Re: Correction des EAF déprimante

La question que je me pose, réellement, c'est:
que pouvait-on attendre de bien sur un tel sujet, qui ne soit pas simple répétition des textes proposés, qui ne soit pas truffé de clichés larmoyants et de soupe téléfilmesque, qui n'oblige pas les élèves à livrer réellement une expérience intime et qui traduise une aptitude littéraire qui dépasse le niveau 5ème ?
furieux

Rien... sauf élève extraordinaire.

Honnêtement, j'ai eu un sujet d'invention excellent, au sujet d'une mère. L'écriture a réellement réussi à transfigurer le personnage, le tout était fin, sans ces gros clichés (j'ai eu droit à une espèce de délire sensuel sur un cousin aux longs cheveux blonds qui fait frémir tout le corps de l'élève à chaque regard...), sans trop en faire, sans platitude morne, sans cette tentation du plagiat. Un vrai style. Evidemment que ce n'est pas le texte de Steinbeck (le plus beau des trois proposés à mon sens), ce sont des élèves de 1ère. et vu comme le sujet est casse-gueule, cette copie méritait sa très bonne note.

Oui un, moi aussi j'ai eu un travail profondément original: mais pour le coup il fallait avoir l'idée géniale et le style pour sortir du bourbier.
Mais sinon...
Tant que les sujets ne seront pas conçus en fonction d'exigences précises en matière de capacités d'expression, d'organisation et de savoirs littéraires, l'EAF sera et restera un foutoir attrape-nigaud, et les notes resteront aléatoires et injustes (au sens où elles sont déconnectées du travail scolaire pendant l'année:) à quoi sert de traiter "le personnage de roman du XVIIème à nos jours" pour demander au final une rédaction de 5ème ?
Pour le coup, il faudrait raisonner sur la tâche finale, tiens, ce serait le bon moment...
A force de vouloir simplifier et raboter les exigences on finit par dérouter les élèves qui n'ont visiblement plus aucune idée des objectifs à atteindre, comme en témoignent les réactions de l'autre forum. Comme le montrent aussi les dissertations: la plupart n'ont absolument aucune idée de ce qu'est la littérature, à part un commerce du livre qui doit répondre aux goûts du public . C'est un peu comme si pour la peinture ils confondaient le Louvre et Leroy-Merlin, quoi... ...

Je crois que la plupart des élèves sait ce qui les attend et ils entendent les discours. le petit nombre de sujets d'invention que je rencontre (sur 58 copies, 6 seulement dont 2 très bons voire excellent pour celle citée) prouve bien qu'ils savent que ce truc-là ne correspond à rien, aucune exigence nette, le jeu de dés.
Mais il n'en reste pas moins que c'est du foutage de gueule oui! la leur, la nôtre. Et c'est valable pour le texte de Giono choisi pour le commentaire et qui donne lieu à des interprétations terrifiantes, ne serait-ce qu'à cause du paratexte lacunaire (combien me case l'action post- 2WW en me trouvant des dénonciations de la classe aisée ou bien au contraire louant les lieux et les gens qui ont su préserver la famille et l'innocence des enfants dans un contexte difficile... comment leur dire? ils font l'effort de tenter de contextualiser...).

iphigénie a écrit:La question que je me pose, réellement, c'est:
que pouvait-on attendre de bien sur un tel sujet, qui ne soit pas simple répétition des textes proposés, qui ne soit pas truffé de clichés larmoyants et de soupe téléfilmesque, qui n'oblige pas les élèves à livrer réellement une expérience intime et qui traduise une aptitude littéraire qui dépasse le niveau 5ème ?

Probablement d'ailleurs parce que ce sujet correspond à la culture de celui/celle qui l'a proposé. Je suis sûr que son modèle littéraire, c'est Joséphine... Rolling Eyes

osez, osez Razz

iphigénie a écrit:Oui un, moi aussi j'ai eu un travail profondément original: mais pour le coup il fallait avoir l'idée géniale et le style pour sortir du bourbier.
Mais sinon...
Tant que les sujets ne seront pas conçus en fonction d'exigences précises en matière de capacités d'expression, d'organisation et de savoirs littéraires, l'EAF sera et restera un foutoir attrape-nigaud, et les notes resteront aléatoires et injustes (au sens où elles sont déconnectées du travail scolaire pendant l'année:) à quoi sert de traiter "le personnage de roman du XVIIème à nos jours" pour demander au final une rédaction de 5ème ?
Pour le coup, il faudrait raisonner sur la tâche finale, tiens, ce serait le bon moment...
A force de vouloir simplifier et raboter les exigences on finit par dérouter les élèves qui n'ont visiblement plus aucune idée des objectifs à atteindre, comme en témoignent les réactions de l'autre forum.

C'est ce que nous disons tous au sujet de l'invention depuis sa réforme de 2007 : c'est un sujet qui est désormais déconnecté des contenus de la discipline en termes de programme. Dès lors, on est bien obligé de le noter subjectivement, comme on aime ou pas tel ou tel passage d'un livre. C'est dramatique.

Nell a écrit:Je crois que la plupart des élèves sait ce qui les attend et ils entendent les discours. le petit nombre de sujets d'invention que je rencontre (sur 58 copies, 6 seulement dont 2 très bons voire excellent pour celle citée) prouve bien qu'ils savent que ce truc-là ne correspond à rien, aucune exigence nette, le jeu de dés.
Mais il n'en reste pas moins que c'est du foutage de gueule oui! la leur, la nôtre. Et c'est valable pour le texte de Giono choisi pour le commentaire et qui donne lieu à des interprétations terrifiantes, ne serait-ce qu'à cause du paratexte lacunaire (combien me case l'action post- 2WW en me trouvant des dénonciations de la classe aisée ou bien au contraire louant les lieux et les gens qui ont su préserver la famille et l'innocence des enfants dans un contexte difficile... comment leur dire? ils font l'effort de tenter de contextualiser...).

Entièrement d'accord sur tous les plans. Et en effet, eux au moins cherchent à contextualiser, pas l'a brutie(e) qui a pondu le sujet.

bon, invention inepte,
commentaire en effet inaccessible sans contextualisation,
dissertation générale: impossible dans les conditions de manque terrifiant de culture littéraire.
humhum

Il n'empêche que la dissert' a tout de même un sujet réellement intéressant et riche pour qui a des références (et heureusement, j'en ai, avec la princesse, Manon Lescault, Moderato Cantabile, Rabelais, etc). En revanche, j'ai beaucoup ri hier en corrigeant la copie dont les 4 premiers exemples sont (dans l'ordre): Twilight, Harry Potter, Indiana Jones (qu'est-ce qu'il vient faire là lui?!) et...les trois petits cochons!
En voilà un qui a cessé de lire en 4ème (et encore!). Au moins, ça m'a détendu (un temps).

J'ai eu quasiment le même sujet de dissertation à mon propre Bac.

Nell a écrit:Je crois que la plupart des élèves sait ce qui les attend et ils entendent les discours. le petit nombre de sujets d'invention que je rencontre (sur 58 copies, 6 seulement dont 2 très bons voire excellent pour celle citée) prouve bien qu'ils savent que ce truc-là ne correspond à rien, aucune exigence nette, le jeu de dés.
Mais il n'en reste pas moins que c'est du foutage de gueule oui! la leur, la nôtre. Et c'est valable pour le texte de Giono choisi pour le commentaire et qui donne lieu à des interprétations terrifiantes, ne serait-ce qu'à cause du paratexte lacunaire (combien me case l'action post- 2WW en me trouvant des dénonciations de la classe aisée ou bien au contraire louant les lieux et les gens qui ont su préserver la famille et l'innocence des enfants dans un contexte difficile... comment leur dire? ils font l'effort de tenter de contextualiser...).

Tu en as de la chance : sur 105 copies, j'ai plus de 70 sujets d'invention... Suspect

J'ai cette proportion là avec les commentaires Dodie (commentaires...pour beaucoup de la paraphrase...).

Nell a écrit:j'ai beaucoup ri hier en corrigeant la copie dont les 4 premiers exemples sont (dans l'ordre): Twilight, Harry Potter, Indiana Jones (qu'est-ce qu'il vient faire là lui?!) et...les trois petits cochons!
En voilà un qui a cessé de lire en 4ème (et encore!). Au moins, ça m'a détendu (un temps).

Deux de mes 1re L lisaient Fantômette dans les couloirs la dernière semaine. "Pour détresser, monsieur !" humhum

Mais comment se fait-il que certains aient 100 copies? Vous êtes en plus d'oral?

Cripure a écrit:

Nell a écrit:j'ai beaucoup ri hier en corrigeant la copie dont les 4 premiers exemples sont (dans l'ordre): Twilight, Harry Potter, Indiana Jones (qu'est-ce qu'il vient faire là lui?!) et...les trois petits cochons!
En voilà un qui a cessé de lire en 4ème (et encore!). Au moins, ça m'a détendu (un temps).

Deux de mes 1re L lisaient Fantômette dans les couloirs la dernière semaine. "Pour détresser, monsieur !"

L'air de rien, je suis persuadée que les fantômettes d'antan sont meilleurs que certaines litté jeunesse au succès fulgurant.
Et j'ai relu les Alice avec plaisir avant de les refiler à Fils (que ça n'intéresse pas, c'est une fille le héros et pas un chevalier...): c'est écrit avec des vrais passés simples!

Amaliah, ça dépend tout simplement des académies et du nombre de correcteurs.

Nell a écrit:

Cripure a écrit:

Nell a écrit:j'ai beaucoup ri hier en corrigeant la copie dont les 4 premiers exemples sont (dans l'ordre): Twilight, Harry Potter, Indiana Jones (qu'est-ce qu'il vient faire là lui?!) et...les trois petits cochons!
En voilà un qui a cessé de lire en 4ème (et encore!). Au moins, ça m'a détendu (un temps).

Deux de mes 1re L lisaient Fantômette dans les couloirs la dernière semaine. "Pour détresser, monsieur !"

L'air de rien, je suis persuadée que les fantômettes d'antan sont meilleurs que certaines litté jeunesse au succès fulgurant.
Et j'ai relu les Alice avec plaisir avant de les refiler à Fils (que ça n'intéresse pas, c'est une fille le héros et pas un chevalier...): c'est écrit avec des vrais passés simples!

Amaliah, ça dépend tout simplement des académies et du nombre de correcteurs.

Sur la narration, oui, c'est meilleur, j'en suis persuadé. Les phrases sont plus complexes, les temps sont idoines, le vocabulaire est plus riche.

Je suis également en colère, car il est évident que l'invention a "attiré" cette année des élèves qui ont cru que ce serait + facile mais qui s'en seraient bien mieux sortis dans le commentaire. Pour ma part 35% d'invention. Je suis très loin du cas de Nell ! Par contre j'ai déjà vu une dissertation excellente.

Aletheia a écrit:Je suis également en colère, car il est évident que l'invention a "attiré" cette année des élèves qui ont cru que ce serait + facile mais qui s'en seraient bien mieux sortis dans le commentaire.

Comme d'habitude.

Comme d'habitude, peut-être, mais devant un sujet argumentatif ils auraient peut-être été moins nombreux à se faire piéger...

Je pense aussi qu'un sujet d'invention sans argumentation multiple par 10 les chances d'avoir des devoirs niais, vides et... inquiétants... Je ne m'en remets pas d'avoir lu autant de textes incestueux... :shock::shock::shock::shock::shock:

on devrait compter combien de complexes d'Oedipe on a corrigé :lol:

Que choisir?
La grande difficulté vient aussi du conseil non écouté : les élèves n'ont-ils pas compris qu'invention rime avec piège à c...? L'exercice ne me déplaît en soi car technique et réflexif (enfin en soi ) et je pense que nous l'enseignons ainsi. Entre les banalités d'une situation dialogique ubuesque (deux élèves parlent de littérature...regardez leurs bras ) et un texte à produire que choisir? On a beau leur dire que l'exercice est protéiforme au possible et que seuls les bons peuvent avoir un quota semi chanceux s'y parvenir. Pourquoi cette tentation : "ils ne savent voir les idées" d'un commentaire et sont bloqués, génération y oblige, par leur premier échec à cet exercice. Lire un énoncé est plus ardu que lire un texte...J'ai eu oui oui dans une dissertation ces mois derniers et l'élève était sérieux.
Toute est question de technique dans la pensées, dans les idées et dans l'évasion...

Après les trois quarts, mêmes bons et toutes sections confondues ne savent lire une consigne : il me souvient d'une suite de Médée à écrire en respectant temps de la pièce et essence de la tragédie où il était question de forêt , de tronçonneuse, d'organes génital (dans le texte) (Jason tiens les toi) et de voiture...Sans aller à ce degré extrême , ça fait rire , même à un examen...et peut-être soyons optimiste , ça sera "ce que nous avons eu de meilleur"... Un sujet à visée argumentative type débat est-il réellement mieux réussi dans l'absolu?

Aletheia a écrit:on devrait compter combien de complexes d'Oedipe on a corrigé :lol: