Le déroutant sujet de philo au concours de Normale sup : "expliquer".

Bonsoir,

Bouboule a écrit:http://etudiant.lefigaro.fr/les-news/actu/detail/article/le-deroutant-sujet-de-philo-au-concours-de-normale-sup-13405/

Ce n’est pas le première fois, on a déjà eu la même chose avec le bac, non ? Ce qui est déroutant, c’est qu’on médiatise de plus en plus les commentaires de candidats qui fleurissent sur Twitter après les épreuves…, le tout avec des journalistes types madame Michu donnant son avis sur des choses qu’elle ne connaît pas (et avec des épreuves comme la philo ou les maths, c’est facile de faire passer n’importe quoi pour extraordinaire). Je veux dire : moi aussi, en sortant d’épreuves, j’ai toujours râlé et dis pas mal de conneries avec mes potes, ça défoule et par nature, on est souvent frustré dans ces moments-là. Et une plateforme qui propose de s’exprimer en cent quarante caractère est le lieu idéal pour ça. Mais de là à y trouver le moindre intérêt médiatique…

Et la mentalité qui sourd : ne faudrait-il donc plus de sujet compliqué, déroutant, surprenant ? On s’empare de bougonnements de candidats (qui sont eux, légitimes : c’est normal qu’un candidat râle) pour en faire des sujets de sociétés, eux, illégitimes, et − je trouve − inconscients de leurs propres enjeux (que peut devenir une société ou un pays qui refuse la complexité, le déroutant ou l’inattendu ?).

En journalisme, c'est ce qu'on appelle un marronnier non? Comme les sujets de philo du bac qui sont égrenés et commentés par les journaux radiophoniques et télévisés...

Il me semble que c’est assez nouveau que les journalistes aillent chercher sur twitter les commentaires de candidats, et leur donnent une importance particulière (les bacheliers trouvent que l’épreuve de maths était trop dure : le journaliste dit que l’épreuve de maths était trop dure ; les étudiants estiment que l’épreuve de philo était déroutante : l’épreuve de philo était déroutante… c’est donc le point de vue des candidats qui structure l’article, et pas les autres avis, qui ne viennent que secondairement et ne font pas le fond du propos).

Dimka a écrit:Il me semble que c’est assez nouveau que les journalistes aillent chercher sur twitter les commentaires de candidats, et leur donnent une importance particulière (les bacheliers trouvent que l’épreuve de maths était trop dure : le journaliste dit que l’épreuve de maths était trop dure ; les étudiants estiment que l’épreuve de philo était déroutante : l’épreuve de philo était déroutante… c’est donc le point de vue des candidats qui structure l’article, et pas les autres avis, qui ne viennent que secondairement et ne font pas le fond du propos).

Tout à fait.
Je rappelle ce qu'a écrit PY sur la 1re page du topic

Moi, je trouve qu'il n'a absolument rien de spécial. (Il est très bien, ce sujet.)

Un sujet normal de philo pour un concours exigeant. Que les candidats soient déroutés me semble aussi tout à fait banal. Et la dissert de philo est une épreuve qui permet de trier parmi les meilleurs. Ce qui est la loi des concours.
What else ?

J'ai aussi cette même impression (la même que Dimka & Thalia).

Thalia de G a écrit:
Un sujet normal de philo pour un concours exigeant. Que les candidats soient déroutés me semble aussi tout à fait banal. Et la dissert de philo est une épreuve qui permet de trier parmi les meilleurs. Ce qui est la loi des concours.
What else ?

Quoi d'autre ? Disons une nouvelle manière de tenter, je dis bien de tenter, d'imposer la dictature du qu'en-dira-t-on... Version hype (avec mobilisation de médias nationaux, tout de même) de feu note2be...

Ce que j'ai préféré dans ce concert de réseaux sociaux relayés par les journaux (même mes élèves de terminales scientifique, bien loin de la Capitale, étaient au courant, aujourd'hui !), c'est le passage par VDM : Je tente Normale Sup' après une deux années de prépas prestigieuses et on ose me demander de faire de la philo... Ah oui quelle vie de merde ! C'est tellement mieux d'échouer à son bac pro... :|

Thalia de G a écrit:Tout à fait.
Je rappelle ce qu'a écrit PY sur la 1re page du topic

Moi, je trouve qu'il n'a absolument rien de spécial. (Il est très bien, ce sujet.)

Un sujet normal de philo pour un concours exigeant. Que les candidats soient déroutés me semble aussi tout à fait banal. Et la dissert de philo est une épreuve qui permet de trier parmi les meilleurs. Ce qui est la loi des concours.
What else ?

PauvreYorick a écrit:J'ai aussi cette même impression (la même que Dimka & Thalia).

Tu es d'accord avec Thalia, qui est d'accord avec toi, en somme.

Aenésidème a écrit:Je tente Normale Sup' après une deux années de prépas prestigieuses et on ose me demander de faire de la philo... Ah oui quelle vie de merde ! C'est tellement mieux d'échouer à son bac pro... :|

Euh, what ? Je ne vois pas le rapport.

Dalathée2 a écrit:

Aenésidème a écrit:Je tente Normale Sup' après une deux années de prépas prestigieuses et on ose me demander de faire de la philo... Ah oui quelle vie de merde ! C'est tellement mieux d'échouer à son bac pro... :|

Euh, what ? Je ne vois pas le rapport.

Disons qu'une vie de merde en termes de scolarité ça me fait plus spontanément penser à ça qu'au sujet de concours de l'éns...

Aenésidème a écrit:

Dalathée2 a écrit:

Aenésidème a écrit:Je tente Normale Sup' après une deux années de prépas prestigieuses et on ose me demander de faire de la philo... Ah oui quelle vie de merde ! C'est tellement mieux d'échouer à son bac pro... :|

Euh, what ? Je ne vois pas le rapport.

Disons qu'une vie de merde en terme de scolarité ça me fait plus spontanément penser à ça qu'au sujet de concours de l'éns...

Ah, je vois. Je ne sais pas si je serais d'accord. Echouer dans la filière qui est la sienne, ce doit être très difficile, que cette filière soit un bac pro ou Ulm. M'enfin, ce n'est pas tellement le propos du fil alors je m'en tiendrai à ça.

PauvreYorick a écrit:« Œdipe » comme sujet d'écrit de philo à l'ENS ? ben c'est cent fois pire qu'« expliquer »

Moi c'était "Voir." en 1986. Je m'emmerdais tellement que j'ai fait une troisième partie sur le point après l'infinitif

Dalathée2 a écrit:J'attends le suet de philo qui sera : "La philosophie". Ce serait rigolo de voir les correcteurs et correctrices s'empoigner autour de la définition de leur matière.

Y a-t-il des profs de philo qui tentent de définir leur discipline ? Ca doit bien prendre l'année entière, non ?

Cripure a écrit:

Dalathée2 a écrit:J'attends le suet de philo qui sera : "La philosophie". Ce serait rigolo de voir les correcteurs et correctrices s'empoigner autour de la définition de leur matière.

Y a-t-il des profs de philo qui tentent de définir leur discipline ? Ca doit bien prendre l'année entière, non ?

Hors programme depuis 2003, heureusement !
Sinon mon prof de terminale (avant la réforme Fichant donc), avait en effet dû consacrer près des deux tiers de l'année à patiner dans la semoule en prétendant traiter de la question... Ce qui m'a fait d'ailleurs détester la matière au premier abord.

Aenésidème a écrit:

Cripure a écrit:

Dalathée2 a écrit:J'attends le suet de philo qui sera : "La philosophie". Ce serait rigolo de voir les correcteurs et correctrices s'empoigner autour de la définition de leur matière.

Y a-t-il des profs de philo qui tentent de définir leur discipline ? Ca doit bien prendre l'année entière, non ?

Hors programme depuis 2003, heureusement !
Sinon mon prof de terminale (avant la réforme Fichant donc), avait en effet dû consacrer près des deux tiers de l'année à patiner dans la semoule en prétendant traiter de la question... Ce qui m'a fait d'ailleurs détester la matière au premier abord.

J'aime bien le bouquin de Gourinat, qui commence par "Littérature & P", "Sciences et P", "Art et P", avant de tenter "Qu'est-ce que la philosophie"

Aenésidème a écrit:

Cripure a écrit:

Dalathée2 a écrit:J'attends le suet de philo qui sera : "La philosophie". Ce serait rigolo de voir les correcteurs et correctrices s'empoigner autour de la définition de leur matière.

Y a-t-il des profs de philo qui tentent de définir leur discipline ? Ca doit bien prendre l'année entière, non ?

Hors programme depuis 2003, heureusement !
Sinon mon prof de terminale (avant la réforme Fichant donc), avait en effet dû consacrer près des deux tiers de l'année à patiner dans la semoule en prétendant traiter de la question... Ce qui m'a fait d'ailleurs détester la matière au premier abord.

Ah tiens, moi aussi. Mon prof de terminale (2006) avait passé le premier trimestre dessus, ce qui avait provoqué chez moi la même réaction que chez toi. Il avait ensuite consacré l'intégralité du second trimestre à traiter la notion de... de quoi déjà ? Un seul et même objet d'étude nous avait occupé tout un trimestre en tout cas. Ce qui m'avait fait détester la matière au deuxième rabord, aussi.

Sur le fond, je suis assez d'accord avec Dimka. C'est assez symptomatique d'une époque dans laquelle une parole en vaut une autre, et où la notion d'expertise a cédé la place à la notion d'humeur. Le livre d'Olivier Pouriol sur les coulisses du Grand Journal est assez éclairant à ce sujet. L'important, c'est de rapporter des histoires, des tranches de vie, des moments auxquels l'individu lambda puisse s'identifier. L'important, c'est de laisser la place au débat, si possible enflammé. Il faut du rythme, éviter que le téléspectateur zappe et donc s'adapter à (autant que formater) son attention moyenne qui est de quelques minutes seulement. Cela exclut la présence d'individus manifestement mieux informés que les autres. Il ne viendrait donc à l'idée de personne d'interroger un ou une prof de prépa (ou de l'ENS) pour avoir son point de vue sur la question.

Le format "chronique" devient idéal, et le métier de "chroniqueur", payé pour donner son avis, qui vaut bien le nôtre, le plus envié de la planète. Un étranger me faisait remarquer que c'était un format typiquement français, d'ailleurs, ces émissions où des inconnus s'empoignent sur des sujets auxquels ils ne connaissent rien.

Un étudiant de prépa perplexe devant le sujet du concours d'entrée de l'ENS, c'est bien, c'est vendeur, ça fait jaser quelques minutes, ça fait se sentir au même niveau que le dit étudiant de prépa, et c'est classé rapidement. Ne pas appesantir, au risque que la vacuité se voie.

Dalathée2 a écrit:
Ah tiens, moi aussi. Mon prof de terminale (2006) avait passé le premier trimestre dessus, ce qui avait provoqué chez moi la même réaction que chez toi. Il avait ensuite consacré l'intégralité du second trimestre à traiter la notion de... de quoi déjà ? Un seul et même objet d'étude nous avait occupé tout un trimestre en tout cas. Ce qui m'avait fait détester la matière au deuxième rabord, aussi.

L'ennui c'est que finalement cette matière s'est avérée (un peu plus tard) être celle qui me convenait. Bref, ce super prof a été pour moi l'occasion d'un petit détour avant d'arriver à bon port...

Les spé philo (Lyon) ont eu un sujet moins déroutant pour les journalistes sur la forme :

L'individu est-il un principe ?

En revanche, il est assez musclé par son étendue (ils avaient au programme : l'individu / le mouvement).

Tiens, je viens de tomber sur ça :

Bertrand Russel a écrit:« L'objet de la philosophie, c'est de partir d'une chose si simple que ça ne vaut pas la peine d'en parler et d'arriver à une chose si compliquée que personne n'y comprend plus rien. »

Ruthven a écrit:Les spé philo (Lyon) ont eu un sujet moins déroutant pour les journalistes sur la forme :

L'individu est-il un principe ?

En revanche, il est assez musclé par son étendue (ils avaient au programme : l'individu / le mouvement).

Oui. Moins déroutant pour les journalistes, mais nettement plus musclé, je trouve aussi.

Aspasie a écrit:

Ruthven a écrit:Les spé philo (Lyon) ont eu un sujet moins déroutant pour les journalistes sur la forme :

L'individu est-il un principe ?

En revanche, il est assez musclé par son étendue (ils avaient au programme : l'individu / le mouvement).

Oui. Moins déroutant pour les journalistes, mais nettement plus musclé, je trouve aussi.

En même temps, je ne vais pas me plaindre, j'ai donné à peu près le même sujet en concours blanc (réalité première à la place de principe); j'espère qu'ils vont briller !

Cripure a écrit:

Dalathée2 a écrit:J'attends le suet de philo qui sera : "La philosophie". Ce serait rigolo de voir les correcteurs et correctrices s'empoigner autour de la définition de leur matière.

Y a-t-il des profs de philo qui tentent de définir leur discipline ? Ca doit bien prendre l'année entière, non ?

Ou cinq minutes, autoritairement

Dalathée2 a écrit:

Thalia de G a écrit:Tout à fait.
Je rappelle ce qu'a écrit PY sur la 1re page du topic

Moi, je trouve qu'il n'a absolument rien de spécial. (Il est très bien, ce sujet.)

Un sujet normal de philo pour un concours exigeant. Que les candidats soient déroutés me semble aussi tout à fait banal. Et la dissert de philo est une épreuve qui permet de trier parmi les meilleurs. Ce qui est la loi des concours.
What else ?

PauvreYorick a écrit:J'ai aussi cette même impression (la même que Dimka & Thalia).

Tu es d'accord avec Thalia, qui est d'accord avec toi, en somme.

Nan, ô perfide Dalathée2, je suis d'accord avec Thalia qui est d'accord avec Dimka. Comme d'autres :

Dalathée2 a écrit: Sur le fond, je suis assez d'accord avec Dimka. C'est assez symptomatique d'une époque dans laquelle une parole en vaut une autre, et où la notion d'expertise a cédé la place à la notion d'humeur.[...]

Le format "chronique" devient idéal, et le métier de "chroniqueur", payé pour donner son avis, qui vaut bien le nôtre, le plus envié de la planète. Un étranger me faisait remarquer que c'était un format typiquement français, d'ailleurs, ces émissions où des inconnus s'empoignent sur des sujets auxquels ils ne connaissent rien.

Sinon,

Dalathée2 a écrit:Tiens, je viens de tomber sur ça :

Bertrand Russel a écrit:« L'objet de la philosophie, c'est de partir d'une chose si simple que ça ne vaut pas la peine d'en parler et d'arriver à une chose si compliquée que personne n'y comprend plus rien. »

C'est une excellente définition, ça. Ça rappelle un peu ce que dit Desproges (« quand un philosophe me répond, je ne comprends plus ma question »).

PauvreYorick a écrit:Sinon,

Dalathée2 a écrit:Tiens, je viens de tomber sur ça :

Bertrand Russel a écrit:« L'objet de la philosophie, c'est de partir d'une chose si simple que ça ne vaut pas la peine d'en parler et d'arriver à une chose si compliquée que personne n'y comprend plus rien. »

C'est une excellente définition, ça. Ça rappelle un peu ce que dit Desproges (« quand un philosophe me répond, je ne comprends plus ma question »).

Que cela implique-t-il ? si d'aventure impliquer était antonyme d'expliquer — oups, on me souffle que non.

Pliée de rire.

Une de mes collègues avait sorti à ses élèves (qui lui demandaient: "ça sert à quoi la philo?") que ça servait à être moins con. Elle n'avait pas vraiment déplié sa reponse, la vilaine. C'est déjà mieux que la psychanalyse qui n'est pas "un remède contre la connerie", selon la pythie de l'objet a.

Ruthven a écrit:Les spé philo (Lyon) ont eu un sujet moins déroutant pour les journalistes sur la forme :

L'individu est-il un principe ?

En revanche, il est assez musclé par son étendue (ils avaient au programme : l'individu / le mouvement).

Bon, ben voilà.
Autant "expliquer", je pourrais y passer 6h, autant là, vraiment, non.

(ce qui ne veut pas dire que j'aurais une meilleure note au premier :lol: )

J'ai donné une fois « définir ».

PauvreYorick a écrit:J'ai donné une fois « définir ».

En fait, vous, les profs de philo, vous prenez un verbe au pif dans le dico, vous vérifiez vaguement que ça reste dans les limites de l’éthique et de la responsabilité, puis vous balancez la purée ?

…

Dans le cadre du développement durable, ce serait peut-être pertinent de passer du format A4 au format post-it, dans ce genre de discipline, non ? :diable: