quantifiable, c'est évidemment la participation au PAF, la réponse aux convocations des formations à public désigné, la participation aux formations dans l'établissement. J'entends déjà les mauvaises langues persifler "oui c'est la prime à celui qui fait le plus de lèche sur des formations formatage stupides", il n'empêche que plusieurs sont de qualité, et que les demandes au PAF traduisent une certaine démarche. Je pourrais citer aussi l'intérêt pour les interventions que j'organise, mais comme c'est en fin de journée, ça ne compte pas puisque tout le monde ne peut pas se libérer (et on a parfaitement le droit de ne pas être émoustillé par la présentation des travaux de Delahaye, ou du conseil coopératif en classe).

Ensuite, il y a les échanges informels. Comme je suis curieux, j'aime bien recevoir les profs tout de mon établissement tout au long de l'année, papoter sur les contenus du programme, ce qu'ils font en EPI, ce sur quoi ils s'interrogent. C'est très flou, mais surgit quand même l'intérêt pour sa discipline et son actualité.
Dans la même veine du quotidien, j'ai observé une prof de maths super calée sur l'algorithmie proposer une formation à ses collègues sur un temps de concertation, et l'un d'entre eux expliquer que ça l'ennuyait à l'avance et qu'il éviterait les classes avec ces sujets au programme. C'est le même qui était terriblement fier de me montrer en juin qu'il avait déjà fait toutes ses photocopies pour l'année prochaine : aucun changement possible, aucune place pour l'adaptation à ses élèves, son cours est blindé depuis je ne sais combien d'années. Tout ça traduit des choses.

Forcément, il y aura des gens qui se forment discrètement sans qu'on le constate, et d'autres qui joueront sur un écran de fumée. C'est là qu'il devient nécessaire de croiser avec les observations de l'inspecteur, pour qualifier la démarche de formation d'un enseignant.
Rendash
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Le "néo-management", ou le mal indéfini - Page 3 Empty Re: Le "néo-management", ou le mal indéfini

par Rendash Mer 27 Sep 2017 - 21:21
pogonophile a écrit:Par contre, sur l'idée selon laquelle tous les professeurs sont assez consciencieux pour "faire le job", ce qui implique de bosser régulièrement, de se former, de se tenir au fait de sa discipline, de se remettre en question... tu trouveras des contre-exemples dans tous les établissements.

Ce qui est rarement compatible avec le maintien forcé dans l'établissement à coups d'heures de trou ou de réunions diverses, soit dit en passant.



pogonophile a écrit:on n'est pas obligé de vivre l'évaluation ou l'inspection comme du fliquage, tout le monde a besoin de regards extérieurs et de conseils. C'est ce vers quoi est censée tendre l'inspection.

Certes, lorsque l'évaluateur ou l'inspecteur ne se conduit pas comme un flic, ou plutôt un procureur. Cette réaction est donc une question d'a priori ; et à ce titre, la rupture de confiance entre l'institution et une grande partie des enseignants est à prendre en compte, me semble-t-il. Quelle légitimité peut bien avoir un IPR qui a vendu la réforme du collège, et qui cette année défend le retour aux bilangues et l'enseignement du latin ? Il lui reste la légitimité disciplinaire, certes... ha, même plus, puisque les IPR sont occupés ailleurs et envoient fréquemment, dans certaines académies, des chargés de mission pour évaluer la conformité, non plus aux programmes (ce qui est légitime), mais aux dogmes en vigueur.
Pour être acceptés, donc utiles, les regards extérieurs et les conseils nécessitent un rapport de confiance. Rien dans ce qui a été fait par la hiérarchie dans son ensemble, des CDE aux IGEN, ne justifie une quelconque confiance a priori, pour beaucoup d'enseignants.

_________________
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"Ce serait un bien bel homme s’il n’était pas laid ; il est grand, bâti en Hercule, mais a un teint africain ; des yeux vifs, pleins d’esprit à la vérité, mais qui annoncent toujours la susceptibilité, l’inquiétude ou la rancune, lui donnent un peu l’air féroce, plus facile à être mis en colère qu’en gaieté. Il rit peu, mais il fait rire. [...] Il est sensible et reconnaissant ; mais pour peu qu’on lui déplaise, il est méchant, hargneux et détestable."
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User17095
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par User17095 Mer 27 Sep 2017 - 21:35
Rendash a écrit:
Certes, lorsque l'évaluateur ou l'inspecteur ne se conduit pas comme un flic, ou plutôt un procureur. Cette réaction est donc une question d'a priori ; et à ce titre, la rupture de confiance entre l'institution et une grande partie des enseignants est à prendre en compte, me semble-t-il. Quelle légitimité peut bien avoir un IPR qui a vendu la réforme du collège, et qui cette année défend le retour aux bilangues et l'enseignement du latin ? Il lui reste la légitimité disciplinaire, certes... ha, même plus, puisque les IPR sont occupés ailleurs et envoient fréquemment, dans certaines académies, des chargés de mission pour évaluer la conformité, non plus aux programmes (ce qui est légitime), mais aux dogmes en vigueur.
Pour être acceptés, donc utiles, les regards extérieurs et les conseils nécessitent un rapport de confiance. Rien dans ce qui a été fait par la hiérarchie dans son ensemble, des CDE aux IGEN, ne justifie une quelconque confiance a priori, pour beaucoup d'enseignants.

N'oublie pas que le mot d'ordre du ministre, c'est "l'école de la confiance" - même si je n'ai pas encore compris en quoi ça consistait. abi
Rendash
Rendash
Bon génie

Le "néo-management", ou le mal indéfini - Page 3 Empty Re: Le "néo-management", ou le mal indéfini

par Rendash Mer 27 Sep 2017 - 21:36
pogonophile a écrit:Le plus visible pour le perdir, et le plus quantifiable, c'est évidemment la participation au PAF, la réponse aux convocations des formations à public désigné, la participation aux formations dans l'établissement. J'entends déjà les mauvaises langues persifler "oui c'est la prime à celui qui fait le plus de lèche sur des formations formatage stupides", il n'empêche que plusieurs sont de qualité, et que les demandes au PAF traduisent une certaine démarche. Je pourrais citer aussi l'intérêt pour les interventions que j'organise, mais comme c'est en fin de journée, ça ne compte pas puisque tout le monde ne peut pas se libérer (et on a parfaitement le droit de ne pas être émoustillé par la présentation des travaux de Delahaye, ou du conseil coopératif en classe).


Mais là encore, la qualité des formations du PAF est d'une part très variable selon les académies, d'autre part foutrement subjective : tel CDE pourra juger génialissime la formation Enseigner le Latin Via le Numérique Quand On Est Professeur de Mathématiques Citoyen et Responsable, qui fera vomir tel collègue.
De plus, le PAF, dans mon académie du moins, ne propose lors de l'inscription que les intitulés, tous plus ou moins ronflants. Mais de contenu, de noms de formateurs (histoire de savoir à qui on a affaire), de date, point.
Enfin, pardon, mais quand tu vis au fin fond de l'académie et que tu dois te taper deux cents bornes pour assister à une formation du PAF, sans remboursement de frais (ou avec un crachat et deux cacahuètes virgule cinq), tu hésites forcément à passer autant de temps et d'énergie pour un résultat aléatoire.
Mauvais exemple, le PAF, donc.

Idem pour les FIL, d'ailleurs : pardon, mais après une journée de huit heures, j'ai besoin de rentrer décompresser un peu avant de m'y remettre. Si FIL (ou réunion, d'ailleurs) il y a, je ne m'inscris pas, et je sèche si je suis inscrit d'office. En annonçant la couleur, btw.


pogonophile a écrit:nsuite, il y a les échanges informels. Comme je suis curieux, j'aime bien recevoir les profs tout de mon établissement tout au long de l'année, papoter sur les contenus du programme, ce qu'ils font en EPI, ce sur quoi ils s'interrogent. C'est très flou, mais surgit quand même l'intérêt pour sa discipline et son actualité.
Dans la même veine du quotidien, j'ai observé une prof de maths super calée sur l'algorithmie proposer une formation à ses collègues sur un temps de concertation, et l'un d'entre eux expliquer que ça l'ennuyait à l'avance et qu'il éviterait les classes avec ces sujets au programme. C'est le même qui était terriblement fier de me montrer en juin qu'il avait déjà fait toutes ses photocopies pour l'année prochaine : aucun changement possible, aucune place pour l'adaptation à ses élèves, son cours est blindé depuis je ne sais combien d'années. Tout ça traduit des choses.


Quant à ceci, ma foi, ça me conforte plutôt dans l'idée que je dois me méfier a priori de la hiérarchie, et que je ne cause pas tant que je ne sais pas à qui j'ai affaire. Double erreur de ta part, tel que tu le décris, de mon point de vue :
- la super collègue super-calée qui super-propose des super-formations à ses moins-super-collègues est peut-être simplement super balaise pour se faire super-mousser, et ses élèves, qui sont quand même les premiers et principaux concernés, ne font peut-être pas les super-progrès auxquels on devrait s'attendre.
- le branquignole qui a une progression et des photocopies déjà prêtes est peut-être extrêmement efficace, sait tirer ses élèves vers le haut, et a déjà anticipé pas mal de choses, façon Arbre des Possibles. Soit dit en passant, le coup de la programmation calée au pwâl de lulu près dès la rentrée, c'est so ESPE Razz

Ta conclusion selon laquelle il faut alors croiser ton regard avec celui de l'inspecteur serait une réponse logique à ces objections, si les IPR en question étaient encore à même d'avoir un regard objectif et cohérent sur les points qui manquent à l'observation des CDE. Mais comme ils viennent, pour un nombre croissant d'entre eux, s'assurer d'une conformité idéologique aux dogmes en vigueur, c'est râpé.

En fin de compte, l'essentiel, le cœur de notre mission, à savoir les élèves et les progrès qu'ils accomplissent, passe complètement à la trappe dans ces discussions et ces évaluations.

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"Ce serait un bien bel homme s’il n’était pas laid ; il est grand, bâti en Hercule, mais a un teint africain ; des yeux vifs, pleins d’esprit à la vérité, mais qui annoncent toujours la susceptibilité, l’inquiétude ou la rancune, lui donnent un peu l’air féroce, plus facile à être mis en colère qu’en gaieté. Il rit peu, mais il fait rire. [...] Il est sensible et reconnaissant ; mais pour peu qu’on lui déplaise, il est méchant, hargneux et détestable."
gauvain31
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par gauvain31 Mer 27 Sep 2017 - 21:42
Rendash a écrit:
pogonophile a écrit:Par contre, sur l'idée selon laquelle tous les professeurs sont assez consciencieux pour "faire le job", ce qui implique de bosser régulièrement, de se former, de se tenir au fait de sa discipline, de se remettre en question... tu trouveras des contre-exemples dans tous les établissements.

Ce qui est rarement compatible avec le maintien forcé dans l'établissement à coups d'heures de trou ou de réunions diverses, soit dit en passant.



Je confirme ;@ Pogonophile : je me forme à la fac de sciences, hors PAF sur mes heures de libre (je suis en léger "sous-service "); et d'autres collègues font de même dans d'autres disciplines. Cela enrichit nos cours et la vision de notre discipline. Quand on veut maintenir les enseignants coûte que coûte dans leur établissement comme le font quelques (rares) CDE malveillants, ces derniers ne peuvent pas non plus leur demander à se former . Cela est du bon sens élémentaire.
Rendash
Rendash
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Le "néo-management", ou le mal indéfini - Page 3 Empty Re: Le "néo-management", ou le mal indéfini

par Rendash Mer 27 Sep 2017 - 21:43
pogonophile a écrit:
Rendash a écrit:
Certes, lorsque l'évaluateur ou l'inspecteur ne se conduit pas comme un flic, ou plutôt un procureur. Cette réaction est donc une question d'a priori ; et à ce titre, la rupture de confiance entre l'institution et une grande partie des enseignants est à prendre en compte, me semble-t-il. Quelle légitimité peut bien avoir un IPR qui a vendu la réforme du collège, et qui cette année défend le retour aux bilangues et l'enseignement du latin ? Il lui reste la légitimité disciplinaire, certes... ha, même plus, puisque les IPR sont occupés ailleurs et envoient fréquemment, dans certaines académies, des chargés de mission pour évaluer la conformité, non plus aux programmes (ce qui est légitime), mais aux dogmes en vigueur.
Pour être acceptés, donc utiles, les regards extérieurs et les conseils nécessitent un rapport de confiance. Rien dans ce qui a été fait par la hiérarchie dans son ensemble, des CDE aux IGEN, ne justifie une quelconque confiance a priori, pour beaucoup d'enseignants.

N'oublie pas que le mot d'ordre du ministre, c'est "l'école de la confiance" - même si je n'ai pas encore compris en quoi ça consistait. abi

C'est comme la bienveillance, comme la réussite pour tous, comme la démocratisation, comme l'inclusion ...de beaux mots, qui en jettent, mais qui sont creux et dévoyés et empêchent surtout de s'opposer à ce qui est mis en place : qui irait s'opposer à l'école de la confiance, pour prôner une école de la méfiance ? Qui irait militer pour une école de la malveillance, de l'exclusion, de l'échec massif ?

Ce sont des armes d'escrocs pour se placer dans le Camp du Bien, rien de plus.

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par henriette Mer 27 Sep 2017 - 21:54
Rendash a écrit:En fin de compte, l'essentiel, le cœur de notre mission, à savoir les élèves et les progrès qu'ils accomplissent, passe complètement à la trappe dans ces discussions et ces évaluations.
Je suis tout à fait d'accord avec toi, Rendash : la seule évaluation qui vaille, c'est les progrès que les élèves ont fait dans l'année, ce que l'enseignant leur a transmis, ce qu'ils ont appris.

J'ajouterai une chose : l'enseignement, c'est un artisanat, voire un art. On est plus ou moins naturellement enclin à le faire, mais chacun avec sa patte, sa façon. On ne viendrait pas dire à un ébéniste d'arrêter de faire à sa façon, que dorénavant tous les ébénistes de France et de Navarre doivent suivre le même process, ce serait imbécile, n'est-ce pas ? Il en est de même avec l'enseignement, car on enseigne comme on est avant tout, selon sa nature, et c'est cela dont il faut avoir conscience.
Un des moments les plus enrichissants de ma carrière, d'un point de vue pédagogique, a été l'heure et demie d'entretien avec l'IG de lettres classiques qui m'avait inspectée en 2006.
Pas question de compétences à s'impliquer dans ceci ou cela, ou je ne sais quoi d'autre, mais une vraie réflexion sur ma façon d'enseigner, et une sorte de maïeutique pour m'amener à comprendre comment je fonctionne, et en tirer parti pour rendre mon enseignement le meilleur et le plus efficace pour mes élèves.

Alors tout le reste, le référentiel, les petites cases, les items et sous-items, tout cela n'a aucune prise sur la réalité de l'acte d'enseigner, tout cela ne cerne absolument pas le cœur de notre métier, et c'est à mon avis au mieux une perte de temps désolante pour tout le monde.

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"Il n'y a que ceux qui veulent tromper les peuples et gouverner à leur profit qui peuvent vouloir retenir les hommes dans l'ignorance."
Zagara
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Guide spirituel

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par Zagara Mer 27 Sep 2017 - 21:57
henriette a écrit:
Rendash a écrit:En fin de compte, l'essentiel, le cœur de notre mission, à savoir les élèves et les progrès qu'ils accomplissent, passe complètement à la trappe dans ces discussions et ces évaluations.
Je suis tout à fait d'accord avec toi, Rendash : la seule évaluation qui vaille, c'est les progrès que les élèves ont fait dans l'année, ce que l'enseignant leur a transmis, ce qu'ils ont appris.

J'ajouterai une chose : l'enseignement, c'est un artisanat, voire un art. On est plus ou moins naturellement enclin à le faire, mais chacun avec sa patte, sa façon. On ne viendrait pas dire à un ébéniste d'arrêter de faire à sa façon, que dorénavant tous les ébénistes de France et de Navarre doivent suivre le même process, ce serait imbécile, n'est-ce pas ?
C'est le principe de l'industrie, en fait.
Et je crois qu'on peut dire que les établissements, vu le nombre d'élèves par classe, sont des sortes d'usines.
Standardisation des gestes professionnels, pour traiter un travail massifié. Ça paraît logique quand on y pense.
Rendash
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par Rendash Mer 27 Sep 2017 - 21:58
Zagara a écrit:
Et je crois qu'on peut dire que les établissements, vu le nombre d'élèves par classe, sont des sortes d'usines.

Travail à la chaîne dans le meilleur des cas, abattoirs pour les autres ; ouais, ça colle.

On se réunit pour fixer une date de réunion pour en parler ?

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par Kimberlite Mer 27 Sep 2017 - 22:00
pogonophile a écrit:Calmons nous sur les comparaisons avec l'esclavage et le management d'entreprise, je rappelle qu'on n'est pas dans la grande distribution mais dans le service public, donc que le but de notre travail n'est pas de générer du profit.
Ainsi, la "réunionite" n'est pas un outil de management destiné à faire plier les résistances pour gagner des sous. Elles sont dans un but utile (enfin, la plupart... du moins j'essaie) aux élèves - par exemple, une réunion d'équipe pédagogique lancée par le professeur principal pour travailler sur le climat d'une classe qui tourne mal.

Quant à la lutte des classes au sein de l'EPLE, gardons nous d'une transposition douteuse. Il n'y a pas de dynamique exploitant/exploité quand on parle de service public : personne ne gagne d'argent sur la sueur des enseignants. On pourrait gloser sur la dérive induite par les rapprochements école-entreprise, qui me hérissent le poil, mais ce n'est pas l'entreprise qui emploie les enseignants.
Il est bien dommage que tu ne puisse pas t'insinuer façon petite souris pour voir comment certains de tes collègues utilisent les réunions comme outils de management... nous, on a un bel exemplaire, qu'on a vu noter sur ses petits papiers qui était là où non à certaines réunions (non obligatoires), qui fait de petites remarques sournoises si personnes d'une discipline ne s'est déplacé pour une des dites réunions, et qui va même jusqu'à envoyer des lettres au rectorat pour signaler l'absence de certains à des réunions et menacer de retrait de salaire (alors qu'aucune convocation en règle n'avait été envoyée...).

Et pour avoir assisté à pas mal de réunions, je peux te dire que parfois je me demandais bien ce que je faisais là...

Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas directement de "profit" en terme d'argent que le public est exempt des dérives du privé. Beaucoup de personnes ont tendance à vouloir y mimer un fonctionnement observé dans le privé (d'ailleurs tout n'est pas non plus exclusivement centré sur l'argent, du moins pas directement et j'y ai vu aussi bien des pratiques contre-productives). Je t'engage pour comprendre certains travers courants à lire le livre "les stratégies absurdes" qui illustre bien comment l'utilisation de certains "indices de réussite" peut avoir des conséquences perverses.

K.

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User17095
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par User17095 Mer 27 Sep 2017 - 22:11
Rendash a écrit:
pogonophile a écrit:Le plus visible pour le perdir, et le plus quantifiable, c'est évidemment la participation au PAF, la réponse aux convocations des formations à public désigné, la participation aux formations dans l'établissement. J'entends déjà les mauvaises langues persifler "oui c'est la prime à celui qui fait le plus de lèche sur des formations formatage stupides", il n'empêche que plusieurs sont de qualité, et que les demandes au PAF traduisent une certaine démarche. Je pourrais citer aussi l'intérêt pour les interventions que j'organise, mais comme c'est en fin de journée, ça ne compte pas puisque tout le monde ne peut pas se libérer (et on a parfaitement le droit de ne pas être émoustillé par la présentation des travaux de Delahaye, ou du conseil coopératif en classe).


Mais là encore, la qualité des formations du PAF est d'une part très variable selon les académies, d'autre part foutrement subjective : tel CDE pourra juger génialissime la formation Enseigner le Latin Via le Numérique Quand On Est Professeur de Mathématiques Citoyen et Responsable, qui fera vomir tel collègue.
De plus, le PAF, dans mon académie du moins, ne propose lors de l'inscription que les intitulés, tous plus ou moins ronflants. Mais de contenu, de noms de formateurs (histoire de savoir à qui on a affaire), de date, point.
Enfin, pardon, mais quand tu vis au fin fond de l'académie et que tu dois te taper deux cents bornes pour assister à une formation du PAF, sans remboursement de frais (ou avec un crachat et deux cacahuètes virgule cinq), tu hésites forcément à passer autant de temps et d'énergie pour un résultat aléatoire.
Mauvais exemple, le PAF, donc.

Idem pour les FIL, d'ailleurs : pardon, mais après une journée de huit heures, j'ai besoin de rentrer décompresser un peu avant de m'y remettre. Si FIL (ou réunion, d'ailleurs) il y a, je ne m'inscris pas, et je sèche si je suis inscrit d'office. En annonçant la couleur, btw.


pogonophile a écrit:nsuite, il y a les échanges informels. Comme je suis curieux, j'aime bien recevoir les profs tout de mon établissement tout au long de l'année, papoter sur les contenus du programme, ce qu'ils font en EPI, ce sur quoi ils s'interrogent. C'est très flou, mais surgit quand même l'intérêt pour sa discipline et son actualité.
Dans la même veine du quotidien, j'ai observé une prof de maths super calée sur l'algorithmie proposer une formation à ses collègues sur un temps de concertation, et l'un d'entre eux expliquer que ça l'ennuyait à l'avance et qu'il éviterait les classes avec ces sujets au programme. C'est le même qui était terriblement fier de me montrer en juin qu'il avait déjà fait toutes ses photocopies pour l'année prochaine : aucun changement possible, aucune place pour l'adaptation à ses élèves, son cours est blindé depuis je ne sais combien d'années. Tout ça traduit des choses.


Quant à ceci, ma foi, ça me conforte plutôt dans l'idée que je dois me méfier a priori de la hiérarchie, et que je ne cause pas tant que je ne sais pas à qui j'ai affaire. Double erreur de ta part, tel que tu le décris, de mon point de vue :
- la super collègue super-calée qui super-propose des super-formations à ses moins-super-collègues est peut-être simplement super balaise pour se faire super-mousser, et ses élèves, qui sont quand même les premiers et principaux concernés, ne font peut-être pas les super-progrès auxquels on devrait s'attendre.
- le branquignole qui a une progression et des photocopies déjà prêtes est peut-être extrêmement efficace, sait tirer ses élèves vers le haut, et a déjà anticipé pas mal de choses, façon Arbre des Possibles. Soit dit en passant, le coup de la programmation calée au pwâl de lulu près dès la rentrée, c'est so ESPE Razz

Ta conclusion selon laquelle il faut alors croiser ton regard avec celui de l'inspecteur serait une réponse logique à ces objections, si les IPR en question étaient encore à même d'avoir un regard  objectif et cohérent sur les points qui manquent à l'observation des CDE. Mais comme ils viennent, pour un nombre croissant d'entre eux, s'assurer d'une conformité idéologique aux dogmes en vigueur, c'est râpé.

En fin de compte, l'essentiel, le cœur de notre mission, à savoir les élèves et les progrès qu'ils accomplissent, passe complètement à la trappe dans ces discussions et ces évaluations.

On m'a demandé de quels outils je disposais, j'ai répondu, oui ils sont tous critiquables, non aucun n'est absolu, non je ne suis pas demeuré je suis capable de prendre en compte le fait qu'on vit parfois à pétaouch au fond de l'académie, sauf qu'à Paris ce n'est pas un argument.
Les exemples locaux que j'ai cités sont des exemples locaux, donc oui il y a peut-être des fumistes, mais la prof que je cite sur l'algorithme est réellement brillante, motivée, motivante, pour les élèves comme pour les collègues, et le gars qui fait ses photocopies un an avant est une catastrophe ambulante, d'ailleurs on ne lui colle jamais un même élève deux ans de suite. Je connais mon établissement, ce n'était pas des exemples dans l'absolu.

edit : et concernant la mesure des progrès des élèves, on fait comment ?
Les résultats aux exame... "ah non stop, indicateur à la noix, on n'est pas responsable du niveau des élèves à l'arrivée, et on peut pas faire de miracle"
Ok alors les progressions des moyen... "non mais ça va pas, on peut aussi pipoter les notes, donc ça veut rien dire"
J'anticipe hein, pour gagner du temps.

Tout cela étant précisé, soit je suis obtus, soit la seule conclusion possible c'est qu'il n'y a aucun mode d'évaluation qui soit admissible pour les enseignants, puisque ni perdirs ni enseignants ni qui que ce soit ne trouvera grâce à tes yeux. Cela souligne d'autant plus la nécessité d'un regard extérieur tiens.


Dernière édition par pogonophile le Mer 27 Sep 2017 - 22:28, édité 1 fois
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User17095
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Le "néo-management", ou le mal indéfini - Page 3 Empty Re: Le "néo-management", ou le mal indéfini

par User17095 Mer 27 Sep 2017 - 22:17
henriette a écrit:
J'ajouterai une chose : l'enseignement, c'est un artisanat, voire un art. On est plus ou moins naturellement enclin à le faire, mais chacun avec sa patte, sa façon. On ne viendrait pas dire à un ébéniste d'arrêter de faire à sa façon, que dorénavant tous les ébénistes de France et de Navarre doivent suivre le même process, ce serait imbécile, n'est-ce pas ? Il en est de même avec l'enseignement, car on enseigne comme on est avant tout, selon sa nature, et c'est cela dont il faut avoir conscience.
Un des moments les plus enrichissants de ma carrière, d'un point de vue pédagogique, a été l'heure et demie d'entretien avec l'IG de lettres classiques qui m'avait inspectée en 2006.
Pas question de compétences à s'impliquer dans ceci ou cela, ou je ne sais quoi d'autre, mais une vraie réflexion sur ma façon d'enseigner, et une sorte de maïeutique pour m'amener à comprendre comment je fonctionne, et en tirer parti pour rendre mon enseignement le meilleur et le plus efficace pour mes élèves.

Alors tout le reste, le référentiel, les petites cases, les items et sous-items, tout cela n'a aucune prise sur la réalité de l'acte d'enseigner, tout cela ne cerne absolument pas le cœur de notre métier, et c'est à mon avis au mieux une perte de temps désolante pour tout le monde.

Je n'aime pas trop la qualification d'art pour l'enseignement, parce que ça suppose un don, une inspiration, une muse, et que ça fait passer au second plan le fait que ce soit une technique. Mais peu importe.

Bien sûr on ne dit pas à tous les ébénistes de faire la même chose. On ne le dit pas aux enseignants non plus.
Quand on préconise par exemple l'instauration de rituels pour l'entrée en classe, on ne précise pas lequel, à chacun le sien. Et c'est une préconisation, pas un ordre. De la même façon, on demandera à un ébéniste de préparer ses outils avant de travailler, et il le fera comme il l'entendra, mais s'il ne le fait pas, il va se mettre en difficulté.

Enfin, on peut critiquer autant qu'on veut les petites cases et les items. Il n'empêche que ça a au moins un avantage, c'est de diminuer la part d'arbitraire de l'évaluation d'un cadre. Combien de fois au juste a-t-on entendu protester, parfois à juste titre, parfois non, à propos de l'IA-IPR qui a ses têtes ? Là, on a un document cadre, et quelques éléments plus tangibles que "chacun enseignant son style de pratique, chacun inspecteur son style de rapport".
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